18. Sherlock Holmes : L’Homme à la Lèvre Tordue – The Man with the Twisted Lip

SAISON 2 – [Le retour de Sherlock Holmes] – ÉPISODE 5

  • Producteur : June Wyndham-Davies, Rebecca Eaton
  • Réalisateur : Patrick Lau
  • Scénariste : Alan Plater
  • Décorateur : Tim Wilding
  • Musique : Patrick Gowers
  • 18ème épisode tourné
  • 1ère diffusion : Angleterre : 13 août 1986 – ITV Network (18ème épisode diffusé); États-Unis : 5 mars 1987 – WGHB; France : 23 avril 1989 – FR3 (18ème épisode diffusé)
  • Durée : 51 min 35 sec

  • Distribution :
    Jeremy Brett … Sherlock Holmes
    Edward Hardwicke … Dr. John Watson
    Eleanor David … Mrs. St Clair
    Clive Francis … Neville St Clair
    Denis Lill … Inspector Bradstreet
    Patricia Garwood … Kate Whitney
    Terence Longdon … Isa Whitney
    Rosalie Williams … Mrs. Hudson
    Albert Moses … Lascar

Le Pitch ?
À intervalles réguliers, Holmes disparaît sans prévenir. Cette fois, Watson n’apprécie pas car il l’attend vainement. Il accepte alors d’aider son amie Kate, en allant chercher son mari, fumeur d’opium invétéré, au Bar de l’Or, Upper Swandam Lane.

Sur place, il est agrippé par un vieillard repoussant qui s’avère être… Holmes méconnaissable. Le détective enquête incognito sur la mystérieuse disparition de Neville Saint Clair, un journaliste qui travaille dans la City et dont seuls les vêtements ont été retrouvés dans la Tamise.

Or sa femme l’avait entrevu à la fenêtre d’une taverne d’un quartier populaire, victime apparemment d’une agression.

Mme Saint Clair revient sur les lieux, escortée par la police qui arrête un mendiant à la lèvre tordue, du nom de Boone, si répugnant mais si habile à la répartie qu’il gagne beaucoup d’argent.

Holmes reste très pessimiste sur le sort de Neville, mais sa femme est persuadée qu’il n’est pas mort, car elle vient de recevoir un mot écrit de sa main.

Intro : Un homme fait la manche, il est sale, mal en point, récite du Shakespeare et les élégants monsieur de la City lui remplissent sa sébile.

Les affaires marchent plutôt bien pour le mendiant Boone…

Pendant que les pièces tintent pour Boone, un homme élégant se dirige vers une ruelle assez mal famée.

Du côté du 221b, Watson est de mauvais poil car il devait dîner avec Holmes et ce dernier est parti avec une cliente.

S’asseyant devant le feu et pensant passer une soirée à lire le journal devant le feu, le brave docteur est dérangé par l’arrivée d’une dame, on le voit râler, puis changer de tête en tombant nez à nez avec une connaissance.

Allez hop, puisqu’on m’a signalé le mois dernier que je faisais dans le glauque du bush australien, dans les bas fonds des États-Unis ainsi que les poubelles de l’histoire d’Argentine, je vais donc me pencher un peu sur le « garbage » de la bonne société victorienne !

Pas de ma faute si cet épisode se penche un peu sur l’envers du décor de Londres à l’époque de sa reine Victoria et que l’on quitte quelque peu les beaux salons londoniens où les nobles et les riches boivent leur thé avec le petit doigt en l’air et la cuillère en argent posée délicatement sur la sous-tasse…

ENFIN, Sir Arthur Conan Doyle va envoyer son détective dans les bas-fonds londoniens et nous balader dans quartiers miséreux et mal famés de l’East End, là où Jack a fait son Ripper…

Anybref, là où c’est glauque à souhait et où on aura envie de se laver les main après avoir vu l’épisode ! Ou de se gratter si on pense qu’il pouvait y avoir des petites bêbêtes dans les vêtements de Boone.

Encore un épisode que j’adore, non seulement parce que l’on nous montre autre chose que des beaux salons et qu’on aperçoit Londres telle qu’on la voit peu souvent dans les aventures de Holmes.

[Il faut lire « Le peuple d’en bas » de Jack London]

Londres nous présente un visage à la Janus, avec, d’un côté, la bourgeoisie et les nobles, ceux qui pètent dans la soie et de l’autre, les miséreux qui vivent dans des taudis, dont Boone est le plus cruel exemple.

Dans ces ghettos où s’entassent hommes, femmes et enfants, il est dangereux de s’aventurer pour qui est étranger ou bien habillé. Mme St Clair en fera l’expérience.

Les images étranges de la caméra, les sons déformés lui font vivre un cauchemar éveillé, marchant au hasard, tiraillée et bousculée.

Le passage de la fumerie d’opium où Watson pénètre afin de récupérer le mari opiuman de son amie est assez glauque, on voit des hommes avachis comme des lavettes, la bave aux lèvres, les yeux dans le vague, et avec des places à louer dans leur tête.

Et puis, on sursaute lorsqu’une main agrippe Watson par le devant de son manteau et que l’on découvre  notre vieil ami à nous, Holmes.

— Vous croyez que j’avais ajouté l’opium à la liste de mes petites faiblesses ?

Si Holmes est en forme dans cet épisode et qu’il a de belles réparties, on dirait que Watson nous la joue femme délaissée, boudant toujours pour son dîner raté, et suivant Holmes un peu comme s’il subissait l’affaire, avec des pieds de plombs, ronchonnant plus tard sur le fait que Holmes ne l’a laissé dormir que 2 heures.

— Un vrai parangon de la vertu ! [Watson après que Holmes lui eut décrit le parfait monsieur Neville St Clair].
— Watson, cette pointe de scepticisme dans votre voix ne vous honore pas.

Il est un fait que vivre avec un type comme Holmes ne doit pas être de tout repos car lorsque ce dernier est sur une enquête, il ne s’intéresse plus à rien d’autre qu’à son affaire et les autres n’ont qu’à suivre le mouvement.

Holmes lui-même suivant le mouvement de madame St Clair qui a tout d’une femme remarquable et pas d’une pleurnicheuse, une femme de caractère, déjà qu’elle avait osé entrer dans Upper Swandam Lane, rue vachement mal famée !

D’ailleurs, Holmes mettra en garde Watson qui voulait se montrer galant et qu’elle ne lui cède pas sa place pour le souper léger :

— Watson, c’est une femme qui sait ce qu’elle veut, vous lui tenez tête à vos dépens.

Oui, Holmes mènera la danse durant tout l’épisode, nous laissant un Watson suivant le train, un peu en retrait, boudeur face  à un Holmes qui se moque de tout le reste, en ce compris des heures réglementaires de sommeil, sans compter que ce pauvre Watson a dû dormir dans une chambre enfumée puisque Holmes a fumé comme une cheminée pour tenter d’avoir l’illumination sur la disparition mystérieuse de Neville St Clair.

La scène qui suivra sera directement inspirée par un dessin de Sidney Paget qui avait dessiné Holmes méditant, la pipe en bouche, toute une partie de la nuit, les yeux clos, assis en position du lotus sur une pile de coussins, le tout filmé dans un halo de lumière quasi mystique.

Jeremy apprécia particulièrement de jouer Holmes en méditation car lui-même avait a été un adepte de la méditation toute sa vie. Voilà une autre facette qui les réunissait. Et la méditation, ça marche pour résoudre une affaire étrange de disparition !

La scène du réveil de Watson est drôle car Holmes, habillé de pied en cap, lui chatouille le pied qui dépasse du lit et lui balance un :  » Je vous ai réveillé pour vous demander si vous pourriez envisager la possibilité de vous lever ».

Watson demande l’heure (il est 6h du mat’), se plaint qu’il ne l’a laissé dormir que 2h et lui demandera si la vie de quelqu’un est en jeu.

La réponse est non, mais quand Watson demandera à Holmes s’il  ne peut pas aller vérifier sa théorie un peu plus tard, il lui sera répondu « Je vous attends en bas dans 5 minutes ».

Le silence de Watson sera éloquent, pourtant, Holmes n’hésitera pas à s’auto-flageller tout en menant de main de maître l’attelage à un cheval de sa cliente :

— Watson, vous êtres en compagnie d’un des plus grands idiots d’Europe. Je mériterais qu’on m’envoie d’ici à Charing Cross à coups de pieds !

Dans cet épisode rythmé qui nous montre une facette du Grand Londres peu reluisante, on nous fait voir aussi que le respect des convenances et de la bonne moralité sont primordiaux, sans oublier que la pression sociale étaient telles à l’époque que certains auraient préférés mourir ou rester en prison plutôt que de faire retomber sur sa famille la honte de leur activité de mendiant.

Oh les regards méprisants, désapprobateurs, de l’inspecteur Bradstreet et du brave docteur Watson devant Boone, quand ce dernier leur explique combien il gagne par année… et en sachant ce qu’ils savent sur son identité réelle !

Par contre, pas de jugement du côté de Holmes qui lui est heureux d’avoir résolu ce mystère insondable et qui est fasciné par cet homme qui a fait du théâtre et qui, comme  lui, savait se grimer et jouer un rôle.

Sans doute y voyait-il le reflet de son anticonformisme, de son art du déguisement, de son désir d’être libre, de ne dépendre de personne, de fuir la routine et les convenances pour vivre une aventure exceptionnelle.

Si Jeremy Brett avait, tout comme Holmes, un certain talent pour se déguiser et se rendre particulièrement laid et repoussant, on peut dire que l’acteur qui joue Boone a montré un égal talent, si pas mieux !

Un super épisode que je ne me lasse jamais de regarder ou de lire, même en sachant la solution de l’énigme, car c’était tellement bien trouvé !

De plus, on a quelques dialogues drôles et des réparties amusantes de Holmes envers Watson.

D’ailleurs, en arrivant à la prison où était détenu le mendiant Boone, l’inspecteur Bradstreet leur annonça, en se frottant les yeux, que le mendiant dormait encore et Watson de répliquer, des reproches dans la voix « À cette heure-ci, tout le monde dort encore ! ».

J’adore !

Pour ce coucher moins bête au soir :

  • L’intérieur de la fumerie d’opium a été reconstitué en studio à Manchester.
  • On assiste à un exemple typique du caractère holmésien, que l’on retrouve également au début du « Manoir de l’Abbaye ». L’actrice Patricia Garwood, qui joue Kate Whitney, l’amie de Watson, est la femme du scénariste Jeremy Paul.
  • Le côté shakespearien du personnage de Boone est souligné par la magnifique scène finale, ajout des scénaristes, où St Clair, jetant les vêtements de Boone au feu, récite un extrait de la tirade d’Horatio à la mort d’Hamlet.
  • Cet acte d’expiation par les flammes ressemble à un bûché funèbre. Il s’agit bien d’une partie intime de lui même que St Clair a sacrifiée.

28 réflexions au sujet de « 18. Sherlock Holmes : L’Homme à la Lèvre Tordue – The Man with the Twisted Lip »

  1. Ping : Bilan Mois Anglais – Juin 2017 [Saison 6] – I’ll be back !! | The Cannibal Lecteur

    • Ah bon ?? Tu te tapes Hercule et Sherlock e alternance ?? Ben toi alors !!! PTDR

      Sérieusement, maintenant, oui, l’homme à la lèvre tordue est une intrigue qui a du peps, elle est très bonne et je te conseille de sortir un peu Holmes des étagères 😉

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  2. Oh oui! J’avais adoré cette affaire! Pas de mort… et une fin aussi inattendue que réjouissante la montagne d’angoisse ayant été accouchée par une souris (les raisons assez bénigne de la disparition du mari – certes certains préfèrent la mort au « déshonneur » mais bon… ) et non l’inverse selon le proverbe!

    Merci pour ce billet sympathique!

    Aimé par 1 personne

    • Oui, d’ailleurs, tu vois les regards lourds de reproche de l’inspecteur et de Watson quand ils comprennent que… oh putain, pire que si le mec avait violé des p’tites vielles !

      J’adore cet épisode !

      De rien ! 😉

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  3. Effectivement du grand art..du grand Holmes…et quelle tranformation…j’ai toujours en tete « les voies d’Anubis » de Power quand je vois cela…..ou la cour des miracles a paris…..en tout cas ouiii mes dimanche vont etre pris…apres Game of Throne…lol

    Aimé par 1 personne

    • Vivement la saison 7 de GOT !!

      Pas encore lu les voies d’anubis (c’est scato ??) que je possède, pourtant…

      La cour des miracles, c’était du grand art, on revoyait plus ou moins la même chose à la vierge noire à bruxelles, la rue où les gens venaient demander des allocations pour handicap ou accident.

      Pendant des années, la Direction générale (DG) pour les Personnes handicapées était établie Rue de la Vierge Noire à Bruxelles, beaucoup de personnes parlaient de la ‘Vierge Noire’ ou de la ‘Rue de la Vierge Noire’ quand ils voulaient faire référence à la DG des Personnes handicapées. Ils ont déménagé au jardin botanique depuis. Mais on les surnommait aussi la cour des miracles parce que des gens arrivaient en voiturettes et partaient en marchant !!

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      • alors la « les voies d’anubis »…c du steampunk pur et dur…ce fut mon premier livre de Tim Powers et maintenant j’en suis accro..c’est trop trop trop bien….j’en suis totalement fan….et cela se passe dans la cour des miracles londonienne (tu pourrais le lire pour le mois de juin 2018…lol)
        en fin de compte ce genre de communaute existe partout….cela reste quand meme une situation bien triste…;)

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