Les Enquêtes d’Irène Adler et de Sherlock Holmes – 02 – L’empoisonneur de Brook Street : Michel Bourdoncle [Par Dame Ida]

Titre : Les Enquêtes d’Irène Adler et de Sherlock Holmes – 02 – L’empoisonneur de Brook Street

Auteur : Michel Bourdoncle
Édition : Librinova (12/07/2021)

Résumé :
Londres, automne 1894

La troublante Violet Handcock vient solliciter l’aide de Sherlock Holmes. L’ombre d’un danger sournois plane au-dessus de l’officine de pharmacien de son père. Las, le lendemain, le vieil homme est retrouvé mort dans son laboratoire fermé de l’intérieur.

Dès lors, le détective de Baker Street n’aura de cesse de mettre ses extraordinaires facultés d’observation et de déduction au service de l’énigme de ce meurtre en chambre close, pour démasquer un assassin machiavélique et pour innocenter un homme injustement accusé par Scotland Yard.

Holmes sera aidé dans sa tâche par son fidèle ami Watson, que la gent féminine laisse moins indifférent que jamais, et par une madame Hudson rajeunie et à la personnalité nouvelle des plus surprenantes.

Mon Avis :
Attention : critique saturée de spoilers. Le roman n’étant pas très gros… quand on pointe l’inutile et qu’on le retire… il ne reste plus que l’essentiel… et on parle très vite des grosses ficelles grossières du scénario.

Donc… si vous collectionnez les pastiches comme Dame Belette, lisez le livre d’abord et on discutera ensuite de nos impressions dans les commentaires.

– Si l’introduction et l’intrigue sont au départ sympathiques on ne peut pas dire que le mystère soit bien compliqué à résoudre : nous avons le choix entre deux suspects : la solution est cousue de fil blanc et se devine rapidement même si on ne sait pas encore comment Holmes va arriver au résultat prévisible.

– La solution est en outre dévoilée au 3/4 du livre. On se demande pendant plusieurs dizaines de pages réparties sur quelques chapitres ce qu’on peut encore en attendre… on ne sait jamais… un rebondissement de dernière minute…

Et ben non… telle sœur Anne je ne vis rien venir. Rien de rien ! T’as juste perdu ton temps. Aucun intérêt. C’est l’épilogue le plus long (plusieurs chapitres) et le plus brouillon (car partant dans tous les sens) que je n’ai jamais lu !

L’auteur voulait juste prolonger le plaisir qu’il avait à écrire (à moins qu’il ne soit payé à la page?) sur ses personnages préférés. Si le lecteur s’emmerde ce n’est pas son problème.

– Cela doit être de l’auto édition à en croire le nombre de coquilles. Quelques fautes d’accords complexes sont tolérables mais une odeur « d’amende amère » qui aurait davantage convenu à un mauvais stationnement qu’à un empoisonnement au cyanure (qui sent l’AMANDE amère!) là ça devient comique… et que dire de Madame Hudson nommée Madame Watson à deux reprises dans la même page !!! Heureusement qu’on nous avait dit que Mary Morstan-Watson était déjà morte!

– Le Lestrade de ce roman n’est pas canonique… Ses rapports avec Holmes sont ici haineux et désastreux! Rien de ça dans le canon où les deux hommes sont toujours restés courtois l’un avec l’autre ! On le fait passer pour un sadique brutal, une caricature de ripoux à deux neurones… C’est pas vraiment sympa… Et c’est d’un manichéen ! Lestrade c’est le méchant pourri (on a pas pu ressusciter Moriarty alors on prend ce qu’on a sous la main!) et Holmes c’est le Gentil!

– Watson de son côté se prend pour un don Juan ayant besoin de se rassurer sur la longueur de sa quéquette  et son impudeur en la matière n’a rien de très victorien… en outre il passe juste pour un crétin prétentieux qui se croit très malin. C’est pénible à la longue.

– Holmes reste holmesien…si on oublie que le voila amoureux! Et oui un Holmes asexuel ça dérange encore quelques uns qui s’obstinent à lui imaginer une vie sexuelle…

Du temps de Victoria on n’avait pas de vie sexuelle (si on en avait une c’était tabou-caché et on ne parlait de rien et on écrivait pas sur le sujet!). On se mariait et des enfants venaient au monde.

Aujourd’hui les auteurs ou lecteurs de pastiches se fichent de savoir si les enfants vont arriver ou s’ils ont pilules, capotes ou stérilet ! Ils faut juste qu’ils niquent parce que c’est ça l’amouuuur ! C’est si bô la passion!!!! Peu importe si ça ne se faisait pas comme ça à l’époque! On dira qu’ils sont modernes et le tour est joué !

Or, un pastiche doit être écrit dans le respect rigoureux des mœurs de l’époque !!! On ne rajoute pas de modernité de mœurs, car ça n’aurait pas été publiable !

– On réintroduit Irene Adler… Ben oui quoi ! Elle est trop fascinante pour n’apparaître que dans Scandale en Bohème ! Et puis si Holmes doit s’intéresser à une femme ça ne être qu’elle !

Ok pourquoi pas… mais Watson la croiserait au quotidien sans comprendre que quelque chose cloche puisqu’elle emprunterait les traits d’une personne qui lui est familière depuis des années… Et il ne se rend pas compte du subterfuge ! Les lunettes n’existaient pas à l’époque ? Si pourtant ! OK il est supposé être très con et Irene est supposée être une pro du déguisement comme Holmes… mais tout de même… C’est tellement énorme que ce n’est crédible pour deux sous.

– En plus la présence d’Irene n’apporte rien au roman si ce n’est que d’y ajouter des chapitres entiers sans utilité puisqu’elle ne participe pas du tout à l’enquête. Contrairement à ce qu’annonce le bandeau du livre !!! Publicité mensongère !!! Elle n’est qu’un personnage secondaire dans une vie parallèle ! Pourtant la couverture nous laissait croire qu’elle enquêtait ! Quelle arnaque !

– Et l’auteur nous raconte deux, voire trois fois comment elle s’est réintroduite dans la vie de Holmes. Bref à chacune de ses incursions dans le roman. Des fois que le lecteur ait la maladie d’Alzheimer ! A moins que ce soit l’auteur qui ait des problèmes de mémoire et ne se relise jamais ???

Franchement à la deuxième répétition j’ai cru que l’auteur me prenait pour une conne. Et je n’aime pas ça… Mais alors pas du tout !!! Déjà que ses multiples rappels d’anciennes affaires du canon étaient limites et sans intérêt pour une holmésienne amatrice… car que l’auteur du roman ne se leurre pas : la majorité des lecteurs de pastiches connaissent le canon et trouvent souvent ces rappels aussi inutiles qu’artificiels.

Au mieux faudrait-il faire de simples notes explicatives de bas de page pour ceux qui ne sont pas familiers du canon plutôt que des parenthèses d’un à plusieurs paragraphes qui brisent la progression du développement.

– Je passe aussi sur le côté Harlequin le Champion de l’Amour de ces chapitres introduisant Irene ! Ça pue la guimauve à un point que ça n’en est pas crédible si on reste fixé sur le Holmes du canon et sur les mœurs de l’époque qui incitaient à plus de retenue dans l’évocation des sentiments personnels.

– Cerise sur le pompon : le poison utilisé pour tuer la victime… on évoquera l’odeur « d’amende amère » typique du cyanure mais sans jamais nommer ce poison… en oubliant vite que seul le cyanure a cette odeur et on optera pour l’arsenic à la fin… en le disant inodore… Déjà une contradiction de plus…

Et ce n’est pas un poison à effet rapide !!!! On ne tombe pas foudroyé d’un coup avec l’arsenic. Si elle en avait pris, la victime serait morte lentement et douloureusement et serait nécessairement sortie de sa chambre close pour chercher du secours !

L’auteur aime à montrer qu’il a fait un grooooos travail de recherche sur le canon ou sur l’histoire de l’ère victorienne « genre je suis membre de la SSHF » etc. mais quand on empoisonne ses victimes on se renseigne un minimum sur les effets des poisons borde l!

Tout le monde n’est pas ancienne infirmière de guerre comme Agatha Christie mais quand même !!! Il y a un minimum syndical à assurer ! On se forme ! On s’informe ! On regarde les Experts à Miami ou des Hercule Poirot par exemple !!! Ou on peut lire Madame Bovary qui se suicide à l’arsenic si on veut des références plus smart !!!

Ça commence par des troubles digestifs très pénibles et le système neurologique n’est détruit que dans un second temps. Ça peut durer entre quelques heures et plusieurs jours ! Parfois les gens en réchappent même en fonction de la dose et de leur vigueur !

– Et quand on dit que Irene était contralto dans la première présentation de son parcours… on ne parle pas d’elle ensuite comme d’une soprano quand on se sent obligé de re-raconter et re-re-raconter sa vie !!!!

Une soprano c’est pas une contralto ! Aaaaarrrrg ! Le registre de contralto est bien plus grave et a une dimension androgyne permettant de chanter les rôles masculins des opéras baroques ! C’est le registre qui est effectivement attribué à Irene par Conan Doyle car ce qui distingue Irene aux yeux de Holmes ce sont justement ses qualités supposément masculines et ses ambiguïtés.

À cette époque, justement, on était en pleine transition dans l’importance des registres lyriques et une nouvelle hiérarchie se dessinait : les sopranos ne s’étaient pas encore tout à fait imposées comme archétypes des premiers rôles mais le succès des contraltos était déjà sur le déclin (d’où le retrait probable d’Irene des scènes). Bref…

Écrire c’est pas juste aligner des mots qu’on recopie sans savoir ce qu’ils veulent dire ! Écrire suppose de s’être approprié le moindre mot que l’on offre au lecteur. Quand on sait ce qu’est une soprano et ce qu’est une contralto… et bien on ne fait pas l’erreur ! Au contraire ! On a bien en tête que l’ambiguïté de ce registre participe au charme particulier d’Irene !

Bref en résumé : une bonne idée de départ très maltraitée et qui donnera de l’urticaire à un/e holmesien/ne amateur/trice.

Comme disait Mistinguette une fois arrivée au bas de l’escalier en chantant et en montrant ses jambes : « l’ai-je bien descendu » ?

53 réflexions au sujet de « Les Enquêtes d’Irène Adler et de Sherlock Holmes – 02 – L’empoisonneur de Brook Street : Michel Bourdoncle [Par Dame Ida] »

    • Ah ben oui… Mais comme je disais à Sharon… je n’allais pas en dire du bien. En outre les critiques que je formule sont rigoureusement factuelles et vérifiables en le lisant pour celles qui ne me croiraient pas 🙂 ! Je n’ai strictement rien inventé : le coup de « l’amende amère », Irène la potiche décorative qui n’enquête pas contrairement à ce que dit la couv’… Watson le benêt qui raconte sa vie sexuelle de soldat et qui est trop con pour se rendre compte qu’Irène vit déguisée sous son nez… en une personne qu’il a longtemps côtoyée… L’arsenic (qui ne sent pas « l’amende amère », cette odeur étant le fait du cyanure) transformé en poison violent alors qu’il met du temps à agir… La vie d’Irène reracontée deux, voire presque trois fois… Le dernier quart du roman totalement inutile… Lestrade transformé en ripoux brutal… Quand un livre enfile les bourdes comme des perles, et bien pour une fois, on les donne aux cochons! Et on prévient les copines de garder leurs sous pour acheter de meilleurs livres ! 😀

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        • En fait si je ressens le besoin de me justifier autant en revenant sur les éléments factuels, c’est parce que ça me met mal à l’aise de dire autant d’horreurs sur un livre même s’il le mérite. Il a été écrit par quelqu’un qui y a mis son coeur et toussa toussa… et s’il se trouvait confronté aux impressions qu’il laisse ça lui serait très douloureux. Je me sens toujours coupable quand je me mets en rogne à ce point contre un bouquin alors… je ressasse les arguments qui sont hélas ici nombreux afin de me rassurer sur le fait que c’est pas moi qui ait déconné ici.🤨

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      • Tu as tout à fait raison, je peux accepter que l’on change la personnalité des personnages, chacun les voix comme il veut, mais que l’on fasse des fautes grosses comme des maisons, ou qu’on prenne les lecteurs et les personnages pour des cruches, je ne suis pas d’accord non plus :/

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