L’homme des vallées perdues : Jack Schaeffer

Titre : L’homme des vallées perdues                                            big_5

Auteur : Jack Schaeffer
Édition : Libretto (2012)

Première publication : 1945

Résumé :
1889. Un cavalier solitaire s’arrête l’espace d’une saison dans une ferme du Wyoming dont il va bousculer l’ordinaire.

Refusant de porter une arme alors qu’il sait parfaitement s’en servir, évitant l’affrontement physique bien que personne ne l’effraie, cet homme semble tout à la fois une légende et un mystère.

Shane est l’homme des vallées perdues, celui une seule balle suffira pour rétablir sa vérité. Il est, raconté par les yeux d’un enfant, l’une des plus belles figures inventées par la littérature de l’Ouest américain.

L’homme des vallées perdues est un texte somptueux qui, par son humanité profonde, raconte aussi, comme dans les romans de Cormac McCarthy , la genèse d’une nation née les armes à la main.

Critique : 
♫ I’m a poor lonesome cow-boy ♪ I’m a long long way from home ♫ pourrait être le générique de début de ce roman car nous avons un cavalier solitaire, loin de chez lui (en a-t-il un, déjà, de chez lui ??) qui arrive dans une vallée un peu paumée, sorte de trou du cul du Wyoming et qui, se posant pour un temps, va se lier d’amitié avec une famille…

Oui, ça pourrait presque commencer comme une aventure de Lucky Luke… Pour peu, on se serait cru dans  « Des barbelés sur la prairie » tant les tensions sont assez exacerbées entre les fermiers qui élèvent leur bétail derrière des clôture et l’éleveur du coin qui ne jure que par les grands troupeaux paissant dans l’immensité de la plaine. Mheu.

La comparaison avec la bédé s’arrêtera là. Les barbelés sont déjà sur la prairie et les grands éleveurs de troupeau ont déjà perdu de leur aura, de leur puissance car il est plus facile d’engraisser des bêtes dans un enclos que circulant librement.

Shane est son nom et nous ne saurons que peu de choses sur ce cavalier étrange, cet homme aux yeux froids, mince, sec, souple, cet homme avare de paroles, cet homme qui cache un révolver dans une couverture, cet homme qui arriva un jour dans le petit ranch des Starett, ce cavalier solitaire qui va, le temps d’un roman, se transformer en fermier.

Le récit nous est raconté aux travers les yeux du petit Bob, le gamin de Joe et Marian Starett, 8 ans, et son innocence donne de la fraicheur à ce récit parce que notre petit homme ne comprend pas tout et c’est à nous, lecteurs, de faire les déductions qui s’imposent sur ce mystérieux Shane.

Il est travailleur et entre lui et le père de Bob, un profond respect est né, ils se comprennent sans parler et on sent que Shane, bien que seul, a le sens aigu de la famille.

— Je n’ai besoin de l’avis de personne pour savoir à quoi m’en tenir sur les hommes.Celui-ci, je croirai tout ce qu’il pourra me dire n’importe quel jour que Dieu fait.

Ce que Shane doit expier, nous devrons le deviner. Nous voici face à un homme qui pourrait laisser parler sa violence mais il la refoule, laissant plutôt les insultes glisser sur lui comme l’eau sur les plumes d’un canard.

Les insultes ?? Ben oui, il y a le gros éleveur qui voudrait devenir plus gros et virer les fermiers de leur terre. Fletcher… la salaud de service dont j’aurais aimé en savoir plus sur lui mais vu que tout est raconté par Bob, nous pourrons juste renifler une fragrance connue, celle d’une sorte de Joffrey Barathéon-Lannister, mais avec une paire de couilles, lui.

Le récit est épure de toutes fioritures, tel un beau morceau de viande premier choix sans la moindre once de graisse, mais le récit te touchera mieux qu’une balle tirée en plein cœur.

— Ce qui compte, ce n’est pas ce qu’un homme sait faire, c’est ce qu’il est.

Le fait de voir le destin de Shane au travers des yeux d’un enfant renforce le récit et le rend plus doux, la violence étant larvée, cachée, même si elle suintera des pages à un moment où à un autre.

C’est le récit d’un homme qui lutte contre sa violence intérieure, un homme qui voulait être tranquille, travailler, manger à sa faim et passer du temps paisible au sein d’une famille. Un homme que l’on aimerait pas avoir comme ennemi, un homme dangereux, mais auquel on peut faire confiance.

— Écoute bien ce que je vais te dire, Bob. Une arme n’est rien de plus qu’un outil. Ce n’est ni meilleur ni pire que n’importe quel ustensile – une pelle, une hache, une selle ou ce que tu voudras. Garde ça bien en tête, toujours. Une arme peut faire le bien et elle peut faire le mal : tout dépend de ce que vaut son propriétaire.

Quand les colts seront remisés dans leur ceinture, la larmiche montera insidieusement dans vos yeux parce que des récits aussi court et aussi fort, ça ne court pas les rues ! De plus, la fin étant ouverte, vous pouvez l’écrire vous même, dans votre tête…

L’Ouest Américain, ça t’emporte dans des voyages inattendus et ça te rend triste lorsque le mot « The End » apparaît.

Challenge « XIXème siècle » chez Netherfield Park, « Il était une fois dans l’Ouest » chez The Cannibal Lecteur, Challenge « La littérature fait son cinéma – 4ème année » chez Lukea Livre et « Le Mois Américain » chez Titine.

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CHALLENGE - XIXè siècle CHALLENGE - Il était une fois dans l'ouest - BY Cannibal Lecteur

22 réflexions au sujet de « L’homme des vallées perdues : Jack Schaeffer »

  1. En relisant ton billet (placé dans mes favoris ^_^), il me fait un peu penser à « Impitoyable » le western de Clint Eastwood (1992) que j’ai eu l’occasion de voir hier… Wyoming, un homme qui refuse de tuer… Ca me donne encore plus envie de lire ce roman !!

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    • Oui, en effet, Clint Eastwood refusait de retuer une fois de plus… un superbe film, entre nous. Déjà vu quelques fois, mais là, ça fait longtemps que je ne l’ai plus vu.

      C’est beau un homme qui ne veut plus ou ne veut pas tuer, mais on arrive toujours à le pousser à bout… l’Homme est un con ! Enfin, pas tous…

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  5. Un western littéraire ! J’ai pas du en lire des masses. Pour ainsi dire. Je ne crois pas en compter dans les étagères de mon saloon – qui compte plus de bouteilles de whisky que de livre sur le grand Ouest, celui sauvage des bisons sauvages et des hommes blancs sauvages. Je prend mon couteau et grave le nom du roman sur le grand chêne parce que comme tout cow-boy, je n’ai ni stylo ni parchemin, juste un colt que je rengaine dans son fourreau, sauf si j’ai besoin d’impressionner une demoiselle sous son ombrelle.

    Aimé par 1 personne

    • Un colt que tu rengaines ?? Coquin !! Laisse-le à l’air libre, va ! ;-))

      Je possède assez bien de petits romans de western, de tous les genres, pour tous les goûts, des biens, des moins bien, des romans de gare pour caler des meubles…

      Mais lui, il surclasse tout le monde dans mes western qui sentent la poudre. Il est profond comme le fourreau de Tabatha Cash, la spécialiste du double colt dans le fourreau… je sors !

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    • On est dans le western sans y être… j’aime ce genre de western, on n’est pas dans les desperados, mais dans la vraie vie, les vrais problèmes de l’époque. On pourrait transposer le scénario dans notre époque, ce serait toujours pareil.

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