Crime et châtiment : Fiodor Dostoïevski

Titre : Crime et Châtiment

Auteur : Fédor Mikhaïlovitch Dostoïevski
Édition: Folio Classique (1995) / Livre de Poche (2008)

Résumé :
Seul l’être capable d’indépendance spirituelle est digne des grandes entreprises.

Tel Napoléon qui n’hésita pas à ouvrir le feu sur une foule désarmée, Raskolnikov, qui admire le grand homme, se place au-dessus du commun des mortels.

Les considérations théoriques qui le poussent à tuer une vieille usurière cohabitent en s’opposant dans l’esprit du héros et constituent l’essence même du roman.

Pour Raskolnikov, le crime qu’il va commettre n’est que justice envers les hommes en général et les pauvres qui se sont fait abusés en particulier. « Nous acceptons d’être criminels pour que la terre se couvre enfin d’innocents », écrira Albert Camus.

Mais cet idéal d’humanité s’accorde mal avec la conscience de supériorité qui anime le héros, en qualité de « surhomme », il se situe au-delà du bien et du mal.

Fomenté avec un sang-froid mêlé de mysticisme, le meurtre tourne pourtant à l’échec. Le maigre butin ne peut satisfaire son idéal de justice, tandis que le crime loin de l’élever de la masse, l’abaisse parmi les hommes.

Raskolnikov finira par se rendre et accepter la condamnation, par-là même, il accèdera à la purification. Crime et Châtiment est le roman de la déchéance humaine, l’oeuvre essentielle du maître de la littérature russe.

Critique :
Voilà une lecture dont je ressors mitigée tellement j’ai eu du mal à en venir à bout de ce pavé… Je sens que je vais faire grincer des dents, tant pis, ce ne sont pas mes dents et je suis ici pour donner mon avis, ce qui n’engage que moi.

Ayant fait, dernièrement, une superbe découverte avec les romans noirs et puisque les critiques dithyrambiques de ce livre le cataloguaient dans les noirs de chez noir et autres thrillers psychologiques, j’ai décidé de franchir le pas et de me pencher sur ce pavé littéraire.

« Crime et châtiment », pour ceux qui reviennent de Mars, c’est une « odyssée » sur le thème du salut par la souffrance.

Le roman dépeint l’assassinat d’une vieille prêteuse sur gage et de sa sœur cadette par Raskolnikov, un ancien étudiant de Saint-Pétersbourg, et de ses conséquences émotionnelles, mentales et physiques sur le meurtrier.

Raskolnikov avait une théorie particulière : selon lui, il existe des êtres supérieurs pour lesquels la notion de mal habituelle ne s’applique pas.

Cette élite est au-dessus des gens inférieurs et si pour atteindre un objectif noble, une de ces personnes se voit obligée de commettre un crime, elle peut le faire et a même le droit de passer outre les lois et les scrupules. Est-ce qu’on accuse Napoléon d’être un criminel ? Que nenni ! On lui élève même des statues.

Et puis, la fin ne justifie pas t-elle les moyens lorsqu’il s’agit d’améliorer la justice sociale ?

Tuer cette vieille usurière afin de lui voler son argent pour faire le bien, selon lui, c’est moralement tolérable. Son plan de bataille foirera puisque, surpris par la soeur de sa victime, il lui donnera aussi l’extrême onction par la hache.

Commettre un crime est une chose, l’assumer en est une autre et Raskolnikov n’assume pas. Il est rongé par les remords et la culpabilité, torturé par des dilemmes moraux et sa raison commence à défaillir, le rendant paranoïaque.

Fièvre, délire, visions, sa plongée dans l’enfer va aller crescendo. Notre homme arrivera même à rejeter sa mère et sa sœur.

L’atmosphère du livre est oppressante, étouffante, dérangeante. Tout cela est représentatif de ce que notre criminel ressent lorsqu’il est bouffé par la culpabilité.

Enfermé dans sa petite chambre, la chaleur plombant la ville, tout cela ne l’aide pas, plongé qu’il est dans son huis-clos lugubre. Il en est de même pour la ville de Saint-Pétersbourg : superbe et cruelle, certaines de ses rues suintant de misère qui grouille dans les taudis.

Ici, nous sommes aux côtés du criminel, on s’attache, non pas à la résolution du crime, mais à la manière dont Raskolnikov va pouvoir vivre avec son crime sur la conscience. Croyez-moi, ça le ronge comme de l’acide, surtout que notre homme a échoué dans son projet de vie.

Comment vous faire part de mon ressenti de lecture ? Pas facile… Parce que je ne sais pas trop où ça a coincé chez moi.

Le « message » du livre m’a bien plu, il m’a parlé, je l’ai compris; les personnages étaient tous bien travaillés, torturés; la misère noire dépeinte Dostoïevski était plus que réaliste et on peut dire qu’il a eu un regard acide sur la société russe de son époque.

Son écriture n’est pas plate mais plutôt frénétique, un peu folle, enflammée, les mots sont puissants, tout est décrit avec force et justesse. Bref, un grand auteur, cet homme.

Malgré tout, j’ai failli très souvent piquer du nez sur les pages durant ma lecture… Arrêtez de faire grincer vos dents, ce n’est pas bon pour l’émail ! De plus, cela me fait râler de ne pas avoir su entrer dans le livre pour l’apprécier, parce qu’il avait tout pour me plaire.

Tenez, les personnages, par exemple… Que du bon : ils sont tous taillés sur mesure, profonds, torturés.

Marmeladov, fonctionnaire désespéré et au chômage,  un alcoolo qui en a été réduit à accepter que sa fille Sonia se prostitue afin d’aider sa famille. Marmeladov qui, entre autre, mourra en laissant sa famille dans la misère totale.

Sa fille Sonia, justement, qui a dû vendre son corps et ses charmes pour aider sa famille et qui se dévoue ensuite corps et âme pour notre meurtrier. Magnifique.

Le juge d’instruction, qui utilise des méthodes psychologiques et qui joue avec Raskalnikov au jeu du chat et de la souris. Il est aussi terrible et tout aussi patient que le félin lorsqu’il serre une proie dans ses griffes. Un personnage terrible et bien travaillé.

Svidrigaïlov, qui a sombré dans le côté obscur de la force (représentant la part sombre de Raskolonikov) qui ne trouvera pas la voie de la rédemption; Loujine, un être machiavélique, cruel, bref, un personnage horrible mais superbement bien travaillé, comme tous les autres.

Rien à dire de plus sur les autres personnages, ils tous fascinants, excessifs, outranciers, travaillés. « What’else ? » me direz vous.

« Crime et châtiment » est une oeuvre majeure, phénoménale, dans laquelle l’auteur décrit avec force et justesse ce que peut être la nature humaine dans ce quelle a de plus terrible. C’est une peinture au vitriol de la misère et de la lâcheté, sans parler de la condition humaine.

Malheureusement, je suis passée à côté. Dommage… J’aurais peut-être dû fractionner la lecture de cette oeuvre car je manquais de concentration.

En tout cas, je m’en serais voulue de ne pas vous en parler avec emphase parce que ce n’est pas la faute du livre si je suis passée outre. Tout était bien fait, bien écrit, travaillé, et tout s’emboîtait à la perfection. Il avait tout ce qu’il fallait dans le récit, la psychologie, les personnages, la trame de fond.

Ce n’est pas parce que je l’ai loupé mon rencart avec lui que vous devez passer outre. Je compte revenir vers lui, plus tard, en fractionnant ma lecture.

Challenge « Thrillers et polars » de Liliba (2013-2014), Challenge « Victorien » chez Arieste, Challenge « Les 100 livres à avoir lu » de Bianca, Challenge « Myself » par Près de la Plume-Au coin du feu, le Challenge « La littérature fait son cinéma – 3ème année » de Kabaret Kulturel et Challenge « XIXème siècle » chez Netherfield Park.

22 réflexions au sujet de « Crime et châtiment : Fiodor Dostoïevski »

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  3. Ton article est très bien écrit et argumenté.
    J’ai lu ce livre il y a fort longtemps et je l’avais beaucoup aimé, mais c’était à l’époque où je lisais des classiques et pas des polars.

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    • Le livre a tout pour plaire, dans ses ingrédients, mais j’aurais dû fractionner ma lecture, lire un peu tous les jours, pour le rendre moins indigeste.

      Le pire, c’est que tout ceux qui l’ont lu sont dithyrambiques sur le livre ! 😀 Moi, j’ai pas accroché, mais je propose à tous de se faire son propre avis.

      Il est gratuit sur le Net, pour tablettes, liseuses, PC… en fichier PDF.

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  4. Non mais tu n’es pas sérieuse ?? Quand est-ce-que tu trouves le temps de lire un tel pavé entre tous les polars que tu lis ??
    Tu es un mystère, je vais demander à ce qu’on te dissèque 😉

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  5. J’ai littéralement adoré ce bouquin ! Même s’il traine un peu en longueur dans la deuxième partie, il reste un classique indétrônable de ma bibliothèque. La psychologie y est fascinante…

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  6. Ne connaissant pas beaucoup la littérature russe et voulant la découvrir, ce livre me donnait envie, mais il est vrai que la taille du pavé et surtout l’ambiance que tu décris qui a l’air assez pesante me font un peu reculer, même si il restera quand même sur ma PAL (pour un moment où je serai prête, je suppose ^^).
    Merci pour cet avis en tout cas, et bon anniversaire avec un jour de retard ! 🙂

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    • Merci à toi !

      Il se peu que tu rentres dans l’atmosphère du livre et que tu le dévores. Ils sont plus nombreux ceux qui l’ont aimé que ceux qui n’ont pas adhéré.

      À toi de te faire ton propre avis… bonne lecture, en tout cas ! 😉

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    • Telle est la question… voilà pourquoi je ne relis jamais mes livres adorés, de peur, avec l’âge qui a augmenté, de ne plus les aimer et de leur trouver des défauts, de ne plus passer dessus comme avant.

      Hormis les Holmes de Doyle et quelques Christie, je ne relis jamais, restant sur ma première bonne impression !

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  7. J’avais adoré à l’époque mais serait-ce encore le cas 20 ans après ??
    Je suis, quoi qu’il en soit, en totale empathie avec ton ressenti car je viens de lire 2 monstres de la littérature que j’ai également trouvé bien soporifiques :Les frères Karamazov de Dostoeivsky (encore lui !!!) et Guerre et paix de Tolstoi (encore un russe !!) .

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    • Oups, je dois lire les « frères Karamazov »… Mince, mais pourquoi j’ai pas ressenti ce que tout les autres avaient ressenti en lisant ces monuments ? Frustrant, je trouve, parce que je voulais vraiment le lire et trouver mon plaisir dans la lecture…

      ça m’a vraiment énervée de ne pas y arriver… mais bon, je ne baisse pas les bras pour autant ! 😉

      Comme quoi, là où certains étaient emballés, d’autres ont somnolé…

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  8. Et bien, bravo pour ton magnifique article, argumenté, reflet exact du livre et de son atmosphère.
    Tu connais peut-être ma méthode : 10 pages par jour pour les livres longs ou difficiles. Je le fais pour Proust, il me faut un an pour lire « la recherche », mais chaque matin au réveil 10 pages de Proust c’est exceptionnellement bon pour les neurones.

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    • Ok, pourquoi pas… Le problème, c’est que j’aurais l’impression de ne jamais avoir fini.

      Je devrais peut-être l’appliquer à « Crime et châtiment » pour une seconde lecture plus en phase avec le livre.

      Comme je te l’ai dit, je ne pouvais pas démolir le livre, il est au-dessus de la mêlée avec un scénario béton et des personnages travaillés.

      C’était moi qui n’était pas prête pour l’accueillir ! 😉

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