Un intérêt particulier pour les morts : Ann Granger

Titre : Un intérêt particulier pour les morts                          big_3-5

Auteur : Ann Granger
Édition : 10-18 (2013)

Résumé :
Nous sommes en 1864 et Lizzie Martin accepte un poste de dame de compagnie à Londres auprès d’une riche veuve qui est aussi une propriétaire de taudis. Lizzie est intriguée d’apprendre que la précédente dame de compagnie a disparu, apparemment après s’être enfuie avec un inconnu.

Mais quand le corps de la jeune fille est retrouvée dans les décombres de l’un des bidonvilles démolis récemment autour de la nouvelle gare de St Pancras, Lizzie commence à se demander ce qui s’est passé.

Elle renoue avec un ami d’enfance, devenu l’inspecteur Benjamin Ross, et commence à enquêter avec son aide, au péril de sa vie, pour découvrir la vérité sur la mort de la jeune fille dont le sort semble étroitement lié au sien.

Critique : 
En l’an de grâce 1864,  Elizabeth Martin (Lizzie), 29 ans quitte son Derbyshire pour monter à la capitale afin de jouer à la dame de compagnie auprès d’une riche veuve.

Pourquoi ? Parce que son père, médecin fort apprécié dans la région, est décédé il y a peu de temps, la laissant sans un rond… À force d’aider son prochain, il en a oublié de laisser à sa fille de quoi subvenir à ses besoins. C’était un homme bien qui se dit « Charité bien ordonnée devait commencer par les autres ».

— C’est un petit garçon qui est mort, dis-je. Un tout petit garçon, n’est-ce pas papa ?
Mon père se tourna vers moi et je crois que c’est seulement à cet instant qu’il s’aperçut de ma présence.
  — Oh, Lizzie…
Puis, secouant la tête :
  — Oui, un tout petit enfant. Plus jeune que toi, je pense.
  — Que faisait-il à la mine ? demandais-je. Il n’était tout de même pas assez grand pour extraire le charbon ! (…)
  — N’oublie jamais ce que tu as vu aujourd’hui. Souviens-toi que cela représente le vrai prix du charbon.

Dans cette Angleterre rigide des années 1860, la femme n’a pas la place qu’elle mérite. Elle doit juste fermer sa bouche et tenir sa maisonnée, tout en pondant quelques marmots (les riches en faisant moins que les très pauvres).

Lizzie a 29 ans, pas mariée, c’est donc une vieille fille, pour l’époque. De plus, elle a du mal à tenir sa langue et n’est pas ce que l’on peut dire « jolie ». Bref, elle risque de voir pousser les toiles d’araignée entre ses jambes, la pauvre. De plus, à cette époque, s’envoyer en l’air en dehors des liens du mariage est trèèèès mal vu !

1864… C’est aussi à cette époque que l’on rasa des taudis afin de bâtir la future gare de Saint-Pancras. Et les gens qui y survivaient ? Mais enfin, tout le monde s’en moque ! Vous pensez bien, des pauvres… Le capitalisme n’est pas une invention de notre siècle et on nous le démontrera dans le roman.

L’arrivée de Lizzie dans la ville de Sherlock Holmes (en 1864, il était tout gamin et vivait à la campagne) n’est pas de tout repos ! Voilà que le fiacre qui l’emmène chez la vieille peau croise la route d’un tombereau avec le cadavre d’une jeune femme dessus !

Coïncidence malheureuse, le cadavre est celui de la précédente dame de compagnie qui avait disparu, apparemment en s’enfuyant avec un inconnu.  Rhôôô, très mal vu à l’époque ! Petite dévergondée, va ! Elle brûlera dans les flammes de l’Enfer, selon le Dr Tibbet, gardien de la moralité devant l’Éternel (passez-moi mon AK47, s’il vous plaît, merci).

Lizzie, en digne émule de Sherlock Holmes et du couple Charlotte et Thomas Pitt auquel elle ressemble un peu, va enquêter sur cette affaire où se mêlent d’étranges coïncidences…

Coup de bol, l’inspecteur principal est une lointaine connaissance du Derbyshire et il voue à Lizzie une admiration sans borne. Non, pas de scènes de sexe torride dans le roman, désolée.

Certes, l’intrigue n’est pas recherchée comme celles d’Agatha Christie, certes, l’inspecteur Ben Ross n’est pas Holmes, mais ce fut un véritable plaisir de découvrir cette nouvelle venue dans le polar historique victorien !

Personnages agréables – certains étant détestables, mais c’est ce qui fait le sel de l’histoire – un majordome un peu louche avec sa manie de surgir partout, sa femme qui a tout du dragon, des personnages suspects, des rigides, des collets montés ou bon à jeter dans la Tamise, la panel est varié et bien représenté.

L’époque est bien restituée, il ne manquait plus que le bruit des roues des fiacres, la sensation du brouillard et l’odeur putride des taudis !

« Le brouillard se refermait sur moi, m’enveloppait aussi sûrement qu’un nouveau-né. Et comme un nouveau-né, je regardais le monde avec étonnement, incapable de différencier le nord du sud et l’est de l’ouest, et tout juste le haut du bas. Étais-je en train de monter une légère pente ? Descendais-je une ruelle ? J’avais cru me trouver dans une rue parallèle à Oxford Street ; peut-être étais-je en train de m’éloigner. Je n’entendais aucun bruit de circulation, le brouillard émoussait tous les sons ».

Bon point, je n’avais pas vu venir le (la) coupable à la fin !

Le seul bémol sera à attribuer à l’imprimeur qui, une fois arrivé à la page 216 passe à la 145 ! Abus d’alcool ou manque de café, tout rentre dans l’ordre à la 241 mais il me manque l’histoire qui s’est passée durant ces 25 pages manquantes !

Sans transcender le genre, ce polar ce lit avec grand plaisir et je me demande bien ce que les autres tomes nous réservent. En tout cas, ce sera avec moi !

Challenge « Thrillers et polars » de Liliba (2013-2014), Challenge « Polar Historique » de Samlor (repris par Sharon), Challenge « I Love London II » de Maggie et Titine, Challenge « Victorien » chez Arieste, Challenge « XIXème siècle » chez Netherfield Park et « Challenge Ma PAL fond au soleil – 2ème édition » chez Métaphore.

25 réflexions au sujet de « Un intérêt particulier pour les morts : Ann Granger »

    • Oui, il est bien, agréable et tout et tout, même si il a un air du couple « Charlotte/Thomas Pitt » et que ça pourrait sembler une redite.

      En tout cas, malgré ses petits défauts, il m’a fait passer un agréable moment 😉

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  2. Je viens de lire un de ses romans. Pas celui-là, mais un roman publié en 2000, et qui se passe à notre époque.Déjà, une vieille fille, mise au placard par le foreign office, enquête avec son soupirant de policier. Si l’enquête est parfois affreuse, les conditions de vie le sont aussi – on se croirait en 1842 ! Quant au vaillant chien de garde de la ferme, il frôle la dépression nerveuse. Il n’a pu empêcher les intrus de rentrer sur ses terres, il n’a pu empêcher le cheval de s’enfuir, tant pis ! Il se jette sur le dernier intrus. Quoi, c’était un chien policier ? M’en fout, il est sur-mon-terrain !

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    • Dans lequel ? « Danger de mors » ou « cimetière à vendre » ?

      Bon, l’auteur apprécie les couples d’enquêteurs dont une femme célibataire à la limite d’être momifiée par la société parce que non mariée…

      Ça ne fait pas si longtemps que les règles se sont assouplies… il n’y a pas si longtemps, une femme mariée ne pouvait pas ouvrir un compte en banque sans l’accord de son mari, une femme qui bossait devait quitter son emploi quand elle se mariait afin de se consacrer aux bambins et aux casseroles…

      Un chien qui a du caractère… mais mordre un chien flic, il va se payer une contre-danse ! 😆

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  4. c’est pas forcement l’imprimeur (ca peut etre l’editeur, le maquettiste !) vecu : je me souviens d’un polar dont il a fallu reimprimer 10 pages en catastrophe et les glisser au bon endroit : lecteurs pas contents, auteur pas content (je le comprends!) et la, c’etait l’editeur qui n’avait pas fait relire avant le BAT (bon a tirer… pas dans le sens ou tu l’entends 3:) )… c’etait le moment vecu de l’ancienne assistante d’edition ! j’en ai plein d’autres !

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    • Mince, ça en fait des gens à accuser d’avoir bu trop de Johnnie Walker ! 😆 Ou pas assez de café.

      Normal que les lecteurs ne soient pas contents ! Au prix des romans, tu désires tout de même que tout soit bien imprimé ! Mon « 1275 âmes » de Jim Thompson édité chez Folio Policier a les premières pages imprimées de travers !

      Merci de la précision pour le BAT, j’avais pensé à tout autre chose, mais je ne dirai pas quoi ! 🙄

      Bon, à leur décharge, il y a tellement à faire et à vérifier, mais ça ne devrait pas arriver 😀

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    • Merde alors ! Toi aussi tu as eu la blague ?? Ça alors, ce n’est plus une coïncidence, mais un complot 👿 Que s’est-il passé durant ces fameuses 25 pages manquantes ? Toutes les possibilités sont ouvertes… 😀

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    • Vérifie les pages, vérifie les pages, vérifie les pages ! on ne sait jamais que l’erreur chez moi se répète ailleurs 😀

      Il a un air de Pitt/Charlotte, fatalement, une femme, un flic, une enquête, Londres, victorienne époque… 😛

      Allez, PAL+1 !

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  5. Pas lu mais j’en ai tellement entendu parler chez les copines blogueuses (en bien et en moins bien) que j’avoue passer mon chemin pour l’instant, malgré la très belle couverture. Il faut mener l’enquête pour le mystère des pages 217-240 xD

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    • Abus d’alcool, sans doute… j’ai déjà eu la blague, mais j’avais acheté le livre chez moi, à Bruxelles… Pour celui-ci, je l’ai acheté durant mes vacances dans le Sud de la France et j’en étais à la page 150 lors de mon retour 😦 c’est rappé pour un échange !

      Dans un livre, les critiques sont souvent diverses. Chacun son opinion. Faudra te faire le tien 😉

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  6. Donc je suis définitivement la seule à avoir été assommée aux alentours de la page 150 par ce qui m’a semblé être un très ennuyeux pastiche des Anne Perry ?? Pauvre de moi, je deviens snob :p…

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    • Mais non, mais non, faut pas dire ça 😆 Il y a un air d’Anne Perry, je l’ai reniflé de suite : une jeune fille qui n’a pas sa langue en poche et que l’on désespère de marier, un flic pauvre, mais tenace qui l’aime (ça se sent !!) et qu’on sent qu’ils vont se marier…

      ça y ressemble, mais Lizzie n’est pas issue de la bourgeoisie et elle est seule, sans soeur, sans tante Vespasia, sans rien.

      c’est un roman Canada Dry : ça ressemble à Charlotte/Thomas Pitt, ça en a le goût, mais ce n’en est pas 😀

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  7. Ah c’est donc ça ! Tu as un intérêt particulier pour;les morts 😉
    Bon, tu le sais, je ne suis pas aussi attiré que toi par cette période victorienne, mais rien que lire ta chronique est un plaisir (donc indirectement merci, Mdame Granger)

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