Long Spoon Lane : Anne Perry [Charlotte et Thomas Pitt 24]

Titre : Long Spoon Lane [NUM]                                                     big_4

Auteur : Anne Perry
Édition:  10/18

Résumé :
Réveillé en pleine nuit par Victor Narraway, chef de la Special Branch, Thomas Pitt est sommé de se rendre d’urgence dans Myrdle Street où des anarchistes menacent de faire sauter une bombe.

Après une course-poursuite effrénée, il parvient à arrêter deux d’entre eux, mais découvre dans leur Q.G. de Long Spoon Lane le cadavre de leur chef, fils d’un lord très influent, abattu d’une balle dans la nuque.

Intrigué par ce meurtre et les accusations plutôt troublantes des deux anarchistes qui dénoncent une corruption policière étendue, Pitt décide d’enquêter avec l’aide de son ancien acolyte du commissariat de Bow Street, l’inspecteur Tellman.

Il découvre alors une conspiration policière et politique terrifiante, orchestrée par le Cercle intérieur, qui ne lui laissera pas d’autre choix que de s’allier avec son pire ennemi, Lord Charles Voisey.

Critique : 
C’est fou comme certaines lectures peuvent rejoindre l’actualité… Et malgré plus d’un siècle d’écart, les pensées imbéciles et les désirs haineux de certains sont toujours d’actualités.

En aurions-nous douté ? Pas moi, en tout cas.

Je viens donc de prendre mon pied avec ce roman (tout en ayant une pensée pour l’actualité de ces dernières semaines) qui me donnait envie de chanter ♫ Non, non, rien à changé ♪

Lecture, qui, au départ, fut entamée avec appréhension. Pourquoi ? Parce que je n’aime pas la Special Branch et que je n’ai toujours pas digéré l’éviction du commissaire Thomas Pitt de Bow Street. C’est donc en ronchonnant un peu que j’ai ouvert le livre, mais ce fut de courte durée.

Direction les bas-fonds de Londres, les quartiers les plus miteux, ceux où les gens triment 6 jours sur 7 pour des salaires de misères. Un contexte social et politique étaient présent, de quoi me réjouir, donc.

Des anarchistes ont déposé une bombe afin de faire sauter une maison bien précise mais vu qu’ils n’ont pas accès au site Comment-faire-une-bombe.com, c’est trois immeubles qui sont parti en fumée, laissant leurs occupants encore plus miséreux.

Courses-poursuites en fiacre, fusillade… et un anarchiste au tapis ! Mais qui l’a tué, et pourquoi ??

Lorsque je vous parlais des airs contemporains de cette enquête, c’était au niveau politique. Suite à l’attentat, certains parlementaires ont présenté un projet de loi visant à doter les policiers londoniens d’armes à feu et de leur donner plus de pouvoirs.

Un Patriot Act version « Tea for two »… Des policiers armés en permanence ainsi qu’une possibilité de fouiller les gens et leurs maisons SANS mandat, autrement dit, si les flics ont quelques soupçons ou que votre tronche ne leur revient pas, hop, à la fouille !

Et vu que la police a mis 30 ans afin de se faire accepter par les gens des quartiers les plus miséreux, ils risquent de perdre la confiance du petit peuple.

De plus, une partie de ces flics sont corrompus et rançonnent les petits commerçants… Oui, mafia version rosbeef. Notre Thomas Pitt a du pain sur la planche et les esprits s’échauffent vite, même sans les réseaux sociaux.

L’auteur nous démontre bien les manipulations qui peuvent se faire, en Haut Lieu, afin de permettre à certains de transformer les policiers en petite armée privée, quitte, pour arriver à leurs fins, à provoquer eux-mêmes des attentats afin de renforcer le climat d’insécurité. La démagogie bat son plein.

— Wetron va se servir du sentiment d’insécurité pour faire passer cette loi. Tout nouvel incident fera son jeu. Il va laisser la criminalité augmenter jusqu’à ce que plus personne ne se sente en sécurité nulle part : vols, agressions, incendies et peut-être même d’autres bombes. Il veut, et il va, semer la peur au point que les gens supplieront qu’on donne à la police des armes, des effectifs et des pouvoirs supplémentaires. Et quand il les aura obtenus, il écrasera le crime en quelques jours pour apparaître en héros.

On comprend aussi comment il est possible de présenter, sous un jour favorable, des projets de lois renforçant votre sécurité, alors qu’il n’en est rien. Le produit à l’air alléchant lorsqu’il est présenté par un parlementaire alléché, mais lorsque l’on creuse un peu, on est horrifié des pouvoirs que l’on donne aux autres.

— C’est généralement à cause des troubles que nous acceptons les changements.

Bref, ne nous laissons pas manipuler par les politiciens et les médias, nous rappelle le roman dont certains dialogues m’ont enchanté (surtout les réparties entre Thomas et les anarchistes) et étaient tout ce qu’il y a de plus contemporains.

— Nul n’a le droit de s’en prendre à des gens innocents pour faire valoir son point de vue. C’est mal, quel que soit le désespoir dans lequel on se croit.

Il pouvait se montrer imprudent, ne se rendant pas compte que parfois de mauvaises personnes peuvent prêcher de bonnes croisades.

Un petit roman noir bien serré, une dose de suspense, additionné de fiacres poursuites, saupoudré de coups de feu, et rehaussé d’une enquête qui n’a pas dit son dernier mot avant le mot « fin ». Plus quelques incursions dans les salons huppés avant de replonger dans des petites ruelles coupe-gorge.

Tous nos personnages habituels sont présent, même si Charlotte ne peut plus enquêter comme elle le faisait avant, lorsque Thomas était au commissariat de Bow Street.

Sans oublier une alliance contre nature entre Thomas Pitt et Charles Voisey. Et il est dit que lorsqu’on dîne avec le Diable, il faut se munir d’une longue cuillère (Long Spoon).

Tout compte fait, la Special Branch vient de remonter dans mon estime.

BILAN - Coup de coeurLu dans le cadre du Challenge « Thrillers et polars » de Canel (2013-2014), du Challenge « Polar Historique » de Sharon, du Challenge « Victorien » chez Arieste, du Challenge « XIXème siècle » chez Netherfield Park et, last but not leaste, d’une LC chezBianca.