Titre : La frontière
Auteur : Patrick Bard
Édition : Points Thriller (2003)
Résumé :
Bienvenue à Ciudad Juàrez, frontière américano-mexicaine… du mauvais côté du Rio Grande, celui du Mexique. Bienvenue dans « la ville où même le diable a peur de vivre ».
Journaliste au grand quotidien espagnol El Diario, Toni Zambudio est envoyé à Juàrez par son rédacteur en chef pour enquêter sur une série de meurtres abominables : en moins de deux ans, les cadavres de cinquante trois jeune filles atrocement mutilées ont été retrouvés aux abords de la ville.
Crimes rituels commis par une secte satanique ? Œuvre d’un terrifiant serial killer ?
Toutes les questions restent en suspens dans cet univers d’extrême pauvreté où la mondialisation économique a apporté avec ses usines l’humiliation, le commerce de la chair, la violence et la mort.
Et ce que va découvrir Toni Zambudio est pire encore que le pire des cauchemars… Terriblement noir et violent, ce roman ne fait hélas que se baser sur des faits réels.
Critique :
Vous en avez marre du temps pourri du mois de mai, de cette pluie qui n’arrête pas de tomber (du moins, en Belgique), de ces températures trop basses pour mai ?
Vous rêvez de vacances, de soleil, de farniente ? Alors pourquoi ne pas prendre un billet pour le Mexique et la charmante ville de Ciudad Juàrez ? Si, si, elle est charmante et peuplée de Bisounours…
Bon, ce n’est pas ce roman noir qui me donnera envie d’aller passer des vacances au Mexique ! J’aurais mieux fait de lire un guide du routard, cela aurait été moins dangereux pour ma santé mentale.
Ciudad Juàrez « la ville où même le diable a peur de vivre »… La ville du crime n’a jamais aussi bien porté son nom puisque des jeunes femmes se sont assassiner, mutiler, dépecer, violer, profaner et vous compléterez la liste. Les cadavres des prostituées assassinées par jack The Ripper étaient en meilleur état… C’est vous dire.
Partant de faits divers réels, l’auteur en profite aussi pour nous parler des conditions de travail abominables et précaires qui sont celles des travailleuses à la frontera : salaires de misère, pas de sécurité, pas d’hygiène et l’obligation, tous les mois, de montrer son tampon usagé pour prouver qu’elles ne sont pas enceintes.
Bosser pour des multinationales, à bas prix, pour que les actionnaires et les hauts dirigeants s’en foutent plein les fouilles… Dans des usines qui se foutent bien de polluer à mort, de foutre en l’air les nappes phréatiques et où la corruption, la mordida, comme ils disent (pot-de-vin).
Comme prévient l’auteur, une centaine de jeunes femmes ont été retrouvées violées et mutilées ces dernières années à Juarez, et si l’on a bien arrêté et jugé quelques coupables ou prétendus tels, l’ensemble de l’affaire n’a jamais été élucidé.
Ce livre est donc plus qu’une fiction, c’est une œuvre de révolte qui dénonce, entre autres, la perversité d’un système où les grandes multinationales viennent chercher chez les plus pauvres la main-d’œuvre bon marché, corvéable et humiliable à merci.
On ose espérer que la réalité est un peu moins horrible, mais c’est malheureusement loin d’être une certitude. Lorsque l’on peut faire fabriquer des marchandises à bas prix et se faire une grosse marge bénéficiaire, certains n’hésitent pas et y vont à fond, se moquant de la misère humaine qu’ils créent et de la pollution qu’ils font.
Un roman noir ultra violent, réaliste, inspiré de faits divers vrais et qui vous plongera dans la noirceur humaine, sans vous laisser entrevoir une mini lumière au fond du tunnel. Ici, tout est sombre, sanglant, sans concession. Une lecture en mode « j’arrête de respirer ».
Ciudad Juàrez est la capitale mondiale du meurtre, pas celle des gentils Bisounours et elle a une réputation à tenir. Croyez-moi, elle le fait super bien et ce roman ultra noir ne vous donnera pas envie d’aller vous balader dans cette ville (ni même au Mexique).
Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°XXX] et Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°XX].