Titre : Délivre-nous du mal
Auteur : Chrystel Duchamp
Édition : L’Archipel (22/01/2022)
Résumé :
Commandant de police à Lyon, Thomas est chargé de retrouver Esther, mystérieusement disparue. Les mois passent et l’enquête s’enlise, tandis que d’autres femmes de la région s’évanouissent sans laisser de trace.
Jusqu’à ce que l’une d’elles soit retrouvée pendue dans une usine désaffectée, le crâne rasé et la langue arrachée. C’est le début d’une série de macabres découvertes.
Critique :
Délivre-nous du mal et ne nous soumets pas à la tentation ? Amen ?
Non, pas d’Église dans ce thriller, ni même de prêtre, malgré tout, laissez les enfants assez loin de ce récit qui est violent et glauque dans la mise en scène des cadavres.
Une femme a disparu. En France, on a le droit de disparaître, sans rien dire à personne.
Peut-être, mais quand on part, on prend ses papiers, son argent (qu’on a retiré à la banque auparavant) et on ne laisse pas son chat enfermé dans sa chambre, sans manger et sans boire, non ? L’enquête principale commence ainsi, avec une femme qui est persuadée que sa soeur a été enlevée. L’enquête partira dans des directions inattendues…
Autant où son précédent roman « Le sang des Belasko » m’avait conquis à 100%, autant où celui-ci me laisse mitigée. Je suis partagée entre deux sentiments : j’ai apprécié certaines choses dans le récit, et pourtant, j’ai une sensation de vide en moi, comme si je n’avais pas accroché à cette lecture, ou accroché à moitié.
Le début était prometteur pourtant : le roman commence par des prologues qui se terminent abruptement, laissant le lecteur dans un suspense énorme, sans que l’on en sache plus pour le moment. Les dates ne sont pas les mêmes, la question sera de savoir comment ces trois prologues se rejoindront dans le récit. Pour le premier, on comprendra vite comment.
Ma sensation de vide durant ma lecture vient du fait que j’ai eu l’impression que cette histoire manquait de liant. L’épisode avec le petit village de Oingt est sans doute de trop dans ce récit.
J’avais commencé à décrocher un peu du récit et là, avec ce qui va suivre, j’ai eu l’impression de me retrouver face au fameux concept du « jumping the shark » (autrement dit, la scène qui va trop loin), même si elle faisait référence à un épisode historique réel. Dans le récit, par contre, c’est plus poussé que dans le fait divers réel.
Quant bien même cet épisode se rattache ensuite au récit central, ce qui me heurte, c’est que cela va trop loin dans la folie vengeresse et ça a fichu en l’air les messages importants que possédait ce récit, notamment sur la banalisation des viols, des féminicides, de toutes ces femmes battues que l’on n’écoute pas, dont on ne prend pas assez au sérieux les dépôts de plainte.
Comme si les personnages n’avaient pas été réalistes, ce qui est bizarre comme sensation, puisque notre policier peste sur l’administration qu’il doit faire, qu’il passe plus de temps au bureau que sur le terrain et qu’il lui semble s’être transformé en secrétaire.
C’est tout à fait le résumé de la fonction de policier ou d’enquêteur. Sans doute est-ce la manière dont c’est amené dans le récit qui l’a fait sonner faux. Idem avec les aveux de sa fille, qui semblent n’être là que pour rajouter du glauque au glauque, alors que cela n’apporte rien au récit, si ce n’est de l’eau au moulin de certain(e)s.
C’est un sentiment d’irréalité, de fausseté dans les monologues (ou dialogues) qui m’a attrapé à plusieurs moments et qui ont gâché cette lecture qui était prometteuse, car nous étions dans un polar qui n’avait rien de commun avec les habituels.
L’autrice sortait des sentiers battus en mettant de l’originalité dans la construction du récit et dans son contenu (mais pas dans les personnages, hélas). Elle avait réussi à piquer ma curiosité et je me demandais ce qui se cachaient derrière ces disparitions suspectes. Mon sentiment de départ était que cette lecture était prometteuse… Zut, loupé.
Le final, un peu bâclé, un peu trop rapide, laisse comme un goût d’inachevé, là où le final du « Sang des Belasko » était remarquable. Même si les derniers chapitres, sous forme de lettres, expliquent bien des choses, cela n’enlève rien au sentiment de gâchis qui m’a étreint durant une bonne partie du récit.
Pourtant, ce roman n’est pas à jeter aux orties, c’est ce qui fait que je suis, une fois de plus, le cul entre deux chaises, même s’il penchera plus du côté des « lectures qui ont foirées » alors que l’autre roman de l’autrice est dans mes coups de cœur.
Sans doute est-elle plus douée pour les polars psychologiques que dans les enquêtes policières avec des vrais flics.
J’essaierai son autre roman « L’art du meurtre » pour ne pas rester sur ma chute… Allez, en selle !
Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°191].