La légende de Santiago : Boris Quercia

Titre : La légende de Santiago

Auteur : Boris Quercia
Édition : Asphalte Noir (11/10/2018)
Édition Originale : La sangre no es agua (2019)
Traducteur : Isabel Siklodi

Résumé :
Rien ne va plus pour Santiago Quiñones, flic à Santiago du Chili. Sa fiancée Marina ne l’aime plus, ses collègues policiers le méprisent, et il est rongé par la culpabilité depuis qu’il a aidé son beau-père, gravement malade, à mourir.

Aussi, quand il tombe sur le cadavre d’un trafiquant dans un resto chinois, son premier réflexe est d’empocher la demi-livre de cocaïne pure qu’il trouve également sur les lieux.

Un coup de pouce bienvenu pour traverser cette mauvaise passe, d’autant qu’on vient de lui confier une enquête sensible sur des meurtres racistes…

Mais ce faux pas ne va pas tarder à le rattraper.

Critique :
Me voici revenue du Chili où j’ai été enquêter sur des crimes lâches avec Santiago Quiñones.

Au passage, j’ai sniffé de la coke, subit un tremblement de terre, pris des coups dans la gueule, euthanasié son beau-père avec un coussin, cassé la gueule d’un pauvre innocent, et j’en passe.

– Toi, Santiago, quand tu fous la merde, tu ne la fous pas qu’à moitié.

C’est comme ça lorsqu’on suit les pas de Santiago Quiñones, on ne sait jamais trop dans quoi on va s’embarquer, juste que ce sera un truc assez barge, à la limite de la légalité, qu’on passera la ligne rouge de nombreuses fois car notre flic n’en est pas à une près. Je connais l’animal, ce n’était pas ma première.

Un clou chasse l’autre. Il y a toujours quelqu’un de plus méchant que toi, qui par comparaison te donne l’impression d’être un ange.

Niveau enquête, on ne peut pas dire non plus qu’on s’est foulé, Santiago et moi… Pas trop vite les gars, on ne se cherche pas du boulot non plus. Que les petits jeunes se fassent les dents sur les enquêtes, ils ne sont pas encore blasés, eux…

Moi, ça m’est égal, ils sont jeunes, ils débutent. Je demande à les voir dans quelques années, quand ils auront de la bedaine, quand ils éviteront de se mouiller, quand ils trahiront leurs propres principes et seront corrompus comme tout le monde. Mais je ne serai plus là pour le constater. Je serai certainement déjà quelques pieds sous terre, et cette enquête n’y changera rien.

Santiago Quiñones est un flic chilien qui n’entre dans aucune catégorie… Oubliez les fins limiers tels Sherlock Holmes, Hercule Poirot, Columbo et même Navarro, notre policier n’a rien reçu en héritage de ceux-là.

Les promotions ne sont pas pour lui, il est bordeline, ne s’embarrasse pas avec les règlements, sniffe de la coke volée, trompe sa femme, est un électron libre, vous montre un visage impassible en toutes circonstances et est poursuivi par sa « légende noire », comme il l’appelle.

« Je suis la pomme pourrie dans le panier, personne ne veut rester dans mes parages. Je suis l’exemple même du flic raté, qu’on montre du doigt aux nouveaux. Pour recadrer un petit jeune, j’ai entendu un collègue dire : « Si tu continues comme ça, tu vas finir comme Quiñones. » Je suis une légende, ils me croient capables de tout, et comme souvent dans les légendes, tout est faux. »

Peut-être que tout aurait été différent si je n’avais pas laissé les petits jeunes jouer aux détectives. Je serais allé droit au but, en commençant par passer les menottes au suspect et l’attacher à la cuisinière avant même de lui demander son nom. Mais c’est justement ce genre de réflexes qui m’ont toujours empêché de grimper les échelons. Je ne voulais pas en rajouter avec ma légende, je les ai laissés faire pour qu’ils apprennent le métier.

On ne se plonge pas dans un récit de Boris Quercia pour lire une enquête policière digne de ce nom : son flic est blasé, il n’enquête pas trop fort pour certains délits, bien que pour d’autres, il soit prêt à tuer les coupables, mais ce n’est pas en surchargeant ses narines de poudre blanche qu’on résout une affaire.

En fait, on lit l’auteur pour découvrir un portrait de la ville de Santiago du Chili comme aucun Tour Opérateur ne vous montrera. Avec Quiñones pour guide, on passe de l’autre côté du décor de carte postale et on explore les faces cachées et sombres de la faune chilienne.

Le Chinois a trois fils, tous délinquants – ils doivent avoir repris le flambeau. Un banal changement de gérance. Tant qu’il y aura des acheteurs, il y aura des vendeurs. À quoi ça sert de mettre en taule le dealer de service ? À rien, il sera remplacé par un autre et tout continuera comme d’habitude, eux qui trafiquent et nous à leurs trousses. C’est l’heure de la récré, on va tous dans la cour jouer aux gendarmes et aux voleurs.

Dans ce pays, c’est pas la modestie qui nous étouffe. Tout le monde sait comment améliorer notre économie, mais bizarrement, ça continue d’aller mal.

La première fois qu’on lit Quercia, on pourrait être perturbé par ses multiples retours en arrière afin d’explorer la vie de ses personnages, mais une fois qu’on a pris le pli (il vient très vite), on s’amuse de cette manière de faire redescendre l’adrénaline et de faire durer le suspense.

Pas de temps mort, même lorsque notre flic est face à sa mère qui ne se remet pas de la mort de son second mari, même face à ses problèmes avec son demi-frère qu’il vient de rencontrer ou face à ses aventures sexuelles assez folles (on est vachement plan-plan face à Santiago !!) ou ses soucis avec le contrôle anti-dopage.

Elle met de la poudre sur ma bite, dure comme un bâton. Elle ressemble à un beignet couvert de sucre glace.
Ensuite elle revient sur moi, me montrant son dos, et guide doucement ma bite jusqu’à son cul. Elle m’enfourche petit à petit et je rentre en elle doucement jusqu’à ce que ses fesses se posent sur mes hanches. On reste un moment comme ça, sans bouger. Angélica gémit. On ne bouge pas, mais elle me serre puis relâche à l’intérieur et c’est comme si elle me suçait. La coke se mêle à notre sang comme si des milliers de points traçaient des lignes de plaisir qui vont jusque dans ma tête. Angélica gémit encore et commence à bouger doucement en avant et en arrière, jusqu’à ce que j’explose en elle.

« Elle ne m’a jamais laissé l’enculer, il me dit, complètement bourré, un peu amusé et à la fois désemparé.
– C’est parce que tu ne bandes pas, gros lard… »

C’est toujours avec brio que l’auteur relance la machine, sans qu’elle s’essouffle et sans faire d’esbroufe car les emmerdes qui surgissent dans la vie de Santiago suffisent à alimenter la machine, le tout pimenté de soucis avec un peu tout le monde, que ce soit des bandits, des flics, sa mère ou des femmes un peu trop fatales.

Coucher avec Angélica de temps en temps réveillait mon amour pour Marina. Évidemment, il est impossible d’expliquer ça à ta femme.

Les 250 pages passent trop vite et on se surprend, au moment de tourner la dernière page, d’en redemander encore un peu plus. Merde, c’est fini…

Un roman brutal, sombre, violent, dont le personnage principal par en long dérapage incontrôlé et voit sa vie de merde partir en couilles sans qu’il ne puisse rien faire d’autres que de s’enfoncer un peu plus dans les ennuis car c’est plus fort que lui, Santiago a un côté destructeur.

Un flic torturé, déglingué, cynique, sarcastique, adepte de sexe et de coke, sans oublier les cigarettes et qui voit sa ville changer sous ses yeux, avec l’augmentation de la pédophilie, la montée de la xénophobie et des extrémistes en tout genre, prêt à tout pour rendre le Chili aux Chiliens.

Il nous insulte copieusement et nous sort le typique « vous ne savez pas à qui vous avez affaire », ainsi que l’autre grand classique de ceux qui regardent beaucoup la télé : « Je veux parler à mon avocat. » Il me gonfle tellement que je lui lance :
« Ton costume nazi, il est dans le coffre ? Ou c’est ton petit noir qui te le repasse ? »

C’est fantastique d’être chef, on peut dire une chose un jour et son contraire le lendemain, et ça passe crème. On ne demande de la cohérence qu’aux subalternes.

Allez, je pourrai encore un peu profiter de mon flic borderline avec le premier tome de la trilogie, le seul que je n’aie pas encore lu (Les rues de Santiago).

Personne n’a jamais rien fait, personne n’est jamais coupable de rien. Tout le monde a toujours de bonnes raisons, des politiciens véreux aux pédophiles. Les premiers disent que c’est la seule façon de financer la politique, les seconds que les enfants les ont provoqués, mais ils sont tous innocents, c’est toujours les circonstances.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (2018-2019).

22 réflexions au sujet de « La légende de Santiago : Boris Quercia »

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  5. Bin quand meme….le Chili reste a part dans les pays d’amerique latine…tu peux faire confiance aux policiers….je pense que je n’aurais pas pu tenir 13 ans autrement….;)….
    En tout cas cela me gene, c’est trop sombre…je sais que cela existe…que certains quartiers restent dans le boderline, mais c’est loin tres loin des favelas par ex. On ne parle pas d’envoyer l’armee ou une unite speciale de Kamikaze….bref….;)

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    • Heureusement !

      Bon, je suppose que l’auteur sait de quoi il cause avec son flic borderline et ces quartiers pouraves…. n’y vivant pas, je ne puis juger, et même si ça se passait à Bxl, je ne pourrais pas juger que ça existe ou pas :/

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      • oh je ne dis pas que cela n’existe pas….mais je te dirais que je trouve Paris plus dangeureux que Santiago…on n’a pas encore de portes blindees avec des tonnes de serrures….je rencontre souvent des filles marchant seules a 2h du mat…je pense que l’auteur, comme beaucoup d’auteurs de polar, utilise un endroit existant, un fait existant et en parle pendant 300 pages….mais il ne faut pas generaliser….;)

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        • Comme quoi, le danger n’est jamais là où on pense !! Attention que bien souvent, ce sont les serrures qui engendrent la peur et non la peur qui engendrent les serrures, un peu comme le Mur dans GOT…

          L’auteur a sans doute d’autres expériences que toi, ou alors, comme tu dis, il développe son sujet sur 300 pages, mais il ne devient jamais lassant, c’est ça qui est bien.

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          • oh oui il parait qu’il est bon….ouiii….bin on n’a pas encore cette peur…cela veut tout dire….;)….
            je me souviens de ce reportage de ghettos en belgique….pour se proteger d’eventuels delinquants….mais bon s’agit-il d’un exemple ?

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  6. Nan mais allô quoi ! Tu veux que je lise voire que je m’identifie à un tel mega looser de flic à la ramasse et qui en croque en plus? Dans un pays sud américain? Nan mais allô quôa! Moi j’veux du héros! Du prince charmant! Du mec musclé en costard bien repassé, plein d’ideaux, qui sauve la veuve et l’orphelin en tringlant au passage une ménagère bien sous tout rapport (comme môa-m’aime évidemment!)… bref… je n’accepterai pas un rencard avec ce tocard! 😜

    Non plus sérieusement, je sais que le principe de l’anti-héros plein de faiblesses et d’aspérités donne plus d’épaisseur aux personnages et paraît plus crédible par rapport à des héros tellement idéalisés qu’ils en deviennent ridicules (genre James Bond)… mais là je trouve que l’auteur va très loin en chargeant trop sa mule (hihihi dans une affaire de drogue! Charger sa mule ! Tu notes l’effort de trait d’esprit n’est ce pas? Chuis trop drôle !) dès le départ ! Je trouve ça aussi peu crédible qu’un James Bond en fait un mec aussi ravagé ! Donc impossible d’adhérer pour moi. Dès le départ. C’est souvent ce qui fait ma difficulté avec le roman «  série noire » avec des privés alcooliques à la vie sexuelle compliquée et aux amis louches… et évidemment dans le collimateur des flics officiels car très limite avec la loi. 🧐

    Les clichés de l’anti héros deviennent parfois aussi lassants que ceux concernant les héros Mister Parfait.🤨

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    • J’adore le coup de charger la mule !!! J’en ai pouffé de rire comme une débile (que je suis).

      Je vais lire prochainement un Harlequin de la série PASSION Intense et te sortir du bô mâle qui saute tout ce qui bouge et plus particulièrement la ménagère fatiguée de plus de 50 ans…

      Malgré son côté ravagé, Santiago est réaliste, vu le pays… Certes, ça ne fonctionnerait pas en France ou en Belgique, du moins, pas de nos jours… quoique… 😆

      Bond est moins crédible, il ne froisse même pas son costume, et 36 mecs tirant à la mitraillette dessus ne le touchent même pas !

      J’ai remarqué que les romans noirs d’Amérique Latine sont tous avec des flics ou des privés borderline, cynique, drogué, alcoolo ou dépressif comme un rat mort. la politique de leur pays doivent leur faire cet effet là…

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      • Ménagère fatiguée de plus de 50 ans??? Meuh… j’ai pas encore 50 ans moi!!! 😩😩😩 Et pis dans les Harlequin (pourquoi y z’ont rajouté un H au fait? C’est en rapport avec le fait qu’il faut fumer des trucs illégaux pour supporter de telles lectures???) les mecs y sautent pas sur tout ce qui bouge! Ils sont censés être romantiques et n’avoir d’yeux que pour l’héroïne ( l’héroïne… ça les change du H! Ahah ahah! Chuis trop drôle ! 😂🤣😂)…

        Ah ouais… c’est si pourri que ça l’Amérique du Sud? Purée ! Chuis bien contente de pas avoir les moyens de voyager moi!!! 🙄

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        • Mes confuses, je t’avais vieillie !! Je gâtouille, tu le sais bien, je ne sais même plus ce que je fais !! 😀

          Le H c’était pour que le personnage de Arlequin ne leur colle pas un procès… Ou alors, faut vraiment en fumer ! 😆

          Y’a pas une collection « harlequin porno » ouske le mec il ne pense qu’à vider ses réservoirs à ADN ??? Putain de littérature de merde, va 😛

          On va rester dans nos pays et on demandera à Rachel de nous raconter le Chili de là-bas 🙂

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