Plus bas dans la vallée : Ron Rash

Titre : Plus bas dans la vallée

Auteur : Ron Rash
Édition :
Édition Originale : In the valley (2020)
Traduction : Isabelle Reinharez

Résumé :
Un an après son départ pour le Brésil, Serena, personnage emblématique de l’œuvre de Ron Rash, revient dans les Great Smoky Mountains. Selon le contrat qui la lie à la compagnie de Brandonkamp, tous les arbres de la dernière parcelle qu’elle possède aux États-Unis doivent être abattus avant la fin de juillet. Il ne reste que trois jours.

La pluie incessante qui fait de ce flanc de montagne un véritable bourbier, les serpents impitoyables, l’épuisement des bûcherons en sous-effectif rendent la tâche presque impossible. La « Lady Macbeth des Appalaches » sera-t-elle à la hauteur de sa sinistre réputation ?

Autour de ce diamant noir, six nouvelles âpres mais traversées d’éclairs d’un humour parfois grinçant disent la vie rude et privée d’horizon des enfants oubliés de l’Amérique que sont les habitants de cette contrée.

Critique :
Alors Serena, on est de retour ? Tu es revenue dans les Appalaches, dans les Great Smoky Mountains, afin de continuer de raser la forêt ?

Serena, tu n’imagines pas combien j’étais heureuse de recroiser ta route, tout en redoutant la confrontation. Avais-tu changé ou étais-tu égale à toi-même ?

Pas de doute, ma Serena, tu es égale à toi-même : une femme froide, une femme de poigne, une femme qui n’hésite pas à trucider ceux ou celles qui t’ont fait chier, déplu, qui pourraient te faire de l’ombre…

Enfin, Serena, tu te contentes de donner l’ordre à Galloway, ton âme damnée, qui fait le sale boulot.

Serena… Je disais, dans ma chronique du roman éponyme, qu’elle inspirait la peur, le respect, le désir, la haine. On oscille sans cesse entre l’amour et la haine du personnage.

La seule chose dont je suis sûre, avec Serena, c’est que son personnage est recherché, travaillé et que son auteur a réellement donné vie à une Lady Macbeth des années 30. Et quand elle doit gagner un pari ou respecter une échéance, la Serena est prête à tout, notamment à mettre en danger ses ouvriers, sans états d’âmes.

Moi qui ne suis pas fan des nouvelles, voilà que celles composant ce recueil m’ont scotchées dans mon canapé, tant elles étaient puissantes, bien racontées, sans laisser le lecteur sur sa fin. Le retour de Serena valait la peine d’être lu et Ron Rash a eu bien raison de nous l’offrir !

Percutante, comme toujours, la Serena. Diabolique, comme toujours. J’ai aimé les petits textes, entre deux chapitres, où l’auteur parle des animaux qui ont quitté la forêt, dévastée par les bûcherons, aux ordres de Serena, coupant tout sur leur passage, ne laissant que des souches, des morts, des blessés et des ouvriers épuisés… Violent.

La nouvelle se déroulant avec des soldats Sudistes (Les Voisins), vivant de rapines, celle avec l’homme qui voulait être baptisé était magnifique aussi et terriblement violente (Le Baptême), notamment dans la personnalité du futur baptisé.

Sans oublier celle avec la flamboyante, mais froide, Serena (Plus bas dans la vallée) et celle avec gérant d’une aire d’autoroute qui aidera une paumée (Le Dernier pont brûlé). Ce sont mes quatre nouvelles préférées.

Toutes ont pour cadre la Caroline du Nord, et si elles n’ont pas toutes la même puissance dévastatrice, elles n’en restent pas moins de très bonnes nouvelles qui parlent de pêche, de nature, de solitude, d’alcoolisme, de rencontres improbables, de nature exploitée et de travailleurs aussi…

Ce recueil de nouvelles est noir, sombre, sans pour autant manquer de lumière, car toutes les nouvelles ne se terminent pas tragiquement, il y a encore de l’espoir dans certains êtres humains. Bon, pas dans tous… En tout cas, même en étant dans des nouvelles assez courtes, les personnages ne manquaient pas de consistance.

J’aimerais bien que Ron Rash nous donne encore de ses nouvelles, qu’il nous offre quelques pépites noires, où les âmes humaines se débattent, hésitent, ne savent pas quel chemin choisir.

Ron Rash a un art bien à lui pour nous conter la noirceur humaine, ses côtés obscurs, le tout dans une nature grandiose, malmenée par l’Homme, où les animaux ne savent pas se défendre, hormis les serpents venimeux.

Attention, ce ne sont pas toujours les serpents les plus dangereux… Si Serena vous propose un emploi, fuyez, pauvres fous, mais si elle vous tend ce recueil, achetez-le et lisez-le, nom de Dieu !

Publicité

Un Noël à New York – Petits crimes de noël 12 : Anne Perry

Titre : Un Noël à New York – Petits crimes de noël 12

Auteur : Anne Perry
Édition : 10/18 Grands détectives (2016)
Édition Originale : A New York Christmas (2014)
Traduction : Pascale Haas

Résumé :
Jemina Pitt, la fille du célèbre directeur de la Special Branch, a 23 ans durant l’hiver 1904. Elle décide d’accompagner sa jeune amie Delphinia Cardew à New York, sur le point de se marier avec l’aristocrate Brent Albright.

Dans la haute société new-yorkaise, ce mariage est une grande affaire qui liera deux familles prodigieusement riches. Mais Jemina détecte une ombre mystérieuse planant sur la célébration.

Maria, la mère de Delphinia, est absente de la fête et les Albright refusent de mentionner son nom. Et quand le frère du marié demande à Jemina de l’aider à retrouver Maria afin de prévenir un scandale, elle n’hésite pas à se lancer dans une enquête aussi inattendue que périlleuse.

De Hell’s Kitchen à Central Park, Jemina devra trouver son chemin à travers les rues enneigées de New York, sans se douter qu’un danger mortel la menace.

Critique :
Ne me demandez pas ce qui m’arrive, cette année, mais voilà que ce mois de décembre, j’ai eu l’envie soudaine de lire des récits se déroulant durant la période de Noël, moi qui préfère les lire en juillet/août.

Pour faire bonne figure, j’ai tout de même choisi un polar historique afin d’avoir un meurtre sous le sapin. Il n’est pas sous le sapin, mais dans un lit (rien de graveleux, hélas).

Dans ce polar de Noël, Jemina Pitt, la fille de Thomas et Charlotte Pitt, accompagne son amie Delphinia Cardew à New-York, où celle-ci va épouser le fils de l’associé de son père, un mec pété de thunes (toute comme elle). Delphinia est totalement in love de son Brent Albright.

Le mystère est que la mère de Delphinia a abandonné sa fille lorsque cette dernière était tout bébé et que le frangin du futur marié a peur que la mère, qui a eu un comportement scandaleux, ne vienne foutre le bronx le jour du mariage. Le Bronx, à New-York, c’est normal (jeu de mot foireux après Noël).

J’avoue que Anne Perry m’a habitué à mieux, beaucoup mieux, dans sa saga avec Thomas Pitt, notamment en nous parlant, mieux que personne, du Londres victorien et nous décrivant avec précision l’Angleterre de cette époque, avec les différentes classes sociales, les petits doigts en l’air pour boire les cup of tea, tandis que dans les taudis, la misère grouille comme les rats (Hidalgo est innocente)…

Il est difficile d’entrer dans des détails historique avec un roman de 156 pages et c’est tout le problème de ce petit polar historique : il se lit trop vite et ne va pas au fond des choses, donnant l’impression qu’un nombre précis de pages ne devait pas être dépassé et que, quoiqu’il en coûte, il fallait le clore en vitesse.

Allez hop, il faut donc sauter des étapes importantes, notamment l’arrestation de la personne coupable ! Ah oui, mais non, c’est super important, ça, l’arrestation ! Déjà que Jemina et le policier n’ont que peu d’éléments à charge, ni aucune preuve tangible. La personne coupable aurait pu ricaner et dire « Prouvez-le » et là, c’est Tintin (et Milou avec) ! On a de fortes présomptions, la logique parle (même moi j’avais trouvé qui c’était dès la découverte du cadavre), oui, mais pas de preuve directe.

Mais puisque l’on arrête la personne coupable, je suppose que cette dernière a avoué, ce qui est difficilement compatible avec son caractère froid et calculateur. Mais je m’égare…

De plus, si dans la version londonienne, l’autrice prend toujours le temps de donner à la ville une place importante, ici, New-York faisait de la figuration et n’a pas obtenu la place qu’elle méritait. La visite de quelques quartiers emblématiques est rapide et on lui signale qu’on n’ira pas à Hell’s Kitchen, car trop dangereux.

Malgré ces gros bémols et ce final qui m’a semblé se dérouler en accéléré à l’aide de quelques phrases explicatives, le reste du roman n’est pas si mal que ça : il est plaisant à lire un jour de réveillon de Noël, reposant et on le dévore assez vite afin d’apprendre le secret caché et honteux de la maman indigne de Delphinia. Effectivement, pour l’époque, c’était scandaleux au possible.

Ce ne sera pas le polar de l’année, ni même celui du mois de décembre et ma préférence restera pour la saga de Thomas Pitt.

Avec une centaine de pages de plus, l’autrice aurait pu développer mieux son intrigue, la recherche d’indices et l’arrestation de la personne coupable, dont j’aurais aimé que l’on nous décrive son visage, ses dénégations, la réaction des autres personnages… Ce qui fait le sel d’un polar !

Si j’ai été contente de passer du temps avec Jemina Pitt, que j’ai connue dans le ventre de sa maman et que j’ai vu grandir, j’ai trouvé le reste du roman assez mièvre, notamment avec un gros cliché final. Le fait de ne pas suivre l’arrestation de la personne coupable est une aberration dans un polar et le résumer en quelques lignes insipides est une hérésie.

Une lecture pour se détendre l’esprit avant un réveillon de Noël, pour se détendre après les fêtes de Noël, pour lire sur la plage, sans se prendre la tête.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°106].