Nuits Appalaches : Chris Offutt

Titre : Nuits Appalaches

Auteur : Chris Offutt
Édition : Gallmeister Americana (07/03/2019)
Édition Originale : Country Dark (2018)
Traducteur : Anatole Pons

Résumé :
À la fin de la guerre de Corée, Tucker, jeune vétéran de dix-huit ans, est de retour dans son Kentucky natal. En stop et à pied, il rentre chez lui à travers les collines, et la nuit noire des Appalaches apaise la violence de ses souvenirs.

Sur son chemin, il croise Rhonda, quinze ans à peine, et la sauve des griffes de son oncle. Immédiatement amoureux, tous deux décident de se marier pour ne plus jamais se quitter.

Tucker trouve un boulot auprès d’un trafiquant d’alcool de la région, et au cours des dix années qui suivent, malgré leur extrême précarité, les Tucker s’efforcent de construire un foyer heureux : leurs cinq enfants deviennent leur raison de vivre.

Mais quand une enquête des services sociaux menace la famille, les réflexes de combattant de Tucker se réveillent.

Acculé, il découvrira le prix à payer pour défendre les siens.

Critique :
Et bien, ça m’arrive tellement rarement de ne pas avoir ma phrase d’intro pour une chronique que ça mérite d’être souligné !

Là, je suis toujours un peu groggy, suite à ma lecture passionnante et émouvante de ce que j’appellerais « Les aventures de la famille Tucker ».

Aventures « merdiques », il va sans dire, puisque cette famille habite les collines du Kentucky et que, sans vouloir entrer dans les stéréotypes, je suis pourtant forcée de le faire, car habiter cette région vous colle une étiquette sur le front et que malheureusement, une partie de cette étiquette est véridique.

Peuplée de familles vivant dans la précarité, de pères violents, alcoolos, de jeunes désœuvrés, les collines du Kentucky recèlent toujours une faune assez haute en couleur, même si je ne les ai visitées que par la littérature, mais Chris Offutt en parle tellement bien, qu’on les aime directement, ces white trash.

La famille Tucker est composée d’un vétéran de la guerre de Corée – Tucker – qui a rencontré sa future épouse – Rhonda, 15 ans – en la délivrant de son oncle qui voulait se la faire le jour des funérailles du père de cette même Rondha… Ça vous situe ?

Pour faire bouillir la marmite, notre Tucker devient coursier pour un bootlegger du coin, puisque nous sommes en 1953 et que fabriquer de l’alcool est toujours une activité lucrative. Tucker ne sait rien faire d’autre que la guerre, alors, coursier, ça lui va très bien.

Dix ans plus tard et 5 enfants aussi, Tucker est le meilleur coursier et même si sa famille vit dans la précarité, il est prêt à tout pour elle.

La force de ce roman tient dans ses personnages qui n’ont rien pour eux, au départ, qui ressemblent à tous les gens précarisés de la colline, si ce n’est que chez les Tucker, on aime ses enfants, on les protège, on les couvre de tendresse et que l’on se demande pourquoi on n’arrive pas à faire des enfants sans handicap (une seule fille est née « normale).

Énormément d’émotions dans ce père qui parle à son fils, Big Billy, atteint d’hydrocéphalie, énormément de tendresse dans cette soeur, Jo, qui s’occupe de ses sœurs atteintes, elles, d’autres handicap, tellement de questions et de peine dans cette mère, Rhonda, qui se voit mettre au monde des enfants anormaux et qui fait tout ce qu’elle peut pour tenir sa maison en ordre.

Il y avait aussi tellement de compréhension dans cette dame des services sociaux qui sait comment adresser la parole aux Tucker, alors que son collègue ne veut qu’une chose : les retirer tous à leur mère.

Ce qui entrainera des conséquences lourdes pour la famille et pour ce crétin des services sociaux qui a vu des animaux de foire, des parasites, en lieu et place d’êtres humains doués de sensibilités et d’amour.

Un sacré putain de roman noir comme la nuit, mais une nuit pourvue d’étoiles qui brillent au firmament et qui vont me hanter longtemps tant le récit était magnifique, la plume portant son récit d’une manière acérée.

Un roman noir comme je les aime et comme je voudrais en lire plus souvent. Mon seul bémol sera pour le fait qu’il était trop court et que j’aurais aimé passer plus de temps avec les membres de la famille Tucker.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (2018-2019).

19 réflexions au sujet de « Nuits Appalaches : Chris Offutt »

  1. Ping : Les Gens des collines : Chris Offutt | The Cannibal Lecteur

  2. Ah ! Ces salauds de sévices sociaux (Ah oui je sais j’ai fait une faute… ) qui retirent leurs enfants à leurs parents aimants… c’est un thème vendeur ! Mais… J’ai un peu de mal avec le principe parce que certes… c’est ici du roman et dans les romans les gentils sont nécessairement les « vraies victimes »… Mais en France les médias n’arrêtent pas de relayer l’idée que les services sociaux n’interviennent que dans des familles sans problème et laisseraient en même temps mourrir les enfants sous les coups de leurs parents violents sans rien faire ! Le discours bien clivé et clivant qui comme tout discours clivé ne rend jamais compte d’une réalité bien plus complexe. Mais comme les pros des services sociaux sont tenus au secret professionnel absolu ils n’ont pas droit de réponse sur le fond des cas évoqués dans les médias et il n’y a que ce que les journalistes veulent bien relayer (donc ce qui scandalise le spectateur qu’on capte par du sensationnalisme) sur la place publique et la vérité personne ne la connaît et tout le monde s’en fout. De fait ce genre de trucs… c’est pas pour moi… ça m’en ferait monter la tension!

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    • Leur job n’est pas facile, je le conçois aisément. Les gens sont parfois de bons comédiens, j’en ai même une dans la famille qui est en passe de remporter l’oscar ET le césar de la meilleure actrice. Les pleureuses italiennes et siciliennes ont du soucis à se faire si celle-là débarque un jour chez elles.

      Anybref, ici, nous sommes dans un roman, avec un narrateur omniscient, on sait que les Tucker sont de bons parents, d’ailleurs, l’assistance des sévices sociaux a toujours trouvé une maison bien tenue, propre et des enfants à qui il ne manquaient que quelques trucs, parce que papa tirait le diable par la queue. Fatalement, face au bon « flic », tu as le méchant qui veut envoyer tout le monde au diable vauvert. Fallait ce genre de personnage pour faire capoter la petite existence tranquille des Tucker, même si la caricature est un peu poussée.

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