Sombre vallée : Thomas Willmann

Sombre Vallée - Thomas Willmann

Titre : Sombre vallée

Auteur : Thomas Willmann
Édition : Belfond (2016)

Résumé :
« C’est ainsi que l’homme et l’animal sortirent de l’étroit et sombre goulet qui, entaillant jusqu’à mi-hauteur la paroi désolée du massif montagneux, débouchait sur une immense plaine entourée d’une suite de sommets, havre insoupçonné de calme, asile de fertile solitude. C’était un endroit qui se suffisait à lui-même et ne tolérait la présence d’aucun élément extérieur. Il ne se défendait pas contre les intrus, mais se refermait aussitôt derrière eux, interdisant tout retour à un autre monde. »

Alpes bavaroises, fin XIXe siècle.

Quand l’étranger est arrivé sur sa mule un soir, les villageois se sont interrogés. Greider est-il vraiment peintre, comme il le prétend ? Ou est-il guidé par de plus sombres desseins ? Et puis un mort, un fils du clan Brenner, les fermiers qui règnent en maîtres sur la communauté. Et bientôt la mort d’un autre fils. Et d’autres encore…

Ceux qui dirigeaient jusque-là le village seraient-ils devenus des proies ? Tous les regards se tournent vers lui, Greider. L’étranger connaît-il les lourds secrets de la sombre vallée ? Et s’il était revenu pour mettre à exécution une vengeance ourdie de très longue date ?

Au cœur des montagnes bavaroises se noue un drame aux conséquences dévastatrices. Porté par une écriture puissamment évocatrice, un premier roman impressionnant, un suspense oppressant au service d’une histoire de haine et de revanche.

Mountain+darknessCritique :
« La montagne, ça vous gagne », qu’ils disaient. Tu parles ! Vu d’ici, on a envie de fuir à toutes berzingue de leur foutue montagne et surtout de leur trou du cul de village perdu dans une vallée des Alpes Bavaroises.

Ce roman porte bien son nom en français, la vallée est sombre et pas uniquement parce que nous sommes en hiver et que le soleil se couche avec les poules.

Non, ici, la sombritude (néologisme gratuit) elle est dans le cœur des gens, dans leurs âmes, dans l’acceptation de la domination d’une famille, le clan Brenner, comme si nous étions encore au Moyen-Âge ou dans en Sicile, sous la coupe de la Mafia.

Pourtant, que la montagne pourrait être belle dans cette vallée à la terre fertile s’il n’y avait pas ces foutus fils Brenner qui y font la loi. Ils sont six et bientôt, il ne seront plus que quatre, puis cinq… Une sorte de « Dix Petits Nègres » d’Agatha Christie rebaptisé « Six Fils Brenner ».

Le récit est oppressant car même si nous sommes dans une vallée, avec l’hiver qui arrive, ça devient un huis clos. L’auteur nous fait bien sentir qu’il y a un truc louche dans la venue dans ce village paumé du peintre Greider, mais au départ, on ne voit pas le lien.

C’est petit à petit aussi que l’on découvre que tout le village est sous tutelle de la famille Brenner et à un moment donné, en analysant les angoisses d’un personnage, j’ai compris jusqu’où cette main mise pouvait aller et là, ce fut l’horreur absolue lorsque l’auteur a confirmé mes pires craintes.

Les personnages sont taillés à la serpe, on n’en saura pas beaucoup sur eux, mais ce sera suffisant pour qu’on s’attache à certains, dont Greider, la veuve Gader, Luzi et Lukas tandis que les autres nous feront trembler de par leur morgue, leur froideur, leur façon d’être.

Le style d’écriture n’est pas trépidant, mais les pages se tournent toutes seules, car on veut savoir ce que Greider fout dans ce trou du cul paumé des alpes bavaroises, hormis dessiner les paysages et les maisons au fusain. Il n’y a pas que ça…

On voudrait aussi en savoir plus sur le clan qui règne telle la famille Ewing dans cet univers impitoyable et qui font montre de toute leur puissance, leur hégémonie ou de leur testostérone lorsqu’ils déambulent dans le village pour accompagner Greider chez la veuve Gader.

Comme dans le roman « Sécessions », les dialogues sont assez rares, mais ici, grâce à la plume de l’auteur, ça passe comme une lettre à la poste car certaines scènes sont puissantes, violentes, mais on en veut toujours plus car on veut savoir.

Vers la page 190, deux récits vont d’entremêler, deux récits du passé, mais qui auraient pu concerner aussi le présent (je l’ai pensé à un moment donné), deux récits violents, âpres, prenant, deux  histoires tragiques qui, dans le roman, sont séparées par un espace mais sont sœurs de par la violence sans borne qui les caractérisent.

Je quittais un récit la mort dans l’âme pour me replonger dans l’autre que j’étais contente de retrouver car je voulais connaître le fin mot et au moment où… boum, on revenait au premier, et l’auteur a ainsi joué avec le suspense et l’envie de tout savoir durant de nombreuses pages, faisant monter mon rythme cardiaque.

Niveau ambiance western, elle s’y trouve bel et bien dans ce côté d’un Clint Eastwood qui jouerait le rôle de Preacher (Pale Rider) ou à la manière d’un Henry Fonda (Mon nom est Personne) et bien entendu, dans le final, mais sans les mouches, vu la climat.

Le seul bémol sera pour quelques phrases en allemand non traduites en annexe ou en bas de page.

Un roman sombre, un nature writing mâtiné de roman noir, une histoire d’hégémonie suprême d’un homme et de ses fils sur un village, leurs pleins pouvoirs, et devant eux, un troupeau de dominés courbant l’échine et un peintre inconnu armé de ses fusains.

C’est lent, poétique, avec de la psychologie dans les personnages et dans l’analyse de ala position de Greider, à la fin, sans oublier de la rédemption. Et lorsque l’on tourne les pages, on frémit de ce qui pourrait nous attendre au détour de l’une comme au détour des forêts sombres et couvertes de neige de ce coin perdu où il ne fait pas bon y échouer.

Étoile 4

Challenge « Thrillers et polars » de Sharon (2016-2017) et Challenge « Polar Historique » de Sharon, le Challenge « Victorien » chez Camille, le Challenge « XIXème siècle » chez Netherfield Park, le Challenge « Coupe d’Europe des Livres » chez Plume de cajou et le RAT A Week Estival, Summer Edition chez Chroniques Littéraires (337 pages).

coupe europe livres 2016 bis

 

51 réflexions au sujet de « Sombre vallée : Thomas Willmann »

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  3. Ping : Bilan Livresque Mensuel : Août 2016 | The Cannibal Lecteur

  4. Ping : Premier bilan du mois du polar | deslivresetsharon

  5. Héhé, comme je suis contente que tu te sois lancée dans cette histoire. Dans ces histoires…
    Oui un livre d’ambiance, tout en retenu. Sauf peut-être au niveau de la violence qu’il s’en dégage. Violence physique mais aussi psychologique.
    J’ai eu beaucoup de mal à quitter ses montagnes après avoir refermé ce livre.
    Et tu as raison ma Belette, la montagne ça vous gagne !!!

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  6. Je le veux!!!!Il n’a rien à ajouter, après Genevieve qui m’avait déjà convaincue, là je me dis qu’il faut qu’il rentre dans mon planning de toute urgence!!!!Tu me confirmes juste que je suis à la bourre dans mes découvertes 2016!!!!!Mdr.
    Espérons que le montagne me gagnera également….;)

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    • J’espère aussi ! Pour le reste, je ne peux pas t’aider car je l’avais acheté en papier lors de mes vacances en France, au soleil ! Là, pour le moment, la Belgique est entrée dans le mois d’octobre, vu le temps.

      Je suis à la bourre aussi dans mes découvertes de 2016, m’en reste encore de 2015-2014 alors niveau retard, on est binôme aussi !!! mdr

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  7. J’adooooore les histoires qui se passent dans les grandes et vieilles maisons délabrées qui craquent et abritent des « trucs » genre fantômes, vampires, loups garous et démons… Et aussi celles qui se passent comme ici dans ces coins perdus de nature brumeuse peuplés de gens étranges et de mystères mystérieux ! Le mieux c’est les ruines hantées dans ces campagnes perdues mais bon… On peut pas toujours tout avoir! 😄

    Tiens au fait! Rien à voir… Mais toi qui est la petite fiancée de Jack l’éventreur, je ne sais pas si tu connais ce site : casebook.org ? Bon c’est en english mais il paraît que c’est le Must pour une riperologue distinguée!

    Imagine! L’esprit de Jack qui hante un hôtel (de passe évidemment!) en ruine, dans un coin perdu de nature hostile ou quelques campeuses viendraient se réfugier (les inconscientes! Les crétines!)!!!! Topissime!

    A peluches

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    • Et bien ici, à défaut de ruines délabrées (pléonasme) on a le trou du cul de la Bavière, ach, et des gens bizarres, vivant repliés sur eux-mêmes (bonjour les courbatures) et n’acceptant que difficilement le sang neuf. Ils vivent en autarcie (non, Nabilla, si tu le lis, l’autarcie n’est pas un lointain continent ou un pays froid) et font du troc. Bon, on est à l’époque après le Jack, fin 19ème aussi, les smartphone ne sont pas encore arrivés et ils ne chassent que du gibier réel et pas des pokémon.

      Ouiiiiiiiiiiii je le connais mais comme tu dis, tout en anglais et je capte pas le tiers du dixième. Je possède aussi « The ultimate Jack The Ripper casebook » tout dans la langue de Holmes et faudrait que je me remette à l’english, mais quand trouver le temps ??

      Ouh, mon dieu, je vois déjà les campeuses du camping de atrick Chirac et celles du camping paradis débarquant, le fion en chaleur et se retrouvant dans cet hôtel de passe, en ruine, perdu dans la nature qui est toujours hostile, et hanté par des fantômes genre Casper libidineux et par Jack himself !!

      Je ne me sens plus !!

      A+ (était leur groupe sanguin)

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        • Marc Dorcel…. attends un peu, je vois plus bien qui c’est… hum, un grand réalisateur, films profonds, grands acteurs, césar, oscar, lion d’or, et tout le toutim, non ?? PTDR

          Je te parie qu’un scénario pareil, Spielberg l’a dans son coffre !!

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