Dans les eaux du Grand Nord : Ian McGuire

Titre : Dans les eaux du Grand Nord

Auteur : Ian McGuire
Édition : 10/18 (2017/2019)
Édition Originale : The North Water (2017)
Traduction : Laurent Bury

Résumé :
Puant, ivre, brutal et sanguinaire, Henry Drax est harponneur sur le  » Volunteer « , un baleinier du Yorkshire en route pour les eaux riches du cercle polaire arctique.

Patrick Sumner, un ancien chirurgien de l’armée traînant une mauvaise réputation, n’a pas de meilleure option que d’embarquer sur le baleinier comme médecin.

En Inde, pendant le siège de Delhi, Sumner a cru avoir touché le fond de l’âme humaine, et espère trouver du répit sur le « Volunteer »…

Mais pris au piège dans le ventre du navire avec Drax , il rencontre le mal à l’état pur et est forcé d’agir. Alors que les véritables objectifs de l’expédition se dévoilent, la confrontation entre les deux hommes se jouera dans l’obscurité et le gel de l’hiver arctique.

Critique :
1859, Angleterre… Nous allons faire la connaissance du sieur Henry Drax et, comme dans un Columbo, nous ne raterons du meurtre et nous aurons l’identité du coupable. L’analogie s’arrêtera là. Et dans analogie, il y a… anal, en effet.

Drax aime les jeunes garçons, je ne vous ferai pas de dessin. Le meurtre du gosse est violent et marquant. Quelle entrée en matière !

Ce roman d’aventures restera aussi dans mes annales en raison de sa violence, qu’elle soit envers les animaux (nous sommes à bord d’un baleinier) du Grand Nord (phoques, baleines, ours blancs) ou envers les hommes.

Parce que dans un baleinier, les marins ne sont pas des enfants de coeur, mais si en plus des mousses, vous avez embarqué le fameux Drax et son goût pour les jeunes gamins, ça risque de mal se terminer ! Déjà que vous vouliez couler votre navire pour toucher les assurances…

Oui, ce roman restera dans mes annales, en partie pour les raisons exposées ci-dessus, mais aussi parce qu’après un tiers de pages, je me suis de temps en temps ennuyée et j’ai souqué plus ferme dans le but de passer outre de ces vagues d’ennui.

Ce roman possède des émotions fortes (violences, naufrage, survie, meurtres,…), des descriptions remarquables des paysages, des actions, de la vie sur un baleinier, par contre, je n’ai pas trouvé la bouée de sauvetage et j’ai bu la tasse de temps en temps. Trop de détail tue le détail, même si, pour l’immersion, c’était parfait.

Me voici donc mitigée au moment d’écrire ma chronique : le roman n’est pas mauvais du tout, il apporte le souffle de la grande aventure, il est précis, documenté, l’écriture descriptive est très jolie, et pourtant, il m’a manqué quelque chose pour que j’adhère totalement à ce récit.

Sans doute un personnage auquel me raccrocher, même si le chirurgien, Patrick Sumner, a fait l’affaire durant une grande partie du roman.

C’est une impression fugace qu’il manquait une âme à ce récit, un corps. Des émotions autre que le dégoût devant les massacres d’animaux ou des assassinats d’être humains.

Décrire avec précision la vie sur un baleinier, l’assaisonner de violence, de sodomie, d’assassinat d’un mousse, de fausses accusations, d’un coupable souffrant de déni purulent, rajouter une couche de violence, de descriptions peu ragoutantes, faire couler le navire et passer ensuite dans un récit de survie, tout en rajoutant une énorme couche de violence, ne fait pas d’un roman d’aventure un excellent roman d’aventure.

Dommage, le premier tiers était addictif et je l’avais lu en un rien de temps. La suite a défilé un peu plus vite lorsque je me suis mise à sauter des pages.

Une lecture en demi-teinte et le cul entre deux chaises (inconfortable) pour rédiger ma chronique. Tout n’est pas mauvais, dans ce roman, que du contraire, mais il manquait d’âme, que ce soit pour le récit ou pour les personnages, un peu trop brièvement esquissés. Zut alors…

#MoisAnglais2022

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°239] et Le Mois Anglais – Juin 2022 (Chez Titine et My Lou Book).

Âme de pirate : Charlotte Macaron [NetGalley]

Titre : Âme de pirate

Auteur : Charlotte Macaron
Édition : 404 (09/01/2020)

Résumé :
Naviguer dans ce labyrinthe d’îles, si proches les unes des autres qu’elles frôlent la coque des navires qui s’y aventurent, affronter le brouillard opaque qui les recouvre, et les ombres qui s’y cachent, relève de la folie furieuse !

Mais, poursuivi par la Marine Royale, l’équipage pirate du Saule pleureur n’a pas le choix. Ils ne se laisseront pas intimider par la sombre réputation des Mortes-Îles. Ils ont à leur bord les meilleurs navigateurs, et rien n’arrêtera leur soif de liberté.

Pourtant ce labyrinthe leur réserve bien des épreuves et ils n’en sortiront peut-être pas indemnes…

Critique :
Quand c’est bon, c’est toujours trop court…

Oui mais là, c’était vraiment trop court, limite 3 minutes, douche et préliminaires comprises…

Et pourtant, le plaisir était là.

Comme quoi, un p’tit coup rapide peut satisfaire la grande lectrice que je suis.

What did you expect ??

Merci NetGalley pour l’envoi de cet epub au bon format. Mais est-ce un court roman ou une nouvelle un peu plus épaisse ? Nous dirons que nous naviguons entre deux eaux.

Ne virez pas de bord mais tâchez de souquer ferme vers ce petit roman numérique qui possède tout ce qui fait un bon roman de piraterie.

L’auteure nous proposant une histoire courte (56 pages), elle doit mettre le lecteur de suite dans le bain, alors, peu de préliminaires et on se retrouve déjà pourchassé par trois galions de la Couronne et engagé dans un détroit d’îles qui a tout du Triangle des Bermudes.

L’élément fantastique va comme un gant à un roman de pirates et sans en faire trop, l’auteure arrive à immerger son lecteur dans un lieu qui fait frissonner tous les marins, lecteur y compris, ajoutant une pincée de fantastique, juste ce qu’il fallait.

L’art de la nouvelle est toujours le même : en dire juste assez, pas trop, ni trop peu, bref, faut doser la poudre à canon si on ne veut pas que ça nous pète à la gueule et même si je ne suis pas une fan des récits courts.

Un sans faute car j’ai apprécié cette histoire où les combats étaient vivants, bourrés de suspense, de dynamisme, d’émotions et où les termes consacrés à la navigation rendaient ce récit plus réaliste sans pour autant avoir besoin d’un dictionnaire.

Les personnages des pirates sont directement attachants, d’ailleurs, ce sont eux les héros du livre et non leurs poursuivants, les marins de sa Majesté d’un royaume inconnu de notre Monde. Nos pirates sont flamboyants.

Et c’est dommage car nous avions le fond et la forme pour écrire une grande aventure, pour étoffer un peu plus ce Monde qui n’est pas le nôtre, de cette Magie qui a disparu il y a quelques années.

Bref, j’ai beau avoir pris mon pied littéraire, je reste tout de même avec un goût amer de trop peu en bouche car l’auteure nous a donné plein d’indications sur ce Monde, sur les personnages des pirates, qui auraient méritées d’être plus développées dans un roman plus épais.

Je remercie les éditions NetGalley pour cette navigation en territoire fantastique où je n’ai pas su lâcher la barre avant d’être arrivée à destination. Là, j’ai cargué les voiles puisque j’étais arrivée à bon port, secouée mais ayant le pied marin, je n’ai pas eu le mal de mer.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (juillet 2019 – juillet 2020) – N°152.

 

Les Naufrageurs : Iain Lawrence

Titre : Les Naufrageurs

Auteur : Iain Lawrence
Édition : Folio Junior (1999)
Édition Originale : The Wreckers (1998)
Traducteur : Henri Robillot

Résumé :
1799… Un navire se fracasse sur les récifs le long des côtes de Cornouailles. John Spencer, le fils du capitaine et le plus jeune membre de l’équipage, survit au naufrage.

Lorsqu’il reprend connaissance, il comprend avec effroi que les hommes qui viennent à sa rencontre sont des pilleurs d’épaves…

Les habitants du village de Pendennis semblent se livrer à un mystérieux trafic…

Qui tire les ficelles ? Et à qui John pourra-t-il se fier pour libérer son père retenu prisonnier ?

Un roman d’aventures captivant dans la grande tradition de L’île au trésor et Moonfleet.

Critique :
Les comparaisons avec un autre roman, c’est souvent surfait ! Parce que croyez-moi, on est tout de même très loin de l’île au trésor ! Pas à quelques encablures, mais à au moins mille miles marin !

Hissez les voiles, matelot, nous voguons au fil de l’eau. Pour l’ambiance maritime, je ne me plaindrai pas, l’auteur plonge son lecteur dedans, toutes voiles dehors.

Prévoyez un dico Gogole à vos côtés afin de vous y retrouver entre le mât d’artimon et de misaine et sachez comment virer au lof.

Niveau aventures, je ne me suis pas embêtée non plus, ça bouge, on galope dans tous les sens, on a du mystère, des fausses pistes, une enquête, une énigme dans le fait qu’on ne sait pas qui est le chef des naufrageurs, mais le tout semble brouillon, trop vite écrit, juste de quoi faire un livre pour que les jeunes amateurs d’aventures aient leur dose sans trop se poser de questions.

Les événements s’enchainent un peu trop vite, un peu trop bien, les personnages ne sont pas assez travaillés, surtout Simon Mawgan, l’oncle de Mary qui recueille John Spencer, notre jeune naufragé.

Il s’emporte pour un rien, se calme aussi vite, à l’air parfois un peu trop détaché de tout, cachant des choses, donnant l’impression qu’il est une brute sans coeur. J’aurais aimé plus de profondeur. D’ailleurs, même la fin du roman ne m’a pas vraiment éclairé sur son comportement général, sauf pour une chose que j’avais déjà deviné.

De plus, hum, l’auteur n’est pas trop regardant dans le soucis du détail ! À un moment donné, il dit que les deux gosses montent sur leurs poneys à cru et dans une scène plus loin, il nous dit qu’ils sont « étrier contre étrier »… La selle a dû pousser sur le dos du cheval ou pour ces enfants là, monter avec une selle ou à cru, c’est la même chose !

Tout à l’air d’être un peu trop beau pour être vrai, les personnages tournant assez vite casaque, Mary racontant les confidences de John à son oncle, puis à une autre personne (on ne peut lui faire confiance, à cette gamine !) et tout allant un peu trop bien dans le final, alors que peu de temps auparavant, c’était la Bérézina totale à Waterloo.

Deus ex machina… Oui, un peu. Ça se retourne plus vite qu’un chat portant une tartine beurrée sur le dos.

Quant au commanditaire des naufrageurs, faut pas avoir fait ses études chez Holmes pour le deviner, il se voit aussi bien que le nez au milieu de la figure et les soupçons sont totalement confirmé lorsqu’il tue une personne au lieu de la mettre en joue.

Anybref, ça se lit vite, ça met du piment au voyage en train, on sent les embruns et on entend le bruit des vagues mais on oubliera ce récit tellement vite qu’il faudra se dépêcher de faire la chronique avant de l’avoir totalement zappé.

Ça se lit, sans plus ou ça se lit, à la rigueur.

Le navire prend l’eau de toute part, va falloir souquer ferme et écoper !

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (2018-2019) et Le mois anglais (Juin 2018 – Saison 8) chez Lou & Titine.

 

Lucky Luke – Tome 16 – En remontant le Mississippi : Morris & Goscinny

En remontant le Mississippi - Lucky Luke

Titre : Lucky Luke – Tome 16 – En remontant le Mississippi

Scénariste : Goscinny
Dessinateur : Morris

Édition : Dupuis (1961)

Résumé :
La Nouvelle-Orléans. Lucky Luke, qui vient de mener un troupeau en Louisiane, en profite pour faire du tourisme.

Mais il va se retrouver au centre d’un conflit entre deux capitaines, Barrows, celui du Daisy Belle et Lowrner, celui du ASbestos D.Plower.

Lucky Luke aidera le capitaine Barrows à remporter la course entre les deux hommes, Lowrner n’usant pas de techniques légales.

luckyluke_t16Critique : 
Voilà un album qui nous emmène sur un lieu inédit pour notre cow-boy solitaire : le Mississippi !!

On échange les plaines sauvages de l’Ouest américain pour naviguer sur la flotte à bord de ces magnifiques bateau à aubes et fonctionnant avec une chaudière à bois.

Là, Goscinny fait péter la chaudière pour notre plus grand plaisir avec toujours un bon thermos d’humour et des tasses de situations cocasses.

J’ai lu que dans certains pays, cet album avait été censuré pour racisme, mais je ne vois pas où Goscinny, juif polonais, aurait été raciste !

Que du contraire, il nous présente juste les clichés sur les populations noires de l’Amérique à cette époque… Il n’allait quand même pas leur donner des droits alors qu’ils n’en avaient pas ou si peu (le droit de la fermer, je pense). Nous sommes en Louisiane et on le ressent bien.

Moi, j’ai un gros faible pour Ned, le meilleur de tous les pilotes du Mississippi (et le plus menteur), jamais avare d’une anecdote sur le Mississippi ainsi que son acolyte Sam, détenteur du titre du meilleur verseur de café du Mississippi et du Missouri réunis !

— N’oubliez pas, mon garçon, que je suis le meilleur pilote du Mississippi… Si je vous disais que je connais tous les alligators par leurs noms et leurs surnoms…

— Vous ai-je parlé de la fois où le Mississippi était tellement sec qu’on ne pouvait naviguer qu’au petit matin à cause de la rosée ?

— Le Mississippi,… 3700km d’eau sale. Trop épais pour bien naviguer dessus, trop liquide pour cultiver… le fleuve le plus capricieux du monde !… ou bien il est tellement mouillé qu’il inonde cinq états à la fois, ou bien il est tellement sec qu’il faut le boire à la fourchette !…

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Quant au capitaine Lowriver, c’est un méchant de grande envergure, prêt à tout pour ne pas que le capitaine Barrows gagne et pour cela, il va tricher, magouiller, engager les pires racailles des environs des port, comme ce bon vieux Joe de l’album « Joss Jamon ».

[Capitaine Barrows ] — Je n’ai pas besoin que mon pont soit mouillé, j’ai besoin que le Mississipi soit mouillé.

Non, rien à redire sur cet album qui nous entraine dans une aventure toute voiles dehors… Pardon, toutes chaudières à bois dehors !

Quand à la morale de l’histoire, laissons-là à Cards Devon : « J’en ai assez de cette vie de tricheur sur les bateaux du Mississippi…Je vais aller tricher sur les bateaux du Missouri ! »

Étoile 4

Challenge « Thrillers et polars » de Sharon (2016-2017), le Challenge « Polar Historique » de Sharon, le Challenge « Victorien » chez Camille, le Challenge « XIXème siècle » chez Netherfield Park, « Il était une fois dans l’Ouest » chez The Cannibal Lecteur,  le RAT A Week Estival, Summer Edition chez Chroniques Littéraires et « Le Mois Américain 2016 » chez Titine.

CHALLENGE AMÉRICAIN 2016 - Elementary

Meurtres à Willow Pond : Ned Crabb

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Titre : Meurtres à Willow Pond

Auteur : Ned Crabb
Édition : Gallmeister (2016)

Résumé :
Sur les rives d’un petit lac du Maine, Alicia et Six Godwin coulent une existence paisible, entre la librairie qu’ils ont créée et leur passion commune pour la pêche. Jusqu’au jour où ils décident de passer le week-end dans le luxueux lodge que leur richissime cousine, Iphigene Seldon, dirige d’une main de fer.

Âgée de 77 ans et dotée d’un caractère bien trempé, la vieille femme a justement convoqué ce même week-end ses nombreux héritiers pour leur annoncer qu’elle modifie son testament. Au lodge, l’atmosphère devient électrique. Et tandis qu’un orage d’une extrême violence se prépare, tous les membres de la famille se laissent envahir par des envies de meurtre.

WillowCritique : 
Imaginez un instant qu’Agatha Christie soit une férue de pêche à la ligne et qu’un jour, ayant éclusé quelques verres de bourbon, elle ait décidé de nous créer des personnages colorés, d’ajouter du sexe et de transposer tout ça pour des meurtres à l’Anglaise dans les terres de Stephen King : le Maine !

— Alors, si je comprends bien, tous les ingrédients sont réunis pour que ça tourne au vinaigre.

— Oh, bon sang, répondit Six à Gene, on se croirait dans un roman d’Agatha Christie. Les gens envoient encore des menaces de mort, de nos jours ?

Il y a ici comme une atmosphère de « Dix Petits Nègres » (coupé du monde durant quelques heures) avec des cadavres qu’on pourrait ramasser à la pelle ou au filet de pêche, le tout mélangé avec « Mort sur le Nil » devenu « Morts sur le lac » et un soupçon du « Crime de l’Orient Express » pour le fait que bien du monde souhaiterait voir Iphegene Seldon avaler son acte de naissance de travers.

Attention, ami lecteur, si tu n’as jamais lu du Ned Crabb, ça pourrait te perturber au départ, bien que ce roman-ci soit moins olé-olé que « La bouffe est chouette à Fatchakulla », mais malgré tout, on retrouve la patte ou la plume de l’auteur dans ses personnages assez hauts en couleurs et ses finals assez déroutants.

Connaissant l’animal, je n’ai pas été perturbée le moins du monde car je savais que je devais m’attendre à des trucs un peu fous et je peux comprendre que certains aient été déstabilisé par le final à la James Bond dans ses meilleurs jours, par le trop plein d’enquêteurs avec le couple Godwin engagé et par l’identité de…

— Et merde. Sherlock Holmes.
Caleb pouffa.
— À part la pipe, y a pas grande ressemblance.

L’auteur prendra son temps pour planter le décor de la luxueuse lodge où les amateurs de pêche aux portefeuilles sans rivets se donnent rendez-vous pour pêcher pour l’amour du sport.

Durant les 432 pages, on suit les péripéties de tout nos personnages principaux, on boit beaucoup, on baise aussi et on en profite pour mieux découvrir la tenancière de l’affaire, Iphigene Seldon, sorte de Tatie Danielle et surnommée par ses neveux « Le Duce », ce qui vous situe bien le côté tyrannique de la vieille bique que tout le monde aimerait voir morte.

— C’est Merrill et moi que le Duce détestait. Kipper, elle l’a-do-rait. Son Kiperounet, elle l’a-do-rait. Lui et sa petite fée Clochette en cuisine.

La voir morte ? Ils la détestent tant que ça ? Oh que oui ! Elle règne sur eux tel un tyran, ils touchent de gros salaires mais sont prisonniers chez eux et, bien que ça ne change pas la face du monde si la vieille allait voir six pieds sous terre, pour eux tous, la vie en serait changé merveilleusement bien et tous chanteraient « Libérés, délivrés ».

— Eh bien, moi, j’ai essayé plein de fois de me représenter ce que ça ferait de prendre un flingue pour la descendre… la descendre… au moment où elle me cassait les couilles. (Il eut à nouveau un sourire tordu pour Tom.) Lieutenant, on m’a souvent castré, mais ça repousse toujours.

Pas eu le temps de m’endormir, l’auteur manie l’humour au travers de ses dialogues et de ses personnages qui, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ne sont pas figé dans leur identité, c’est à dire qu’il évoluent et que les salauds pourraient bien être pas si salauds que ça…

Et que si la plupart des membres qui compose la famille Seldon (au sens large) a envie de voir la vioque mourir, ou de la tuer, ce n’est pour autant qu’ils danseront la mazurka lorsque ça arrivera.

Merrill avait cordialement détesté sa tante, elle avait souhaité sa mort, avait prié pour que Gene meure. Mais à présent, oh Seigneur, à présent, elle voyait avec effroi le grand abyme séparant l’envie de tuer et le meurtre réel, un abyme sans pont qui permette de revenir en arrière […].

Un roman qui tire vers le nature writing, le roman policier, le thriller sur la fin, et une ambiance que n’aurait pas renié la Grande Dame du Polar, les références au sexe et à la pratique de la bête à deux dos en moins pour elle (shocking !).

Cela n’empêcha pas le câlin de la cuisine de susciter chez cet Orphée dégingandé une réaction physiologique qui poussa son Eurydice à glousser et à baisser les yeux pour admirer cette ardeur soudaine.
— Doux Jésus, s’exclama-t-elle, n’as-tu pas été rassasié dans notre lit de stupre ? — La bête sort du bois.
— Ça m’en a tout l’air.
— Reviens-t’en dans notre antre, douce amie.

Des personnages bien typés, hauts en couleurs, qui peuvent révéler des surprises, bonnes comme mauvaises,  une plume qui manie l’humour et qui sait si bien nous décrire un lac paisible, une tempête ou des scènes de pêches même si on ne pratique pas à tel point qu’on aurait envie d’y être (mais sans les meurtres !).

Si on ne peut pas s’installer sur le ponton le soir avec ses nichons à l’air, à quoi bon être au bord d’un lac ?

Et la tension qui monte, qui monte… Comme la libido de tous nos protagonistes !

Rien qu’à s’imaginer se pavanant dans le casino, habillée comme Eva Green dans Casino Royale avec Daniel Craig, un vague désir commença à l’échauffer.

— Ça vous chauffe les tripes.
— C’est ça qu’on appelle un café au corps généreux ? demanda Alicia.
— Je pensais que “au corps généreux” signifiait “gros seins et hanches larges”. […]
— Enfin, concernant cette histoire de… femme aux formes généreuses. Si cela indique une ardeur naissante de ta part, et crois-moi je ne suis absolument pas hostile à un peu d’ardeur, pourrais-tu s’il te plaît te retenir jusqu’à cet après-midi ? J’ai envie d’aller à la pêche d’abord.

Pour moi, un excellent moment de lecture avec de l’humour et des rebondissements, le tout dans un cadre merveilleux.

Qui a dit que la pêche était un sport calme ??

— Un gentleman ne boit jamais de bon whisky au goulot.

— Il y a autre chose.
— Ouais ?
— Renee expose entièrement aux regards la féminité de son buste.
— Caleb, ta façon de t’exprimer m’étonne parfois.

Étoile 4

Challenge « Thrillers et polars » de Sharon (2016-2017), Le « Challenge US » chez Noctembule, Challenge « Coupe d’Europe des Livres » chez Plume de cajou, RAT A Week Estival, Summer Edition chez Chroniques Littéraires et Une année avec Gallmeister : les 10 ans chez LeaTouchBook.

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Nos disparus : Tim Gautreaux

Titre : Nos disparus                                                                            big_4-5

Auteur : Tim Gautreaux
Édition : Seuil (2014)

Résumé :
1918. Sam Simoneaux, dont la famille a été massacrée quand il avait six mois, débarque en France le jour de l’Armistice. On l’envoie nettoyer les champs de bataille de l’Argonne.

1921. Rentré traumatisé à La Nouvelle-Orléans où il est devenu responsable d’étage aux grands magasins Krine, Sam ne peut empêcher l’enlèvement, quasiment sous ses yeux, de Lily Weller, trois ans et demi.

Licencié, sommé par les parents Weller de retrouver leur enfant, il embarque comme troisième lieutenant à bord de l’Ambassador, bateau à aubes qui organise des excursions sur le Mississippi. Le roman longe le fleuve sur fond de musique de jazz – orchestre noir, orchestre blanc et alcool à volonté.

Au gré des escales et des bagarres, Sam, toujours en quête de Lily, met au jour un fructueux commerce d’enfants animé par quelques spécimens peu reluisants de la pègre des bayous.

Les vrais sujets de cette fresque naturaliste striée de noir restent les liens du sang, l’inanité de la vengeance et la transmission des valeurs.

Critique : 
Voilà ce qui s’appelle avoir une chance de cocu ! Sam Simoneaux ainsi que les autres combattants Américains, arrivent en France pour participer à la Première Guerre Mondiale le… 11 novembre 1918.

À peine descendu de leur rafiot, c’est des scènes de liesse partout : la guerre est finie. On pourrait penser qu’ils vont se tourner les pouces, mais non, faut déminer les champs remplis de grenades, bombes, obus… Sans se faire exploser sois-même !

Dès le début, en quelques pages (40), l’auteur, de sa plume sans concession, nous démontre toute l’absurdité, toute la bestialité, toute la cruauté et l’inhumanité d’une guerre. Nos soldats, tout dépités lorsqu’ils étaient arrivés de ne pas pouvoir participer à cette Grande Boucherie, comprennent ce à quoi ils ont échappés. Voir les corps déchiquetés et la terre éventrée vont les secouer et les traumatiser.

Ensuite ? Retour à la casa América pour nos hommes et Sam Simoneaux se retrouve à la Nouvelle-Orléans comme responsable d’étage aux grands magasins Krine.

N’allez pas croire qu’on se la coule douce, dans les romans de Tim Gautreaux. Nous sommes dans le Sud de l’Amérique, et c’est toujours un Sud poisseux et inhospitalier que nous allons évoluer. Un Sud aux mentalités raciales que vous connaissez bien. La tolérance, c’est toujours un gros mot.

Ici, on boit de l’alcool de contrebande, sorte de tord-boyaux qui donnera un peu de courage aux gens ou qui les fera oublier dans quelle misère noire ils vivent. Certes, tous ne vivent pas dans la misère, mais les contrastes sont assez prononcés entre les deux populations : les très riches et les pauvres.

Qualifier ce roman de policier ne serait pas faux, nous avons notre Sam qui va se muer en enquêteur de fortune afin de retrouver la petite fille kidnappée, presque sous ses yeux, au magasin.

Mais ceci n’est qu’une partie visible de l’Histoire avec un grand I. C’est aussi de l’Aventure que l’on vous propose, une Quête, parce que retrouver la gamine est une sorte d’exorcisme, une expiation d’une faute ancienne. Ce roman mélange habillement tout ces genres pour nous donner un plat de résistance dont on se pourlèche les babines.

Sorte de voyage initiatique sur un bateau à aubes remontant le Mississippi sur des airs de jazz et de bagarres, l’auteur nous ballade à travers le Sud sans que l’on voit le temps passer, nous présentant une (faible) partie de ses plus mauvais gens. Et les pires ne sont pas toujours chez les pauvres ! Mais certains valent la peine qu’on ne les croise jamais de notre vie.

— Mais ces gens sont complètement malades !
Les yeux de Soner lui parurent clairs et brillants.
— Absolument pas. Ils sont exactement comme vous et moi. Ils sont seulement descendus quelques barreaux plus bas sur l’échelle morale que la majorité.

— À cette époque, quand on rencontrait un Cloat, on finissait la gorge tailladée par un rasoir ou une balle de .45 dans le crâne. Enfin, si on était un homme. Les femmes, elles, devaient subir d’autres types de pénétration. Les Cloat ne sont pas d’ordinaires mauvaises graines d’assassins.

— Un des Skadlock dont je t’ai parlé.
— Moitié homme, moitié belette.
— Pour la partie belette, tu as sans doute raison.

J’ai joué de la musique pour des culs-bénis, des soulards ou des péquenauds, j’ai dansé au son de la musique Noire, j’ai essuyé des crachats, lavé le pont souillé de vomi, l’ai fait briquer, j’ai enquêté, j’ai terminé mes journées épuisée et vous savez quoi ? J’en redemande.

Il leva la main, puis la laissa retomber.
— Je n’y comprends rien. Il y a quelques jours encore, c’était une épave puante. Aujourd’hui, il me donne envie de partir en croisière au clair de lune.

Les bateaux à vapeur, ils sont toujours en bois, et pas du meilleur ni du plus épais. En fait, ces rafiots sont à peine plus solide que des cages à poules. Quand il y en a un qui se cogne contre le pilier d’un pont, sûr qu’en aval les gens ont plus besoin d’aller s’acheter des cure-dents pendant un bon bout de temps.

La plume de l’auteur fait toujours mouche, ses personnages sont toujours aussi fouillés, attachants ou donnant des envies de meurtre (une certaine bonne femme, surtout), sans nous gaver, il nous brosse le portrait d’une Amérique dans les années 20 avec détails, mais pas de trop. À nous d’aller voir ce qu’est un train des orphelins.

La trame n’est pas cousue de fil blanc parce que j’ai eu des surprises. Franchement, je pensais qu’on allait plier l’affaire en deux coups de cuillère à pot et bien non !

Un portrait sombre du Sud, des personnages taillés à la serpe, hantés par des deuils non accomplis, des idées de vengeance, des douleurs muettes et des envies de revenir en arrière pour tout changer.

Son oncle lui avait dit et répété que la vengeance ne menait nulle part et qu’un salaud se punissait tout seul en en étant un.

Il y a une humanité énorme dans le personnage de Sam et sa force de caractère lors de certains passages ont forcé mon admiration. Oui, il y a encore des traces d’humanité. Le roman en est rempli.

– Petit, un pistolet dans la poche d’un homme change sa façon de penser. Quand il n’en a pas, il hésite à prendre certains risques. Quand il en a un, il va là où il ne devrait pas, ou fait ce qu’il ne devrait pas faire. Il pense qu’une arme est un passe-partout, mais il se trompe.
– Mais c’est aussi une protection, non ? Un dispositif de sécurité ?
– Quand on ne sait pas nager, il vaut mieux ne pas s’approcher de l’eau.

Challenge « Thrillers et polars » de Sharon (2015-2016), le Challenge « Polar Historique » de Sharon et Le « Challenge US » chez Noctembule.

CHALLENGE - Thrillers et polars 2015-2016 CHALLENGE - Polar historiqueCHALLENGE - US