Kukulkan – Le secret du cénote oublié : Grégory Cattaneo

Titre : Kukulkan – Le secret du cénote oublié 🇲🇽

Auteur : Grégory Cattaneo
Édition : Ex Aequo Rouge (30/01/2022)

Résumé :
XIe siècle. Atlantique Nord. En découvrant un poste avancé vidé de tous ses occupants, les Vikings décident d’abandonner leur colonie du Vínland. Des trois navires survivants, celui conduit par Björn et Ari refuse de retourner au Groenland et prend une tout autre route qui le fait dériver vers le sud…

De nos jours. La journaliste Calypso est envoyée au Mexique (🇲🇽) pour enquêter sur la Santa Muerte, un culte macabre dont plusieurs cartels se réclament. Elle rencontre par hasard un professeur spécialiste des Vikings qui disparaît mystérieusement…

Au cours d’une plongée en caverne, Ludo, guide et plongeur, découvre un cadavre décapité dans un cénote… Pour l’inspecteur Gómez de la police fédérale, cela ne fait aucun doute : le meurtre est signé par les cartels dont les règlements de comptes entachent la vie idyllique de la Riviera Maya.

Ces personnages, que rien ne destinait à se rencontrer, vont à leur façon s’engager dans une enquête qui les conduira dans la jungle du Yucatán, sur la piste de la légende de Kukulkan, dont le secret millénaire changera l’histoire du Mexique.

Critique :
Comme à mon habitude, je préfère lire un roman se déroulant au Mexique que d’y aller : c’est moins coûteux et moins dangereux.

Oui, dans ce roman, vous n’avez pas envie de croiser des flics mexicains qui se sont déjà rendus coupables d’agressions, d’extorsions, de vols, envers les touristes ou la populace.

Par contre, au fond de son divan, il est agréable de lire ce roman qui nous entraîne dans les cénotes (moi qui rêve de plonger, mais qui ai trop peur de le faire), dans l’Histoire avec le Vinland et dans des aventures un peu folles, pas à la Indiana Jones, mais dans cet état d’esprit.

Le premier chapitre est intrigant, car il nous emmène dans le passé, à bord d’un navire viking, voyageant vers le Vinland (coucou, Thorfinn) avant de poursuivre leur route plus bas… Mais jusqu’où ?

Dans ce roman, le rythme n’est pas trépidant, mais il est difficile de s’ennuyer, notamment en raison des arcs narratifs, consacrés aux différents personnages et à leurs actions.

Si au départ, tout le monde est séparé, ensuite, plusieurs personnages s’associeront (une journaliste, deux plongeurs, un assistant de prof à UCLA) afin de résoudre les meurtres horribles qui sont arrivés (cadavre décapité retrouvé dans un cénote).

Aidés de l’inspecteur Gómez et d’une légiste, tout ce petit monde va faire fonctionner ses petites cellules grises. Bon, dans la réalité, cela irait tout autrement, mais nous sommes dans la fiction, alors, tout le monde peut collaborer en bonne entente.

Quant aux lecteurs, ils auront du mal à démêler le vrai du faux, notamment ce qui concerne les légendes. Et j’ai été surprise en lisant, en fin de roman, ce qui était vrai et inventé. Par contre, peu de surprises pour les méchants de l’histoire, ils étaient prévisibles et aussi voyant qu’une grosse verrue sur le nez d’une top-model…

Malgré tout, je me suis laissée emporter par le tourbillon de l’histoire, de l’enquête, des mystères, des cadavres décapités, des légendes, des récits de viking, des plongées dans les cénotes (ça donne envie !), des messages cachés, des exécutions sanglantes et rendons à l’auteur ce qui est à lui : ses personnages sont sympas et attachants (sauf les méchants, bien entendu).

Non, ce n’est pas le thriller de l’année, il n’a rien d’exceptionnel, si ce n’est qu’il fait bien le job de vous divertir, de vous entraîner dans une folle aventure, de vous instruire (déjà pas mal, ça !), de vous faire voyager comme si vous y étiez, de vous faire vibrer avec les flash-back consacrés aux vikings et de n’être jamais ennuyeux.

C’est déjà pas si mal que ça ! Une lecture agréable, une grande aventure et une évasion, au fond de mon canapé.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°200] et Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°44].

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Diadorim : João Guimarães Rosa

Titre : Diadorim

Auteur : João Guimarães Rosa 🇧🇷
Édition : 10/18 Domaine étranger (1997) / LP (2007)
Édition Originale : Grande Sertão : veredas (1956)
Traduction : Maryvonne Lapouge-Pettorelli

Résumé :
À travers amours et guerres, envoûté par l’énigmatique Diadorim, évoquant toutes les aventures qui firent de lui un preux jagunço, un gardien de troupeaux, Riobaldo raconte les journées encore brûlantes passées de bataille en bataille, les longues chevauchées à méditer sur la vie et la mort, dans le décor aride du sertão, lieu de l’épreuve, de la révélation et de la confrontation à l’infini.

Unique roman et chef-d’œuvre du plus grand écrivain brésilien du XXe siècle, Diadorim apparaît d’ores et déjà, au même titre que Don Quichotte, La Chanson de Roland ou Faust pour la tradition européenne, comme une œuvre mythique de dimension universelle.

« Un véritable tour de force sur le plan de la langue. Une des œuvres formellement les plus abouties du siècle. » Mario Vargas Llosa

« Une œuvre d’une dimension rare en littérature… L’un des plus grands livres qu’on ait jamais écrits. Brutal, tendre, cordial, sauvage, vaste comme le Brésil lui-même. » Jorge Amado

Critique :
Lorsque je furète en bouquinerie, je ne fais pas que chercher les romans se trouvant sur ma wish, je suis attentive aux autres et lorsque je tombe sur des auteurs dont le nom semble être hispanique, je lis le 4ème afin de voir s’il pourrait participer au Mois Espagnol et Sud-Américain. Bingo avec celui-ci !

Un roman culte, qu’ils disaient… L’un des plus grands livres qu’on ait jamais écrits. Diantre, fallait plus en jeter, j’étais déjà conquise à l’avance !

Mon édition 10/18 fait 630 pages et le style de l’auteur m’a déconcerté dès le départ : pas de chapitrage, des dialogues peu nombreux et inclus dans le texte. Heureusement qu’il y avait des paragraphes, sinon, j’aurais sauté des lignes sans même m’en rendre compte.

Je ne peux pas dire que j’ai détesté ce roman, ni que l’écriture était merdique. Que du contraire, le style est riche, très riche, trop riche, peut-être, car on passe d’une langue vulgaire à une poétique (ou l’inverse), c’est bourré de néologismes, ardu, obscur et on a de temps temps l’impression que notre narrateur ne parle pas bien le Brésil.

Anybref, le narrateur est un grand bavard et qu’il a tendance à raconter trop, dans un récit monolithique, ce qui m’a lassé, avant que je n’arrive à la moitié du récit.

De quoi ça cause, ce roman ? C’est l’histoire de Riobaldo et de sa bande armée, des jagunços, qui sont des brigands à la solde des grands propriétaires terriens (les fazendeiros), des gardes du corps, généralement embauchés par les propriétaires de plantations et les « colonels » dans les arrière-pays du Brésil.

Dans cette partie de l’arrière-pays (le sertão), une région semi-aride, on pratique l’élevage et ce sont des zones de non-droit où tous les sales coups sont permis.

Ces brigands sont souvent associés à des politiciens véreux (pléonasme) ou sont libres de toutes attaches. Ils pratiquent le racket, bref, ils sont un peu des mafiosi qui vous demande de les payer pour assurer votre protection.

Notre Riobaldo, ce guérilleros au service de riches propriétaires terriens, bossant aussi parfois pour des politiciens, des hommes de guerre, vivant comme un hors-la-loi, nous raconte donc tout et son histoire est un mélange d’histoire de guerre, d’aventures, d’amour, de western. C’est aussi un récit halluciné, comme sous emprise de drogues.

Ce roman n’est pas facile à lire, il est touffu, part dans tous les sens, est inclassable, si ce n’est avec les romans qui divisent les lecteurs : ceux qui ont réussi à le lire et ceux qui se sont paumés dedans. Je me suis paumée, même si je me suis accrochée et finalement, j’ai sauté des paragraphes après avoir peiné dans la première moitié.

Bon, ce texte n’était pas pour moi, trop ardu, trop dense, trop lyrique… Les aventures de Riobaldo et de ses guérilleros étaient semées d’embûches, comme le fut ma lecture, chaotique, de ce pavé qui est devenu indigeste.

Si vous êtes tenté de vous attaquer à ce monument de la littérature, allez-y lentement, picorer un peu tous les jours, faites durer le plaisir, sinon, la nausée arrivera vite et vous serez incapable de terminer ce roman (pourtant, la fin est belle et recèle une belle surprise).

Bon, j’ai tenté le coup, j’ai raté… Pas grave !

Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°36].

Les Mahuzier chez les indiens Guaraos : Philippe Mahuzier

Titre : Les Mahuzier chez les indiens Guaraos 🇻🇪

Auteur : Philippe Mahuzier
Édition : G.P. Rouge et Or Dauphiné (1966)

Résumé :
C’est le Venezuela (🇻🇪), plus exactement le delta de l’Orénoque, qu’Albert Mahuzier s’est fixé comme but d’une prochaine expédition.

Mais la « tribu » Mahuzier a grandi – les deux aînés se sont mariés et totalisent déjà cinq enfants – de sorte que le cinéaste a jugé prudent de partir en avant-garde pour préparer le séjour familial.

Aussi, l’année suivante, en débarquant de l’île de la Trinité, ont-ils la surprise de s’installer dans une véritable maison guarao, bâtie sur pilotis, où ils vont vivre, durant quelques mois, des heures fertiles en surprises et émotions diverses.

Ils trouvent un concours précieux en la personne du Français Agosto, ancien forçat évadé devenu presque Indien, qui les aide à entrer dans l’amitié des indigènes et à découvrir les beautés d’une nature splendide et redoutable. Le retour de la « tribu » en pays civilisé sera assuré… par des contrebandiers !

Critique :
Petit retour en arrière, petite régression, avec de la littérature jeunesse de chez G.P : toute mon enfance, même si j’ai lu plus de livres jeunesses de la Bibliothèque Verte et Rose.

Je ne vais pas vous mentir, ça a vieilli… Publié en 1966, pour une jeunesse de l’époque, qui ne voyageait pas (ou peu) et qui n’avait pas Internet.

Alors oui, le style, la manière de décrire le voyage et les aventures que la famille Mahuzier va vivre dans la tribu des guaraos, un peuple pacifique qui vit dans le delta de l’Orénoque.

Ce qui est plus intéressant, c’est que ceci n’est pas un roman, une fiction, mais le récit d’un voyage réellement effectué par la famille Mahuzier, afin d’aller photographier, filmer, étudier, cette tribu au sein de laquelle vit Agosto, un évadé du bagne de Cayenne.

Alors, si le style est vieillot, on le met vite de côté pour se concentrer sur ce voyage un peu fou, dont une partie de fera à bord de canot gonflable pour rejoindre le village de cette tribu isolée. Cette partie prendra presque la moitié du récit (90 pages sur 187).

C’est tout de même intéressant de s’immiscer dans la vie d’une tribu qui vit aux antipodes des français moyens, même en 1966 (ou plus tôt, le roman ayant été publié après le voyage). Ils vivent dans la simplicité, dans des maisons qui ne tiennent pas plus de 5 ans (ensuite, faut les refaire), se moquant de la propriété, vivant de chasse et pêche, ou de confection de hamacs, pour certaines femmes.

Mon autre bémol sera pour les personnages : les parents Mahuzier s’embarquent dans l’aventure avec un bon nombre de leurs enfants (ils en ont 9, mais tous ne sont pas partis), mais on n’aura jamais l’occasion de mieux les connaître, tant leur rôle, dans ce récit, semble ténu.

En fait, personne n’est vraiment mis en avant, hormis le père, Philippe Mahuzier, qui est un homme assez confiant dans la vie. Tout va s’arranger, pas de panique. Hélas, même lui semble effacé dans le récit. Sans doute voulait-il mettre en avant l’aventure avec un grand A, le voyage, les guaraos, Agosto, les pères capucins et la faune.

Attention, dans ce livre, on tue des animaux, on pêche des poissons, des crabes et on tue des papillons pour les conserver et les étudier en France…

Une petite aventure agréable, sans se prendre la tête, dans un style un peu passé, fait pour la jeunesse des années 60, mais ce petit roman venait à point après un roman très sombre et ultra violent.

PS : un article sur le voyage d’un des fils Mahuzier, là-bas, précisément.

Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°XX].

Voyage à motocyclette : Ernesto Che Guevara

Titre : Voyage à motocyclette

Auteur : Ernesto Che Guevara
Édition : Au diable Vauvert – Les poches du diable (2021)
Édition Originale : Diarios de motocicleta (1993)
Traduction : Martine Thomas

Résumé :
En 1951, à bientôt vingt-quatre ans, Ernesto Guevara, alors jeune étudiant en médecine et fils de bonne famille désireux de découvrir le monde, grimpe à l’arrière de la Norton 500 de son ami Alberto Granado pour une traversée de l’Amérique latine qui deviendra un véritable voyage initiatique, embarquant le lecteur dans la variété des paysages, architectures et populations du pays.

Mais face à la misère omniprésente, ce voyage est aussi celui d’une prise de conscience politique, d’un sentiment de révolte qui se convertit en nécessité révolutionnaire.

La naissance de celui qui deviendra bientôt le commandante Che Guevara.

Critique :
« En 1951, durant ses études de médecine, Ernesto Rafael Guevara entreprend avec Alberto Granado un premier voyage à moto en Amérique latine. Il en effectuera un deuxième en 1953.

Avec cette première expédition, le Che est au contact quotidien de la pauvreté. Ce terrible constat a fait naître en lui le sentiment que seule une révolution pourrait permettre d’abolir les inégalités ». Voilà ce qu’il en est dit de ces carnets de voyage de Guevara…

Partis de San Francisco, en Argentine, sur une Norton 500, Ernesto Rafael Guevara part avec son ami Granado pour un périple à la Easy Rider. Sauf que la moto rendra l’âme en court de route et qu’ils continueront à pied… Leur but était d’atteindre l’Amérique du Nord, alors, ils continueront à pied, à cheval, peu importe le moyen de transport.

Normal de casser, lorsque l’on voyage sur une moto surchargée, où trop de choses tiennent grâce à des bouts de fil de fer… Au début, sur des routes encaissées, ils se taperont le cul sur la selle, auront des crevaisons de pneus, des casses, des pannes mécaniques… Mais ne dit-on pas que le plus important, dans un voyage, c’est le voyage lui-même ?

Argentine, Pérou, Chili, Colombie, Vénézuela, ça fait un sacré périple, des aventures à foisons et des rencontres de population. Bref, ça fait une lecture où il aurait été difficile de s’ennuyer et pourtant, c’est ce qui m’est arrivé !

J’ai sans doute dû descendre à la première crevaison, sans m’en rendre compte et les deux hommes sont parti sans moi. Durant tout le récit, j’ai passé mon temps à errer, sans jamais reprendre pied tout à fait dans leur voyage. Les seuls moments où je suis revenue dans le récit, c’est lorsque que Guevara a parlé de misère humaine, des vestiges Incas…

Là c’était intéressant, instructif et une fois ces passages terminés, je reprenais ma sieste. Le voyage de nos deux hommes a été plus long que prévu et il est à l’image de ma lecture : chaotique, long, pénible. Ils ont eux faim et moi j’avais faim d’un autre livre, de passer à autre chose.

Bref, ce livre, qui avait été recommandé par un (une) libraire sur l’émission « La grande librairie » n’a pas eu le même impact sur moi, puisque je suis passé à côté et que la lecture a été foirée sur toute la ligne, quasi.

Mais au moins, maintenant, je sais pourquoi on a surnommé Guevara « Che » ! En fait, « Che » est une sorte de tic de langage des Argentins, qui veut dire « Tiens » ou « hé ». S’il était de notre époque et jeune en pays francophone, on l’aurait surnommé « quoi » ou « du coup »…

Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°26].

Toute la poussière du chemin : Wander Antunes et Jaime Martin

Titre : Toute la poussière du chemin

Scénariste : Wander Antunes 🇧🇷
Dessinateur : Jaime Martin 🇪🇸

Édition : Dupuis Aire libre (2010)

Résumé :
Bien loin du rêve américain, Wander Antunes et Jaime Martin nous entraînent sur les routes poussiéreuses du sud des États-Unis, à la suite de milliers d’hommes chassés de chez eux par la crise de 1929.

L’un d’entre eux, Tom, fuit l’ombre d’un passé que l’on devine douloureux. Misanthrope muré dans le silence et la solitude, il va pourtant accepter de partir à la recherche d’un enfant disparu.

Le visage de l’Amérique qu’il va rencontrer, au gré de ses pérégrinations, va être celui de la violence, du racisme et de l’injustice, exacerbés par la crise que traverse le pays.

Un récit âpre, qui raconte la quête d’un homme seul face à l’iniquité des représentants de l’ordre et à la brutalité d’hommes sans foi ni loi, dont la force évocatrice n’est pas sans rappeler les écrits réalistes et politiques de Georges Orwell.

Critique :
La crise économique de 1929 a jeté des gens sur les routes, sans oublier le Dust Bowl. Les banques ont tout pris aux fermiers, aux pauvres gens et ensuite, elles ont fait faillite (les hauts placés sont sans doute foutu le camp avec le fric des autres).

Tom fait partie de ces hobboes qui voyagent en train, dans cette Amérique exsangue, dans ce Sud ségrégationniste, raciste, méchant, violent, meurtrier, où les gens n’ont que les mots « nègres » et « lynchage » à la bouche.

Le road-trip de Tom n’est pas de tout repos. Lorsqu’un pays est en crise, la solidarité fout souvent le camp la première et on a l’impression que le cerveau reptilien est seul aux commandes, tant les gens deviennent agressifs, violents, avec des tendance meurtrière. C’est le replis sur soi. L’ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine et la haine à la violence.

J’ai apprécié les dessins dans des tons lavés, jaunâtre, ces visages pas toujours détaillé. Bizarrement, ça a passé comme une lettre à la poste. Idem avec le scénario, qui est simple, mais très fort, très profond.

Si le récit semble saccadé, il se lit pourtant très facilement et trouve son rythme assez vite, nous emportant dans cette Amérique de 1929 où l’on voyage en schmet dans les wagons de trains de marchandises.

Tom est un personnage tourmenté, mais attachant, on apprendra plus tard ce qui le tourmente ainsi. Au moins, lui, ne perd pas son humanité, alors qu’il était si facile de la paumer sur les chemins poussiéreux et semés d’embûches (et des types armés), de devenir égoïste et de bouffer les autres pour ne pas être bouffé aussi.

Une bédé forte, âpre, qui ne fait pas dans le sentimentalisme, même si elle laisse la porte entrouverte pour apporter un peu de lumière dans ce monde sombre, rempli de brutes armées de gourdins, de flingues et qui n’hésite pas à tirer sur tout ce qui n’appartient pas à leur ville, village… Les flics n’étant pas mieux.

Ce petit côté manichéen ne m’a pas empêché de savourer cette bédé, car tout le monde n’était pas mauvais dans l’affaire et la solidarité, même en voie de disparition, se débattait encore pour exister.

Une bédé à découvrir, assurément !

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°187] et Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°13].

HMS Beagle, Aux origines de Darwin : Fabien Grolleau et Jérémie Royer

Titre : HMS Beagle, Aux origines de Darwin

Scénariste : Fabien Grolleau
Dessinateur : Jérémie Royer

Édition : Dargaud (31/08/2018)

Résumé :
Londres, 1831. Le jeune Charles Darwin, impatient d’embarquer pour le périple de sa vie, prend place sur le HMS Beagle. Le voyage vers des contrées lointaines pleines de promesses sera aussi fait de multiples épreuves.

Tandis que ses découvertes sur la faune et la flore le comblent d’admiration et de confusion, la fréquentation d’esclavagistes va le pousser à questionner les principes humanistes de ses contemporains.

Un voyage formateur pour l’homme et révolutionnaire pour la science.

Critique :
De Darwin, je connaissais peu de choses, si ce n’est sa théorie de l’évolution, qui a fait couler beaucoup d’encre (hérésie ! blasphème) et qui en fait encore couler de nos jours.

Ce que je ne savais pas, c’est qu’il avait fait un périple en Amérique du Sud, et ça, c’était parfait pour le Mois Espagnol et Sud Américain…

Partant de Plymouth et faisant une escale à Cape Verde, le HMS Beagle (qui va faire souvent vomir Darwin), va accomplir un périple de 5 années et ce que Darwin découvrira comme espèces et plantes, seront primordiales pour sa théorie de l’évolution.

De ses recherches et ses accumulations d’insectes et d’espèces animales, il va mettre au point ses théories.

Cette bédé, aux dessins spéciaux qui ne m’ont pas rebutés (ils lui allaient bien, je trouve), est un récit succinct du voyage de Darwin, malgré tout, je pense que le plus important s’y trouve. Les éléments clés, je veux dire.

Charles Darwin est un homme spécial, en cela qu’il est avide de découverte, mais surtout, qu’il était pour l’égalité des Hommes, ce qui, à cette époque, était plus que révolutionnaire !

Malgré tout, en découvrant le peuple habitant la Terre de Feu, il les trouvera sauvages et non civilisés… Je ne lui en voudrai pas, nous penserions sans doute la même chose, malgré notre plus grande ouverture d’esprit.

Une bande dessinée des plus intéressantes, un scénario qui entraîne les lecteurs (et lectrices) dans un voyage fabuleux, où Darwin va émettre des théories blasphématoires, comme le fait que la Terre ait bien plus que les 6.000 années qu’on lui donnait (bible).

Un scénario qui ne devient jamais indigeste, car les auteurs ont été assez intelligents que pour aller à l’essentiel. Un récit qui fait que l’on va se coucher moins bête, après avoir dévoré, d’une traite, cette bédé de 176 pages.

Encore une preuve que les bédés ne sont pas constituées QUE des p’tits Mickeys, ni QUE pour les enfants… Ceci est une bédé adulte, mais qu’un enfant de 10 ans pourrait lire sans problème.

Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°10].

Les ombres de la Sierra Madre – Tome 3 – El Dedo de Dios : Philippe Nihoul et Daniel Brecht

Titre : Les ombres de la Sierra Madre – Tome 3 – El Dedo de Dios

Scénariste : Philippe Nihoul
Dessinateur : Daniel Brecht

Édition : BD must (20/10/2020)

Résumé :
Mexique, années 1920, 40 ans après la reddition de Geronimo, alors qu’Hollywood tournait ses premiers films parlants, les Apaches poursuivaient une guerre perdue pour défendre un mode de vie condamné à disparaître…

Âpre, violente, désabusée et teintée d’humour noir, Les Ombres de la Sierra Madre renouvelle le genre.

Western atypique, par son ton, son rythme et sa chronologie, c’est aussi une tragédie en 3 actes, inspirée d’évènements authentiques et méconnus.

Critique :
En Afrique, les chasseurs yankees chassaient les lions, en Inde, ils flinguaient des tigres et dans la sierra du Mexique, ils vont pouvoir chasser l’Homme, même si pour eux, les Apaches n’en sont pas.

Gaffe quand même, contrairement aux fauves, les Apache sont armés et peuvent riposter. Et puis, la Sierra Madre, ce n’est pas l’Afrique…

Gaffe aussi que les mexicains n’apprécient pas trop que des yankis excités de la gâchette et armés jusqu’aux dents, franchissent leur frontière.

Suite du deuxième tome, nous retrouvons nos personnages cherchant à retrouver le petit James. Moroni est prêt à tout, même à déclencher une seconde guerre mondiale, afin de retrouver son fils (nous sommes en 1927).

Sa troupe de chasseurs regroupant des pros de la chasse aux fauves en Afrique, en Inde, ainsi qu’un ancien acteur de cinéma muet, a tout d’une bande de guignols incapables de comprendre que le terrain n’est pas celui de l’Afrique et que les Apaches ne sont pas des animaux, mais des guerriers féroces, sachant combattre, se cacher, feinter…

Moroni a bien changé, au fil des albums, et pas dans le bon sens. Merejildo est un salaud, mais au moins, il reste constant, là où Moroni rend responsable la petite Bui de la perte de son fils, lui rappelant que ses origines sont Apache, alors qu’elle n’est en rien responsable de ce qui leur est arrivé.

Une fois de plus, c’est un album violent, sans concessions et au final glaçant, alors qu’on aurait pu avoir quelque chose de plus doux… Ou du moins, pas aussi terrible.

J’avais aimé le premier album, le deuxième aussi, mais ce troisième, là, il m’a foutu en l’air avec son final meurtrier.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°185] et Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°06].

Le Trésor des Aztèques : Evelyne Brisou-Pellen

Titre : Le Trésor des Aztèques

Auteur : Evelyne Brisou-Pellen
Édition : Flammarion – Castor poche (2007)

Résumé :
Dans la belle ville de Mexico, Citlal, le jeune Aztèque se rend chaque jour au palais de l’empereur pour s’occuper des serpents dont il a la charge. C’est là, qu’un matin, il fait la connaissance de Mia, une jeune Mixtèque.

Mais les Espagnols convoitent le fabuleux trésor des Aztèques sur lequel veille l’empereur. La cité est en danger. Citlal et Mia se retrouvent au coeur des combats…

Critique :
Un peu de littérature jeunesse pour changer et direction l’empire Aztèque !

Cortés a déjà mis les pieds sur le continent et foutu le bordel. Il convoite l’or, comme tout le monde.

C’est une jeune garçon qui va tenter de les en empêcher, en faisant preuve de courage.

Dans ce court récit, nous apprendrons quelques coutumes des Aztèques, mais très peu… L’autrice est restée sobre, ne parlant que peu des sacrifices humains, sans doute pour ne pas choquer le jeune lectorat.

Ce roman se lit très vite, une fois entamé, on a envie de savoir ce qu’il va se passer et, sans pour autant posséder un suspense de malade, on s’accroche au récit. Les combats sont détaillés, sans être trop détaillés, jeunesse oblige.

Un récit qui ne restera pas dans ma mémoire, de la littérature jeunesse qui se laisse lire, facilement et qui venait à point pour débuter tranquillement le Mois Espagnol et Sud Américain.

Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°05].

Les âmes torrentielles : Agathe Portail

Titre : Les âmes torrentielles

Auteur : Agathe Portail
Édition : Actes Sud (05/04/2023)

Résumé :
Patagonie (🇦🇷), avril 2015. Alma, jeune employée tehuelche d’une grande exploitation agricole, a pour mission d’assurer le transfert d’un troupeau de chevaux, en compagnie du gaucho qui les vend.

Chevauchant leurs montures dans les contrées patagoniennes, ces deux solitudes vont apprendre à se connaître, à braver les difficultés et leur passé qui les rattrape sans crier gare. Sans compter qu’un barrage, tout proche, est sur le point de céder…

Un périple tout en tension en Amérique du Sud.

Critique :
Un vieux rêve vient de se réaliser : me voici convoyeuse de chevaux, en Patagonie. Je serre les fesses, parce que l’on ne chevauchera pas sur des beaux chemins comme dans nos régions…

Patagonie, avril 2015. On fait la connaissance du gaucho Danilo, un des derniers habitants d’une vallée qui sera entièrement submergée de flotte, pour le barrage que l’on vient de construire.

Danilo partira le dernier, avec les quelques chevaux qui lui restent et qu’il vient de vendre à une estancia (exploitation agricole). Il n’a pas résisté face à la toute puissance des sociétés qui construisent des barrages. David ne peut pas gagner contre Goliath.

Alma, une jeune femme taciturne, d’origine tehuelche (une native), va l’aider dans cette transhumance. Elle est secrète et les chapitres s’alterneront avec son passé, le présent de la transhumance et la vie de ceux qui sont au barrage pour contrôler son remplissage.

Dans ce roman, j’ai ressenti les bienfaits des feux de camp, les douleurs des chevauchées, le plaisir de descendre de sa selle, au soir. Ne manquait plus que les odeurs, mais je n’ai pas dû faire beaucoup d’efforts pour me souvenir de celle d’un feu et de celles des corps, après une longue chevauchée (oui, on pue, mais comme toute la troupe pue, tout le monde s’en moque).

Ce récit, ce n’est pas qu’une transhumance, c’est aussi toute la souffrance humaine. Celle des natifs, Mapuches ou Tehuelches, qui ont vu leur culture, leur langue, se faire bouffer toute crue par les chrétiens débarqués sur le continent.

C’est aussi celle des propriétaires, qui, après plusieurs générations passées sur leurs terres, se voient relégués, destitués de leurs propriétés, eux qui se croyaient plus à l’abri, parce qu’ils vivaient loin de la civilisation, dans la raie du trou du cul de l’Argentine. « Circulez, la loi du plus fort prévôt, la civilisation arrive, avec ses routes et tout le tralala. Allez voir ailleurs si nous y sommes »… On connaît le message.

Que pèse un gaucho face au besoin de confort, de lumière, de chaleur, de loisirs de trois cent cinquante mille Argentins ? Il faut bien que les électeurs en aient pour leur bulletin.

Dans ce roman, il y a des véritables morceau de souffrance, sans que l’autrice soit obligée d’en faire des tonnes, sans pathos, pas pour faire pleurer dans les masures, juste pour expliquer, montrer comment le monde tourne, partout, tout le temps : le plus fort dévore le plus petit, les plus faibles, les moins riches, les moins pistonnés…

Ce roman de 200 pages, qui est ramassé sur cinq jours, est copieux, sans jamais virer à l’indigestion. L’amertume est bien présente, l’acidité aussi, mais il y aussi un peu de sucrosité, en fin de bouche, sans que l’équilibre ne soit rompu. Oui, j’ai un peu trop regardé Top Chef…

Des portraits réalistes, des personnages auxquels on s’attache, possédant de la noirceur humaine, de la haine, de la rage, l’envie d’en découdre, ou tout simplement une lassitude de la vie, des interrogations, des regrets, de la peine… Oui, on s’attache vite à la jeune Alma et à Danilo le gaucho…

Un beau roman, assurément !

La nausée la prit par surprise. Elle était habituée au discours officiel, elle avait conscience du fait que la classe moyenne avait été éduquée à penser qu’il ne restait en Argentine pas de population significative de “natifs”. Mais l’entendre de la bouche du patron, de ce type correct qui avait peut-être perçu son état de délabrement intérieur, ça lui causait une douleur fulgurante. Elle le laissa parler de sa glorieuse ascendance. Comme si les premiers pionniers germaniques n’avaient pas, comme tous les autres, mélangé leur illustre patrimoine génétique avec celui des Mapuches, peuple Aonek, Kawésqar, Selk’nam, Chonos, peuples des forêts et des lacs. Quatre-vingts pour cent de la population patagonne avait des origines natives. Il fallait bien déverser quelque part la précieuse semence européenne en attendant de faire venir les Augustine et les Konstanze.

Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°04].

Terres d’Ogon – Tome 2 – Blancs visages : Nicolas Jarry et Alex Sierra

Titre : Terres d’Ogon – Tome 2 – Blancs visages

Scénariste : Nicolas Jarry
Dessinateur : Alex Sierra 🇪🇸

Édition : Soleil (22/03/2023)

Résumé :
Pour sauver son frère, Itomë pactise avec un ancien esprit malfaisant. Bannie par les siens pour avoir bravé les lois sacrées de son clan, luttant contre l’esprit du sorcier qui cherche à s’emparer de son âme, elle entreprend une quête sans retour à travers les terres d’Ogon.

Mais Itomë l’a juré : quelles que soient les épreuves qui l’attendent elle ne laissera plus la peur guider ses choix.

Critique :
Les Terres d’Ogon appartiennent au prolifique monde d’Arran. Je dis prolifique parce que la saga comporte maintenant plus de 90 titres.

Si dans les terres d’Arran, nous avons des Elfes, des Nains, des Orcs, des Gobelins, des Mages, des Humains, dans l’autre terre, plus lointaine, on trouve d’autres créatures fantastiques, mais aussi des tribus qui font penser à celles de l’Afrique.

Dans ce deuxième tome de cette nouvelle saga, nous allons faire la connaissance de Itomë, une jeune fille de la tribu des Blancs-Visages, poursuivies par la tribu des Dents-Limées, qui veulent en faire leur quatre heures…

Il est dit que l’on mange à la table du diable, il faut une longue fourchette (ou une longue table, comme celle de Poutine) et notre jeune Itomë va le comprendre, après avoir pactisé avec un sorcier. Les vœux ont une contrepartie, nous ne sommes pas dans le joli conte de Disney avec un génie bleu et amusant.

Ce deuxième tome est différent du premier, notamment parce qu’il introduit des nouveaux personnages (comme pour la saga des Terres d’Arran), mais il reste excellent en termes de dessins et de scénario.

Une fois de plus, le scénariste va mettre son personnage principal face à un autre, qui lui est opposé, totalement (Djo-Djo est un Dents-Limés), et le duo va fonctionner à merveille, à coup de chamailleries, de piques, de ronchonnements… Ce sont les duos les plus opposés qui marchent toujours le mieux.

Comme pour le premier, le personnage principal, Itomë est jeune (une jeune fille, ici) et son voyage va être initiatique, lui servant à grandir, à comprendre, à devenir une autre personne, à se sevrer de ses parents, comme pour son acolyte, Djo-Djo.

J’ai souvent souri en les écoutant parler ensemble, Djo-Djo faisant le fanfaron, puisqu’il doit devenir un guerrier, tandis que Itomë lui répond qu’elle n’a pas besoin de lui. Dans les duos, l’un à besoin de l’autre, l’un n’est rien sans l’autre et une fois de plus, l’union fera la force !

Un super album, rempli d’aventures, de combats, de parcours initiatique, d’humour et d’amitié.

Nous sommes à plus de 90 tomes dans cette immense saga qu’est celle des Terres d’Arran (parfois nommée Le monde d’Aquilon) et si quelques albums, dans la masse, étaient moins bons que les autres, l’ensemble est tout de même d’excellente facture et jusqu’à présent, il m’a donné bien souvent des coups de coeur.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°183] et Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°01].