Joe : Larry Brown

Titre : Joe

Auteur : Larry Brown
Édition : Folio (2001) / Gallmeister Totem (2014/2018)
Édition Originale : Joe (1991)
Traduction : Lili Sztajn

Résumé :
Gary Jones a peut-être bien quinze ans. Sa famille vagabonde, arpente les rues et les bois du Mississippi tandis qu’il rêve d’échapper à cette vie, à l’emprise de son bon à rien d’ivrogne de père.

Joe Ransom a la quarantaine bien sonnée. Il ne dénombre plus les bouteilles éclusées et les rixes déclenchées.

Lorsqu’il croise le chemin de Gary, sauver le jeune garçon devient pour Joe l’occasion d’expier ses péchés et de compter enfin pour quelqu’un.

Ensemble, ils vont avancer et tracer à deux un cours sinueux, qui pourrait bien mener au désastre… ou à la rédemption.

Critique :
♪ Hey Joe, where you goin’ with that gun in your hand ? ♫ (*)

Oui, Joe a un flingue sous le siège de sa voiture et oui, faut pas emmerder Joe…

Joe, il faut aussi le taxi, chargeant ses journaliers, des pauvres hommes Noirs, qu’il emmène faire bosser dans la forêt où ils doivent empoisonner des arbres afin d’en planter des autres, de ceux qui rapporteront du fric.

Le titre du roman est court, peu recherché, mais l’important est ce qui se trouve dedans : un pur roman noir de chez noir, aussi sombre que dans le trou du cul d’une taupe, occupée à creuser une galerie, au fond d’une mine, à minuit, par une nuit sans lune.

Tous les niveaux de sombritude sont cochés et on ne ressort pas de cette lecture en sautillant gaiement. Oubliez le pays des Bisounours, ici, c’est l’alcool qui sert à supporter des vies de misères, des boulots de merde, où l’on trime beaucoup pour gagner peu.

L’auteur prendra le temps avant de nous amener à la rencontre entre Joe Ransom, quadra qu’il ne faut pas faire chier et Gary Jones, gamin de 15 ans, analphabète qui ne sait rien de la vie, trop occupé qu’il fut à suivre ses parents dans plusieurs états.

Les descriptions des différents personnages qui hantent ces pages sont flamboyantes, profondes, détaillées. Des vies de misère, de crève-la-faim, de débrouillardises, de petits trafics en tout genre sont décrites au scalpel et les décors sont grandeurs nature, pollués aussi, puisque tout le monde jette ses canettes ou bouteilles par le fenêtre de son pick-up.

Dans cette petite ville du Mississippi que l’on pourrait appeler Bouseville ou Ploucville, le temps semble s’être arrêté. C’est une chape de plomb qui pèsera sur les épaules du lecteur qui a osé s’aventurer ici. Sans compter les tripes qui vont se serrer en voyant tout ce que Wade fait subir à ses enfants, notamment à son gamin, Gary.

Le père Jones, le fameux Wade, est LE personnage que l’on a envie de noyer dans la rivière du coin avant de creuser un grand trou pour l’y enterrer. Si les autres personnages traînent des casseroles à leurs culs de bouseux, lui, il a la collection complète.

Cet homme est égoïste, fainéant, alcoolique, voleur, menteur, exploiteur et j’en passe. Décapsuler une bière dans son périmètre est aussi dangereux que d’ouvrir une boîte de thon dans une pièce remplie de chats affamés.

Certains romans noirs sont poisseux de sang, « Joe » est un roman noir poisseux de misère. Les portraits sont esquissés avec justesse, ils sont fouillés, réalistes, certains sont même fait avec tendresse (John Coleman). Mais c’est noir de chez noir, sans espoir. Criant de vérité, de désespoir, de sueur, de sang, de saloperie…

Bref, la ruralité que l’on n’a pas envie d’arpenter en vrai mais qui nous plait vachement bien en version littéraire. Ce roman noir, c’est l’Amérique archi profonde, pauvre, alcoolique, minable où les gens triment du matin au soir pour gagner quelques sous.

(*) Hey Joe – Jimi Hendrix

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°35].

16 réflexions au sujet de « Joe : Larry Brown »

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  5. Et oui! L’envers du rêve américain qui tient plus du cauchemar picaresque que d’autre chose! Avec le genre de personnages qu’on ne croise pas lors d’un voyage organisé ou dans les grandes villes touristiques et sur qui on ne fera jamais de série… les Zinvisibles Made In US!!! Heureusement que tu es là pour nous parler des livres rappelant leur existence !

    Dans les séries US il n’y a jamais de pauvres ni d’obèses (alors que ce serait 30% de la population)! On ne fait rêver qu’avec les riches plein d’oseille! Moi quand j’étais jeune (on ne sait plus quand!) je me marrait comme une bossue en regardant Dynastie ! Jean Collins alias Alexis se réveillait dans son lit en satin maquillée avec ses cheveux comme si elle venait de chez le coiffeur… et des fois elle avait même déjà une rivière de diamant au cou! Ah… ces ricains… (ou elle est anglaise J.Collins mais pas la série !) 🥳

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