La servante écarlate – Tome 2 – Les testaments : Margaret Atwood [LC avec Bianca]

Titre : La servante écarlate – Tome 2 – Les testaments

Auteur : Margaret Atwood
Édition : Robert Laffont – Pavillons (10/10/2019)
Édition Originale : The Testaments (2019)
Traducteur : Michèle Albaret-Maastsch

Résumé :
Quinze ans après les événements de La Servante écarlate, le régime théocratique de la République de Galaad a toujours la mainmise sur le pouvoir, mais des signes ne trompent pas : il est en train de pourrir de l’intérieur.

A cet instant crucial, les vies de trois femmes radicalement différentes convergent, avec des conséquences potentiellement explosives.

Deux d’entre elles ont grandi de part et d’autre de la frontière : l’une à Galaad, comme la fille privilégiée d’un Commandant de haut rang, et l’autre au Canada, où elle participe à des manifestations contre Galaad tout en suivant sur le petit écran les horreurs dont le régime se rend coupable.

Aux voix de ces deux jeunes femmes appartenant à la première génération à avoir grandi sous cet ordre nouveau se mêle une troisième, celle d’un des bourreaux du régime, dont le pouvoir repose sur les secrets qu’elle a recueillis sans scrupules pour un usage impitoyable.

Et ce sont ces secrets depuis longtemps enfouis qui vont réunir ces trois femmes, forçant chacune à s’accepter et à accepter de défendre ses convictions profondes.

Critique :
Le monde décrit dans La Servante Écarlate n’était pas de la petite bière, nous étions loin du pays des Bisounours…

Pourtant, malgré le fait que nous étions dans une dystopie, il y avait des relents de déjà-vécu quelque part dans le Monde ou quelque part dans le passé.

Il fait froid dans le dos, ce roman, car nos sociétés pourraient basculer dans ce cauchemar très vite, sans que l’on s’en rende compte et sans que l’on sache y faire quelque chose.

Sans oublier que certaines sociétés sont dans ce puritanisme religieux…

Puritains quand ça les arrange, bien entendu ! On oblige les autres au puritanisme, mais si on gratte sous la croûte de pudibonderies, on trouvera de la saloperie.

Quand à la religion, elle a bon dos et ne sert qu’à justifier certaines règles, certains comportements, qu’ils soient machistes, phallocratiques, misogynes ou qu’ils transforment la femme en vache reproductrice. Une tyrannie doit reposer sur quelque chose et la religion est souvent la bonne excuse.

Bien souvent, les suites sont moins bonnes que le premier tome, mais ici, ce n’est pas le cas, j’ai même trouvé la suite meilleure que le premier opus !

En tout cas, niveau froid dans le dos, j’ai eu ma dose pour quelques temps. J’ai comme une envie de me jeter sur des Petzi ou des Martine, c’est vous dire combien j’ai flippé ma race.

Dans le monde décrit brillamment par l »auteure, les femmes n’ont aucun droit, si ce n’est celui de fermer sa gueule et de jouer aux juments reproductrices, ou aux vaches gestantes. Au choix… Mais elles n’ont pas toujours le choix de l’étalon (ou du taureau).

Le taux de fécondité ayant fortement baissé, il faut bien perpétuer la race Humaine avec celles qui savent encore tomber enceinte et donc… Les Servantes Écarlates sont comme des vaches qu’on engrosse pour prendre le veau. L’enfant, pardon.

Trois personnages marquants vont nous raconter leur vie dans cette suite : une Tante, une jeune fille habitant le Canada (donc libre) et une fille d’un Commandeur, habitant Galaad (Gilead dans la traduction précédente, mais ça ne m’a pas dérangé).

Nous sommes 15 ans après la premier tome, donc, le récit n’est pas linéaire et ne vous attendez pas à retrouver Defred aux commandes de la narration.

J’ai trouvé que donner la parole à une Tante qui avait connu la démocratie, qui avait assisté à le chute de la société, qui avait été dans un camp et qui en était sortie en abandonnant une partie de son âme, était une riche idée. Nous avons vu la naissance de Galaad d’une autre manière et compris que si ça arrivait chez nous, cela se passerait de la même manière : sans quasi de résistance.

Le récit est fort, puissant, intense, horrible… Il m’a donné froid dans le dos. Entrer ainsi dans le fonctionnement de Galaad et voir le lavage de cerveau m’a donné envie de vomir. Voir le système de l’intérieur, voir sa corruption, sa corrosion, son hypocrisie, son manichéisme, m’a collé la nausée tant tout était réaliste et possible.

Mon seul bémol sera pour la fin qui est un peu trop précipitée à mon goût. Bianca l’a trouvée elle aussi un peu trop rapide, mais malgré ce léger point critique, tout le reste est dans le haut du panier littéraire.

Une dystopie à l’écriture fine, caustique, réaliste. Une tyrannie basée sur des mensonges, sur religion dont les écrits sont détournés pour servir les intérêts de quelques-uns et pas du bien commun.

Des personnages forts, énigmatiques, profonds et qui évolueront au fil des pages. Un monde décrit qui fait froid dans le dos et où la lecture et l’écriture sont devenus dangereux, interdits et réservés à quelques personnes triées sur le volet.

Anybref, une fois de plus, une LC réussie avec Bianca et nous sommes sur la même longueur d’ondes. Et si vous suivez le lien, vous en aurez la preuve !

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (juillet 2019 – juillet 2020) – N°134.

33 réflexions au sujet de « La servante écarlate – Tome 2 – Les testaments : Margaret Atwood [LC avec Bianca] »

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      • Disons que pour moi c’etait insense….comment une femme qui a eu une vie, comme toi et moi, se laisse violer tous les mois ?…si l’auteure avait pris une jeunette qui serait passee dans une ecole a faire des bebes, j’aurais plus adhere (d’ailleurs comme dans le 2eme tome)….je prefere plus les dystopiques qui brulent les livres…..c’est plus sense…

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        • La preuve que l’on peut être instruit(e), éduqué(e) et malgré tout sombrer dans le porte nawak. Les mecs n’ont rien dit quand on a interdit aux femmes d’avoir un compte en banque, les épouses n’ont rien dit qu’on leur mette une poulinière à la maison et qu’elles doivent la tenir pour l’accouplement… Tout le monde a dit « oui amen » et ceux qui se sont rebellés, pendus ! Alors, on ferme sa gueule…

          Quand je vois que des femmes signent des lois qui punissent l’avortement, même après viols, qui disent que si femme violée est enceinte, c’est qu’elle a eu son plaisir, sinon, son corps se serait défendu et pas enceinte (on est en 2019, pas en 1880), quand je vois ce que des femmes tolèrent parfois, je me dis qu’il ne faudrait pas beaucoup pour arriver à « la servante écarlate ». Notre cerveau serait vite lavé. Hélas.

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          • Je suis totalement d’accord avec toi…d’ou mon apparte sur les livres…oui on peut en arriver a ces extremites…mais lala non…c’est un viol continu d’une femme qui n’est nullement engagee…enrolee…oui, il y a eu des fermes a produire le meilleur nazi avec des femmes qui ont accepte de coucher, ouvrir les jambes, avec des bons Nazis et donner leur bebe a Hitler…elles etaient consentantes….c’est aussi pour cela que je trouve que le 2eme tome pourrait etre plus realiste…pour moi…car on parle d’une jeune fanatique….prete a tout…tu peux me parler de survie…et je reparlerais de viols continues….c’est quand meme autre chose que des cheques….;)

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            • Le second est différent, à mon avis, tu l’aimerais mieux.

              Lorsque je repense aux camps de concentration, à toute cette masse de gens, supérieur en nombre aux gardiens et personne qui bougeait… Tout le monde qui laissait des horreurs se passer devant ses yeux… Je me dis que l’Homme peut devenir plus vite amorphe qu’on ne le pense. C’est mon avis, je me plante peut-être (j’aimerais avoir tort, tu sais !).

              On a tout de même lavé le cerveau des Servantes dans les camps, on en parle dans le tome 2… On les a délesté de leur humanité et j’ai l’impression que Defred est une enveloppe vide durant toute une partie du roman. Comme si elle s’était résolue à accomplir sa destinée de reproductrice. Ça fait froid dans le dos…

              Si tu te rebelles, ils te casseront de nouveau, donc, tu « acceptes », du moins, tu serres les dents et tu laisses faire, comme si ta volonté avait été annihilée.

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              • Justement…je trouve qu’on ne retrouve pas ca dans le 1, ce cote « annihilee » et « cassee »….oui tu le dis une coquille vide depuis le debut…lors des rares evocations de ces fameux camps, elle est amorphe, elle subit….elle est sensee nous representer, des femmes ayant du vecu subissant une dictature….et franchement je ne suis pas sure de me laisser faire, je deteste que l’on me touche sans mon consentement et je ne me vois pas devenir une poule pondeuse….bref je pense que je n’ai eu aucune sympathie pour elle….;)

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                • Je n’ai pas beaucoup de sympathie pour Defred, mais je me suis mise à sa place et me suis demandée ce que j’aurais fait, moi… J’ai pensé comme toi « ruer dans les brancards » mais je sais aussi que l’esprit humain peut être vite annihilé et combien on est capable de tolérer des choses qu’on aurait juré ne jamais accepter… Un peu comme ces filles qui viennent en Europe et qui se retrouve à devoir faire le tapin pour les passeurs, alors que ce n’était pas ça qu’elles voulaient. On leur parle d’une dette à rembourser, d’une famille que l’on peut retrouver et la fille fait le tapin… Il ne faut pas longtemps pour que son cerveau soit anesthésié et elle résignée… Certaines se rebelles, s’en sortent vivantes (ou mortes, hélas), mais on se résigne vite, on accepte vite son sort, je trouve. Maintenant, j’aimerais avoir tort, mais quand on regarde l’Humain sur toute son existence, on se rend compte qu’il se résigne vite et que les révolutions ne durent jamais longtemps, que s’unir pour avoir de la force n’est pas toujours facile et que l’on se lasse vite.

                  Je plains plus Defred que je ne la juge, même si je trouverai toujours que son ton était trop froid. La preuve sans doute que son esprit était résigné, mort, lessivé, endoctriné… et tout ce que tu veux.

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