Les neuf cercles : R.J Ellory

Neuf Cercles - Ellory [NUM]Titre : Les neuf cercles [NUM]                                     big_5

Auteur : R.J Ellory
Édition : Sonatine (2014)

Résumé :
1974. De retour du Vietnam, John Gaines a accepté le poste de shérif de Whytesburg, Mississippi. Une petite ville tranquille jusqu’au jour où l’on découvre, enterré sur les berges de la rivière, le cadavre d’une adolescente.

La surprise est de taille : celle-ci n’est autre que Nancy Denton, une jeune fille mystérieusement disparue vingt ans plus tôt, dont le corps a été préservé par la boue.

L’autopsie révèle que son cœur a disparu, remplacé par un panier contenant la dépouille d’un serpent. Traumatisé par le Vietnam, cette guerre atroce dont « seuls les morts ont vu la fin », John doit à nouveau faire face à l’horreur.

Il va ainsi repartir au combat, un combat singulier, cette fois, tant il est vrai qu’un seul corps peut être plus perturbant encore que des centaines. Un combat mené pour une adolescente assassinée et une mère de famille déchirée, un combat contre les secrets et les vérités cachées de sa petite ville tranquille.

Si mener une enquête vingt ans après le crime semble une entreprise périlleuse, cela n’est rien à côté de ce qui attend John : une nouvelle traversée des neuf cercles de l’enfer.

Critique : 
Ellory a beau être anglais, il nous décrit l’Amérique comme un vrai yankee, à la différence qu’il a du recul pour analyser plus en profondeur sa face cachée, sa face sombre, celle qui est à mille lieues du clinquant ou des airs vertueux de ce pays qui veut jouer le gendarme du monde alors qu’il est un grand voleur…

Qu’elle soit nécessaire, ou même justifiée, ne croyez jamais que la guerre n’est pas un crime.

Le Vietnam… Une sacrée boucherie, un putain de merdier et monstrueuse erreur monumentale selon John Gaines, ancien combattant devenu le shérif de la petite ville tranquille qu’est Whytesburg, Mississippi. Un crime tous les ans et le coupable qui attend les flics tranquillement, des contraventions… Voilà son quotidien. Cool.

Une petite ville tranquille jusqu’au jour où l’on découvre, enterré sur les berges de la rivière, le cadavre d’une adolescente qui avait disparu 20 ans plus tôt.

Notre pauvre shérif va faire face à la plus terrible affaire de sa carrière, les morts tombant comme des mouches sous l’action combinée d’un « pchitt » de Baygon Vert et Bleu. C’est vous dire si le croque-mort va avoir du boulot.

Les années 70, dans les romans, j’adore parce que c’est une période sans nouvelles technologies, sans toutes les facilités que nous avons maintenant et cela rend les enquêtes plus « vraies ».

Si en plus on me parle des années 70 en Amérique, là, je kiffe à mort !

L’auteur a su trouver les mots justes pour nous parler de l’ambiance assez plombée de cette époque « post guerre du Vietnam », où les anciens combattants souffraient de ce mal non encore étiqueté qu’est le stress post-traumatique.

On perdait une partie de son humanité à la guerre, et on ne la récupérait jamais.

Cette époque où des mots tels que « respect », « tolérance » ou « égalité des hommes » étaient considérés comme des gros mots et où les membres du sinistre Klan, bien que ne se promenant plus avec des taies d’oreillers sur leurs tronches, étendait encore leurs ombres sur le territoire.

J’apprécie que l’on décortique ces années où la déségrégation, qui aurait dû commencer, n’avait pas eu lieu parce que les hommes Blancs étaient trop cons que pour se rendre compte que nous sommes tous les mêmes ou alors, ne voulaient pas voir la vérité car elle leur faisait peur.

La haine trouvait son fondement dans l’ignorance. Pourtant, la haine des autres était aussi une haine de soi, car au fond, nous étions tous les mêmes.

Ellory nous plonge en plein dans ces années que ce grand pays, sois-disant « démocratique », aimerait oublier.

À travers les souvenirs du Vietnam de Gaines, nous allons mener l’enquête avec lui, à son rythme, entrant dans les maisons et les vies de certains des habitants, traquant les indices quasi inexistants, remontant le fil des événements 20 ans plus tôt.

Bien qu’écrit à la troisième personne, on a l’impression que le narrateur, c’est Gaines, comme si c’était lui qui nous racontait l’histoire.

Les personnages sont forts, le shérif Gaines est un homme que l’on a envie d’aimer (en tant qu’ami), un homme qui m’a ému au travers d’un événement de son existence, un policier qui ne laisse pas tomber son affaire, même s’il n’est pas infaillible et commet des erreurs.

Un homme qui n’a pas peur de s’attaquer à un plus fort que lui.

La plume de Ellory fait mouche et dresse un portrait au vitriol de cette Amérique un peu profonde, où les grandes familles font la loi, où les hautes sphères sont corrompues, où il était si facile d’envoyer les gens en taule… Cette grande nation qui envoya ses jeunes se faire massacrer pour rien au Vietnam.

Se battre pour la paix, c’est comme baiser pour la virginité.

Ils disaient que la conscription, c’était des Blancs qui envoyaient des Noirs se battre contre des Jaunes pour protéger la terre qu’ils avaient volée à des Rouges.

Ce n’était pas la taille, ni l’influence, ni la richesse d’un pays qui permettaient de gagner une guerre dans la jungle. C’était la connaissance. La présence. La compréhension du territoire. Seuls les Vietnamiens possédaient tout ça : ils ne pouvaient donc pas perdre.

La guerre acceptait tout le monde. À la guerre, il n’y avait ni racisme, ni fanatisme, ni intolérance, ni division, ni distinction de race, de couleur, de croyance, de confession, de nationalité, d’âge ou de genre. La guerre pouvait consumer un Vietnamien de 5 ans qui n’avait rien vu de la vie aussi aisément et voracement qu’elle consumait un marine de 45 ans avec une soif insatiable de Viets morts.

La guerre purgeait les hommes de ce qu’ils avaient de meilleur. Elle les purgeait avec du feu, des balles, des lames, des bombes et du sang. Elle les purgeait avec du chagrin et de la douleur, et avec cette espèce d’incrédulité particulière et incommunicable qu’elle engendrait chez tous ceux qui assistaient à la cérémonie de la bataille.

L’ennemi des États-Unis n’avait pas de visage, pas d’uniforme, il connaissait le terrain, ses anomalies et ses particularités, et avait donc toujours l’avantage. Les États-Unis possédaient la puissance de feu, la couverture aérienne, de solides lignes d’approvisionnement, des ressources humaines presque inépuisables, mais ils ne possédaient pas d’ennemi visible. Ils combattaient des fantômes et des ombres. Ils combattaient un cauchemar.

Amis du trépidant, perdez pas votre temps dans ce roman, ici, tout n’est que lenteur calculée, profondeur délibérée, psychologie planifiée, indices proportionnés, récits de guerre calibrés, entremêlés dans une enquête bien ficelée, le tout servi par une plume acérée qui assènera quelques vérités que nous devrions nous méditer.

L’Amérique, la plus grande de toutes les puissances, s’était faite avoir et vaincre par une bande de collabos communistes en sandales. La fierté d’Eisenhower en avait pris un coup. Il avait vaincu l’Allemagne nazie, et, pourtant, il n’était pas foutu de s’emparer d’une bande de terre grande comme la moitié du Texas. Eisenhower était texan. Le Vietnam était un coin paumé au milieu de nulle part. Il était humilié.

Tout le monde savait que la fin était proche, mais la machine de guerre était trop bête et arrogante pour s’avouer vaincue.

Deux Ellory en peu de temps, deux orgasmes littéraires. Ce mec est fort !

Challenge « Thrillers et polars » de Liliba (2014-2015)et Le « Challenge US » (2014-2015) chez Noctembule.

CHALLENGE - Thrillers polars 2014-2015 (1) CHALLENGE - US

22 réflexions au sujet de « Les neuf cercles : R.J Ellory »

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  2. Ping : Bilan Livresque : Octobre 2014 | The Cannibal Lecteur

  3. Je vais me faire frapper par Yvan mais…bon…je n’accroche pas avec cet auteur 😉 Peut-être un jour…je retenterai l’expérience sous la menace des nombreuses fans!! hihihih

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    • tiens, bien fait, na ! 😛 Pour une fois, j’ai de l’avance sur toi et je me pose en maîtresse tentatrice. Chouette !

      Oui, les 4 étoiles 3/4 n’existant pas… je garde « mauvaise étoile » un lili cran au-dessus, mais ce « neuf cercles » a une profondeur qui m’a bien plu.

      ; enjoy !

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  4. j’ai failli passé à côté de ce bouquin !! j’ai annoncé sa sortie mais j’ai pas pensé à l’inscrire sur ma liste d’emplettes ! merci pour cette piqure de rappelle ! en plus ta chronique me fait dire que je serai passé à côté d’un bon millésime ! bisou

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    • Rhô, nous donner envie et ne pas l’acheter, ça, c’est pas bien, mon petit Mulot ! 😀

      Allez hop, on se déculotte et on montre ses petites fesses pour la piqûre de rappel « Ellory » !

      Gros kiss mon mulot ! et n’oublie pas, hein 😉

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