En douce : Marin Ledun

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Titre : En douce

Auteur : Marin Ledun
Édition : Ombres Noires (2016)

Résumé :
Sud de la France.
Un homme est enfermé dans un hangar isolé. Après l’avoir séduit, sa geôlière, Émilie, lui tire une balle à bout portant. Il peut hurler, elle vit seule dans son chenil, au milieu de nulle part.

Elle lui apprend que, cinq ans plus tôt, alors jeune infirmière, elle a été victime d’un chauffard.

L’accident lui a coûté une jambe. Le destin s’acharne.

La colère d’Émilie devient aussi puissante que sa soif de vengeance.

marin-ledunCritique :
Un roman sombre, une sorte de huis-clos à deux où seuls des chiens viendront mettre un peu d’ambiance en aboyant…

La vengeance est un mobile aussi vieux que le monde. Certains pensent qu’en se vengeant ils retrouveront la paix, d’autres vous diront que non, que du contraire même, que la vengeance ne vous apportera qu’un grand vide.

Les siciliens disent, dans un de leur proverbe, que celui qui veut se venger doit creuser deux tombes… une pour sa victime et une pour lui. Ou alors le proverbe est chinois…

Émilie était une jeune infirmière belle, avec une vie sociale, des envies, et un jour, toute sa vie a basculée, et elle ne s’en est pas vraiment remise, accusant les autres et surtout une personne d’être à l’origine de sa dégringolade sociale.

Faut dire que passer d’infirmière avec un chouette appart à nettoyeuse-soigneuse de chiens dans un chenil, dormant dans un camping-car, ça vous foutrait le moral dans les chaussettes de n’importe qui.

C’est encore plus traumatisant que de louper sa primaire ou que de ne pas se représenter… Ce qui mine Émilie, c’est les regards des autres, leur commisération, leur pitié, et les sales pensées sexuelles des hommes.

Son bouc émissaire est tout trouvé, et maintenant, yapuka passer à l’acte.

Une fois de plus, laissez tomber le résumé du 4ème de couverture et découvrez, vierge de tout, ce huis-clos prenant entre une femme qui a vu sa vie basculer et un homme qui vient de voir la sienne basculer aussi dans l’horreur.

L’écriture glisse sur le papier, ça se lit d’une traite, quasi, on veut savoir jusqu’où elle va aller dans sa folie, parce que oui, pour moi Émilie est une frappadingue qui rend les autres responsables et qui s’est fichue dans cette belle merde toute seule comme une grande.

C’est presque un huis-clos, mais pas aussi prenant et oppressants que certains huis-clos de ma connaissance, dommage (Misery et Shining de Stephen King).

Il ne manquait pas grand-chose pour en faire un truc à vous foutre la suée de votre soirée d’hiver.

Par contre, niveau social, c’était du noir de chez noir. Insidieux, perfide… Le boulot vous reprend après votre accident, les collègues sont gentils, rempli de pitié aussi, mais ça ne dure que le temps que dure les roses… Ensuite, vous redevenez une bête de somme, corvéable à merci et si vous refusez… On ne vous retiendra pas !

Un bon roman noir, sans édulcorants, sans sucre, sans stévia… Noir, quoi. Bien que j’ai déjà dans des plus noirs…

Une histoire de vengeance, une critique sociale, un roman psychologique, un constat amer de notre société qui n’accepte que les biens foutus et pas les handicapés (physiques dans ce cas-ci), une ambiance étouffante, dure, sale et une infirmière qui n’a rien de la cochonne des fantasmes de certains (mais en plus sexy que Annie Wilkes).

Une écriture efficace, sans fioritures, des personnages taillés à la serpe, une ambiance étouffante, moite, et une grande question qui se pose : dans quelle mesure les autres sont-ils responsables de nos échecs ? Le sont-ils à 100% ou ne sont-ils que des vecteurs, le reste nous étant imputable si nous échouons ?

Vous avez trois heure… Ensuite je ramasserai les copies !

Étoile 3,5

Challenge « Thrillers et polars » de Sharon (2016-2017).

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58 réflexions au sujet de « En douce : Marin Ledun »

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  4. Une question, si je peux oser : tu dis dans ton article que l’infirmière s’est mise dans la merde toute seule comme une grande. Cet avis que tu poses, il est lié principalement à ton analyse personnelle et à ta vision du monde ou tu penses que l’auteur essaie de nous orienter vers cette conclusion ?

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    • Bonne question… Je dirais que c’est un ressentit personnel, suite à ce que l’auteur explique dans le déroulement de son drame. Certes, si on analyse à fond, on se rendra compte qu’il y a aussi un peu de la faute de la société en général, celle qui veut nous formater comme la généralité, mais on peut toujours ne pas la suivre. Notre infirmière n’était pas obligée de… (no spolier). Pour moi, elle est la plus responsable de son malheur, du moins le premier : l’accident. Après, si le reste est parti en vrille, c’est aussi un peu la faute à son job et au fait qu’on en demande toujours plus aux travailleurs. Seule, elle a perdu pied, a dégringolé, mais elle ne s’attaque pas au véritable responsable, selon moi.

      Mais ceci est mon avis personnel, l’auteur en avait peut-être un autre (la faute à pas de chance), mais c’est ce que moi j’ai ressenti en lisant son roman. J’avoue aussi que ma vision du monde n’est pas rose bonbon et que l’Humain a toujours tendance à accuser les autres d’être responsable de sa misère ou de ses malheurs. Ce n’est pas toujours vrai. On est souvent responsable de son destin. 😉

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    • Ouf, j’ai eu raison de lire deux de ses romans, alors ! Sinon, je serais mourue bête ! MDR

      Mais bon, il y a des tas d’auteurs qui nous rendent plus intelligents, non ?? Il y en a pléthore, même… heureusement ! 😀

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  5. Hummm… les huis clos entre une femme un peu fêlée et un homme… ça me rappelle le Misery de Stephen King en effet…

    Maintenant un truc me chiffonne quant à la situation de départ. Ayant des infirmières parmi mes proches (et sachant que le roman est français) je peux te dire que les salaires ne sont pas folichons et qu’il ne faudrait pas voir là une situation socio-économique aussi brillante! En plus… comme elles n’ont jamais de mal à trouver du boulot… et avec les quotas de travailleurs handicapés dans les entreprises qui favorisent l’emabauche les personnes ayant une profession pas trop physique… et ben une prothèse de jambe n’empêche pas une infirmière de bosser dans bien des services hospitaliers! Je connais même un médecin dans ce cas! Bref le mécanisme de « suspension d’incrédulité » qui doit se poser à l’entrée du roman pour nous embarquer semble avoir quelque faiblesse.

    Alors oui… une prothèse de jambe ça n’aide pas pour aller draguer en boîte de nuit (cela étant si elle réussi à chopper sa victime en la séduisant c’est que la situation n’est pas si désespérée) ça c’est vrai… mais ne pas trouver de job d’infirmière à cause de ça… et perdre son suuuuupet appart’ (qu’une paye d’infirmière ne permet pas de payer en temps normal) et toussa j’y crois pas deux secondes! 🤔

    Il y a forcément autre chose! Elle devait être folle (et pétée de thunes grâce à un substantiel heritage – comment a-t-elle fait pour le perdre?) avant, non?🤔

    Ah ben oui…faudrait spoiler pour répondre… Bon pas grave! 😜

    Tiens… je suis repartie faire une cure de Downton Abbey en ce moment… un marathon où je me fais toutes les saisons… depuis 10 jours j’en suis à la 5e… Anybref rien à voir! Sauf que ça m’éloigne du net et de la lecture en ce moment… pas bien!😖

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    • Je vais essayer de ne pas divulgâcher l’affaire, mais oui, notre Émilie jolie avait eu un substantiel héritage. 45.000€ et un crédit à la banque.

      Après son accident, grave, elle a repris le boulot, mais au bout d’un certain temps, on lui a demandé d’en faire plus, toujours plus, on lui a fait le coup des droits et des devoirs, les collègues qui au départ étaient rempli de pitié et de commisération ont achevé de lui coller la rage, elle a maigri et ensuite, elle a fait des petites erreurs, le plus souvent par manque d’organisation, on lui a parlé de stress, de difficultés d’adaptations, d’une possible réorientation, puis, un jour, on lui a diagnostiqué le burnes out. J’ai pris les raccourcis, hein !

      L’auteur n’a pas tort en disant que si les infirmières avaient moins de boulot à gérer, on aurait moins d’accident ou d’erreurs dans les hosto ! Mais les hôpitaux engagent pas ou peu et on demande au personnel présent d’en faire plus, et puis, bardaf, c’est l’embardée.

      Le huis-clos était plus horrible dans « noeuds d’acier » de Sandrine Colette, plus oppressant dans shining, dans misery.

      Pour moi, Emilie s’est mise dans sa merde toute seule avec son accident et ensuite, la société l’a un peu poussé vers la sortie, et elle n’a pas su lutter.

      Putain, pas encore regardé Downton !! Pas frapper, pas frapper !

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      • Mouais… c’est vrai que l’hopital public soumet les infirmières à des pressions mais, le droit du travail protège le statut des travailleurs handicapés et tous les services ne se valent pas (réa urgence ou bloc… c’est pas comme en psychiatrie ou comme en maison de retraite privée…) et une infirmière trop usée physiquement peu suivre la formation d’un an pour devenir cadre et être déchargée des trucs trop physiques…

        Mais si ton héroïne se transforme en infirmière psychopathe comme dans Misery… et ben ouais… c’est surtout qu’elle ondule de la toiture! 😜 Donc ça explique qu’elle dévisse!

        T’as raison de pas regarder Downton… t’aimeras pas! C’est Edwardien et pas Victorien! 🤓 Et pis surtout… on ne voudrait pas que tu deviennes addicte ! 🤗 Y’a trop de filles à qui s’est arrivé! Tu n’auras plus le temps de lire et ton rendement d’articles en souffrirait et donc nous aussi! Naaaan… C’est vraiment pas pour toi Downton! Trop étude de classes… trop sur les rapports complexes entre les nobles et leurs valets… trop sur les changements du statut de la
        Fâme au début du XXe… Trop de personnages attachants (le majordome Carson confit dans la naphtaline et l’amidon ou la comtesse douairière – l’excellente Maggie Smith -avec sa langue perfide qui manie avec dextérité la british irony), trop de beaux costumes et de beaux décors… trop de références historiques sur le déclin de l’aristocratie britannique… Et puis ils passent leur temps à table ou à prendre le thé! Que des clichés sauf qu’il pleut rarement sur le Yorkshire… qui l’eut cru ! Anybref… Nul a chier! J’te jure!😏 Tu n’aimeras pas du tout, du tout, du tout!! Regardes pas! Naaaan regarde pas! C’est mauvais pour ta vue en plus !🙄 Lis et fais nous découvrir tes lectures… c’est mieux! Perds pas ton temps… 😁 S’te plaît!

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        • Ma foi, je dirais que le code du travail, on peut se torcher le cul avec ! Dans les grosses boites les syndicats se réunissent dans les locaux du patron, payés par le patron, ils mangent dans la main du patron et je me demande encore à quoi ils servent parfois, mais chuuut, le dit pas.

          Une grosse partie de nos droits, on doit les faire valoir devant un tribunal… ça coûte cher en avocats et ça prend du temps. Imagine un type licencié pour faute grave, pas droit indemnités de chômage, mais il estime qu’il a été licencié abusivement, pour cela faudra le faire reconnaître devant un tribunal et payer un avocat. Chez nous, c’est pas des rapides, ça met deux ans au bas ma… au bas mot ! Le mec a plus de sousous qui rentre, il fait comment pour se payer un avocat s’il n’a pas des bas de laine sous le matelas ?? D’ici à ce que ces droits soient reconnus et qu’on lui paie ses indemnités de licenciement, il a le temps de sucer son pouce !

          Je savais tout ça sur Downton, j’avais déjà regardé les 3 premiers épisodes, j’avais déjà bavé devant le jeu des acteurs, les décors, les habits, la position de la femme, le naufrage du Titanic, les magouilles entre domestiques, le domestique boiteux, le maître d’hôtel, Madame MacGonagal, sans son balais… Et puis, et puis, le temps m’a manqué et bardaf, j’ai décroché !

          Là, tu m’as eue et tentée, je vais replonger dans les salons feutrés et les cuisines au sous-sol !

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          • Chez nous dans les services publics on a un ou deux syndicats qui savent foutre le boxon quand il faut et soutenir les salariés devant les tribunaux administratifs et les tribunaux professionnels si besoin… Et il y en a de plus frileux aussi… Les procédures peuvent être longues aussi… Mais les personnes les plus modestes peuvent avoir une assistance juridique gratuite. Pour les classes moyennes en revanche c’est pour leur pomme… Mais on peut exiger que l’employeur rembourse les frais de la défense s’il perd… Le problème c’est que comme la majorité des cas est toujours limite… et reposent sur des interprétations litigieuses du droit plus que sur des infractions caractérisées gagner n’est jamais certain et l’avance des frais de défense sans garantie d’obtenir leur remboursement dissuade. C’est vrai.

            Anybref…

            Naaaaaaaan (cri déééééchirant) !!!!!! Ne mets pas le nez dans Downton! C’est comme une boîte de chocobons… on arrive plus à s’arrêter tant qu’il y en a! Et c’est qu’il y en a des épisodes (de durée variable curieusement… tu en as qui durent 45mn, et d’autres plus d’une heure trente)!!! Après tu pourras même plus lire ou écrire tes billets! Naaaaaaan! Pitié! Ne regarde pas!!!! 😀

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            • Pas évident, tout ça ! Mais la plupart des syndicalistes chez nous ont exagéré grave, comme bloquer des routes, ce qui est interdit, et empêcher un médecin-chirurgien d’hôpital de passer, alors qu’il avait une opération chirurgicale à faire…

              Pour les tribunaux, je repense toujours à La Fontaine « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir » (les animaux et la peste).

              Si, je vais regarder…. je vais le faire !!!

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      • Je l’attends de pieds ferme cet article. Surtout que je l’ai vu ce film. Il y a deux version dispo sur YouTube dont celle là. Gothique à souhait… Avec un Watson pré retraité encore dynamique et pas trop idiot… Mais c’est quoi cette manie de les faire toujours trop vieux Holmes et Watson!!!

        Le pire c’est que ça a longtemps perduré ! Même avec l’adaptation Granada! Grrrr

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        • J’ai vu des tas de versions à tel point que je dois le connaître par coeur, maintenant… J’avais déjà fait le film avec Cushing-Lee de 1959 et de la Hammer Film. J’ai fait celui avec Stewart Granger de 1952 aussi.

          Ici, c’est la série de 1968 et le Watson, c’est Nigel Stock et ma foi, c’est une sorte de crétin, lui !

          Pas autant que celui avec Basil Rathbone car le Watson joué par Nigel Bruce était un idiot, le pauvre !!

          Pour la Granada, ils voulaient sans doute des acteurs avec de la bouteille pour faire plus vrai, des trop jeunes, ça passerait mal !

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