Brasier noir – Trilogie du Mississippi 01 : Greg Iles

Titre : Brasier noir – Trilogie du Mississippi 01

Auteur : Greg Iles
Édition : Actes Sud Noirs (2018) / Babel Noir (2020) – 1194 pages
Édition Originale : Natchez Burning (2014)
Traduction : Aurélie Tronchet

Résumé :
Ancien procureur devenu maire de Natchez, Mississippi, sa ville natale, Penn Cage a appris tout ce qu’il sait de l’honneur et du devoir de son père, le Dr Tom Cage. Mais aujourd’hui, le médecin de famille respecté de tous et pilier de sa communauté est accusé du meurtre de Viola Turner, l’infirmière noire avec laquelle il travaillait dans les années 1960.

Penn est déterminé à sauver son père, mais Tom invoque obstinément le secret professionnel et refuse de se défendre. Son fils n’a alors d’autre choix que d’aller fouiller dans le passé du médecin.

Lorsqu’il comprend que celui-ci a eu maille à partir avec les Aigles Bicéphales, un groupuscule raciste et ultra-violent issu du Ku Klux Klan, Penn est confronté au plus grand dilemme de sa vie : choisir entre la loyauté envers son père et la poursuite de la vérité. Imprégnées de l’atmosphère poisseuse du Sud, tendues par une écriture au cordeau et un sens absolu du suspense, les mille pages de ce Brasier noir éclairent avec maestria la question raciale qui continue de hanter les États-Unis.

Dans ce volume inaugural d’une saga qui s’annonce comme l’un des projets les plus ambitieux du polar US, Greg Iles met à nu rien de moins que l’âme torturée de l’Amérique.

Critique :
Voilà un roman noir sombre, épais, glauque, comme je les aime… Le genre de roman dont on sait qu’on ne ressortira pas indemne, à force d’avoir vu du racisme, de la ségrégation, des violences, des injustices et des meurtres raciaux.

Non, il n’y a pas vraiment de lumière, dans ce roman glauque où les Méchants sont cruels, sadiques, racistes et j’en passe. À côté des Aigles Bicéphales, les membre du cucul… heu, du Ku Klux Klan font office d’enfants de chœur.

Bienvenue à Natchez, en plein cœur du Mississippi profond où la ségrégation est toujours présente, même si elle se voit moins. La cohabitation a lieu, mais une séparation entre les deux couleurs existe encore et toujours. Nous sommes en 2005 et rien ne change vraiment.

Ce roman noir, qui prend son temps, qui est fort bavard et qui se lit lentement, pourrait porter, en bandeau titre, la même inscription que celle sur le fronton des Enfers : Lasciate ogni speranza, voi ch’entrate (Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance), tant il est noir de chez noir.

À la manière d’un Don Winslow et de sa trilogie consacrée aux cartels de la drogue (Art Keller), Greg Iles s’attaque aux groupuscules secrets des États-Unis, parle de corruption, à tous les étages et des meurtres retentissants, tels ceux des frères Kennedy et de Martin Luther King. JFK, RFK, MLK et KKK… Oui, ce roman est un K intéressant. Très détaillé, aussi. Notamment dans ses personnages, ses lieux, leurs actions.

Ce roman noir est dense, touffu, on parle beaucoup et on n’avance pas très vite. L’enquête est pliée sur trois journées, mais ce sont des longues journées. À la page 73, le titre nous dit que nous sommes lundi et il faudra passer la page 500 pour arriver au mardi. Lire cent pages chez Greg Iles équivaut à deux cent pages chez David Gemmell ou Kent Follet. Une fois passé la moitié (600 pages), le rythme augmente et ça se lit plus vite.

Si l’auteur n’avait pas été aussi prolixe, on aurait pu avoir un roman plus ramassé, sur 800 pages. Est-ce que le récit aurait gagné à être moins détaillé ? Oui, il aurait été plus rythmé, mais avec moins de détails, il n’aurait pas été aussi réaliste, aussi prenant et aurait donné l’impression que l’auteur recoupait ses angles droits pour aller plus vite. Comme quoi il n’est pas facile d’avoir un bon équilibre entre réalisme, profondeur et rythme.

Pour les personnages, par contre, ils ne m’ont pas vraiment touché. Caitlin, la journaliste, pense un peu trop à un scoop (réaliste, hélas), le docteur Tom Cage ne veut rien dire, Penn Cage, son fils veut l’aider contre vents et marrées (réaliste aussi) et les méchants sont terriblement sadiques. Des Bisounours n’auraient pas été réalistes non plus, vu le contexte dans lequel ces hommes évoluent.

Finalement, ce roman résume bien les êtres humains : nous sommes des égoïstes ! Les crimes qui ont eu lieu il y a 40 ans (1964), tout le monde s’en fout, tout le monde a oublié les noms des disparus, des assassinés et personne ne veut vraiment rendre justice à ces pauvres gens, assassinés pour leur couleur de peau ou parce qu’ils avaient mis leur petits oiseaux dans la chatte d’une jeune fille blanche (avec son consentement et parce qu’ils s’aimaient !!), qu’ils militaient pour leurs droits civiques, qu’ils étaient bien intégrés.

Ni les Blancs, ni les Noirs ne veulent s’en occuper, et ceux qui le font ont tous un motif personnel. 1964, c’est loin et personne n’en a rien à foutre, tant qu’il n’est pas concerné.

Le plus gros bémol de ce premier tome, c’est qu’une fois arrivé au bout des 1194 pages, il reste encore des questions dont nous n’avons pas les réponses, alors que l’auteur aurait pu les résoudre dans ce premier volume. Je ne voudrais pas que l’on en arrive à une certaine série télé (LOST) qui avait ouvert bien des mystères et ne les a jamais résolus… J’adore les cold case, mais il faut au moins apporter des réponses sans obliger les lecteurs à lire l’intégrale de la trilogie.

Brasier Noir est un roman très sombre, qui fait quelques retours en arrière, dans les années 60, afin de nous faire comprendre ce qu’il se passait à l’époque de la ségrégation et de la lutte pour les droits civiques, même si la partie « passé » n’est pas aussi importante que je l’aurais souhaitée.

C’est aussi une fresque historique, qui nous montre la part sombre des États-Unis, ces terres de liberté, comme le voulaient les premiers colons… Oui, mon cul ! En 2005, ça n’avait pas changé beaucoup dans les états sudistes et de nos jours, il vaut toujours mieux être Blanc que Noir, au pays de Trump.

Brasier Noir est un roman fort, percutant, dommage que ces personnages n’aient pas réussi à me donner des émotions, ni à m’attacher vraiment à eux. Cela ne m’a pas empêché de vibrer durant ma lecture, avec ce récit sombre et violent.

Oui, je continuerai l’aventure avec l’arbre aux morts…

#Pavés de l’été

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°020], « Les épais de l’été » 2023 (21 juin au 23 septembre) chez Dasola (par ta d loi du cine, « squatter » chez dasola) et chez La Petite Liste et Le Mois Américain en solitaire – Septembre 2023.

26 réflexions au sujet de « Brasier noir – Trilogie du Mississippi 01 : Greg Iles »

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  4. Une trilogie ? Humm… je passe! Je suis déjà en panne sur le Tome 5 d’Harry Potter… Je voulais me rafraîchir la mémoire avant de lire enfin en français les deux derniers tomes mais… j’y arrive plus! Je vais faire une pause je crois… 🤔

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      • Bien que je sois en panne à nouveau pour finir le 5 (et de lire autre chose avant de lire les 6 et 7), j’avoue avoir franchement apprécié ma relecture de A à Z. C’est tellement plus riche que les films que j’ai revus des dizaines de fois avec mes enfants! Ma panne tient plus à mes capacités à me concentrer et à trouver du temps en ce moment (j’ai la tête un peu farcie par plein de choses et je suis somnolente dès le milieu de l’après-midi à cause de mes traitements… même la télé j’ai du mal!).

        Harry Potter c’est franchement un chef d’oeuvre! Ce n’est pas la littérature du 18 ou du 19e siècle… mais c’est une écriture typique de la fin du XXe qui ne réinvente pas la langue mais sans avoir à rougir même si elle n’est pas aussi lyrique qu’un Nobel! Les gens qui relisent Lupin aujourd’hui oublient trop vite que c’est du roman populaire de son époque et je crois que dans 50 ou 100 ans HP sera toujours un grand classique de la littérature anglaise. Il y a un univers et un humour typique à la fois ironique et décalé comme savent le faire les anglais… des métaphores renvoyant à des questions éternelles du genre humain etc…🤓

        Quoi? Moi? Une fan enthousiaste? Hummm… Oui. Tout à fait et j’assume! 😁 Et j’emmerde vigoureusement celles et ceux qui appellent au boycott des oeuvres de JK Rolling parce qu’elle appartient à un courant du féminisme qui a un regard critique sur le fait que les femmes transgenres réduisent généralement la féminité aux codes du désir masculin auxquelles elles s’identifient. 😛

        Anybref! Vivement que je sois à nouveau en vacances et plus en forme pour finir de relire la saga! 😉

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        • Je n’avais pas suivi la polémique, mais ce que je sais, c’est que parfois, tu ne dis rien de mal et on te saute dessus comme une meute sur une charogne… et viens-y que je lynche JKR et plus si affinité. On devient fou, on va trop loin avec les polémiques, on te fait des brouettées sur des conneries et les choses importantes passent à la trappe :/ Moi aussi je me pose des questions sur les personnes transgenre, rien de mal, juste des questions, sur les chiottes, notamment. Sans prise de tête, sans haine, juste des questions. Mais même ça, tu ne peux pas… oulala, non, pas se poser des questions !

          Oui, HP, c’est de la balle ! 😉

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  5. Ce n’etait pas Trump le president en 2005 et ce n’est pas Trump l’actuel président.
    Alors un peu facile de conclure votre chronique par « au pays de Trump » !
    Et je rappelle que ce n’est meme pas Trump qui a fait construire et agrandir le mur avec le Mexique mais un certain Obama.

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    • PS : Voltaire est mort, mais on parle toujours de la France en disant « au pays de Voltaire » ou de Molière, tout comme avec Shakespeare en Angleterre.. C’est une expression, c’est tout, et rien de plus.

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      • Laisse tomber ma Belette! Tu n’as pas à te justifier davantage.

        Y a encore des gens qui aiment Trump… le pauvre milliardaire dont « on » a volé la réélection grâce à un immonde complot porté par les francs maçons et l’internationale sataniste! Y a encore des gens qui aiment le parti Républicain US qui a fait interdire l’avortement là où il pouvait et interdire dans les bibliothèques scolaires les livres lgbt et les livres critiquant la politique raciale dans l’histoire des USA… le parti des télé-évangélistes qui font fortune en convainquant des gens de leur donner leurs sous « au nom de Jésus », de brûler les mécréants… et qui font des exorcismes de groupe… Les démocrates sont aussi très à droite cela étant lorsqu’il est question d’économie aussi… on peut dire du mal d’eux mais pas de Trump et de sa photo ridicule pour sa fiche judiciaire (le dernier à avoir fait le clown dessus c’était Michael Jackson !).

        Allez! J’arrête ! 😉

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        • Je sais que le mur a plus augmenté sous Obama que sous le Donald (bien que je n’ai pas été le constater de visu), mais quand tu as un président qui parle d’attraper les femmes par leur chatte, qui nie le covid, qui parle d’avaler du gel hydroalcoolique et autres fadaises, je me pose aussi des questions sur l’intelligence des gens ! Nos dirigeants ne sont pas mieux, mais moins pire que Donald… Oui, je sais que je n’ai pas à me justifier, mais je n’aime pas les belles-mères qui viennent dire ce que je dois faire, dire, écrire… 😉

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          • 🤣 Ah les belles mères ! Quelle plaie!

            Les states… peuplés des descendants des gens dont on ne voulait plus en Europe… qui passent d’un président probablement psychotique à un autre soupçonné de sénilité… et toujours debout au fait de sa puissance alors qu’il a une dette abyssale car tout s’y fait à crédit ! Il y a pas à dire! C’est un pays dont le véritable gouvernement et la véritable puissance ne sont pas là où on le dit! 🤔

            Ça ne cesse pas de m’étonner ! Je vais finir par croire ces zhistoires de complotistes et d’état profond si ça continue… 😂

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            • Oui, les States ne sont plus ce qu’ils étaient et entre nous, l’ont-ils été un jour ? Les colons ne voulaient plus de ces pouvoirs nobiliaires qu’ils subissaient en Europe, dans leurs pays et finalement, ils n’ont pas fait mieux… Le gendarme du monde n’a personne pour le contrôler, ce qui ne va pas, pour être gendarme, faut être aussi irréprochable et quand on déclare des guerres à des pays qui n’ont même pas une arme de destruction massive, c’est un crime !

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