Trois vautours : Henry Trujillo

Titre : Trois vautours

Auteur : Henry Trujillo 🇺🇾
Édition : Actes Sud – Actes noirs (2012)
Édition Originale : Tres buitres (2007)
Traduction : Alexandra Carrasco

Résumé :
Pour gagner de quoi quitter l’Uruguay, un jeune homme accepte de passer une voiture en contrebande en Bolivie. Là-bas, il rencontre une magnifique paumée qui lui vole son passeport.

Pour le récupérer, il devra s’enfoncer encore un peu plus dans la marginalité. Un roman noir plein de misère et d’espoir.

Critique :
Les auteurs Uruguayens ne se battent pas dans mes étagères, Henry Trujillo étant le seul représentant de ce pays d’Amérique du Sud.

C’était donc une bonne occasion de profiter du challenge Mois Lusophone pour le sortir.

C’est un roman noir, indubitablement. La misère est présente, même si elle semble décrite de manière ténue par l’auteur.

Malgré tout, on sent bien sa présence dans les décors, les villages, les villes, les personnages, leurs actions…

Dans l’émission Top Chef, les chefs le disent tous : il faut du goût, du goût, du goût ! De l’audace, mais surtout du goût. Hélas, c’est ce qui a manqué dans ce roman noir : du goût, du peps, du sel, du rythme.

Tout est un peu lent, sans pour autant que le récit devienne intéressant. Le personnage principal manque de relief, de profondeur, est terne et il semble être le spectateur de sa propre vie.

Le tout manquant de cohérence, comme si l’auteur n’avait pas réussi à faire le lien entre ces différents chapitres, comme si personne ne savait vraiment où il allait aller. Le style est sans doute trop dépouillé.

Dommage parce que la description de la misère était bien réalisée, sans en faire de trop, sans sombrer dans le pathos. Avec quelques situations, nous avions déjà compris que nous étions chez les paumés, les miséreux, ceux qui tirent le diable par la queue.

Les décors étant en harmonie avec ces pauvres gens : perdus, arides, secs, poussiéreux.

Le final nous plongera dans une histoire glauque à faire frémir et on se dit que cela ne pouvait finir qu’ainsi pour certaines personnes.

Bon, une lecture à oublier, l’étincelle n’ayant jamais eu lieu (et pourtant, je n’ai sauté aucune pages, ce qui est paradoxal).

Le Mois Espagnol (et Sud-Américain) chez Sharon – Mai 2022 (Fiche N°27) et Le Challenge « Le tour du monde en 80 livres chez Bidb » (Uruguay).

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La vierge du mal : Edmundo Paz Soldan

Titre : La vierge du mal

Auteur : Edmundo Paz Soldan 🇧🇴
Édition : Gallimard – Du monde entier (15/10/2020)
Édition Originale : Los días de la peste (2017)
Traduction : Robert Amutio

Résumé :
La Casona n’est pas une simple prison sud-américaine. Véritable cour des miracles, elle est à la fois dortoir, bureau, centre commercial, dispensaire et église, et mêle, outre les détenus, des enfants abandonnés, des prostituées, des politiciens, des illuminés, des médecins et de riches barons de la pègre.

Cette galerie de personnages hauts en couleur va progressivement nous dévoiler la vie quotidienne d’un lieu unique, ainsi que les farouches luttes de pouvoir auxquelles s’adonnent les partisans d’une déesse nouvelle, « l’Innommable », dont les attributs rappellent ceux des divinités précolombiennes.

Comme elles — et aux antipodes de la Vierge chrétienne —, l’Innommable n’appelle pas à la paix mais à la guerre. Son culte secret fait résonner un cri de justice dans toute la Casona, alors que parmi les prisonniers commence à circuler un virus inconnu.

S’inscrivant dans la tradition de la littérature pénitentiaire, mais également du récit d’horreur et du roman de dictateur, La Vierge du Mal est une vaste fiction chorale dotée d’une forte dimension symbolique.

Elle offre la radiographie d’une société en décomposition, gangrenée par la violence et rongée par la peur, mais percée aussi, çà et là, comme la nôtre, par une lueur d’espoir.

Critique :
♫ Les portes du pénitencier ♪ Bientôt vont se refermer ♪ Et c’est là que je finirai ma vie ♫ Comme d’autres gars l’ont finie ♪

Voilà une critique qui va être difficile à faire tant cette lecture fut laborieuse.

Déjà, la plongée dans ce milieu donne l’impression de nager dans de la vase, tant la misère est prégnante. Et pourtant, de la misère, j’en ai lu plus que je n’en ai vu.

La Casona est un pénitencier horrible. Éloigné de tout, il est composé d’une faune bigarrée, allant de prisonniers qui peuvent vivre avec leur famille à des violeurs dangereux, des assassins… Et tout ce petit monde peut se croiser.

Lorsque je pars en vacances, je passe des péages et bien, dans cette prison, les matons en ont installé aussi et il faut s’acquitter du prix lorsque l’on passe d’une zone à l’autre.

D’ailleurs, avec du fric, la corruption est plus que possible et tout peut s’acheter : drogues, putes… Vous demandez, vous payez et on vous livre. Gaffe au racket, aussi.

Les autorités ? Elles s’en foutent royalement. La seule chose qui tracasse le Gouverneur, qui vit dans la cinquième tour (et qui est tenue secrète), c’est le culte de l’antévierge. Ben quoi, si l’antéchrist existe, pourquoi n’y aurait-il pas le contraire de la Vierge Marie ?

Ce qui gêne ce gouverneur, c’est que le pouvoir de cette entité prend le pas sur le sien. La déesse vengeresse, représentée avec un couteau entre les dents, n’incite décidément pas à la tolérance ni à l’harmonie.

Ah, ce roman avait tout pour me plaire et je me suis embourbée dans le récit, assez foutraque, ou les dialogues sont imbriqués dans le récit, rendant la lecture laborieuse et pénible.

Bref, au suivant !

Le Mois Espagnol (et Sud-Américain) chez Sharon – Mai 2022 (Fiche N°21) et Le Challenge « Le tour du monde en 80 livres chez Bidb » (Bolivie).

Indomptable : Vladimir Hernández

Titre : Indomptable

Auteur : Vladimir Hernández 🇨🇺
Édition : Asphalte Noir (19/10/2017)
Édition Originale : Indómito (2016)
Traduction : Olivier Hamilton

Résumé :
La Havane, de nos jours. Un jeune ingénieur en électronique, Mario Durán, se retrouve en prison après avoir trafiqué des accès Internet avec son meilleur ami et complice de toujours, Rubén.

À leur grande surprise, il est libéré prématurément, à condition de prêter main forte au vol d’un coffre-fort, pour lequel ses compétences techniques et celles de Rubén sont indispensables. Un boulot apparemment facile… ce qui éveille la méfiance de Durán.

À raison. Quelques heures après le casse, il se retrouve enterré vivant dans un parc de La Havane, le cadavre de Rubén à ses côtés. Il n’aura dès lors plus qu’une seule idée : se venger de « l’Homme Invisible », leur commanditaire… Encore faut-il savoir de qui il s’agit réellement.

Polar mené à un train d’enfer, Indomptable nous transporte dans les rues de La Havane pour nous montrer le Cuba d’aujourd’hui, et sa jeunesse désillusionnée qui rêve d’ailleurs.

Critique :
Comment réussir à foirer sa journée et se retrouver à moitié mort dans un trou. Suivez bien les conseils…

1. Bénéficiez d’une liberté conditionnelle et sortez de prison,
2. Montez à l’arrière de la moto de votre pote et ancien complice,
3. Suivez-le dans la combine géniale qu’un type lui a proposé,
4. Accomplissez le casse en bidouillant le système de sécurité,
5. Ne vous méfiez pas et tournez le dos à un type armé,
6. Sortez du trou, couvert de sang, de terre, la rage au ventre et ruminez votre vengeance.

Pour réussir à avoir un type à vos basques qui veut se venger, il suffit de ne pas respecter sa parole et de demander à votre homme de main, qui a des problèmes de vue, de le tuer. Simple comme un coup de feu loupé…

Raconté ainsi, on pourrait croire que ce n’est jamais qu’une énième histoire de vengeance. En effet. Et pourtant, si cela semble à un récit réchauffé, l’auteur a réussi à lui donner un souffle et de la profondeur.

Tout en instrumentant sa vengeance, Durán va aussi nous parler de la ville de La Havane et de ce qu’il se passe à Cuba : misère noire, bidonvilles, émigration clandestine dans des barques, en direction des États-Unis, corruption, magouilles, salaires de merde, l’embargo…

La dictature qui ne dit pas son nom est sous-jacente. La génération de Rubén et de Durán n’a pas les mêmes aspirations que celle de leurs parents.

A la différence de la génération perdue de leurs parents, et de celle du désenchantement – ou plutôt des jérémiades- qui avait suivi, ils rejetaient le projet social collectif. Comme tant d’autres enfants nés sous la période spéciale, élevés dans une ouverture économique illusoire empreints d’un pragmatisme post-millenium, ils se sentaient totalement libérés des compromis idéologiques d’antan. Ils ne croyaient qu’en l’initiative personnelle. Il était clair pour eux qu’en politique les dés étaient pipés et que la seule issue qu’ils offraient étaient une salle d’attente donnant sur un futur toujours plus incertain.

Pas de bons sentiments, dans le scénario, cela se résout à la testostérone et avec des armes, bien entendu. Ceci n’est pas une vengeance fine, telle celle de Monte Cristo. Ce sera une traque, intelligente tout de même, afin de trouver le mystérieux commanditaire du casse.

En alternance avec le récit, des chapitres seront consacrés à la jeunesse de Durán et à ses années passées en prison, avec toutes les emmerdes que cela implique (dont les viols). Durán semble être fait de métal, pourtant, il a des faiblesses, mais au moins, il apprend de ses erreurs.

Un roman noir brutal, sans concessions, ou quelques surprises nous attendrons au tournant. Le roman n’est ni trop long, ni trop court, en 256 pages, l’auteur arrive à planter ses décors, à donner vie à ses personnages, à les étoffer, sans en faire trop, tout en nous dressant un portrait peu flatteur de La Havane.

Un bon roman noir où l’on ne s’ennuie pas une seconde. Dès les premières pages, je me suis faite happer par le récit et j’ai apprécié ma folle cavalcade avec l’ami Durán et ses guns.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°2XX], Le Challenge « Le tour du monde en 80 livres chez Bidb » (Cuba) et Le Mois Espagnol (et Sud-Américain) chez Sharon – Mai 2022 (Fiche N°19).

Nos vies en flammes : David Joy

Titre : Nos vies en flammes

Auteur : David Joy
Édition : Sonatine Thriller/Policier (20/01/2022)
Édition Originale : When These Mountains Burn (2020)
Traduction : Fabrice Pointeau

Résumé :
Retraité depuis quelques années du service des forêts, Ray mène une vie solitaire dans sa ferme des Appalaches. Il attend sans vraiment attendre que son fils Ricky vienne le rejoindre. Mais celui-ci a d’autres préoccupations – se procurer sa dose quotidienne de drogue, par exemple.

Autour d’eux, leur monde est en train de sombrer : le chômage qui s’est abattu sur la région, les petites villes dont la vie s’est peu à peu retirée, la misère sociale, la drogue. Bref, l’Amérique d’aujourd’hui, dont Ray contemple les ruines, alors que les montagnes environnantes sont ravagées par un incendie.

Le jour où un dealer l’appelle pour lui réclamer l’argent que lui doit son fils, Ray se dit qu’il est temps de se lever. C’est le début d’un combat contre tout ce qui le révolte. Avec, peut-être, au bout du chemin, un nouvel espoir.

Critique :
La région des Appalaches est un formidable terreau pour les auteurs de roman noir car tous les ingrédients y sont réunis pour donner de l’épaisseur au contexte social : chômage, pauvreté, misère sociale, drogues, paumés, forêts dévastées par la surexploitation…

Les personnages sont à l’image de cette région : désespérés, camés, perdus…

Dans ce roman fort noir, plusieurs destins vont s’entrecroiser : un père et son fils junkie qu’il ne veut plus voir, un frère drogué et sa sœur qui n’en peut plus de le voir dévaster sa vie, des dealers, des flics qui tentent de faire leur job, des ripoux. La totale, quoi.

L’auteur ne tire pas à boulets rouges sur les drogués, bien au contraire, il arrive facilement à nous expliquer ce qu’est devenue leur vie depuis qu’ils se sont camés, commençant, comme bien des autres, avec des médicaments prescrits à volonté après un accident ou tout simplement volés, achetés à la sauvette.

Les drogués sont seuls, leurs familles sont dévastées, elles ne savent plus comment les aider, ne veulent plus le faire, ne veulent plus les croire parce qu’elles savent que leurs promesses d’arrêter ne sont que des paroles en l’air, que dès qu’ils le pourront, les drogués les voleront pour aller s’acheter leur dose.

Les drogués oublient très vite leurs bonnes résolutions une fois que l’on agite un sachet devant eux, ou à la perspective d’en avoir un.

Ce sont des portraits d’une Amérique jeune et dévastée que l’auteur dresse et le constat est amer : ce sont les gouvernements qui ont commencé à droguer leurs concitoyens en laissant arriver sur le marché des médicaments dont personne n’avait pris la peine de signaler qu’ils entraîneraient une forte dépendance.

Une fois de plus, David Joy nous dépeint une Amérique qui part en eau de boudin, qui sacrifie ses jeunes, ses habitants, se foutant pas mal de leurs déchéances, de leur misère… Justice absente, flics débordés, parents dépassés, tout est réuni pour que les drames arrivent.

C’est sombre, noir, les portraits des personnages sont taillés à la serpe, sans fioritures, à l’os, mais il n’en fallait pas plus pour leur donner une épaisseur. Avec peu de matière, l’auteur vous fabrique des portraits réalistes.

Mon seul bémol est que je n’ai pas ressentit des émotions fortes durant ma lecture, comme j’en avais ressentie avec les autres romans de Joy (Là où les lumières se perdent / Ce lien entre nous).

Malgré tout, ce roman est puissant et explore avec justesse les relations familiales entre les drogués et les membres de leur famille qui en ont vu de toutes les couleurs.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°119] et Le Mois du Polar chez Sharon (Février 2022 – N°01).

Jours de sable : Aimée De Jongh

Titre : Jours de sable

Scénariste : Aimée De Jongh
Dessinateur : Aimée De Jongh
Traduction : Jérôme Wicky

Édition : Dargaud (21/05/2021)

Résumé :
Washington, 1937. John Clark, journaliste photoreporter de 22 ans, est engagé par la Farm Security Administration, l’organisme gouvernemental chargé d’aider les fermiers victimes de la Grande Dépression.

Sa mission : témoigner de la situation dramatique des agriculteurs du Dust Bowl. Située à cheval sur l’Oklahoma, le Kansas et le Texas, cette région est frappée par la sécheresse et les tempêtes de sable plongent les habitants dans la misère.

En Oklahoma, John tente de se faire accepter par la population. Au cours de son séjour, qui prend la forme d’un voyage initiatique, il devient ami avec une jeune femme, Betty. Grâce à elle, il prend conscience du drame humain provoqué par la crise économique. Mais il remet en question son rôle social et son travail de photographe…

Critique :
1937, États-Unis… Le krash boursier de 1929 a eu lieu et une partie de l’Amérique se prend de plein fouet le Dust Bowl.

Pour les ignares du fond de la classe, le Dust Bowl n’est pas la finale du championnat organisé par la ligue américaine de football américain, mais une série de tempêtes de poussière qui s’est abattue sur les plaines des États-Unis !

L’Oklahoma, le Kansas et le Texas, furent touchés, dans les années 30, par la sécheresse et une série de tempêtes de poussière provoquant une catastrophe écologique et agricole.

Si jamais, relisez (ou lisez) « Les raisins de la colère » de Steinbeek…

La première chose que l’on admire, dans ce roman graphique, ce sont les dessins de l’autrice : de belles grandes planches montrant des décors new-yorkais et ensuite de la région de l’Oklahoma (dans le manche de cet état qui ressemble à une poêle à frire).

Si N-Y grouille de vie et misère, dans l’Oklahoma, ça grouille de misère et la vie se cache tant il est difficile de respirer ou de vivre dans cette région touchée de plein fouet par ces nuages de poussières.

Les couleurs sont dans des tons pastels et même sans paroles, ces grandes planches parlent plus qu’un discours. Sans avoir le choc des photos, on a le choc des dessins et pas besoin du poids des mots, les images parlent d’elles-mêmes.

Des grands dessins sur des pleines pages ou sur des doubles pages : l’envie est grande de les enlever de la bédé et de les accrocher au mur, tant ils sont magnifiques.

De plus, le scénario ne manque pas de profondeur avec les réflexions des habitants de l’Oklahoma sur les photos que prend John Clark : c’est de la mise en scène !

Lui-même se posera la question sur son travail de photographe : est-ce qu’il rend justice aux habitants soumis au Dust Bowl ? La mise en scène est nécessaire pour faire une belle photo, certes, mais donne-t-elle vraiment la dimension de leur souffrance, de ce qu’ils endurent depuis des années ?

Moi qui me plaignais ces derniers temps de ne pas ressentir des émotions dans certains romans lus, ici, j’en ai pris plein ma tronche, des émotions !

Pas de pathos, pas de larmoyant, l’autrice n’est pas là pour faire pleurer dans les chaumières, et pourtant, elle est arrivé, de pas ses dessins, ses personnages, les actions de John Clark, par les dialogues, à me donner des frissons et à faire monter l’eau aux yeux, afin d’en ôter la poussière.

Une magnifique bédé qui va s’en aller rejoindre le clan des bédés d’exceptions dans ma biblio.

Manger Bambi : Caroline de Mulder

Titre : Manger Bambi

Auteur : Caroline de Mulder
Édition : Gallimard (07/01/2021)

Résumé :
Bambi, quinze ans bientôt seize, est décidée à sortir de la misère. Avec ses amies, elle a trouvé un filon : les sites de sugardating qui mettent en contact des jeunes filles pauvres avec des messieurs plus âgés désireux d’entretenir une protégée.

Bambi se pose en proie parfaite. Mais Bambi n’aime pas flirter ni séduire, encore moins céder. Ce qu’on ne lui donne pas gratis, elle le prend de force.

Et dans un monde où on refuse aux femmes jusqu’à l’idée de la violence, Bambi rend les coups. Même ceux qu’on ne lui a pas donnés.

Critique :
Oubliez le gentil petit faon de votre enfance !

Ici, Bambi, c’est une jeune fille de quinze ans qui a bouffé de la vache enragée toute sa vie et qui en veut à la terre entière, sauf à sa mère, bizarrement, alors qu’elle est alcoolo, brutale, en décrochage total dans l’éducation de sa fille, du ménage, bref, elles vivent dans un taudis.

Bambi, pour se faire des thunes, décide de jouer avec les sugar daddy, ces hommes dans la force de l’âge qui veulent se faire des petites jeunes. Bambi ne fait pas ça pour payer ses études, comme bien des filles, mais pour palper le max de pognon et, au passage, leur écraser les roustons.

Bambi, c’est du maquillage genre camion volé, tu vois ? Faut masquer les coups qu’elle s’est prise dans la face, par sa daronne. Son daron ? Il a joué les filles de l’air, il a juste laissé son Sig Sauer et Bambi, elle aime jouer avec l’arme. Pour elle, c’est l’équivalent d’un doudou chez un marmot.

Avec son gun, elle se sent plus forte. C’est plus izi (easy) pour forcer les daddy à filer leur oseille.

Bambi, c’est cru, trash ! Autant dans le récit que dans le langage. Wesh, les mecs et les bitch, va falloir réviser son argot et son langage d’jeun’s ! TKT, Google vous aidera si vous captez pas.

Bambi, c’est du roman noir à fond d’blinde ! T’y aventures pas si tu cherches des petits coeurs roses, tu trouveras que dalle !

L’autrice te raconte la misère ordinaire, simple, courante, celle que l’on a croisé un jour dans notre vie et qu’on a vite détourné les yeux, se moquant de la gonzesse ou du mec qui sentait pas bon, sans penser que sa mère elle avait p’têt abdiqué le ménage.

Avec ce langage cru, celui des jeunes de nos jours, ça renforce le côté filles en perte de vitesse, filles qui se donnent un genre, filles qui se pensent les plus fortes, et qui le sont, sauf quand le vernis craque et qu’on se rend compte qu’elles ne sont que des filles paumées, apeurées. Mais plutôt crever la gueule ouverte que de l’avouer !

Avec un personnage comme Bambi et ses copines, tu sais pas trop si tu dois leur coller des claques dans leur gueule de petites merdeuses, les flinguer direct ou laisser pisser le mérinos.

Elles sont trop loin dans la misère sociale que pour espérer les en sortir. L’autorité, elles en veulent pas. Bambi encore moins. Elle aime que sa mère et ses deux copines. Parfois avec des clash…

Bambi, c’est un roman noir vachement noir, mon frère. Le rayon de soleil ? Cherche pas et carre-le toi bien profond où tout le monde pense. Y’a pas d’édulcorant, pas de sucre, ou alors, c’est de la poudre qu’on sniffe.

Bambi, c’est le récit d’une société qui part en couilles, qui abandonne ses jeunes, qui ne sait pas comment les aider, qui le fait, mais mal.

C’est l’histoire de gamines qui ne savent pas trop si elles veulent être sauvées ou pas. Et si oui, même elles ne savent pas comment, hormis palper le grisbi et se tirer en Thaïlande pour glander grave sa mère. Ce qui ne les aiderait pas, mais ça, elles en savent que pouic.

Bambi, c’est un roman noir qui te met mal à l’aise. C’est un roman trash qui parle de violences, de coups tordus, d’arnaques, de pétage de plombs de ce qui fut, un jour, une gentille petite fille tout mignonne et qui, à cause de cette chienne de vie, a mal tournée et est devenue enragée envers le monde entier.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°88].

Les femmes n’ont pas d’histoire : Amy Jo Burns

Titre : Les femmes n’ont pas d’histoire

Auteur : Amy Jo Burns
Édition : Sonatine (18/02/2021)
Édition Originale : Shiner (2020)
Traduction : Héloïse Esquié

Résumé :
Dans cette région désolée des Appalaches que l’on appelle la Rust Belt, la vie ressemble à une damnation. C’est un pays d’hommes déchus où l’alcool de contrebande et la religion font la loi, où les femmes n’ont pas d’histoire.

Élevée dans l’ombre de son père, un prêcheur charismatique, Wren, comme sa mère avant elle, semble suivre un destin tout tracé.

Jusqu’au jour où un accident lui donne l’occasion de reprendre sa vie en main.

Ce premier roman inoubliable, qui dépeint la lutte de deux générations de femmes pour devenir elles-mêmes dans un pays en pleine désolation, annonce la naissance d’une auteure au talent époustouflant.

Un récit d’émancipation vibrant de beauté et de rage.

Critique :
Les Appalaches… Je n’y ai jamais mis les pieds mais j’ai l’impression de les connaître par coeur, tant je les ai découvertes au travers de la littérature.

Pas avec de la littérature joyeuse, mais au travers de la Noire, celle qui parle de conditions sociales miséreuses, de gens qui boivent, qui distillent leur alcool, qui se droguent, qui vivent chichement, certains étant à la limite des hommes des bois tellement ils vivent dans un isolement quasi total.

Ici, le patriarcat fait loi. Comme partout ailleurs, vous me direz… Oui, mais ici, c’est pire qu’ailleurs !

Comparées aux femmes qui vivent là-bas, nous sommes des reines pourvues de multiples droits car celles du livre n’ont souvent que le droit de la fermer et de se taire, tout en pondant des chiards et en s’occupant de leurs maris, pauvres petits gamins qui ont besoin d’une mère pour essuyer leur merde.

Dans ce récit, on se prend la ruralité de plein fouet. Et la religion dans la gueule. Les gens vont à l’église le dimanche et certains pratiquent encore le culte avec des serpents.

Bizarrement, même si les femmes sont résignées, ce ne sont pourtant pas des femmes faibles, sans volonté. Elles auraient voulu changer de vie, mais les montagnes des Appalaches ne leur ont pas permis de se libérer et celles qui voulaient foutre le camp se retrouvent mariées avec des enfants, vivant dans un mobile-home ou dans une cabane en rondins.

Ce qui marque le plus, dans ce roman noir profond, c’est la puissance des personnages, qu’ils soient adultes ou adolescente, comme Wren, la fille du manipulateur de serpent qui la garde dans sa cabane, perdue au fond des bois, régnant tel un dictateur sur ce petit territoire et sur deux sujets : son épouse et sa fille.

Malgré le fait que je ne me sois pas vraiment attachée à Wren, malgré le fait que le récit soit assez lent, qu’il n’y ait pas vraiment d’action, j’ai apprécié cette lecture en apnée, cette descente dans l’intimité de deux familles où les hommes ne foutent pas grand-chose et où ce sont les femmes qui portent tout à bout de bras.

Dans d’autres romans, je me serais ennuyée, mais ici, jamais. L’atmosphère est oppressante, sans jamais l’être trop et la construction du récit est intelligente. Si la première partie concerne le récit vu aux travers des yeux de Wren, les parties suivantes seront pour les récits de sa mère, Ruby et de sa meilleure amie, Ivy, avant de passer à Flynn, le moonshiner (il distille de l’alcool).

Ces différentes trames temporelles apportent un éclairage intéressant sur le récit, nous apporte des réponses sur le pourquoi ses deux femmes sont restées sur ces collines boisées, sur leur vie d’avant et d’après, leurs rêves…

Un roman puissant, sans pathos aucun, avec des personnages tout en nuance, désespérés, perdus, cherchant leur voie dans cette Rust Belt qui ne fait de cadeau à personne et n’offre pas du travail à tous. Alors on boit pour oublier, parce que c’est plus simple de se laisser porter par la vie, que d’être acteur de la sienne.

Un roman noir porté par une belle écriture, simple, sans fioritures, trempée dans une encre très sombre, décrivant ces vies fracassées, cette Nature imposante, cette société où le fait de naître femme vous condamne déjà à être ce les hommes voudront que vous soyez et ne vous laissera aucune opportunité de changer de vie (à moins qu’une bite ne vous pousse).

Une histoire ancrée dans un réalisme qui fait frissonner car nous avons beau être dans une fiction, elle n’est guère éloignée de la réalité.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°49].

Joe : Larry Brown

Titre : Joe

Auteur : Larry Brown
Édition : Folio (2001) / Gallmeister Totem (2014/2018)
Édition Originale : Joe (1991)
Traduction : Lili Sztajn

Résumé :
Gary Jones a peut-être bien quinze ans. Sa famille vagabonde, arpente les rues et les bois du Mississippi tandis qu’il rêve d’échapper à cette vie, à l’emprise de son bon à rien d’ivrogne de père.

Joe Ransom a la quarantaine bien sonnée. Il ne dénombre plus les bouteilles éclusées et les rixes déclenchées.

Lorsqu’il croise le chemin de Gary, sauver le jeune garçon devient pour Joe l’occasion d’expier ses péchés et de compter enfin pour quelqu’un.

Ensemble, ils vont avancer et tracer à deux un cours sinueux, qui pourrait bien mener au désastre… ou à la rédemption.

Critique :
♪ Hey Joe, where you goin’ with that gun in your hand ? ♫ (*)

Oui, Joe a un flingue sous le siège de sa voiture et oui, faut pas emmerder Joe…

Joe, il faut aussi le taxi, chargeant ses journaliers, des pauvres hommes Noirs, qu’il emmène faire bosser dans la forêt où ils doivent empoisonner des arbres afin d’en planter des autres, de ceux qui rapporteront du fric.

Le titre du roman est court, peu recherché, mais l’important est ce qui se trouve dedans : un pur roman noir de chez noir, aussi sombre que dans le trou du cul d’une taupe, occupée à creuser une galerie, au fond d’une mine, à minuit, par une nuit sans lune.

Tous les niveaux de sombritude sont cochés et on ne ressort pas de cette lecture en sautillant gaiement. Oubliez le pays des Bisounours, ici, c’est l’alcool qui sert à supporter des vies de misères, des boulots de merde, où l’on trime beaucoup pour gagner peu.

L’auteur prendra le temps avant de nous amener à la rencontre entre Joe Ransom, quadra qu’il ne faut pas faire chier et Gary Jones, gamin de 15 ans, analphabète qui ne sait rien de la vie, trop occupé qu’il fut à suivre ses parents dans plusieurs états.

Les descriptions des différents personnages qui hantent ces pages sont flamboyantes, profondes, détaillées. Des vies de misère, de crève-la-faim, de débrouillardises, de petits trafics en tout genre sont décrites au scalpel et les décors sont grandeurs nature, pollués aussi, puisque tout le monde jette ses canettes ou bouteilles par le fenêtre de son pick-up.

Dans cette petite ville du Mississippi que l’on pourrait appeler Bouseville ou Ploucville, le temps semble s’être arrêté. C’est une chape de plomb qui pèsera sur les épaules du lecteur qui a osé s’aventurer ici. Sans compter les tripes qui vont se serrer en voyant tout ce que Wade fait subir à ses enfants, notamment à son gamin, Gary.

Le père Jones, le fameux Wade, est LE personnage que l’on a envie de noyer dans la rivière du coin avant de creuser un grand trou pour l’y enterrer. Si les autres personnages traînent des casseroles à leurs culs de bouseux, lui, il a la collection complète.

Cet homme est égoïste, fainéant, alcoolique, voleur, menteur, exploiteur et j’en passe. Décapsuler une bière dans son périmètre est aussi dangereux que d’ouvrir une boîte de thon dans une pièce remplie de chats affamés.

Certains romans noirs sont poisseux de sang, « Joe » est un roman noir poisseux de misère. Les portraits sont esquissés avec justesse, ils sont fouillés, réalistes, certains sont même fait avec tendresse (John Coleman). Mais c’est noir de chez noir, sans espoir. Criant de vérité, de désespoir, de sueur, de sang, de saloperie…

Bref, la ruralité que l’on n’a pas envie d’arpenter en vrai mais qui nous plait vachement bien en version littéraire. Ce roman noir, c’est l’Amérique archi profonde, pauvre, alcoolique, minable où les gens triment du matin au soir pour gagner quelques sous.

(*) Hey Joe – Jimi Hendrix

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°35].

San Perdido : David Zukerman

Titre : San Perdido

Auteur : David Zukerman
Édition : Livre de Poche (11/03/2020)

Résumé :
Qu’est-ce qu’un héros, sinon un homme qui réalise un jour les rêves secrets de tout un peuple ?

Un matin de printemps, dans la décharge à ciel ouvert de San Perdido, petite ville côtière du Panama aussi impitoyable que colorée, apparaît un enfant noir aux yeux bleus.

Un orphelin muet qui n’a pour seul talent apparent qu’une force singulière dans les mains. Il va pourtant survivre et devenir une légende.

Venu de nulle part, cet enfant mystérieux au regard magnétique endossera le rôle de justicier silencieux au service des femmes et des opprimés et deviendra le héros d’une population jusque-là oubliée de Dieu.

Critique :
Ne cherchez pas la ville de San Perdido (Panama) sur une carte, vous ne la trouverez pas.

San Perdido a beau être fictive, cela ne l’empêche pas de peser de tout son poids sur ses habitants les plus pauvres et d’être d’un tel réalisme qu’on la dirait vraie.

Le récit commence en 1946, dans le bidonville, avec l’arrivée d’un jeune garçon Noir aux yeux bleus étranges que Felicia surnommera La Langosta.

Retenez bien son arrivée ! Il a beau être muet, lui aussi pèsera de tout son poids dans le récit, même s’il n’aura pas le monopole car dans ces pages, tout le monde aura son importance, son rôle à jouer, une participation quelconque. La Langosta sera le fil rouge du roman, ne le perdez pas de vue et laissez-vous toucher par son don étrange.

Malgré le nombre des personnages, vous ne les confondrez pas., rassurez-vous. Ils sont travaillés, détaillés et possèdent de la profondeur : qu’ils soient issus du bidonville ou du palais d’en haut, qu’ils tirent le diable par la queue ou qu’ils vivent dans l’opulence, qu’ils tâchent de s’en sortir comme ils peuvent ou qu’ils magouillent…

Ce roman qui mélange habillement le roman noir et d’aventure, la fable et le réalisme, la politique, l’histoire, nous entraînera du San Perdido du bas à celui du haut, nous mettant face à des injustices perpétrées par les riches et les puissants, par ceux qui se trouvent au-dessus des lois, ceux qui profitent de la misère humaine pour l’exploiter encore plus, se moquant de la justice qui n’existe pas pour eux, sauf que…

Certains ont envie de rétablir la balance à leur manière et La Langosta est parfait dans le rôle de juge silencieux, à tel point qu’on aimerait qu’il existe en vrai, que cette jolie fable soit réelle et qu’un jour, quelque part, tout le monde puisse bénéficier des services de La Mano…

Sans bouger de mon canapé, j’ai voyagé loin, j’ai exploré une terre inhospitalière, une décharge dans un bidonville, mais au milieu des détritus, j’ai trouvé de belles personnes (et quelques voyous). A contrario, dans les palais où les puissants pètent dans la soie, je n’y ai trouvé que des magouilleurs, des profiteurs, des jouisseurs de la vie (et du sexe). Et pourtant, pas de manichéisme.

Porté par une belle écriture, simple sans jamais être simpliste, j’ai passé un moment de lecture qui fut enchanteur dès les premières lignes avalées et qui se termine par un coup de cœur.

Il aurait été dommageable que je ne lise pas cette belle fresque humaniste où le soleil illumine chaque page, même les plus sombres.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 11 Juillet 2020 au 11 Juillet 2021) [Lecture N°250] et le Mois Espagnol chez Sharon – Mai 2021.

Dehors les chiens – Les Errances de Crimson Dyke – Tome 1 : Michaël Mention

Titre : Dehors les chiens – Les Errances de Crimson Dyke – Tome 1

Auteur : Michaël Mention
Édition : 10/18 Grands détectives (18/02/2021)

Résumé :
Californie, juin 1866. Crimson Dyke, agent des services secrets, sillonne l’Ouest et traque les faux-monnayeurs pour les livrer à la justice. Tandis qu’il est de passage dans une ville, un cadavre atrocement mutilé est découvert. Crimson intervient et se heurte aux autorités locales.

Mais lorsque d’autres crimes sont commis, ce sont les superstitions et les haines qui se réveillent. Crimson décide alors d’enquêter, traqué à son tour par les shérifs véreux et les chasseurs de primes.

Sueur, misère et violence : Dehors les chiens réinvente le western avec réalisme, sans mythe ni pitié.

Critique :
Yes, un western ! Et pas écrit par n’importe qui, mais par Michaël Mention, qui, j’en aurais mis ma main à couper, allait y apporter sa touche personnelle et nous sortir un excellent roman western.

Bingo, j’ai gagné ! Non seulement le western n’est pas mort, mais l’auteur lui rend un vibrant hommage en respectant ses codes habituels mais en les cuisinant à sa sauce, ce qui donne quelque chose de consistant sans pour autant être indigeste.

D’ailleurs, il nous écrirait une romance qu’elle serait sans aucun doute magnifique et loin d’être neuneu… Parce qu’avec lui à l’écriture, on peut être sûr que la société va passer à la moulinette et que son analyse sera pointue et le diagnostic sévère.

Avec Michaël Mention, même une bête scène de rasage devient magistrale, remplie de poésie, de questionnement (avant que l’on ne comprenne qu’il s’agit d’un simple rasage). Mieux, j’ai même pensé me trouver devant une scène de sexe alors que ce n’était des ouvriers qui posaient des voies de chemin de fer…

Son personnage principal, Crimson Dyke, agent des services secrets, n’est pas bourré de gadgets comme un 007, mais chevauchant toute la journée, avec ses petites douleurs un peu partout et une odeur qui fleure bon le canasson en sueur (ça fouette !).

Heureusement, si l’auteur est doué pour décrire des ambiances au plus précis, nous donnant l’impression que nous y sommes, il est incapable encore de produire un roman en odorama. Mais je vous jure qu’il ne manque que le bruit et les odeurs pour y être.

Son western se double d’une enquête policière car 22 ans avant les crimes de Whitechapel, un assassin se prend déjà pour Jack The Ripper avant l’heure, mais au lieu d’éventrer des pauvres prostituées, il éventre des hommes. On peut dire d’eux qu’ils ont sorti leurs tripes.

Fort bien documenté, l’auteur nous balade dans cet Ouest sauvage et sans justice, ou alors, celle des plus forts ou de ceux qui tirent plus vite que les autres, qui magouillent mieux, qui tirent en traître.

Non, son Ouest n’a rien à voir avec La Petite Maison Dans La Prairie et si d’aventure une enfant chutant en courant, ce serait parce qu’elle serait poursuivie ou abattue d’une balle dans le dos. No stress, ça n’arrivera pas.

C’est un western sans concession que Mention nous sert, un western qui nous démontre que la société d’aujourd’hui et celle d’avant, ne sont pas fort différents, (les colts et les canassons en moins) et que ce qui fait tourner notre Monde faisait déjà recette dans celui des collons Américains : haine des autres, repli sur soi, violences, magouilles, corruption, femmes méprisées,…

Ces gens qui, obnubilés par l’idée d’éradiquer la menace de l’éventreur, ne réalisent même pas compte que les moyens qu’ils mettent en œuvre pour y parvenir les rendent encore plus mauvais que ledit éventreur.

Que la sauvagerie n’est pas que chez les Indiens (qu’ils considèrent comme non civilisés), mais qu’elle était présente aussi chez les colons et qu’elle n’attendait que l’étincelle pour exploser et sortir, faisant plus de dégâts que les quelques connards éventrés.

Voilà un western noir que j’ai dévoré, bouffé jusqu’à la dernière miette, avec avidité et c’est le cœur lourd, très très lourd, que je l’ai refermé, me disant que la justice, une fois de plus, ne frappait pas les vrais coupables et que, une fois de plus, les gens regardaient par le petit bout de la lorgnette.

Je me suis sentie, à la fin, comme dans un roman mettant en scène les enquêtes du commissaire Kostas Charitos et seul ceux (celles) qui les ont lues comprendront.

Merci, Michaël (je me permets) pour ce putain de roman western, mâtiné de roman noir et pour ces réflexions sur notre société pourrie. Tu as mis le doigt là où ça faisait mal.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 11 Juillet 2020 au 11 Juillet 2021) [Lecture N°219] et Le Challenge « Il était une fois dans l’Ouest » chez The Cannibal Lecteur.

Thrillers polars 02