Titre : La dernière frontière
Auteur : Howard Fast
Édition : Gallmeister Totem (2014 – 2018)
Édition Originale : The Last Frontier (1941)
Traducteur : Catherine de Palaminy
Résumé :
1878. Les Indiens cheyennes sont chassés des Grandes Plaines et parqués en Territoire indien, aujourd’hui l’Oklahoma.
Dans cette région aride du Far West, les Cheyennes assistent, impuissants, à l’extinction programmée de leur peuple. Jusqu’à ce que trois cents d’entre eux, hommes, femmes, enfants, décident de s’enfuir pour retrouver leur terre sacrée des Black Hills.
À leur poursuite, soldats et civils arpentent un pays déjà relié par les chemins de fer et les lignes télégraphiques.
Et tentent à tout prix d’empêcher cet exode, ultime sursaut d’une nation prête à tout pour retrouver liberté et dignité.
Critique :
Sherman rédigea l’acte de nomination du général George Crook, lui donna les pleins pouvoirs dans les Plaines et lui ordonna d’abattre les Cheyennes comme on tire les loups qui maraudent.
Oui, les tirer comme des loups, comme des bêtes car pour eux, ce n’était même pas des humains…
Les États-Unis ne sortiront pas auréolé de gloire, avec ce roman d’Howard Fast qui raconte la longue marche que firent les Cheyennes depuis les rudes terres de l’Oklahoma où on les parquait, à celles qui furent les leurs, dans les Black Hills.
Imaginez 300 Cheyennes, dont à peine 80 hommes, dont la moitié seulement de ces guerriers est dans la fleur de l’âge, tout le reste étant des femmes, des enfants et des vieillards, marchant durant plus de 1.500 kilomètres avec 12.000 soldats à leur cul qui leur ont tendu des souricières où pas une souris n’aurait pu passer, pratiquant même ensuite la stratégie de la tenaille, bien connue de la 7ème Compagnie.
Douze mille hommes, près d’une division entière de soldats des États-Unis, vétérans endurcis des vieux régiments qui avaient combattu les Indiens, essayaient de capturer ces trois cents Cheyennes. Et, sur les trois cents, il n’y avait que quatre-vingts hommes environ, dont la moitié seulement étaient des guerriers dans la force de l’âge.
Et vous savez quoi ? Les Cheyennes sont passés, les Cheyennes ont marché, on les a rattrapé, combattu, on les a pourchassé, mais jamais on ne les a capturé, sauf ceux qui se rendirent afin de permettre aux autres d’échapper à tous ces hommes en bleus lancés à leur trousse comme s’ils avaient commis un crime atroce.
Leur seul crime était de vouloir rentrer chez eux pour ne pas mourir de faim en Oklahoma, ils voulaient juste rentrer chez eux. Pacifiquement. Rien de plus…
Honteux, horrible, à vomir, voilà ce qu’on aurait envie de hurler à la face de l’Amérique pour ce qu’elle fit endurer à ces pauvres Indiens, dépossédés de leurs Terres ancestrales – dont on leur avait pourtant garanti qu’ils les garderaient – parqués pire que du bétail sur une terre aride, crevant de faim, de soif, de maladie, n’ayant plus de bisons à chasser et qui ne demandaient qu’une chose : rentrer dans les Black Hills.
Ben non, pouvaient pas, les Indiens, pas de libre circulation de ces minorités, dans ce grand pays qu’est l’Amérique. Trois sont déjà foutu le camp et en représailles, on en demande 10 pour enfermer dans le trou à rat qu’est la prison de Dry Tortuga…
Ce livre, c’est une baffe donnée à la face des États-Unis, c’est un plaidoyer envers le courage qu’eurent ces hommes et ces femmes de partir sur un périple impossible, alors qu’ils étaient déjà à bout de force, juché sur des poneys maigres et fatigués.
Ce livre, c’est aussi une baffe jetée à l’Homme Blanc qui a peur de ce qu’il ne connaît pas, qui raconte des tas de mensonges sur les autres, inventant au fur et à mesure pour ajouter de l’huile sur le feu et faire le jeu de la propagande. C’est une ode à la tolérance, à l’humanisme, au fait qu’il faut traiter les autres comme des Êtres Humains et pas comme du bétail.
— Mais nom de Dieu, capitaine, même les Indiens sont des êtres humains. Vous ne pouvez pas affamer des enfants et mettre ça sur le compte de leur race.
— Je vous saurais gré de vous mêler de vos affaires, lieutenant, trancha Wessells.
Ici, c’est l’Homme Rouge qui en sort grandi car il est resté pacifique, ne voulant pas recommencer une guerre, tandis que l’Homme Blanc se comportera comme il le fait encore et toujours, alliant la bêtise à la brutalité, la violence avec l’entêtement.
Le Kansas recouvra son sang-froid et découvrit qu’il n’existait pas un cas, pas un seul et unique cas, d’un citoyen assassiné ou molesté par les Cheyennes, pas une seule maison incendiée : des chevaux avaient été enlevés, du bétail abattu, rien de plus.
Pourtant, lorsqu’on écoute le Blanc, ce sont les Indiens qui sont des sauvages, des êtres ne possédant pas plus d’esprit qu’un enfant. On devait manquer de miroir à l’époque…
Le récit d’Howard Fast est magnifique, prenant, bourré de bêtise humaine, de stratégie indienne, de volonté de paix alors qu’en face, on ne sait parler que de guerre et de conflits.
Les coulisses du pouvoir sont abjectes parce que réalistes, on suit tout cela impuissant, alors qu’on a envie de hurler toute sa rage devant autant de décisions absurdes (afin de justifier sans doute qu’on en a une grosse) car dura lex sed lex, sauf pour eux, politiciens.
Un roman dont on sort bouleversé, ému, la partie se déroulant à Fort Robinson étant à la limite de l’insoutenable, tant l’entêtement bête d’un officier va amener ce peuple fier et libre à devoir vivre des jours en enfer.
À Camp Robinson, le thermomètre marquait ce jour-là -30°. L’officier devait connaître ce détail. C’était une des informations données par tous les journaux de la région. Les squaws et les enfants ne possédaient pas une couverture qui ne fût en loques. Ils ont effectivement quitté leur réserve avec les mêmes vêtements qu’ils portent aujourd’hui, mais ils sont partis en août et nous sommes maintenant en janvier. En outre, les vêtements s’usent dans le Nebraska aussi bien qu’à Washington.
Un roman magnifique, un roman fort, un roman à lire et un formidable travail de l’auteur afin de récupérer des témoignages alors qu’il y avait la barrière de la langue, le Cheyenne étant une langue très riche mais très difficile à apprendre.
Challenge Thrillers et Polars de Sharon (2018-2019), Le Challenge « Il était une fois dans l’Ouest » chez The Cannibal Lecteur et le Mois Américain chez Titine (Septembre 2018).
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Encore un à ajouter à ma liste, pfff il y a trop de lectures super en ce moment !! 🙂
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Nous devrions faire le mois des daubes afin d’accorder à nos lecteurs/trices de blog des moments de répit boursier 😀
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Je suis en train de lire Phoenix, Arizona de Sherman Alexie, et le sort des indiens aujourd’hui n’est pas franchement enviable.
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Les Natifs ne sont pas super bien lotis, alcoolisme, drogues, malnutrition, chômage, niveau d’étude peu élevé…
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Heu… Dis moi? En fait le mois US… tu ferais mieux de l’appeler le mois Western, non? 😃😃😃
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Oui, parce que j’adore le western et je te laisse deviner pourquoi 😉
Le western, c’est le début de l’Amérique.
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oh oui toute une histoire, je pleure juste a lire ta critique…alors ce livre je ne peux pas le lire…nop….trop prenant, trop fort…
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très prenant, oui, très fort, surtout cette résignation à la mort. Mourir plutôt que de retourner en Oklahoma…
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Bin comme hostiles, mourir chez eux….
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Mourir chez soi, oui… mais là, ils ont entrainé des autres personnes dans le périple, des soldats qui auraient pu rester assis et se la couler douce.
Mourir chez soi est mieux qu’ailleurs, je trouve aussi.
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oh oui….on n’est plus a l’aise….
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Je ne sais pas, jamais testé, mais le jour où… je posterai un billet pour vous dire quoi ! Je sors…
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en tout cas c’est note dans tes dernieres volontes…;)
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Merci ! 🙂
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Ce livre est magnifique et terrible et violent et bouleversant. Sublime quoi.
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Oui, comme tu as dit !!!
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Ping : Bilan n° 2 du challenge Polar et Thriller du mois de septembre 2018 | deslivresetsharon
Salut Belette, tu m’as plus que convaincu. Je l’achèterai la semaine prochaine. BIZ
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YES j’ai réussi à tenter Pierre !!! L’auteur ne me remerciera pas, mais je suis contente parce que le livre est plus qu’intéressant à lire. Une page de l’Histoire.
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