La Mort selon Turner : Tim Willocks

Titre : La Mort selon Turner

Auteur : Tim Willocks
Édition : Sonatine (11/10/2018)
Édition Originale : Memo from Turner (2018)
Traducteur : Benjamin Legrand

Résumé :
Après La Religion et Les Douze Enfants de Paris, le nouvel opéra noir de Tim Willocks.

Lors d’un week-end arrosé au Cap, un jeune et riche Afrikaner renverse en voiture une jeune Noire sans logis qui erre dans la rue. Ni lui ni ses amis ne préviennent les secours alors que la victime agonise.

La mère du chauffeur, Margot Le Roux, femme puissante qui règne sur les mines du Northern Cape, décide de couvrir son fils. Pourquoi compromettre une carrière qui s’annonce brillante à cause d’une pauvresse ?

Dans un pays où la corruption règne à tous les étages, tout le monde s’en fout. Tout le monde, sauf Turner, un flic noir des Homicides.

Lorsqu’il arrive sur le territoire des Le Roux, une région aride et désertique, la confrontation va être terrible, entre cet homme déterminé à faire la justice, à tout prix, et cette femme décidée à protéger son fils, à tout prix.

Petit Plus : Le fauve Willocks est à nouveau lâché ! Délaissant le roman historique, il nous donne ici un véritable opéra noir, aussi puissant qu’hypnotique. On retrouve dans ce tableau au couteau de l’Afrique du Sud tout le souffle et l’ampleur du romancier, allié à une exceptionnelle force d’empathie.

Loin de tout manichéisme, il nous fait profiter d’une rare proximité avec ses personnages, illustrant de la sorte la fameuse phrase de Jean Renoir : « Sur cette Terre, il y a quelque chose d’effroyable, c’est que tout le monde a ses raisons. »

Critique :
Mais quelle voix rauque, cette Turner ! Quel déhanchement ! Quels frissons elle me donne lorsqu’elle chante « GoldenEye »…

Mille excuses, on m’annonce dans l’oreillette qu’il y a un Ike dans le potage et que ce n’est pas de Tina Turner que l’on parle dans ce roman mais d’un flic têtu et bourré de violence qui ne demande qu’à sortir si on vient lui chercher des poux dans la tête.

L’Afrique du Sud, sans ses vuvuzelas, mais bien ses Township, sa misère crasse, pour ne pas dire noire puisque là-bas, c’est le Blanc qui régna en maître et qui règne toujours.

Une femme pauvre et miséreuse qui se fait écrabouiller contre un container de poubelles et qui meurt dans d’atroces souffrances 30 minutes après, ça ne devrait même pas faire lever la tête des flics du Cap, la ville qui a un taux de criminalité à faire pâlir Tijuana, mais loin derrière la ville de Los Cabos.

Pourtant, Turner, lui, veut le résoudre, ce crime crapuleux et trouver ces Blancs qui n’ont même pas pris la peine d’appeler les secours, même s’ils auraient été inutiles.

Dans ce roman, on commence à l’envers puisque la scène d’ouverture est une de celles qui se passeront à la fin. Ça donne déjà envie de savoir comment Turner s’est retrouvé dans cette merde et une fois que l’on est revenu au point de départ, on n’a plus qu’une envie, tracer sa route et savoir.

Le suspense ne sera pas important niveau coupable puisque nous savons quasi qui a fait le coup, ne reste plus qu’à le prouver et traîner des Blancs riches et puissants devant les tribunaux, et vous savez que c’est là que ça va se corser, comme disaient les Romains face à Ocatarinetabellatchitchix.

Dans ce roman surchauffé et bourré de corruption, pas de manichéisme, personne n’est tout blanc ni tout noir, même celui qui a écrasé la pauvre fille et l’a laissé agoniser sur le bitume. Quant à Turner, malgré le fait qu’il soit incorruptible, quand on le cherche, on le trouve et généralement, on bouffe son acte de naissance jusqu’à la racine.

Un roman noir survolté, un roman où l’Afrique du Sud et son racisme est bien présent, un roman où les exactions de l’Homme sont bien décrites, sa cupidité aussi, ainsi que le fait qu’on ne bâtit pas une fortune en jouant aux Bisounours.

Un roman où une scène terrible m’a fait sauter des lignes, tant elle était horrible mais pourtant, nécessaire à la survie.

Un roman où les personnages sont si proches qu’on pourrait presque les toucher, un roman où la frontière entre le bien et le mal est ténue et où la ligne rouge est facile à franchir dès qu’on pense qu’on agit dans ses droits ou qu’on s’arrange avec sa propre conscience.

Un roman où l’écrasement d’une pauvresse déjà condamné au Cap va déclencher un tsunami de morts dans une ville (Langkopf) encore plus paumée que le trou du cul de l’anus monde (aux portes du Kalahari).

Non mais les gars, est-ce que ça valait la peine de faire tant de mort pour si peu ? Aux lecteurs de juger… En tout cas, voilà un thriller policier qui envoyait du lourd et dans lequel on n’a pas le temps de s’ennuyer.

PS : Mention spécial aux personnages de Turner, Simon, Hennie et Mokoena et de Mimymathy… Pardon, Iminathi !

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (2018-2019), Le Challenge « Les Irréguliers de Baker Street » repris par Belette [The Cannibal Lecteur] et sur le forum de Livraddict (N°57 – La Crinière du Lion – lire un livre se passant en Afrique) et Le challenge British Mysteries (Janvier 2018 – décembre 2018) chez My Lou Book (auteur anglais).

 

50 réflexions au sujet de « La Mort selon Turner : Tim Willocks »

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  8. Grâce à ta fiche je me rends compte que l’auteur a probablement été contaminée par la Macronite aiguë ! Maladie qui consiste à penser que pour faire disparaître là pauvretés il suffit de laisser les pauvres s’entretuer! Quelle horreur cette histoire! Trop glauque pour moi! Le meurtre par simple plaisir sadique ou pour l’amour de l’art je dis oui… quand c’est plus ou moins accidentel et lié à des histoires de fric je trouve ça sordide…
    🤔 Il faut d’urgence que je m’interroge sur mon système de valeurs moi…

    Aimé par 1 personne

    • Bah, avant on pensait que les pauvres étaient des fainéants… quoi ? maintenant aussi ?

      Là, au Cap, suffit même pas de les laisser s’entretuer mais de les laisser mourir de faim, malnutrition, maladies, et autres joyeusetés et hop débarrassé ! Bon, des esprits chagrins diront que ça se reproduit vite…

      Le meurtre n’était pas sadique, mais accidentel et le conducteur, trop ivre, ne s’est rendu compte de rien, mais son beau-père, oui et il a fait semblant de rien, se gardant bien de le lui dire.

      Je pense qu’il faut t’interroger sur ton système de valeur, en effet ! mdr

      J’aime

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