Le Soleil des Scorta : Laurent Gaudé

Titre : Le Soleil des Scorta

Auteur : Laurent Gaudé
Édition : Babel (2006)

Résumé :
La lignée des Scorta est née d’un viol et du péché. Maudite et méprisée, cette famille est guettée par la folie et la pauvreté.

À Montepuccio, dans le sud de l’Italie, seul l’éclat de l’argent peut éclipser l’indignité d’une telle naissance. C’est en accédant à l’aisance matérielle que les Scorta pensent éloigner d’eux l’opprobre.

Mais si le jugement des hommes finit par ne plus les atteindre, le destin, lui, peut les rattraper. Le temps, cette course interminable du soleil brûlant les terres de Montepuccio, balayera ces existences de labeur et de folie.

À l’histoire de cette famille hors du commun se mêle la confession de sa doyenne, Carmela, qui résonne comme un testament spirituel à destination de la descendance. Pour que ne s’éteigne jamais la fierté, cette force des Scorta.

Critique :
Une fois de plus, j’avais un excellent roman qui prenait la poussières depuis des années dans mes étagères.

Je me souviens que je l’avais acheté un jeudi, jour de l’ascension, dans une bouquinerie ouverte les jours fériés. Il y avait du soleil et nous étions en 2008…

Shame on me d’avoir attendu 12 ans avant de lire ce roman que je voulais absolument découvrir (les auteurs qui me font des demandes de lecture comprendront que s’ils comptent sur ma vitesse de déstockage, ils auront des cheveux blancs).

La honte d’avoir mis si longtemps à la découvrir pèsera sur mes épaule autant que soleil des Pouilles qui, dès les premières lignes, a brûlé mes yeux.

Quelle histoire, mes amis ! Quel texte, quelle plume ! Pourtant, l’histoire est banale, habituelle, déjà vue, rien de neuf sous le soleil avec une histoire de bâtards, de bandits, de repris de justice qui vient retrouver la femme qu’il aurait voulu prendre avant d’entrer en prison.

L’ambiance est donnée dès les premières phrases, le style est concis mais puissant. Avec peu, Gaudé raconte beaucoup et fait passer des émotions en vrac, des plus belles aux plus sales. Des plus fortes aux plus douces.

L’auteur, d’un coup de plume magique, nous transporte à Montepuccio, petit village des Pouilles, paumé près de la mer, écrasé sous le soleil.

Les personnages principaux, les petits-enfants de Luciano Mascalzone sont attachants, n’ayant hérité que d’un nom maudit, les Scorta vont s’en sortir à la force du poignet, sans jamais relâcher la pression, sans jamais baisser les bras.

Un récit plein d’amour, de sueur, de sang, de fumée de cigarette, de secrets, de travail et de malédiction laissée en héritage par un père voleur à ses enfants. Un récit confession puisque c’est Carmela qui raconte leur histoire au curé du village.

Ne cherchez pas de l’action, ici, on ne court pas, il fait trop chaud et puis, non n’a rien sans rien, autrement dit, sans trimer dur. Les personnages ont leurs défauts, ne sont pas des anges, mais ils sont d’autant plus humains et attachants.

Un roman qui décrit la vie dans un petit village d’Italie au début du 20ème siècle, un roman puissant, beau, lyrique, bourré de soleil.

Un roman qui de filiation,  d’héritage, qu’il soit d’argent ou du sang, d’amour de la terre, de l’amour porté à son village, à sa famille, l’histoire d’une fratrie qui a survécu alors qu’on ne donnait pas cher de leur peau.

♫ C’est un beau roman, c’est une belle histoire ♪

C’est la famille qui compte. Sans elle tu serais mort et le monde aurait continué de tourner sans même s’apercevoir de ta disparition. Nous naissons. Nous mourons. Et dans l’intervalle, il n’y a qu’une chose qui compte. Toi et moi, pris seuls, nous ne sommes rien. Mais les Scorta, les Scorta, ça, c’est quelque chose.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (juillet 2019 – juillet 2020) – N°211.