Bakhita : Véronique Olmi [LC avec Bianca]

Titre : Bakhita

Auteur : Véronique Olmi
Édition : Albin Michel (2017) / Livre de Poche (2019)

Résumé :
Bakhita, née au Darfour au milieu du XIXe siècle, est enlevée par des négriers à l’âge de 7 ans. Revendue sur un marché des esclaves au Soudan, elle passera de maître en maître, et sera rachetée par le consul d’Italie.

Placée chez des religieuses, elle demande à y être baptisée puis à devenir soeur.

Critique :
Lorsque j’ai ouvert ce roman, je ne savais même pas qu’il était tiré d’une histoire vraie… Shame on me. C’est en l’ajoutant sur Babelio que je m’en suis rendue compte.

Pour moi, ça a changé toute la donne et démultiplié les émotions qui étaient déjà fortes après quelques pages.

Darfour, dans les années 1870. Une petite fille de 7 ans, qui vivait tranquille dans son village, est enlevée par des hommes d’un village voisin et livrée au négriers, aux esclavagistes musulmans (les cathos n’ont pas le monopole).

Non, sa destination ne sera pas les États-Unis mais d’autres pays africains où elle sera esclave. Mais avant d’arriver à cette horrible destination, il faudra y aller à pied et le chemin est long, difficile, ardu, violent, où l’humanité est portée disparue depuis longtemps car les captifs sont traités pire que des bêtes, comme des objets.

Le récit de celle que l’on nommera Bakhita (elle a oublié son prénom d’enfant) commence lentement mais jamais la narration, au présent, ne s’essouffle car le lecteur est happé dans cet univers sombre et violent de la traite des Africains par d’autres Africains et j’ai souvent eu la gorge serrée durant ce récit.

Aucune avanies ne lui sera épargnée, ses maîtres, ses propriétaires, traitent leurs esclaves comme des non-humains, comme des jouets offerts à leur enfants et je vous passerai certains détails.

La lumière commencera à poindre lorsqu’elle rejoindra l’Italie, même si, mettant les pieds dans un pays où l’esclavage n’a pas cours, elle reste tout de même la propriété d’un couple et un jeune castrat sera offert en cadeau à un autre. Moi, là, j’en avale ma salive de travers ! Oui, on offre des humains comme on offrirait des jeunes chiots, chatons…

La suite, vous le saurez en découvrant cette biographique romancée… Bakhita est un personnage que l’on aime très vite, aussi bien enfant qu’adulte, elle est émouvante, innocente et le fait qu’elle n’ait jamais reçu d’éducation la fait réagir un peu comme un jeune enfant, sans compter qu’elle mélange plusieurs langues lorsqu’elle s’exprime.

Des émotions, j’en ai eu mon quota en lisant ce récit et j’ai même souffert de conjonctivite car j’ai eu de l’humidité dans le fond de mes yeux, sans compter la gorge nouée à de nombreux moments.

Sans jamais sombrer dans le pathos, l’auteure nous romance la vie de Bakhita d’une manière sobre, simple, mais empreinte d’un grand respect, sans rien nous cacher, mais en gardant parfois un voile pudique sur certains événements.

Bakhita, c’est une histoire profonde, forte, remplie d’émotions. Une histoire vraie, une histoire sur l’inhumanité de l’Homme mais pas que ça : dans ces pages, dans sa vie, elle a croisé aussi de belles personnes, remplie d’humanité, de compassion, de foi, et qui ont su l’aider à surmonter les horreurs de sa vie et à lui trouver une place, même si, jusqu’au bout, elle s’est toujours sentie esclave.

D’ailleurs, en Italie, dans ce pays où l’esclavage n’existait pas, il fallait une décision de justice pour que la personne soit affranchie. Cherchez l’erreur aussi.

Un roman puissant, généreux, émouvant, et un beau portrait de cette petite fille qui a tout perdu de sa vie (innocence, enfance, famille, pays, langue, souvenirs, identité,…) mais qui a su, grâce à l’aide des autres, s’en construire une autres et être un phare dans la nuit pour d’autres personnes.

Magnifique.

Une LC en décalage avec ma copinaute Bianca qui a moins accroché au récit et qui n’a pas terminé sa lecture. Exceptionnellement, je publie avant elle et sans elle car elle va le terminer à son aise et comme le Mois Anglais arrive à grand-pas, la chronique risquait de n’être publiée qu’en juillet…

32 réflexions au sujet de « Bakhita : Véronique Olmi [LC avec Bianca] »

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  4. Oui en effet… on fustige l’Occident pour la traite des esclaves africains… on a raison de le faire certes… mais on oublie un peu vite que la plupart du temps c’était les africains eux mêmes qui vendaient les membres de la tribu d’à côté et en effet les pays musulmans pratiquaient l’esclavage bien avant que l’Europe ne s’y mette pour répondre aux « besoins » de l’Amérique. Bref… l’Europe et les USA coupables… assurément certes… mais il n’y avait pas qu’eux dans cette industrie de la honte et ça… on en parle moins! C’est souvent une surprise pour beaucoup de gens.

    Des descendants d’esclaves avaient fait une procédure aux USA pour obtenir des réparations… en fait, ils pourraient attaquer l’Europe et l’Afrique aussi!

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    • Bien des gens, des peuples sont coupables… Pour les « voisins » qui vendaient la tribu voisine, je peux encore comprendre qu’on pouvait les menacer (soit tu livres des autres, soit on te prend ta tribu à toi) pour arriver à en faire des délateurs.

      Il y a un monument, au Cinquantenaire, à Bruxelles, où est gravé « L’héroïsme militaire belge anéantit l’Arabe esclavagiste » et le mot « arabe » était souvent effacé (grattée). Elle ne sera pas remise, je viens de l’apprendre en cherchant sur le Net l’inscription exacte (je savais qu’il y avait « arabe esclavagiste » dedans), l’hebdo satirique « Père Ubu » en avait souvent parlé.

      Oui, des esclavagistes, il y en a chez tout le monde, regardons nos fautes en face, ça ira mieux… Chrétiens et musulmans l’ont fait. Les Belges n’ont pas fait des choses bien au Congo et j’ai honte de voir Bruxelles si belle grâce aux richesses volées au Congo… sans oublier les morts ! Et le roi Baudoin leur disait, à leur indépendance « qu’il leur donnait la liberté », liberté qu’ils avaient avant notre arrivée….

      https://www.sudinfo.be/art/830662/article/regions/bruxelles/actualite/2013-10-09/cinquantenaire-l-inscription-l-arabe-esclavagiste-ne-reviendra-pas-sur-le-

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  5. Je l’ai lu. C’est une histoire terrible, qui heureusement connait une belle fin grâce à ces gens qui la tiraient enfin vers le haut. J’en parlerai sur Babelio aussi tellement elle m’a émue à la lecture. Bakhita s’est reconstruire et illumine tout chemin qu’elle arpente.

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      • C’est toujours ainsi. Même si après elle était sorti de sa torpeur et qu’on avait écrit sa biographie dont elle parlait en tournée sur l’Italie. Il y’a toujours des gens moins bons qui essaient de profiter de sa gentillesse, de sa sainteté pour tirer profit de quelque manière. Quelqu’un comme Bakhita, on doit respecter une Soeur, pas essayer de manipuler une religieuse, c’est honteux ! Les italiens qui sont pourtant très pieux, je suis surprise de tels comportements de leur part.

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        • Je me méfie des gens qui se disent « pieux », bien souvent, ils font pire que le dernier des mécréants… Pour moi, on ne doit profiter de personne, que ce soit une religieuse, un ouvrier, un employé… On respecte tout le monde parce que c’est se respecter sois-même (maintenant, une personne qui ne me respecte pas, elle obtient mon mépris). Mais c’est plus fort que l’Homme, il aime tirer profit des autres, manipuler, abuser… La piété est comme tout le reste : à géométrie variable (hélas).

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