Batman (Renaissance) – 01 – La Cour des Hiboux / 02 – La Nuit des Hiboux : Scott Snyder et Greg Capullo

Titre : Batman (Renaissance) – 01 – La Cour des Hiboux / 02 – La Nuit des Hiboux

Scénariste : Scott Snyder
Dessinateur : Greg Capullo

Édition : Urban Comics DC Renaissance (2012)
Édition Originale : Batman, book 1: The court of Owls (2012/2013)
Traduction : Jérôme Wicky

Résumé :
Après une longue période d’absence, Bruce Wayne est de retour sous le masque de Batman, à la poursuite d’un mystérieux tueur en série aux allures de hibou, et dont la prochaine cible n’est autre que…

Bruce Wayne. Plus il progresse dans son enquête, plus le Chevalier Noir rassemble d’éléments sur les motivations de son ennemi. Il découvre alors une sombre vérité mêlant la famille Wayne aux fondations troubles de Gotham City.

Critique :
Lorsque Batman joue au détective, j’adore ! Direction Gotham, LA ville du justicier, SA ville, qu’il se targue de connaître sur le bout des doigts. T’en es bien sûr, Batman ?

Eh bien non, notre chauve-souris ne connait pas tout de sa ville, la preuve, il n’était pas au courant de l’existence de la Cour des Hiboux, celle de la comptine, mais qui, apparemment, existe aussi dans la réalité.

La première chose qui vous happe, dans ce comics, ce sont les dessins : sombres, précis, détaillés (sauf pour certains visages). Greg Capullo a un bon coup de crayon, il sait y faire et donner vie à la terrible ville de Gotham.

Quand au scénariste, Scott Snyder, ce n’est pas un branquignole non plus. Sa saga American Vampire était plus que terriblement géniale.

Dans ce diptyque, notre justicier masqué va en baver, souffrir, ne plus savoir à quel saint se vouer, revenir en lambeaux, en miettes, cassé, abattu,… Si vous aimez Batman, vous allez souffrir pour lui.

Bref, ce premier tome, c’est de la balle, Batman mène une enquête, s’en prend plein la tronche et le lecteur ne sait plus si la cour des hiboux est une légende ou une réalité.

Batman lui-même aura bien du mal dans cette aventure. Je pense à un passage en particulier, où l’on ne sait pas trop s’il fait un délire ou si tout est réel et où le dessinateur, afin de renforcer cette idée de confusion, nous offrira quelques pages à l’envers ou sur le côté.

Entre nous, il aurait pu s’en passer, cela a rendu la lecture difficile. Mais dans l’ensemble, le premier tome est un 4 étoiles, que ce soit pour le scénario ou pour les dessins, les décors, les couleurs. C’est un bel album !

Le tome 2 est donc la suite du premier, ce qui est logique, vous me direz et dans celui-ci, le voile va se lever sur la Cour des hiboux et sur celui qui en veut autant à Batman. Enfin, qui en veut autant à Bruce Wayne, avant qu’il ne se rende compte que Bruce et Batman ne font qu’un.

Scènes de batailles, de bagarres, de baston, Batman va devoir sortir le grand jeu et finira mal en point, avec plein de bobos (on aurait envie d’aller le soigner, le dessinateur lui a fait un beau visage).

Les révélations sont fortes, violentes, incroyables, même Bruce a du mal à y croire, tout comme nous, d’ailleurs. Mais au moins, elles étaient fracassantes. Ensuite, on dirait que l’auteur ne veut pas assumer ce pavé dans la mare et fait en sorte de semer le doute dans l’esprit des lecteurs et de Bruce Wayne.

Il restera un doute, à vous de décider si vous croyez à la version des auteurs ou que vous décider de penser que le criminel a fumé la moquette et c’est fait un film. Au moins, c’était inattendu et culotté au possible !

Ensuite, cet arc narratif est terminé et la suite du comics est faite de petites histoires, dont notamment Mister Freeze, que j’ai bien aimée (Premières neiges). Celle avec le père d’Alfred Pennyworth, majordome pour les Wayne, lui aussi (La Chute de la maison Wayne) n’était pas mal du tout. J’ai bien aimé ces deux histoires.

La dernière, avec le personnage d’Harper Row (L’Esprit dans la machine), je l’ai lue en diagonales parce que je n’ai pas accroché du tout.

Le changement de dessinateur y a été pour quelque chose, je préfère le style de Greg Capullo. Ceci est un détail, mais à cause de la dernière histoire que j’ai lue en diagonale, le deuxième tome perd des plumes à la cotation. J’aurais préféré que l’arc narratif avec la cour des hiboux soit plus long. Ben oui, je l’aimais bien.

Malgré ce petit bémol de fin de tome, j’ai passé un excellent moment (oserais-je dire un chouette moment alors qu’on parle de hiboux ?) avec cette cour des hiboux, qui n’avaient pas de poux, mais à qui on jetterait bien des cailloux, car avec le crime, ils font joujoux et ça, ce n’est pas chou ! Cet arc narratif est un petit bijou qui m’a laissé sur les genoux…

An American Year

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°121],  le Challenge « American Year » – The Cannibal Lecteur et Chroniques Littéraires (du 15 novembre 2023 au 15 novembre 2024) # N°31 et Le Mois du Polar – Février 2024 – Chez Sharon (Fiche N°13).

Justice indienne : David Heska Wanbli Weiden

Titre : Justice indienne

Auteur : David Heska Wanbli Weiden
Éditions : Gallmeister (2021) / Gallmeister Totem (2022)
Édition Originale : Winter counts (2020)
Traduction : Sophie Aslanides

Résumé :
Sur la réserve indienne de Rosebud, dans le Dakota du Sud, le système légal américain refuse d’enquêter sur la plupart des crimes, et la police tribale dispose de peu de moyens.

Aussi les pires abus restent-ils souvent impunis. C’est là qu’intervient Virgil Wounded Horse, justicier autoproclamé qui loue ses gros bras pour quelques billets. En réalité, il prend ses missions à cœur et distille une violence réfléchie pour venger les plus défavorisés.

Lorsqu’une nouvelle drogue frappe la communauté et sa propre famille, Virgil en fait une affaire personnelle. Accompagné de son ex-petite amie, il part sur la piste des responsables de ce trafic ravageur.

Tiraillé entre traditions amérindiennes et modernité, il devra accepter la sagesse de ses ancêtres pour parvenir à ses fins.

Critique :
C’est avec trois ans de retard que j’ai enfin sorti ce roman qui se trouvait dans les 6 premiers titres de ma « PAL Urgente » (des titres datant de mai 2021) !

C’est vous dire mon retard abyssal (ou la quantité de livres que je voudrais lire et qui se trouvent sur la PAL Urgente).

J’ai reporté sa lecture et ce fut un tort, parce que nom de Wakan Tanka, c’était de la bonne came, ce roman noir.

Came n’est peut-être pas le mot le plus approprié, je risque de me faire taper dessus par Virgil Wounded Horse… Il n’aime pas que de la blanche (héroïne) circule dans la réserve de Rosebud (comme le traîneau de Charles Foster Kane et le mot magique pour faire attaquer des dobermans dans un Columbo). Cette réserve indienne est située dans le Dakota du Sud.

Dans ce roman noir, je me suis attachée très vite à Virgil (justicier professionnel) et à son neveu, Nathan, qui a bien du mal à se faire accepter à l’école, parmi les autres Natifs, puisqu’il est sang-mêlé… Oui, dans ce roman, la racisme, la xénophobie et l’imbécilité sont de sortie : pour les Blancs, Nathan est trop Rouge et pour les Natifs, il ne l’est pas assez.

Sérieusement ? Encore une preuve qu’il est impossible que nous soyons les êtres les plus avancés de la Terre. Et dans ces pages, il y aura des véritables morceaux de racistes débiles, qui se croient plus intelligents que les autres, plus « vrais américains » et j’ai eu mal au bide devant certains insultes, comme « nègre des plaines »…

Ce roman noir n’est pas un polar qui avance sur les chapeaux de roues, que du contraire, il prend son temps, mais je n’ai pas vu le temps passer, tant le récit et tout ce qui se trouvait dedans était des plus intéressants.

En fait, l’intrigue policière n’est pas le but en soi de ce récit. Elle est présente, Virgil enquête, mais c’est le côté social qui est le plus important dans ce roman noir.

L’auteur appartient à la nation Lakota Sicangu et il en profite pour parler de tout ce qui ne va pas dans les réserves, sans pour autant sombrer dans le pathos ou le larmoyant.

C’est avec beaucoup de finesse et sans filtres aucune, que ces problèmes sont incorporés dans le récit, lui donnant de l’épaisseur, de la profondeur et j’ai eu du mal à quitter Virgil, Nathan et Marie Short Bear, l’ex petite amie de Virgil.

Un excellent roman noir, social, qui m’a emporté dans le Dakota du Sud durant deux jours de lecture intense, totalement immergée dans la culture amérindienne et dans les problèmes des Natifs de cette réserve (et de tous les autres ailleurs).

Rien de reluisant, dans les réserves : beaucoup de misère, d’alcool, de drogues, de chômage, de décrochage scolaire, de racisme de la part des Blancs et même entre eux (ça, c’est dans tous les peuples, l’Homme est ainsi)…

Mais pourquoi ne l’ai-je pas lu plus tôt, moi ?? J’avais une pépite de roman noir dans ma PAL et j’ai reporté sa lecture à la Saint-Glinglin (qui vient d’arriver)…

An American Year

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°111],  le Challenge « American Year » – The Cannibal Lecteur et Chroniques Littéraires (du 15 novembre 2023 au 15 novembre 2024) # N°23 et Le Mois du Polar – Février 2024 – Chez Sharon (Fiche N°04).

Hacendado – L’honneur et le sang : Philippe Thirault et Gilles Mezzomo

Titre : Hacendado – L’honneur et le sang

Scénariste : Philippe Thirault
Dessinateur : Gilles Mezzomo

Édition : Glénat (14/06/2023)

Résumé :
Mexique, 1863. Sur ces terres arides où la violence et le crime sont le lot quotidien de la population de l’État de Sonora, le descendant d’une ancienne lignée de conquistadors tente de faire perdurer les notions de justice et d’honneur.

C’est pour sauver l’honneur bafoué de son nom que Don Armando, riche Hacendado, décide de faire justice lui-même en condamnant son propre fils à une mort lente mais certaine…

Plus tôt en ville, le jeune Don Diego aurait été aperçu couteau à la main, laissant la belle Doña Joselita au milieu d’une mare de sang.

Convaincu de la culpabilité de ce fils retors au visage d’ange qui ne cesse de clamer son innocence, Don Armando l’emmène dans le sinistre désert de Sonora et l’y abandonne !

Or, dans ces sierras, il faut autant redouter la sauvagerie des bêtes que celle des hommes.

Territoire de la bande d’Abraham Hinter, le plus cruel des chasseurs d’Apaches, le désert est un enfer peuplé de tueurs que le dernier sentiment humain a quitté depuis longtemps…

Critique :
Sonora, ton univers impitoyable, tes déserts mortels, tes bandes Apaches sans pitié, tes chasseurs d’Apaches sans foi, ni loi…

Bref, vaut mieux pas se retrouver dans le désert du Sonora, sans cheval… La Mort vous trouvera, sans aucun doute, la seule incertitude, c’est par qui ou par quoi (soif, chaleur, puma, Apaches,…).

Voilà un western qui ne fait pas dans la dentelle et qui va droit au but : il est violent, sans concession et je n’y ai pas vu l’ombre d’un poil de Bisounours.

Nous sommes en 1863, au Sonora, dans une riche Hacendado, propriété de Don Armando, descendant des Conquistadors et fort attaché aux notions de justice et d’honneur.

Alors, quand on accuse son fils d’avoir tué deux hommes et violé une jeune fille, il ne cherchera même pas à savoir si c’est vrai ou si son fils s’est trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment : le père fera justice lui-même en abandonnant son fils dans le désert, sans cheval. S’il survit, c’est que Dieu lui a pardonné… Il a bon dos, Dieu.

Ce western est classique tout en étant différent : déjà, pas de cow-boys, mais des vaqueros, puisque nous sommes l’État de Sonora (au Mexique). Pas de duel dans la rue non plus, mais des fusillades, des massacres, des empoignades et des coups de poignards dans le dos (au sens figuré).

Oui, c’est un western violent, pas vraiment fait pour les petits enfants. C’est un récit qui ne laisse que peu de répit, qui possède du suspense (il est coupable oui ou non ?), de l’action, une femme qui n’a pas froid aux yeux et des sauvages qui ne sont pas toujours les Indiens, contrairement à ce que pensent les Mexicains, anciens descendants des conquistadors.

La sauvagerie est une maladie hautement contagieuse… Pour imiter un enfant, je dirais que « c’est celui qui dit qui l’est ». Lorsque l’on voit les comportements des Mexicains ou des Blancs dans cette histoire, on se dit que les plus civilisés sont encore les chevaux (et tous les animaux). Deux scènes l’illustreront parfaitement bien et feront froid dans le dos.

Un western sombre, malgré les belles couleurs utilisées par le dessinateur, un western violent, même si on a l’amour d’une mère pour son fils. Un western où Dieu est souvent nommé, mais jamais là. Un western qui surprendra, de par ses petites choses cachées, que l’on apprendra au fil de l’histoire et qui, jusqu’à la dernière case, n’aura pas dit son dernier mot.

Bref, un western comme je les aime…

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°052].

Juillet de sang : Joe R. Lansdale

Titre : Juillet de sang

Auteur : Joe R. Lansdale
Édition : Folio Policier (2007)
Édition Originale : Cold in July (1989)
Traduction : Christophe Claro

Résumé :
Parce que Richard Dane a dû se défendre, il a fait un énorme trou dans la tête d’un homme qui se trouvait dans son salon. Le cambrioleur lui a tiré dessus sans une hésitation. Richard a pour lui la légitime défense, la pénombre de la nuit et la protection de son fils qui dormait dans une pièce mitoyenne.

Les flics comprennent très bien. Ce que ne sait pas encore Richard c’est que s’ils sont à ce point « sympas », ce n’est pas simplement pour soigner leur image auprès du contribuable. Derrière le fait divers se cache une tout autre histoire totalement invraisemblable.

Qui était ce type venu de nulle part ? Que cache la mansuétude des enquêteurs et pourquoi le FBI s’en mêle-t-il ?

Richard, bouleversé par sa propre vulnérabilité, sidéré par ses instincts révélés, va devenir à son tour une cible, car s’il a défendu son enfant, le cambrioleur aussi était le fils de quelqu’un…

Critique :
Je veux bien qu’aux États-Unis, ils soient assez cool avec le concept de légitime défense lorsque quelqu’un s’introduit chez vous et vous menace d’une arme, mais tout comme Richard Dane, j’avais trouvé les flics vachement sympas lorsqu’ils sont venus récupérer le cadavre du cambrioleur et qu’ils lui ont annoncé le connaître : Freddy Russel.

Si l’entourage de Richard le félicite pour le carton réalisé, lui est mal à l’aise, il a tout de même tué un homme et cet homme, il avait un père. Son daron, c’est Ben Russel et il vient de sortir de prison. Il n’est pas content du tout.

Dans ce roman policier, rien n’est comme on pourrait le penser de prime abord et le lecteur/lectrice ira de surprises en surprises. Tout comme les personnages principaux, qui n’ont pas fini d’être étonnés.

Ce roman policier de 300 pages se lit très vite. Il possède du rythme, de l’adrénaline et la touche d’humour qui est celle de Lansdale, même s’il a écrit ce roman avant la série des Hap Collins & Leonard Pine, que j’adore.

On ne va pas se mentir, il n’y a rien d’exceptionnellement profond dans ce roman, mais il fait le job de divertir et d’étonner, de nous emmener là où l’on ne s’y attendait pas du tout, au départ. Même si parfois, l’auteur usera de ficelles et que son final manquera un peu de finesse, de travail.

Mais bon, je ne vais pas bouder mon plaisir non plus, parce que oui, avec ce polar noir, j’ai pris mon pied niveau action, adrénaline, mystères, suspense et personnages, parce que Jim Bob Luke vaut son pesant de cacahuètes !

Un petit polar qui se lit très vite, qui divertit bien, qui est violent et qui va vous faire sourire grâce à des bons mots dans les dialogues. L’intrigue est bien trouvée, mais effectivement, ce ne sera pas le polar de l’année.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°042] et Le Mois Américain en solitaire – Septembre 2023.

Les Gens des collines : Chris Offutt

Titre : Les Gens des collines

Auteur : Chris Offutt
Édition : Gallmeister (07/04/2022)
Édition Originale : The Killing Hills (2021)
Traduction : Anatole Pons-Reumaux

Résumé :
Depuis quatorze ans dans l’armée, où il est devenu enquêteur, Mick Hardin revient dans ses collines natales du Kentucky pour constater que son mariage est brisé. Sous le choc, il s’enferme dans la cabane de son grand-père avec une solide provision de bourbon.

Mais sa soeur Linda, première femme shérif du comté et pas du genre à se laisser marcher sur les pieds, vient solliciter son aide sur une affaire : le cadavre d’une jeune veuve vient d’être retrouvé dans les bois.

Or les gens des collines ont tendance à rendre justice eux-mêmes, d’où la nécessité de court-circuiter les rumeurs inopportunes, avant que les vendettas ne dégénèrent.

Peut-être Mick, enfant du pays et vétéran respecté, pourra-t-il apprendre la vérité et agir à temps ?

Critique :
Là-bas, au Kentucky, on sait tout le prix du silence…

Là-bas, dans les collines du Kentucky, lorsque vous arrivez devant une maison, on vient vous accueillir avec une carabine ou un révolver et vous êtes prié de balancer votre généalogie (je suis le fils de, le petit-fils de).

Bref, c’est hospitalier au possible. D’accord, les maisons sont isolées, mais tout de même.

Une femme a été retrouvée morte, assassinée et dans ces collines appalachiennes, on a tendance à rendre justice soi-même.

Le proverbe dit que celui qui veut se venger, doit creuser deux tombes : une pour sa victime et une pour lui-même, mais dans ces collines, il faudra en creuser dix, car chacun vengera la mort d’un de ses parents, même lointain. C’est pour cela que Linda, la nouvelle shérif, charge son frangin, Mick Hardin, enquêteur militaire à l’armée, de l’aider à faire toute la lumière, avant que les armes ne parlent et ne tuent des innocents.

Dans ce roman, l’enquête policière n’est qu’un prétexte, pour l’auteur, de parler de ces collines qu’il connait bien et surtout, des « petites gens » qui y vivent (je le dis sans insultes). Il nous parle d’eux, de leurs manies, de leurs pensées, de leur étroitesse d’esprit, de leur machisme, sexisme, des traditions, des loyautés, des liens familiaux, des rivalités qui se règlent dans la violence, de l’esprit du clan (pas le klan) et de leur côté rural (ils se sentent mal, perdu lorsqu’ils sont dans une grande ville).

De cet auteur, j’avais adoré « Nuis Appalaches » et je pensais retrouver ce qui m’avait donné ma dose d’émotions, avec ce roman. Ce ne fut pas le cas, sans pour autant que ce roman soit mauvais, que du contraire. Lorsque vous avez eu l’excellence, tout ce qui vient ensuite vous semblera fade.

Les dialogues sont des plus intéressants, notamment dans les silences des gens, dans leurs actions, ou non action, tout comme les personnages, taillés au cordeau, au plus simple, sans pour autant qu’ils manquassent de profondeur.

Mick Hardin est un enquêteur hors pair, mais il est miné par ses problèmes de couple. Quant à sa sœur, elle a un agent du FBI dans les pattes et le peu que nous saurons de lui, apportera de la nuance à son portrait de mec rigide.

L’avantage de ce roman noir, c’est qu’il est court et qu’il évite de tourner en rond ou de faire des pages juste pour avoir plus d’épaisseur. Tout est dit en 240 pages, l’auteur nous a parlé de ces petites gens des collines, on a appris à les connaître, on a désamorcé des situations épineuses, on a assisté à des morts stupides, des vengeances à la con, commises pas des mecs parce qu’il fallait le faire et on pousse un soupir de soulagement en se disant qu’on est bien où l’on est.

Un roman noir composé de gens taiseux, qui ne parlent jamais pour ne rien dire, prompt à sortir les armes à feu, à se venger, qui aiment vivre dans leur petit coin, avec leurs propres codes claniques.

Un roman noir qui nous fait entrer dans un autre monde, que l’on pourrait croire révolu, tant il semble appartenir à l’ancien temps, celui de nos ancêtres. Un roman où la nature est omniprésente et où les gens savent encore attendre que pousse une racine de ginseng.

Un très bon roman noir, même s’il ne m’a pas apporté les émotions de « Nuis Appalaches ». Une belle approche sociologique.

— Partout ailleurs, les gens vivent un peu plus longtemps chaque année. Nous, nos vies raccourcissent. Ça arrive nulle part ailleurs dans le pays. Il y a vingt ans de ça, l’espérance de vie était plus élevée ici.
— Les collines nous tuent à petit feu.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°041] et Le Mois Américain en solitaire – Septembre 2023.

‭La frontière : ‬Patrick Bard

Titre : ‭La frontière

Auteur : Patrick Bard
Édition : Points Thriller (2003)

Résumé :
Bienvenue à Ciudad Juàrez, frontière américano-mexicaine… du mauvais côté du Rio Grande, celui du Mexique. Bienvenue dans « la ville où même le diable a peur de vivre ».

Journaliste au grand quotidien espagnol El Diario, Toni Zambudio est envoyé à Juàrez par son rédacteur en chef pour enquêter sur une série de meurtres abominables : en moins de deux ans, les cadavres de cinquante trois jeune filles atrocement mutilées ont été retrouvés aux abords de la ville.

Crimes rituels commis par une secte satanique ? Œuvre d’un terrifiant serial killer ?

Toutes les questions restent en suspens dans cet univers d’extrême pauvreté où la mondialisation économique a apporté avec ses usines l’humiliation, le commerce de la chair, la violence et la mort.

Et ce que va découvrir Toni Zambudio est pire encore que le pire des cauchemars… Terriblement noir et violent, ce roman ne fait hélas que se baser sur des faits réels.

Critique :
Vous en avez marre du temps pourri du mois de mai, de cette pluie qui n’arrête pas de tomber (du moins, en Belgique), de ces températures trop basses pour mai ?

Vous rêvez de vacances, de soleil, de farniente ? Alors pourquoi ne pas prendre un billet pour le Mexique et la charmante ville de Ciudad Juàrez ? Si, si, elle est charmante et peuplée de Bisounours…

Bon, ce n’est pas ce roman noir qui me donnera envie d’aller passer des vacances au Mexique ! J’aurais mieux fait de lire un guide du routard, cela aurait été moins dangereux pour ma santé mentale.

Ciudad Juàrez « la ville où même le diable a peur de vivre »… La ville du crime n’a jamais aussi bien porté son nom puisque des jeunes femmes se sont assassiner, mutiler, dépecer, violer, profaner et vous compléterez la liste. Les cadavres des prostituées assassinées par jack The Ripper étaient en meilleur état… C’est vous dire.

Partant de faits divers réels, l’auteur en profite aussi pour nous parler des conditions de travail abominables et précaires qui sont celles des travailleuses à la frontera : salaires de misère, pas de sécurité, pas d’hygiène et l’obligation, tous les mois, de montrer son tampon usagé pour prouver qu’elles ne sont pas enceintes.

Bosser pour des multinationales, à bas prix, pour que les actionnaires et les hauts dirigeants s’en foutent plein les fouilles… Dans des usines qui se foutent bien de polluer à mort, de foutre en l’air les nappes phréatiques et où la corruption, la mordida, comme ils disent (pot-de-vin).

Comme prévient l’auteur, une centaine de jeunes femmes ont été retrouvées violées et mutilées ces dernières années à Juarez, et si l’on a bien arrêté et jugé quelques coupables ou prétendus tels, l’ensemble de l’affaire n’a jamais été élucidé.

Ce livre est donc plus qu’une fiction, c’est une œuvre de révolte qui dénonce, entre autres, la perversité d’un système où les grandes multinationales viennent chercher chez les plus pauvres la main-d’œuvre bon marché, corvéable et humiliable à merci.

On ose espérer que la réalité est un peu moins horrible, mais c’est malheureusement loin d’être une certitude. Lorsque l’on peut faire fabriquer des marchandises à bas prix et se faire une grosse marge bénéficiaire, certains n’hésitent pas et y vont à fond, se moquant de la misère humaine qu’ils créent et de la pollution qu’ils font.

Un roman noir ultra violent, réaliste, inspiré de faits divers vrais et qui vous plongera dans la noirceur humaine, sans vous laisser entrevoir une mini lumière au fond du tunnel. Ici, tout est sombre, sanglant, sans concession. Une lecture en mode « j’arrête de respirer ».

Ciudad Juàrez est la capitale mondiale du meurtre, pas celle des gentils Bisounours et elle a une réputation à tenir. Croyez-moi, elle le fait super bien et ce roman ultra noir ne vous donnera pas envie d’aller vous balader dans cette ville (ni même au Mexique).

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°XXX] et Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°XX].

Les contemplées : Pauline Hillier

Titre : Les contemplées

Auteur : Pauline Hillier
Édition : La manufacture de livres (09/02/2023)

Résumé :
À l’issue d’une manifestation à Tunis, une jeune Française est arrêtée et conduite à La Manouba, la prison pour femmes. Entre ces murs, c’est un nouvel ordre du monde qu’elle découvre, des règles qui lui sont dictées dans une langue qu’elle ne comprend pas.

Au sein du Pavillon D, cellule qu’elle partage avec vingt-huit codétenues, elle n’a pu garder avec elle qu’un livre, « Les Contemplations » de Victor Hugo. Des poèmes pour se rattacher à quelque chose, une fenêtre pour s’enfuir.

Mais bientôt, dans les marges de ce livre, la jeune femme commence à écrire une autre histoire. Celle des tueuses, des voleuses, des victimes d’erreurs judiciaires qui partagent son quotidien, lui offrent leurs regards, leurs sourires et lui apprennent à rester digne quoi qu’il arrive.

Critique :
♫ Les portes du pénitencier, sur elle, se sont refermées ♪ Et c’est là que certaines finiront leur vie ♪ Comme d’autres femmes l’ont finies… ♫

De la ville de Tunis, personne n’a envie d’aller faire un tour à La Manouba, la prison pour femmes, où il ne fait pas bon y être emprisonnée.

Dans les prisons, il y a des règles à respecter, propres à l’établissement et lorsqu’on est bleue, on ne les connait absolument pas, ce qui peut entraîner bien des problèmes. Heureusement, notre jeune française, emprisonnée pour avoir manifesté, aura la chance de se faire enfermer dans le pavillon D.

Oui, de la chance ! Non pas que ce soit le Club Med, mais comparé à d’autres pavillons, celui-ci est un peu plus humain que d’autres, moins violents et notre jeune femme fera des rencontres décisives, qui lui ouvriront les yeux.

Oui, elle a eu de la chance de tomber sur des femmes pas trop méchantes, qui l’ont prises sous leurs ailes, qui lui ont expliqués les règles, qui l’ont aidées à s’en sortir, à survivre dans un univers carcéral qui n’est pas fait pour nous…

Là bas, une jeune fille a été condamnée à plusieurs années de prison pour tricherie au bac et on en croisera une autre, qui, en plus d’avoir été violée, aura droit à l’ignominie rajoutée à l’ignominie : ou comment tripler la peine d’une victime, tout en blanchissant l’homme coupable de l’acte (et tous les autres). Terrifiant !

Sans jamais sombrer dans le pathos, l’autrice nous raconte ce qu’elle a vécu dans cette prison tunisienne, les multiples humiliations, l’enfer des transports et les règles bien souvent idiotes et illogiques : pour te doucher, tu gardes ta culotte, parce que la techa d’une femme, c’est sale (les gardiennes sont pourtant des femmes), mais ces mêmes gardiennes ne se priveront pas de vous fouiller l’anus et le vagin… Juste pour le plaisir de vous humilier.

Une fois de plus, voilà un récit qui m’a pété à la gueule et qui m’a tordu doucement les tripes, car comme l’autrice, j’ai moi aussi, pris une leçon d’humanité. Qui aurait cru cela possible, avec des femmes incarcérées pour meurtres ou pour d’autres motifs ?

Bien qu’entre nous, j’accorderais bien une médaille à celle qui tua son mari (et son père et ses frères), vu ce qu’elle avait endurée.

Dans ce roman coup de poing, dans cette autobiographie, il n’y a pas que l’autrice, qui est l’héroïne, mais aussi toutes ces femmes enfermées avec elles, ces parias, ces femmes qui ne sentiront plus le soleil réchauffer leur peau, qui continueront de subir leur incarcération, sachant qu’une fois sortie, rien de bon ne les attendra dehors.

Sans jamais les juger (bien qu’au départ, elle le fasse), l’autrice apprendra à les connaître, à les écouter se confier, parlant de leurs fautes, de leurs crimes, de leurs erreurs, le tout avec beaucoup d’humanité aussi, balançant aux orties ses préjugés moraux.

Être une femme, dans certains pays, c’est plus qu’une épreuve, plus que marcher sur une corde raide, plus qu’une punition, plus qu’un risque de tous les jours, de toutes les heures. Dans certains pays, les hommes ont TOUS les droits, les femmes n’en ont aucun.

Dans ces société patriarcales, hautement religieuses, les êtres humains font rarement preuve de mansuétude, de pardon, de gentillesse et les femmes trinquent deux fois : victimes de la violence des hommes (ou de la société) et ensuite, victimes de la violence des autres femmes (gardiennes, belle-mère, mère,….).

Un magnifique roman qui met en avant la sororité, l’humanité, la solidarité, dans un lieu où il est si facile de la perdre.

Un roman magistral et un coup de coeur !

Leur âme au diable : Marin Ledun

Titre : Leur âme au diable

Auteur : Marin Ledun
Édition : Gallimard Série noire (2021) / J’ai Lu Policier (2022)

Résumé :
L’histoire commence le 28 juillet 1986 par le braquage, au Havre, de deux camions-citernes remplis d’ammoniac liquide destiné à une usine de cigarettes. 24 000 litres envolés, sept cadavres, une jeune femme disparue.

Les OPJ Nora et Brun enquêtent. Vingt ans durant, des usines serbes aux travées de l’Assemblée nationale, des circuits mafieux italiens aux cabinets de consulting parisiens, ils vont traquer ceux dont le métier est de corrompre, manipuler, contourner les obstacles au fonctionnement de la machine à cash des cigarettiers.

David Bartels, le lobbyiste mégalomane qui intrigue pour amener politiques et hauts fonctionnaires à servir les intérêts de European G. Tobacco.

Anton Muller, son homme de main, exécuteur des basses œuvres. Sophie Calder, proxénète à la tête d’une société d’évènementiel sportif.

Ambition, corruption, violence. Sur la route de la nicotine, la guerre sera totale.

Critique :
J’ai arrêté avant même de commencer… Arrêté quoi ? Ben de fumer, pardi ! Je n’ai jamais commencé de ma vie.

Pourquoi ? Parce que fumer transformait vos vêtements en trucs puants (et vous avec) et que si j’avais acheté des clopes, j’aurais eu moins d’argent pour acheter des livres.

Beurk ça pue et en plus, ça coûte un bras, tout en vous transformant en addict, alors, j’ai envoyé tout ça au diable. Ce qui n’était pas facile car à l’époque (les années 80/90), fumer était signe de liberté, de coolitude, d’avoir du style…

Marin Ledun nous propose un polar hyper documenté sur l’industrie du tabac et toutes ses magouilles, ses dérives, ses plans marketing bien huilés, bien hypocrisies, ses bonnes idées pour que les gens fument encore plus, que les politiciens n’entravent pas trop le droit de fumer partout et de s’en mettre plein les fouilles.

L’industrie du tabac, dans ce roman, n’a rien à envier aux mafias : pots-de-vin, pressions, intimidations, cadeaux pour tenir certaines personnes dans sa poche, meurtres, contrebande organisée, détournements d’argent, arrosage des politiciens, des scientifiques ou menaces… Tout est bon pour se faire du pognon, quitte à mentir, à cacher, à jouer avec les mots. Fumer provoquerait des cancers ? Mheu non !

Oui, ce roman est documenté, à fond, l’industrie des clopes n’est pas une œuvre caritative, ni de bienfaisance, ni écologique. Quant aux ingrédients rajoutés en schmet (en douce) dans le tabac, nous avons de la réglisse, du sucre, du chocolat (jusque là, tout va bien) et d’autres plus que dégueu, notamment le carburant pour fusées, du mercure, du plomb, de l’arsenic et de l’ammoniac…

Vous ne mangeriez pas ce que vous fumez ! Mais maintenant, j’aurai une pensée émue pour les fumeurs lorsque je nettoierai mes carreaux, puisque j’utilise un peu d’ammoniac mélangée avec mon produit fait maison.

Hélas, là où le bât a blessé, c’est que le roman est trop long et que les personnages ne m’ont pas touché, même s’ils étaient magnifique d’hypocrisie, de cynisme, de désabusement,…

L’un d’eux a manqué de crédibilité : David Bartels, est déjà assez glaçant de par sa cupidité et l’auteur lui rajoute le plaisir d’avoir tué quelqu’un. C’est bon, fallait pas en jeter plus ! Son côté « lobbyiste prêt à tout » en faisait un vilain très crédible, là, on a surjoué en sucrant le sucre.

Si j’ai apprécié ce que j’ai appris dans ce roman (même si je n’avais jamais eu de doutes quant aux méfaits en tout genre des cigarettiers), à partir de la moitié du récit, j’ai eu l’impression que l’on s’enlisait dans de la mélasse, ce qui a rendu la seconde moitié plus longue à lire et moins passionnante.

Dommage, parce qu’il y avait tout les ingrédients pour faire de ce roman une lecture addictive, sans ajout de substances illicites ou cancérigènes. L’industrie des cigarettes est un rouleau compresseur prêt à tout pour vendre ces clopes et ça, le roman le démontre bien, d’une manière magistrale même. Hélas, à un moment donné, le récit tourne un peu en rond, ce qui a cassé le rythme.

Malgré tout, cette lecture restera marquante pour ce qu’elle explore à fond, sans concession, nous rappelant que l’on déforeste aussi pour planter plus de plants de tabac et que ça, ça ne se mange pas !

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°161].

Ceci n’est pas un fait divers : Philippe Besson [LC avec Bianca]

Titre : Ceci n’est pas un fait divers

Auteur : Philippe Besson
Édition : Julliard (05/01/2023)

Résumé :
Ils sont frère et soeur. Quand l’histoire commence, ils ont dix-neuf et treize ans. Cette histoire tient en quelques mots, ceux que la cadette, témoin malgré elle, prononce en tremblant : « Papa vient de tuer maman ».

Passé la sidération, ces enfants brisés vont devoir se débrouiller avec le chagrin, la colère, la culpabilité.

Et remonter le cours du temps pour tenter de comprendre la redoutable mécanique qui a conduit à cet acte.

Avec pudeur et sobriété, ce roman, inspiré de faits réels, raconte, au-delà d’un sujet de société, le long combat de deux victimes invisibles pour réapprendre à vivre.

Critique :
Bizarrement, les féminicides font couler moins d’encre qu’un attentat terroriste. Pourtant, il y a des coupables et des victimes.

Se sentirait-on moins concernés par des hommes qui tue des femmes, que par des terroristes qui tuent aveuglément plusieurs personnes à la fois ? Ou bien ce sont les médias qui donnent plus de voix à un attentat qu’à des assassinats de femmes ?

Avant, lorsqu’un homme tuait sa femme, sa compagne, les journaux titraient « Il l’aimait tant qu’il l’a tué » et, comme bien des gens, j’ai mis du temps à me rendre compte de l’ineptie et de toute la fausseté de ce titre.

Non, il ne l’aimait pas, il n’aimait que lui, il n’a pas supporté que cette femme lui tienne tête, qu’elle veuille le quitter, qu’elle en aime un autre et pour se venger, il l’a assassinée. L’amour qu’il lui portait était toxique, mortel et personne n’a entendu les plaintes de la femme, personne n’a vu les signes ou pire, tout le monde a fait semblant de ne rien voir.

Avec ce roman de 200 pages, Philippe Besson frappe fort, là où ça fait le plus mal. En donnant la voix à un jeune homme, appelé par sa petite sœur parce que « papa a tué maman », il nous plonge dans l’enfer que vont devoir vivre ces deux enfants, il met le doigt là où ça fait le plus mal, versant du sel dans la plaie, pour qu’un jour, on puisse voir les symptômes et agir avant le drame.

Pas de pathos dans la narration, dans l’écriture, pas de surenchère dans le drame, juste ce qu’il m’a semblé être un bel équilibre dans ce récit où l’auteur décortique ce qui arrive après le meurtre (la visite chez les flics, l’organisation des funérailles, la vie après, le deuil, le stress post-traumatique, les questionnements, les regrets, les remords, l’impression qu’on aurait pu faire quelque chose, le procès…) et tout ce qu’il s’est passé avant, comme signes avant-coureurs, que personne n’a vraiment vu, qui ont été minimisés et que le père, violent, s’était bien gardé de crier sur tous les toits.

J’ai été horrifiée d’apprendre que le père assassin conservait les droits sur ses enfants mineurs, alors qu’il est un meurtrier… D’ailleurs, dans ce roman, bien des choses m’ont glacées d’effroi, à tel point que je ne saurais toutes les citer. Cela m’a révoltée, donné envie de vomir. Il était temps que j’apprenne…

Dans ce roman, j’étais en territoire inconnu, venant d’une famille banale où les violences conjugales n’ont jamais eu lieu (ni dans ma vie de femme mariée).

Ce roman est puissant, glaçant, c’est un coup de cœur tout en étant un coup de poing. Voilà qu’un drame atroce débouche sur une lecture captivante, émouvante, marquante.

Un comble, me direz-vous, qu’il faille un roman parlant d’une histoire vraie, d’un drame épouvantable, pour qu’il décroche plein d’étoiles à la cotation. C’est la preuve qu’il était bien écrit, d’une belle justesse.

Par contre, j’aurais aimé entendre d’autres voix que celle du fils de 19 ans, notamment celle de sa petite soeur de 13 ans, témoin du crime. De plus, j’étais persuadée que l’auteur avait dit, lors de l’émission de La Grande Librairie, qu’il avait donné la parole au père assassin. J’ai dû rêver (ou confondre avec un autre des romans présentés sur le plateau)…

Pourtant, j’aurais aimé qu’on lui donne la parole, à ce meurtrier, non pas pour lui trouver des excuses, mais pour tenter de comprendre ce qui avait basculer cet homme dans cette violence extrême (17 coups de couteau, tout de même !). L’auteur donne quelques pistes, mais j’aurais aimé avoir toutes les voix dans le récit.

Un magnifique roman, qui m’a mis de l’eau dans les yeux et dont j’ai bien du mal à décrire les émotions qui m’ont assaillies durant ma lecture. De la colère, de la rage, de la haine, l’envie de gueuler sur le système défaillant qu’est la police, la justice, les lois…

Et de la tristesse, beaucoup de tristesses devant toutes ces vies fichues irrémédiablement, tout ça à cause d’un homme qui avait peur d’être abandonné et qui ne savait pas aimer sans violence. Non, ce n’était pas un faits divers, c’est plus grave que ça et non, ce n’était pas de l’amour.

Une LC lue en apnée avec Bianca qui, tout comme moi, a été toute retournée. Là, je m’en vais piquer un Tchoupi à ma nièce….

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°138] et Le Mois du Polar, chez Sharon – Février 2023 (N°21).

Terres d’Ogon – Tome 1 – Zul Kassaï : Jean-Luc Istin et Kyko Duarte

Titre : Terres d’Ogon – Tome 1 – Zul Kassaï

Scénariste : Jean-Luc Istin
Dessinateur : Kyko Duarte

Édition : Soleil (09/11/2022)

Résumé :
Au nord d’Ogon on dit que le peuple Kulu est sous la protection des Zul Kassaï, dieux immortels à la peau rouge.

Lorsqu’un Tog sanguinaire assassine la famille du jeune Ubu, ce dernier se présente à ses dieux réclamant justice. La décision est prise : les Zul Kassaï ne feront pas la guerre aux Tog.

Roass’aa n’est pas de cet avis et décide de braver l’interdit et d’accompagner Ubu en pays tog.

Critique :
Les Terres d’Arran se spin-off de tous les côtés, puisque maintenant, nous pouvons aller en Terres d’Ogon, de l’autre côté de la grande bleue.

Si le scénario est au rendez-vous, cela ne me dérange pas que l’on nous sorte une nouvelle série.

Il faudra juste ne pas oublier la qualité afin de ne pas prendre les lecteurs et les lectrices pour des porte-monnaie ambulants.

Cet album commence doucement, gentiment, au coin d’un feu de camp. Une famille est réunie, elle est du peuple Kulu, un peuple pacifique.

Hélas, il y avait des gorilles dans le brume… Un groupe de Tog, des gros gorilles guerriers, qui aiment la chasse aux humains, faire couler le sang et qui ne s’embarrassent pas des traités de paix.

Ce récit est celui d’une vengeance, d’un apprentissage, d’un passage à l’âge adulte avant l’heure, d’une survie, de combats. Ubu est un survivant, il ne rêve que de venger sa famille assassinée, alors qu’il est tout frêle et ne sait pas manier d’armes.

Oui, le récit est classique : l’enfant va demander de l’aide, celle des Elfes Rouges, des dieux de Zul Kassaï. Il veut la justice, il veut la mort de celui qui a massacré, sans autre but que le plaisir, sa famille. Les guerriers Zul Kassaï lui apprendront à se battre.

C’est conventionnel à mourir et pourtant, on s’attache au gamin, on aimerait passer plus de temps avec les guerriers Rouges et finalement, avec un plat traditionnel, servi sans trop de changements, les auteurs ont tout de même réussi à m’accrocher et à me donner envie de poursuivre mes incursions dans les Terres d’Ogon qui ressemblent aux terres africaines ou sud-américaine, vu leurs décors (savanes, forêts luxuriantes, pyramides Mayas).

Une belle relecture de David contre Goliath, même si, dans cette histoire, le petit David Ubu s’est fait aider des Elfes Rouges pour terrasser le vilain Goliath qui était vraiment un sale gorille méchant et sadique, une grande gueule qui s’amusait à frapper les faibles ou les vieux.

Un premier album réussi, même si conventionnel au possible. Les dessins de Kyko Duarte sont toujours agréables à regarder.

Un album qui peut se lire indépendamment des autres de la collection des Terres d’Arran.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°99] et Le Challenge « Les textes courts » chez Mes Promenades Culturelles II (Lydia B – 56 pages).