L’eau rouge : Jurica Pavičić

Titre : L’eau rouge

Auteur : Jurica Pavičić
Édition : Agullo Noir (11/03/2021)
Édition Originale : Crvena voda (2017)
Traduction : Olivier Lannuzel

Résumé :
Croatie, 1989. Dans un bourg de la côte dalmate, Silva, 17 ans, disparaît durant la fête des pêcheurs. L’enquête menée par Gorki Sain fait émerger un portrait complexe de cette jeune fille qui prenait et revendait de la drogue.

Quand le régime de Tito s’effondre, l’inspecteur est poussé à la démission et l’affaire classée. Seule la famille de Silva poursuit obstinément les recherches.

À travers ce drame intime et la quête de la vérité par la famille, L’Eau rouge déploie dans une grande fresque les bouleversements de la société croate : chute du communisme, guerre de 1991 à 1995, effondrement de l’économie et de l’industrie, statut des vétérans de guerre, explosion de l’industrie touristique et spéculation foncière, investissements étrangers et corruption…

Ou comment les traumatismes de l’Histoire forgent les destins individuels.

Critique :
Il est des rendez-vous littéraire que l’on loupe. Pour plusieurs raisons : pas le bon moment, pas le bon état s’esprit, roman qui ne nous correspond pas ou tout simplement, roman où l’on s’ennuie un peu.

Ce n’est pas la première fois que, dans roman policier, les crimes, disparitions (ou autres) ne sont qu’un prétexte pour nous parler du pays, de son Histoire, de son peuple, des misères qui les frappe…

Cela ne m’a jamais dérangé, que du contraire, j’apprécie puisque c’est l’occasion de découvrir un pays, une culture, autrement.

Dans ce polar qui n’en est pas vraiment un, l’auteur met en scène la Yougoslavie avant la guerre, du temps où elle ne faisait qu’un seul pays. En 1989, une disparition a eu lieu dans le petit village de Misto (côte dalmate, sur la mer Adriatique) : Silva est allée à une soirée et elle n’est jamais revenue.

Les recherches ont lieu, on ne la retrouve pas, puis la guerre éclate et il y a un changement radical ensuite puisque le pays va se diviser en plusieurs. Tout a changé, plus rien n’est le même et le village de Misto va se muer en station balnéaire. Le communisme n’est plus, place au capitalisme qui laisse bien des travailleurs sur le carreau suite aux fermetures d’usines.

Du suspense, il y en aura peu, l’enquête policière tournera vite à rien. Si comme moi, vous cherchez un roman policier pur et dur, passez votre chemin. Pire, la solution finale semblera tout droit sortie d’un chapeau, même si j’avais deviné, me trompant de peu (oui, je ferais une mauvaise enquêtrice !).

En fait, ce roman est plus à découvrir pour la psychologie des personnages et l’éclatement total d’une famille, celle de la disparue. Tout comme le pays, elle s’est divisée, il y a eu des mots et sans la disparition, sans les erreurs, le destin de certaines personnes n’auraient pas été le même.

Avec des « Si », on mettrait Paris en bouteille et si ma tante en avait eu, on l’aurait appelée mon oncle. L’enquêteur Gorki Šain le comprendra à la fin, lorsque la lumière se fera dans son esprit. Beaucoup trop de « Si » qui ont changé toute la donne, qui ont changé des vies, des destins… Ce fut le moment le plus émouvant du roman, de voir à quoi nos vies tiennent…

De cette lecture comateuse, je retiendrai pourtant l’écriture de l’auteur, ses belles descriptions de ce petit village de Yougoslavie, de ses habitants, avant et après la chute du régime de Tito, leur misère, les entreprises sans scrupules qui veulent transformer leur côte en station balnéaire, cette arrivée massive de touristes…

Un des avantages de ce récit, c’est qu’il donnera la parole aux personnages les plus importants. Cette chorale de voix permet de mieux appréhender leurs caractères, leurs complexités, leurs pensées, leurs désirs, leurs états d’âmes…

Je retiendrai aussi les portraits fracassés, des personnages en proie à des sentiments différents selon leur positionnement par rapport à Silva : le père qui renonce, la mère qui se morfond, le fils qui cherche sans renoncer, l’enquêteur hanté par cette enquête non résolue, un accusé qui veut se racheter durant la guerre, l’ancien petit ami qui se détruit,…

Leur seul point commun est d’avoir loupé leur vie depuis la disparition de Silva. Paraît que 6 croix peuvent changer votre vie, en porter une aussi… Une disparition et votre futur imaginé/souhaité disparaît, devient un autre, un futur merdique.

Si ce roman policier est endormant et loin d’être trépidant, au moins, les portraits sont bien ciselés du côté psychologique. Ceci est un roman noir sans possibilité d’y déposer un sucre pour l’adoucir.

Hélas, la rencontre entre lui et moi a foirée… Dommage, je voulais le lire depuis longtemps.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°137], Le Mois du polar chez Sharon – Février 2022 [Lecture N°19] et Le Challenge « Le tour du monde en 80 livres chez Bidb » (Croatie).

27 réflexions au sujet de « L’eau rouge : Jurica Pavičić »

  1. Bonsoir Belette2911, et bien moi, j’ai été agréablement surprise par ce roman que j’ai beaucoup hésité à lire. Je l’ai trouvé bien construit avec des personnages auxquels on s’attache. J’espère lire le suivant. Bonne soirée.

    Aimé par 1 personne

  2. Ping : Bilan Mois du Polar : Février 2022 [Chez Sharon] | The Cannibal Lecteur

  3. Ping : Bilan Livresque Mensuel : Février 2022 [Mois du Polar] | The Cannibal Lecteur

  4. Ping : Challenge « Le tour du monde en 80 livres  chez Bidib (2022) | «The Cannibal Lecteur

  5. Ping : Mois du polar 2022 | deslivresetsharon

  6. Bon… Ben tu l’as lu! Voit le côté positif : -1 pour ta PAL! 😉

    En même temps, bon… pourquoi se préoccuper de ce qu’est devenue une droguée dealeuse ? Je sais pas en Belgique mais en France, pas besoin qu’un flic soit mis en retraite pour raisons politiques pour que certaines affaires de meurtres se retrouvent enterrées tout au fond de la pile et jamais résolues… Depuis que j’entends parler de règlements de compte aussi meurtriers que spectaculaires entre dealers et trafiquants de drogues dans certaines grandes villes françaises étrangement je n’entends jamais parler des procès des assassins des dealers trucidés, même quand il s’agit de mineurs qui ainsi faisaient vive leur famille. 🙄 J’dis ça… Je dis rien! C’est peut être les journalistes qui trouvent plus intéressant de compter les morts brûlés vifs dans le coffre de leur voiture que les meurtriers condamnés ? Mais bon… quand ils pensent avoir raccroché le téléphone, certains policiers préfèrent insulter des femmes qui ont porté plainte la veille pour agression sexuelle et partant du principe que c’est elles les coupables! Alors… Tout est possible! Remarque comme ça plus besoin de se bouger pour enquêter! Pourquoi pas mettre les femmes directement en prison! 😡

    Aimé par 1 personne

    • Hélas, oui, c’est ainsi, mais il est plus facile (et moins dangereux) d’engueuler une femme qui est venue se plaindre de violences conjugales que de crier sur un assassin de dealer, d’un membre d’un gang ou autre… :/

      J’aime

C'est à votre tour d'écrire !

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.