Le Philatéliste : Nicolas Feuz

Titre : Le Philatéliste

Auteur : Nicolas Feuz
Édition : Rosie & Wolfe (05/10/2023)

Résumé :
À l’approche de Noël, un vent d’effroi parcourt la Suisse. Un tueur organise un jeu de piste sordide avec des colis postaux. Sa signature ? Des timbres-poste fabriqués à partir de peau humaine.

L’inspectrice de la police judiciaire genevoise Ana Bartomeu est saisie de l’affaire. Son enquête va la conduire des beaux quartiers de Genève à la vieille ville d’Annecy, des impasses sombres de Lausanne aux rues pavées de Delémont.

Réussira-t-elle à démasquer cet assassin mystérieux que les médias suisses et français ont surnommé Le Philatéliste ?

Critique :
À croire que les auteurs de polars se sont donnés le mot : se creuser la tête pour scénariser des crimes pas banals, sortant de l’ordinaire, notamment dans le modus operandi et dans les scènes de crime…

Vous trouvez que les timbres coûtent la peau des fesses ? Alors, fabriquez-les vous même avec de la peau humaine (mais pas la vôtre, hein), comme l’a fait le tueur sadique et pervers de ce roman.

Ah, quand on parle d’originalité, ici, on n’a pas fait dans la dentelle (les timbres ont des dents, contrairement aux poules) ! Jeu de piste à la Poste Suisse, à la recherche de colis suspect dont les timbres sont en peau humaine (une personne a souffert et été torturée).

Le pitch était des plus attractifs et comme ce roman s’était souvent retrouvé dans les listes coups de cœur des copinautes, j’ai eu envie de le découvrir. En ce qui concerne le suspense, les surprises, les retournements de situation, les twist, j’ai été gâtée.

Pour les personnages, il m’a été difficile de m’attacher à l’un ou l’autre, tant ils m’ont semblé froids, distants. Dommage, parce que l’enquêtrice principale était atypique et loin des canons de la beauté et du poids exigés par nos sociétés.

Le scénario, lui, était bien tarabiscoté, notamment avec ces deux affaires qui semblent n’avoir aucun rapport l’une avec l’autre (en plus des timbres humains, nous avions un stalker harceleur ou une plaignante qui mentait !) et des retours dans le passé où l’on se retrouvait avec un gamin en surpoids, sans que l’on sache comment tout allait se goupiller ensuite.

Évidemment, ce n’est qu’à la fin que l’on remettra toute la chronologie en place et que l’on se rendra compte de la perversité de l’auteur qui a bien monté son récit afin d’entretenir le suspense. Maintenant, tout cela serait-il réalisable dans la vie réelle ? Difficile, sans aucun doute et heureusement. Le roman manque un poil de réalisme…

Un polar bien ficelé, addictif, qui peut se dévorer durant une grosse soirée, tant les chapitres sont courts et dynamiques, mais qui, malgré ses qualités, ne me laissera pas de souvenirs impérissables dans la mémoire, sauf quand je regarderai ma vieille collection de timbres (des chevaux, uniquement) et que je repenserai à ce tueur totalement zinzin et au final de l’auteur.

Une lecture plaisante mais pas marquante.

PS : Philatéliste… Bizarrement, ça me fait penser à un sketch d’Éric et Ramzy (pourtant, je ne l’ai vu qu’une seule fois, apparemment, il m’a marqué) = file au tennis.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°148].

Ed Gein, autopsie d’un tueur en série : Harold Schechter et Eric Powell

Titre : Ed Gein, autopsie d’un tueur en série

Scénariste : Harold Schechter
Dessinateur : Eric Powell

Édition : Delcourt Contrebande (12/04/2022)
Édition Originale : Did you hear what Eddie Gein Done ? (2021)
Traduction : Lucille Calame

Résumé :
Ce récit révèle la véritable histoire d’un malade mental sous l’emprise d’une mère bigote et abusive. Cette biographie factuelle d’Ed Gein se focalise sur son enfance et sa vie de famille malheureuses, et sur la façon dont elles ont façonné sa psyché. Il explore aussi le choc collectif qui entoura l’affaire et la prise de conscience que les tueurs peuvent être des citoyens ordinaires.

Il a inspiré de nombreux personnages de cinéma comme Norman Bates dans Psychose. Harold Schechter et Eric Powell nous proposent cette BioBD d’Ed Gein, l’un des plus terrifiants tueurs en série américains.

Critique :
Je suppose que tout le monde a vu le film « Psychose » et connait le twist final… De toute façon, je ne le divulguerai pas, des fois que Alfred Hitchcock viendrait me tirer les doigts de pieds, la nuit…

D’ailleurs, c’est le romancier Robert Bloch qui, le premier, s’inspira de ce tueur pour son roman, du même titre que le film qu’Alfred en tira ensuite.

Alors, qui a inspiré le personnage de Norman Bates (et pas que lui : Hannibal et le mec de Massacre à la tronçonneuse,…) ? Edward Gein… Et je parie que comme moi, vous n’aviez aucune idée de qui il était ?

Un gamin au physique disgracieux, bizarre, le genre qui se fait harceler à l’école, qui pleure souvent, qui voit sa mère comme un Dieu, qui vit en solitaire, qui a l’air un peu demeuré et qui a une vie sexuelle plus pauvre que celle d’un pape (même s’il se branle de temps en temps).

Ce comics, tout en noir et blanc, est très bien dessiné, surtout les expressions, notamment celle de  la mère d’Edward Gein, une femme pieuse, bigote, qui pense que toutes les femmes sont des salopes, des sodomites, échappées de dieu sait où et qui mène tout le monde à la baguette (son mari alcoolo et ses deux gamins).

Il ne faut pas s’étonner, avec une génitrice pareille, que le petit Ed Gein ait été plus que perturbé et ait fini en tueur en série, nécrophile et pilleur de tombes. Je ne dis pas que tous les enfants élevés de la sorte finiront en mecs dépravés (heureusement) ou serial killer, mais pour ceux qui tourneront assassins en puissance, on saura d’où ça vient.

Ce comics assez épais (plus de 200 pages), est une autopsie d’un tueur en série, où les auteurs se sont attachés aux faits, rien qu’aux faits, même s’ils nous donneront un aperçu de toutes les sornettes que les gens de la ville de Plainfield (Wisconsin) balanceront sur Ed, une fois celui-ci arrêté (en 1957). Les rumeurs courent plus vite que la vérité et les horreurs font vendre plus de journaux…

Ce récit n’est pas pour les esprits sensibles ou les jeunes enfants… Les ambiances sont malsaines, angoissantes, flippantes, sans pour autant basculer dans le gore ou la surenchère inutile.

Les auteurs ont réussi le difficile équilibre entre montrer les horreurs commises par Ed Gein, sans s’appesantir dessus, afin de ne pas provoquer l’effet contraire. Ce qui aurait été contreproductif, alors que là, on imagine sans mal et on en tremble d’effroi.

Un terrible fait divers mis en scène de manière remarquable par les deux auteurs dans cet album qui retrace l’enfance et la vie d’Ed Gein, son arrestation, l’enquête, son internement et les faits qui lui ont été reprochés.

En lisant ce comics, vous saurez tout sur celui que l’on a surnommé « le boucher de Plainfield »… Pour un public averti, tout de même !

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°114],  Le Challenge « American Year » – The Cannibal Lecteur et Chroniques Littéraires (du 15 novembre 2023 au 15 novembre 2024) # N°25 et Le Mois du Polar – Février 2024 – Chez Sharon (Fiche N°06).

Les Aigles de Panther Gap : James A. McLaughlin

Titre : Les Aigles de Panther Gap

Auteur : James A. McLaughlin
Édition : Rue de l’échiquier (12/05/2023)
Édition Originale : Panther Gap (2023)
Traduction : Christian Garcin

Résumé :
Frère et sœur inséparables, Bowman et Summer passent leur enfance en pleine nature, dans un ranch sauvage et isolé, véritable forteresse secrète dans le Colorado. Ils grandissent sous la férule de leurs oncles et de leur père qui les élèvent avec la même discipline de fer que leurs aigles de chasse.

Arrivés à l’âge adulte, ils s’éloignent l’un de l’autre et choisissent des chemins différents : Summer reprend l’exploitation familiale, tandis que Bowman met les voiles et part vivre reclus dans la jungle du Costa Rica, loin de la civilisation et de son confort moderne.

Mais, vingt ans après leur séparation, ils sont rattrapés par une sombre et dangereuse histoire de succession. Ils vont non seulement devoir affronter les fantômes du passé et les affaires troubles de leur grand-père défunt, mais également être contraints de se réconcilier pour se protéger de la violence sanguinaire des cartels, qui en veulent à leur héritage.

Les Aigles de Panther Gap met en scène une fratrie cabossée et une histoire familiale chargée de lourds secrets, dans un grand Ouest sauvage traversé par la cruauté des cartels de la drogue.

Pour ce deuxième roman, James A. McLaughlin confirme tout son talent et renoue avec ce qui a fait le succès de Dans la gueule de l’ours, en alliant avec brio la violence et l’efficacité du thriller à la beauté sensible et sauvage du nature writing.

Critique :
Bowman et Summer, frère et soeur, ont été élevé à la dure par leur père, dans un coin paumé, plus perdu que le pire trou du cul de l’Amérique. Une sorte de ranch déguisé en forteresse (ou le contraire : une forteresse déguisée en ranch).

Élevant des aigles et parcourant la nature, les deux gosses sont totalement adapté dans un biotope naturel, mais n’ont jamais vu la ville.

Leur père semble craindre un danger, mais comme il ne parle pas beaucoup et cache tout, ses enfants ne sauront rien ou pas grand-chose et 20 ans plus tard, il semble que le secret est en train de leur péter à la gueule.

Le précédent roman de l’auteur, « Dans la gueule de l’ours », m’avait emballé et il avait terminé en coup de coeur. Voilà pourquoi j’étais impatiente de lire son second ouvrage (il m’a fallu du temps pour le trouver en seconde main) et finalement, il est plusieurs crans en-dessous du précédent.

Pourtant, au départ, tout avait bien commencé. N’ayant pas vraiment relu le résumé, je ne savais pas où j’allais aller et je m’en fichais un peu, tant le récit qui avait des airs de nature writing, me plaisait bien.

La tension montait déjà, les récits étaient alternés entre ce qui arrivait à Bowman, revenant du Costa Rica et celui de Summer, au ranch, sans oublier celui de touristes dormant dans un coin perdu et à qui il va arriver des grosses emmerdes.

Puis, j’ai ressenti une lassitude : l’alternance des chapitres étaient une bonne idée, mais cela m’a donné l’impression que l’auteur ajoutait trop de choses pour retarder le final, qu’il ajoutait trop de rebondissements, trop de rocambolesque, afin d’augmenter la taille de son histoire et finalement, j’ai trouvé que cela alourdissait le récit, le rendant aussi pesant que marche dans de la mélasse.

Trop c’est toujours trop, trop est l’ennemi du mieux. C’est bien d’être ambitieux, mais l’auteur a voulu englober trop de faits dans son histoire : cartels de drogues, héritage, passé trouble, secrets de famille, nature, animaux, violences,…

L’affaire secondaire, celle avec le cartel, aurait pu être évitée, elle n’apporte rien, si ce n’est des pages de plus et je me suis perdue à ce moment-là, sans jamais arriver à revenir totalement dans le récit.

Malgré tout, le début était très bien, je ne peux donc pas parler de lecture foirée totalement, mais elle n’était pas à la hauteur de mes attentes, surtout après un aussi bon premier roman…

À noter que la majorité des lecteurs/lectrices sur Babelio ont des avis plus enthousiastes que moi.

An American Year

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°099]  et le Challenge « American Year » – The Cannibal Lecteur et Chroniques Littéraires (du 15 novembre 2023 au 15 novembre 2024) # N°19.

Six Versions – 02 – La tuerie McLeod : Matt Wesolowski

Titre : Six Versions – 02 – La tuerie McLeod

Auteur : Matt Wesolowski
Édition : Les Arènes (02/03/2023)
Édition Originale : Hydra (2018)
Traduction : Antoine Chainas

Résumé :
« Bienvenue dans Six Versions, je suis Scott King. Durant six semaines nous reviendrons sur le drame qui a frappé la famille Macleod en 2014, une tragédie connue sous le nom de « Tuerie Macleod’. « 

Lors d’une soirée glaciale d’hiver, Arla Macleod, vingt ans, tue sa mère, son beau-père et sa soeur cadette à coups de marteau. Vingt ans plus tard, internée dans un hôpital psychiatrique, Arla accepte de se confier à Scott King, pour le célèbre podcast Six Versions.

Interrogeant aussi ceux qui ont connu Arla dans son adolescence, le journaliste plonge dans le monde trouble des jeux interdits, des trolls infestant la Toile et, surtout, des mystérieux « enfants aux yeux noirs »…

Critique :
♫ Si j’avais un marteau, je cognerais ma sœur, je cognerais mon père, j’y mettrais tout mon cœur ♪ J’assassinerais ma mère ♪ J’lui défoncerais la chair ♫ Et je maquerais sur mon père, ma mère et ma soeur ♪ Oh oh, ce serait le bonheur…

Désolée de vous coller du Cloclo dans la tête et dans une version plus trash que d’habitude, mais vu que Arla Macleod, âgée de 20 ans, à défoncé les crânes de son beau-père, sa soeur cadette et de sa mère, la chanson s’y prêtait bien.

Sinon, j’avais aussi la chanson de Queen : Hammer to fall, qui s’y prêtait bien aussi.

Non le roman policier n’est pas mort, non il n’est pas toujours monté de la même manière, même si, dans le fond, il faut toujours résoudre une énigme, une enquête, un ou plusieurs crimes. Ici, peu de doute quand à la culpabilité de Arla, mais la question qui se pose, c’est : pourquoi ?

Scott King, à l’aide de ses podcast, va remonter le fil de l’histoire et tenter de comprendre, à l’aide de six témoignages, ce qui a bien pu pousser Arla à virer en meurtrière violente.

Parce que bon, assassiner sa famille à grand coup de marteau et maquer (taper en patois de chez moi) sur leurs têtes au point de rendre sa frangine méconnaissable, avouez que c’est un fait divers peu banal que l’on nous propose là.

Le concept développé par l’auteur n’est pas banal et il le met bien en scène. Le premier tome était déjà très bon, mais le deuxième le surclasse. Au moins, cette fois-ci, je n’ai pas été déstabilisée par la manière dont l’auteur présente son récit, j’étais en terrain connu.

Pas d’action dans ce roman, pas de course-poursuite, mais plutôt des discussions entre Scott King et les différents témoins de l’époque, qui nous parlerons d’Arla, de ses problèmes, de sa famille catho à l’extrême, de son côté gothique et de plein d’autres choses qui feront que nous aurons une meilleure perception de ce que cette jeune fille a vécu et de ce qu’elle était.

Pas d’action, mais un suspense à couper au couteau et un côté addictif dans ce polar. Deux malheureux jours pour le lire et j’aurais pu encore faire moins, si j’avais voulu.

C’est diaboliquement mis en scène, on a en plus l’intrigue de la personne qui menace Scott King et qui joue au troll sur ses pages de réseaux sociaux et ce ne sera qu’à la toute dernière ligne que l’on aura le fin mot de l’histoire, la trame complète et les explications de cette tuerie au marteau (on ne précisera jamais le modèle du marteau).

Un thriller psychologique, qui joue avec les faits de sociétés, les dangers des réseaux sociaux, les jugements hâtifs, l’intolérance envers les autres, celles ou ceux qui sortent de l’ordinaire, de par leur look (choisi) ou leur masse corporelle (non choisie).

Le harcèlement scolaire, les conneries des ados, les jeunes mecs qui parlent des filles comme si elles étaient des pièces dans un étal de boucherie, la religion à l’exagération, le culte de la personnalité, bref, toutes ces choses de notre époque qui peuvent pourrir la vie des jeunes et des moins jeunes.

C’est un thriller qui comporte beaucoup de choses en lui, sans pour autant que l’on arrive à l’indigestion, car tout est bien amené, traité, sans qu’on ait l’impression que l’auteur a tout fourré dedans pour rajouter de la masse.

Non, non, tout est bien agencé, on se laisse porter par le récit, on s’imagine écouter ce qu’on lit, on voit les personnages, on frémit avec eux, on sent la tension monter et les dernières pages se lisent avec fébrilité !

Un coup de maître, assurément ! La preuve que l’on peut encore innover dans les romans policiers.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°079].

Rage : Richard Bachman (Stephen King)

Titre : Rage

Auteur : Richard Bachman (= Stephen King)
Édition : J’ai Lu (2000)
Édition Originale : Rage (1977)
Traduction : Évelyne Châtelain

Résumé :
Charles Decker est, en apparence, un petit lycéen américain bien tranquille. Mais, entre un père violent qu’il déteste et une mère fragile, il rage a froid. Un jour, cette rage éclate et il abat, d’un coup de revolver, sa prof de maths.

Puis, il s’empare du pouvoir, autrement dit, il prend sa classe en otage.

Il va alors contraindre ces condisciples a se livrer a un déballage furieux, a se débarrasser de toutes les haines accumules en secret : contre les parents, la société corrompue, l’école pourrie, la lâcheté et l’incompréhension des adultes.

Critique :
Rage est le premier roman que Stephen King a publié sous le pseudonyme de Richard Bachman. Si vous voulez le lire, vous ne le trouverez pas en librairie, mais dans des bouquineries, en seconde main.

Pourquoi ? Parce que l’auteur a fait arrêter la publication de nouvelles éditions, en 1999, après qu’un exemplaire a été trouvé dans le casier d’un lycéen ayant tué trois de ses camarades (et ce n’était pas la première fois que l’in découvrait ce roman dans les casiers des lycéens ayant tiré sur des camarades).

Dans ce roman, Charles Decker assassine deux professeurs. Vous n’assisterez donc pas à une chasse aux étudiants dans des couloirs de l’école, tel un mauvais film d’épouvante. Ou pire, dans la réalité.

Ce roman est un huis-clos psychologique, puisqu’après avoir tué sa prof d’algèbre et un autre qui voulait entrer dans la classe, Charles tiendra toute sa classe en otage et leur expliquer une partie de sa vie, demandant ensuite à ses camarades de parler de leurs frustrations, de livrer des petits secrets, de se confesser, en quelque sorte.

Non, Charles n’a pas eu une vie merdique, même s’il y avait mieux (mais c’était plus cher), coincé qu’il était entre un père chasseur qui voulait en faire un homme et sa mère qui l’affubla d’un costume en velours, à 13 ans, pour aller à une fête d’anniversaire (débile et inapproprié !).

Là, il vient de péter un câble, un de plus et il est allé aussi loin qu’on peut aller : l’assassinat de sang-froid. On comprend bien ses névroses en lisant ses pensées, ses explications, mais de là à arriver à prendre une arme et à tuer, on se demande bien quelle araignée lui a trotté dans le crâne.

En tout cas, rien n’indiquait qu’il allait basculer du côté obscur de la force. Et rien ne peut justifier ses actes (ni ceux dans la vie réelle). Je peux comprendre (pas cautionner) un meurtre par vengeance (on a tous rêvé de flinguer un chef, un collègue, un emmerdeur, un tortionnaire, mais juste dans sa tête). Mais là, ce n’est pas le cas, Charlie ne se venge pas de tortionnaires, d’harceleurs et il y a des dommages collatéraux terribles. Sa réaction à ses problèmes est excessive.

Ce qui fout plus les chocottes, dans ce premier roman du King, c’est le comportement de ses camarades de classes. Là, j’en suis restée bouche bée. Pour eux, c’est une aventure, un truc à raconter (nous ne sommes même pas à l’époque des réseaux sociaux), une journée passée à ne rien faire et un seul tentera de s’opposer à Charlie. Juste un seul. La meute est avec Charlie. C’est ça le plus terrible.

Un premier roman qui sonnait déjà juste, qui parlait d’un phénomène qui allait s’amplifier aux États-Unis, où les jeunes peuvent faire de plus gros cartons, puisqu’ils sont équipés de fusils d’assaut, possédant des chargeurs multiples et avec lesquels ils peuvent tirer de nombreuses fois sans devoir recharger.

Charles, dans ce récit, ne possède qu’un révolver, un six-coups, il doit ouvrir le barillet pour recharger et quitter ses camarades des yeux. Avec une arme de guerre, c’est plus simple, plus rapide et plus meurtrier.

Un président a dit, un jour, que si les français avaient pu porter des armes, ils auraient pu se défendre face aux terroristes du 13 novembre 2015. Moi je dis que ce n’est pas vrai… Les américains sont armés, les flics sont armés et face à un jeune qui flingue à tout va, personne ne bouge, ou alors, il se fait descendre comme au tir pipes.

Un roman assez glaçant, avec un personnage tourmenté, qui avait ses petits problèmes et qui a choisi de les résoudre de manière violente et expéditive. Pas de circonstances atténuantes pour Charlie Decker, même si c’est une personne vulnérable.

Un roman surprenant, puisqu’il ne va pas dans la direction que l’on aurait pensée…

Ce que wikiki en dit : Stephen King écrit une première version de Rage durant sa dernière année de lycée, sous le titre Get It On, mais la laisse inachevée. Il termine le roman en 1971 mais, après il est refusé à la publication par Doubleday malgré l’intérêt de la maison d’édition. Il est finalement publié en 1977 sous le pseudonyme de Richard Bachman.

#automneduking – 01

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2023 au 11 Juillet 2024) [Lecture N°050] et Le Mois Américain en solitaire – Septembre 2023.

Jack l’éventreur n’est pas un homme : Pascale Leconte

Titre : Jack l’éventreur n’est pas un homme

Auteur : Pascale Leconte
Édition : Auto édition (2014)

Résumé :
Et si Jack l’Éventreur était une femme ? Voici la vie de Florence Maybrick, à partir de ses dix-huit ans lorsqu’elle rencontre son futur mari anglais, alors qu’elle est américaine.

Comment cette « étrangère » fut-elle poussée dans ses derniers retranchements ?

Une enfance instable, une mère castratrice aux mœurs légères, un mari volage ainsi que l’époque victorienne et puritaine sont autant d’explications nous guidant sur le chemin de la réponse.

Florence est-elle l’auteur du « Journal de Jack l’éventreur » ?

Mêlant biographie et faits réels, ce roman pourrait-il être la clé ?

Florence était-elle une perverse narcissique capable d’éliminer ses rivales sans le moindre remord ?

Critique :
Si Jack L’Éventreur n’est pas un homme, c’est donc qu’il est une femme. Élémentaire (on va oublier les non genrés et tout le  reste, nous sommes en 1888). Mais Jacqueline l’Éventreuse, ça le fait tout de suite moins, non ?

L’autrice commence son roman en mettant en scène une femme qui apporte son roman à un certain Stéphane Bourgoin, le spécialiste des serial-killer (bon, maintenant que l’on sait ce que l’on sait, j’ai ricané doucement). Sorte de mise en abîme, elle lui présente son roman où elle explique les meurtres de 1888.

Puis, commence l’histoire à proprement dite. Nous faisons la connaissance avec Florence, jeune fille timide, qui cherche à se marier à tout prix et tente de trouver l’homme idéal durant son voyage entre l’Amérique et la France. Là, on va péter le record de demande en mariage la plus rapide… Puis, la vie de couple commence…

Comment Florence Maybrick est-elle devenue une tueuse de sang-froid, assassinant les prostituées ? Est-ce que cette théorie marche ? Est-elle plausible ?

Tout d’abord, Florence est une femme détestable, sorte de petite merdeuse capricieuse, jamais contente, ne voulant plus dans sa tasse de thé le biscuit de son époux, mais n’ayant aucun scrupules à le tromper, à tel point quelle tombera enceinte d’un autre homme que son légitime. Ses enfants, elle ne les aime point.

Son personnage, réaliste, est une manipulatrice, jamais contente, colérique, chieuse, bref, on a envie d’aller la noyer dans l’étang. James Maybrick, son époux, lui passe tous ses caprices (le con) et se plie devant elle. Puis, il va la tromper, ce qu’elle n’appréciera pas. Alors qu’elle, a eu une fille avec son amant…

L’autrice n’est pas une branquignole en matière de Jack The Ripper et elle a réussi à faire des corrélations entre les meurtres et sa coupable, évitant, intelligemment, l’écueil du double meurtre et n’oubliant pas trouver une solution, plausible, au fait qu’un témoin avait salué Mary Jane Kelly alors qu’elle était déjà éparpillée façon puzzle.

Si j’ai trouvé le temps long, avant les meurtres et après, la partie consacrée à la période des éventrations était prenante, bien mise en scène et tout ce qu’il y a de plus plausible. Que l’on adhère ou pas à la théorie de l’autrice, le tout s’emboîte bien et est réaliste.

Hélas, cette lecture m’a semblée longue et j’ai patiné avec Florence. Oui, elle me sortait par les trous de nez, mais le problème n’était pas là. Il se trouvait dans le rythme de narration, assez lent, l’autrice prenant le temps de poser ses personnages, de les étoffer, de monter le portrait psychologique de la Florence et là, à la fin, je me suis ennuyée.

Un comble, parce que si l’autrice n’avait pas pris la peine de développer ses personnages, cela n’aurait pas aussi bien marché. Comme quoi, je ne suis jamais contente.

Malgré tout, cette lecture fut intéressante, car la théorie mise en place est plausible, prend tout ce que l’on sait, sur les meurtres, en compte, assure la concordance avec le fameux journal de Maybrick (qui est un faux) et lie le tout, ce qui fait que la sauce prend facilement.

De plus, son final est excellent ! Il m’a scotché. Et paf, pour Bourgoin. En dat in a kas (et pan dans ta g…).

#lemoisanglais

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°218] et Le Mois Anglais, chez Lou et Titine – Saison 12 – Juin 2023 [Fiche N°17].

‭Reine Rouge – Antonia Scott 01 : Juan Gomez-Jurado

Titre : Reine Rouge – Antonia Scott 01

Auteur : Juan Gomez-Jurado 🇪🇸
Édition : Fleuve Noir (2022) / Pocket Thriller (2023)
Édition Originale : Reina Roja (2018)
Traduction : Judith Vernant

Résumé :
La série phénomène vendue à 2 millions d’exemplaires Antonia Scott est spéciale. Très spéciale. Elle n’est ni flic ni criminologue. Elle n’a jamais porté d’arme ni d’insigne, et pourtant, elle a résolu des dizaines d’affaires criminelles. Avant de tout arrêter.

Depuis un tragique accident, Antonia se terre dans un appartement vide et n’aspire qu’à une chose : qu’on lui fiche la paix. C’était compter sans l’inspecteur Jon Gutiérrez.

Missionné pour lui faire reprendre du service, il parvient à la convaincre d’étudier un dernier dossier, celui d’un assassin sans scrupule qui s’en prend aux héritiers des plus grandes fortunes d’Espagne.

Sa particularité ? L’homme ne semble motivé ni par l’appât du gain, ni par le plaisir de tuer. Un cas complexe auquel la police madrilène n’entend rien. En un mot, le terrain de jeu favori d’Antonia Scott.

Critique :
Une fois de plus, j’avais loupé LE thriller dont tout le monde parlait…

Ben non, je n’en avais pas entendu parler, et pourtant, je visite des blogs, Babelio, Livraddcit. Ou alors, j’en ai entendu parler et puis, j’ai tout oublié. Problème résolu puisque je l’ai lu.

Il est bien ? Oui, il est addictif, rempli de suspense, de déductions, d’action, d’adrénaline, bref, tous les ingrédients d’un thriller qui pulse et qui fait son job.

Ai-je envie de lire la suite et de retrouver le duo hors norme ? Oui, absolument. Est-ce que ce thriller marquera ma mémoire ? Non, pas vraiment.

Qu’on ne s’y trompe pas, je ne vais pas descendre ce roman, il m’a bien diverti durant deux jours (560 pages – format poche – lues en 48h, c’est un bon rendement). J’ai apprécié le duo formé par Jon Gutiérrez, flic usé et viré pour faute déontologique et Antonia Scott, une femme brisée, au cerveau éblouissant, qui ne voulait pas bosser sur cette affaire de crime.

Un attelage disparate mais qui fonctionne bien et qui vous tira le carrosse avec fougue et humour, sans vraiment perdre de rythme. C’est la bonne découverte de ce thriller, même si Antonia est trop intelligente que pour être crédible et que le roman possède des ficelles et des trucs un peu gros. Mais ça passe.

Pour le scénario, il est classique sans l’être, déjà vu tout en étant cuisiné autrement et cela donne un plat assez speedé, bourré d’épices et qui ravira les plus blasés, même si certaines réflexions d’Antonia me sont restées hermétiques, sans explications ultérieures. Ou alors, j’avais le cerveau en compote !

L’autre bon côté du scénario, c’est que les enlèvement ne sont pas comme d’habitude, notamment dans les revendications. J’ai aimé la psychologie de certains personnages secondaires, torturés, tiraillés, mais restant tels qu’ils ont toujours été : inflexibles.

Dans Alice au pays des merveilles (à ne pas confondre avec Ça glisse au pays des merveilles), la reine rouge, un peu chtarbée, lui disait que dans son pays, il fallait courir pour rester sur place. Pour Antonia, c’est courir pour se mettre au niveau des prédateurs, toujours plus rusés, plus fourbes, plus sadiques.

Alors non, ce ne sera pas le livre de l’année, mais c’est un excellent thriller qui vous happera assez vite et ne vous lâchera plus jusqu’au final, bourré de suspense, d’adrénaline et de choses dont je ne vous dirai pas, afin de ne rien divulgâcher !

Un thriller addictif, qui déstabilise, qui intrigue, qui tient en haleine, qui fait son boulot, qui le fait bien, même s’il n’est pas toujours crédible…

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°189] et Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°17].

L’île des souvenirs : Chrystel Duchamp

Titre : L’île des souvenirs

Auteur : Chrystel Duchamp
Édition : L’Archipel Suspense (09/03/2023)

Résumé :
Delphine, 22 ans, est étudiante à Lyon. Issue d’une famille bourgeoise, elle tente de s’affranchir de son éducation en écumant bars et boîtes de nuit. Au cours d’une soirée, elle suit une ombre mystérieuse jusqu’à sa voiture…

Quand elle se réveille dans une maison abandonnée, elle est menottée à un radiateur. Bientôt rejointe par une autre prisonnière.

L’enquête confiée à la Crim’ n’avance pas assez vite aux yeux de l’opinion. Sous pression, le capitaine Romain Mandier accepte l’aide d’un profiler et d’une psychotraumatologue.

Qui est cet homme en noir, qui hante les souvenirs confus d’une des captives ? Pourra-t-on exhumer de sa mémoire les fragments qui mèneront au coupable ?

Une fois de plus, Chrystel Duchamp surprend par une intrigue des plus originales, et un épilogue aussi glaçant que retors !

Critique :
Notre mémoire est tortueuse, elle oublie ce qu’elle a envie, elle conserve le positif, elle change nos souvenirs, elle occulte, bref, elle n’est pas fiable.

Lorsqu’une victime est victime de sa mémoire qui lui a collé une belle amnésie, il va falloir aller extraire les souvenirs autrement.

Le dernier roman de Chrystel Duchamp me faisait de l’oeil depuis sa sortie, les retours étaient excellents, ce qui fait qu’il n’a pas attendu trop longtemps dans ma PAL.

Ce roman choral se lit assez vite, mais hélas, il souffre de beaucoup de digressions dans les personnages.

Si j’ai apprécié les portraits de Delphine et de Maelys, les deux protagonistes, qui nous brossaient leur personnalité avec efficacité, j’ai commencé à soupiré avec le portrait du flic, le capitaine Romain Mandier et ses soucis de fertilité, qui n’apportaient rien à son personnage. Trop de blablas aussi dans la présentation d’Erwann, le profileur.

Ce que Erwann pense des réseaux sociaux, je le pense aussi, je suis raccord avec lui, mais présenté de la sorte dans le roman, ça fait pieds dans le plat, gros sabots, comme si le texte n’avait pas été travaillé afin d’être amené avec un peu plus de recherche que ce gros pavé indigeste qui montre que l’autrice avait un message à nous faire passer et qu’elle l’a fait, sans subtilité aucune.

Dans un autre de ses romans, Le sang des Belasko, tout était plus subtil, les dialogues étaient plus fins, alors qu’ici, on a l’impression de lire un roman écrit par une autrice débutante.

Lorsque la solution de l’énigme est arrivée, repensant à ce que j’avais lu, dans différentes chroniques, qui parlaient toutes d’une final exceptionnel, j’ai été déçue : je l’avais vu venir de loin ! Zéro surprise. Mais effectivement, pour qui n’avait rien vu venir, ça faisait un effet Kiss Cool : paf dans la bouche.

Oui, mais, j’avais oublié qu’avec un bonbon Kiss Cool, il y avait un double effet et celui-là m’a explosé dans la gueule, littéralement. Ok, je remise mes critiques dans mon pantalon, elles y seront au chaud et le style lourd que je reprochais à l’autrice trouve peut-être son explication dans l’épilogue.

Bien vu, merci Spip (les belges comprendront).

Je vais vous faire une confidence : dans ma vie d’électrice, j’ai voté pour les socialistes et j’ai été bien baisée. Ma voix est allée aussi aux Libéraux et j’ai été encore mieux baisée. Pareil avec les listes du bourgmestre de mon bled : niquée !

Ici, grâce à son final, Chrystel Duchamp rejoint, à nouveau, le panthéon des auteurs et autrices qui m’ont le mieux baisés et en littérature, c’est un compliment, ça mérite même d’être inscrit sur des cartes de visite.

Si je déteste me faire avoir dans la vraie vie, en littérature, c’est un vrai plaisir et Agatha Chrsitie m’a souvent fait le coup.

Dommage tout de même qu’il y ait eu autant de digressions dans les portraits des personnages et qui, dans certains cas, n’apportaient rien à ces personnes.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°177].

Ikigami – Préavis de mort (Double) – Tome 1 : Motorô Mase

Titre : Ikigami – Préavis de mort (Double)

Scénariste : Motorô Mase
Dessinateur : Motorô Mase

Édition : Kazé Seinen (2015)

Résumé :
Dans ce pays, une loi entend assurer la prospérité de la nation en rappelant à tous la valeur de la vie. Pour ce faire, un jeune sur mille entre 18 et 24 ans est arbitrairement condamné à mort par une micro-capsule injectée lors de l’entrée à l’école.

Lorsqu’on reçoit l’ikigami, c’est qu’il ne nous reste plus que 24h à vivre. Mais à quoi passer cette dernière journée, lorsqu’on n’a pas eu le temps de faire sa vie ?

Critique :
La vie n’a pas de prix, mais bien souvent, nous l’oublions, il faut que nous manquions de mourir pour s’en rappeler, ou que nous voyons partir des plus jeunes que nous…

Alors, pour bien faire comprendre à toute la population la valeur de la vie, un pays, totalitaire, inocule une capsule dans les vaccins que sont obligés de recevoir les élèves. Un sur les mille mourra entre ses 18 et 24 ans, de manière arbitraire.

Sont préavis, il le recevra 24h avant sa mort… C’est un ikigami et c’est pour assurer la prospérité de la nation.

Prospérité ? J’t’en foutrai, moi, de ta prospérité. Depuis quand la mort d’un jeune assure-t-elle la prospérité de la nation ? C’est un devoir ? Ben merde alors… Mais bon, je n’ai jamais été atteinte de patriotisme non plus… Défendre mes proches, oui, mais sacrifier ma vie pour le pays qui se fout bien de moi, je ne suis pas encore prête.

Dans ce premier tome, nous assisterons à plusieurs réactions, suite à la réception du préavis de mort. Au moins, aucun des personnages ne réagira de la même manière et j’ai apprécié les questionnements que se pose Fujimoto, qui est un livreur d’ikigami, même si je trouve qu’ils arrivent fort rapidement, comme s’il mettait déjà le système en doute.

Fujimoto a raison, le système est arbitraire et débile, puisqu’on ne sait pas à quoi cela sert d’éliminer une personne sur mille. C’est même totalement absurde ! Mais si les régimes totalitaires ne l’étaient pas, cela se saurait !

La menace n’empêche pas les jeunes de se comporter comme des salopards, comme la bande de harceleurs et les sanctions qui pèsent sur les familles, si jamais le futur mort semait des troubles, n’a pas empêché l’un des personnages à se venger avant de mourir.

La lecture est intéressante parce qu’elle permet de se poser une question terrible, à laquelle nous n’avons pas toujours de réponse : qu’aurais-je fait à la place de ? Que ce soit à la place du fonctionnaire qui fait son job et délivre ses ikigamis ou à la place des personnes qui apprennent qu’il leur reste 24h avant de mourir.

Malgré tout, je suis restée sur ma faim… Fujimoto n’a pas beaucoup de place pour la rébellion, ni pour poser trop de questions. Quant aux chapitres consacrés à ceux qui allaient mourir, s’ils étaient intéressants, je n’ai pas envie que toute la série se déroule de la même manière, cela deviendrait redondant.

Un manga qui oscille entre thriller et dystopie, qui instaure un climat de malaise face à ces crimes institutionnalisés, réglés comme du papier millimétré et dont les fonctionnaires sont très fiers de cette « Loi pour la prospérité nationale » et du système mis en place pour que personne ne sache à l’avance dans quel vaccin la puce mortelle va être insérée (ni dans quel élève).

Ma foi, j’ai beau être restée sur ma faim, je vais tout de même lire le deuxième opus afin de voir si l’histoire bouge où si elle reste statique.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°121] et Le Mois du Polar, chez Sharon – Février 2023 (N°04).

La Constance du Prédateur – Ludivine Vancker 04 : Maxime Chattam [Par Dame Ida, Ex-Ex-Groupie Frissonnante du Fan-Club de Maxime Chattam]

Titre : La Constance du Prédateur – Ludivine Vancker 04

Auteur : Maxime Chattam
Édition : Albin Michel (02/11/2022)

Résumé Babelio
Ils l’ont surnommé Charon, le passeur des morts. De son mode opératoire, on ignore tout, sauf sa signature, singulière : une tête d’oiseau.

Il n’a jamais été arrêté, jamais identifié, malgré le nombre considérable de victimes qu’il a laissées derrière lui. Jusqu’à ce que ses crimes resurgissent du passé, dans les profondeurs d’une mine abandonnée…

Plongez avec Ludivine Vancker dans le département des sciences du comportement, les profilers, jusque dans l’âme d’un monstre.

L’avis de Dame Ida :
Meuh nan ! Ce n’est pas une histoire sur une dénommée Constance qui se serait entichée d’un prédateur à poils ou à plumes…

Chattam ne donne pas dans le documentaire animalier, même si on échappera pas à la dimension bestiale du dit prédateur ! C’est, comme l’indique le résumé Babelio, une histoire de tueur en série très prolifique et d’une redoutable persévérance.

Un crime, que dis-je une série de crimes tellement énormes et dans un contexte d’enquête tellement particulier que l’atmosphère glauquissime nous scotche dès les premières pages et nous laisse englués dans la progression de l’enquête jusqu’à son dénouement.

Une série de crimes tellement conséquente que la pression qui pèse sur les épaules des enquêteurs et en particulier du duo d’enquêtrices, nous écrase nous aussi lecteurs et lectrices.

Et l’affaire devient d’autant plus mystérieuse quand on retrouve dans un autre charnier d’autres victimes attendant qu’on les découvre depuis les années 1930, portant l’ADN du même meurtrier présumé que des dépouilles remontant aux années 1990… ADN que l’on retrouvera sur sur des victimes très récentes.

Un méchant terrible et dément… Des victimes dont Chattam nous rappelle et décrit l’humanité comme le font rarement les auteurs d’histoires de tueurs en série, afin de nous rappeler qu’elles sont des personnes avec une vie, des projets, des proches, des familles, et pas juste des objets que le tueur détruit sans états d’âmes pour assouvir ses fantasmes délirants…

Une héroïne avec son histoire, ses forces et ses blessures, travaillant sous les ordre d’une nouvelle supérieure avec qui le courant passe rapidement très vite et très bien, rappelant que nan, les femmes ne sont pas nécessairement des peaux de vaches entre elles, rongées par une sorte de pulsion instinctuelle à la rivalité…

Des personnages qui même secondaires ou quasi-figurants, se voient dotés d’une âme et d’une histoire…

Une intrigue bien tordue et bien huilée… Qu’il n’est évidemment pas question que je déflore ici… Et qui se dépliera sans temps morts, tâtonnements ou chapitres bâclés…

Anybref, du grand Chattam ! Du Chattam que j’aime ! Du Chattam comme il m’avait manqué depuis sa trilogie du mal ou depuis les Arcanes du Chaos… Enfin !!!

Un ou deux bémols cependant… Et oui, vous me connaissez… Faut toujours que je râle… Mais promis ça sera light aujourd’hui !

Si Maxime Chattam a ici fait un effort notable pour se renseigner sur l’organisation du service en sciences du comportement de la Gendarmerie Nationale et le statut de celles et ceux qui y travaillent (ça nous changera du dernier Thilliez que j’ai lu et qui se vautrait un peu sur ce point), il aurait dû vérifier cet autre petit point de procédure judiciaire avant de l’aborder rapidement dans son roman…

Dans le roman il parlera d’un suspect qui aurait demandé à son avocat qu’il fasse effacer de son casier judiciaire le viol pour lequel il vient de sortir de prison. Les enquêteurs se réjouissent que la demande n’ait pas encore été traitée, car sinon ils n’auraient pas eu connaissance des antécédents du suspect.

Oui… Mais non !

Certes, il est possible pour une personne condamnée à une peine d’obtenir que ladite peine ne soit pas inscrite au casier judiciaire accessible à l’employeur pour ne pas nuire à ses possibilités d’accéder à un emploi. Cela étant… En général cela doit être demandé par l’avocat lors du procès, avant même le prononcé de la peine et pas à la sortie de prison (bien que ça ne mange pas de pain d’essayer après) …

Mais, cela concerne généralement les délits mineurs sans récidives. Je n’ai jamais vu ou entendu parler, à l’époque où j’ai travaillé en secteur judiciaire, de l’effacement de crimes (infractions passibles de peines supérieures à 10 ans de prison) comme des viols ou des meurtres d’un casier judiciaire.

Et en outre, le fait que la peine ne soit pas inscrite sur le casier accessible à l’employeur ne signifie pas que la peine soit effacée du casier… Elle est juste reportée sur une autre partie du casier judiciaire qui n’est pas accessible à l’employeur, mais elle reste toujours accessible aux services judiciaires et policiers, lorsque l’on recherche les antécédents d’un délinquant.

Nos enquêteurs ne seraient donc jamais passés à côté d’une peine pour viol sur le casier d’un criminel sous prétexte qu’il l’aurait fait « effacer » de son casier. C’est impossible, puisque ça ne sera pas effacé et qu’ils ont accès à l’intégralité du dossier et pas seulement au casier accessible aux employeurs.

Je préfère le préciser pour que les lectrices ou lecteurs, victimes réelles ou potentielles d’un tel crime, soient rassurés sur le fait qu’un viol ne compte pas si peu aux yeux de la justice, pour que l’on en obtienne l’effacement total dans un casier judiciaire.

En outre, une condamnation pour viol entraîne en France l’inscription du condamné sur le FIJAIS (Fichier Judiciaire Automatisé des Auteurs d’Infraction Sexuelles ou violentes), et ça m’étonnerait beaucoup que des enquêteurs n’aillent pas voir sur ce fichier dans ce genre d’affaires… Je dis ça… Mais je ne dis rien… C’est dommage que Chattam ait oublié l’existence de ce fichier-là !

Sans parler du fait que si les juges peuvent se laisser convaincre de ne pas inscrire une condamnation « mineure » comme une bagarre avec ses voisins pour une question de trouble du voisinage, chez quelqu’un qui n’a pas de casier… ou un vol à la tire sans récidive…

Un viol ou un meurtre chez un sujet inquiétant (dans ce cas il est fréquent de demander des expertises ou enquêtes de personnalité) … avec les risques que ça peut faire courir aux éventuels collègues, clients, employeurs… Je doute que les juges soient irresponsables au point de le rendre invisible sur le casier, réclamé lors d’une embauche sur un emploi un peu sensible, réclamant un casier vierge.

Par ailleurs, il y a aussi une légère erreur concernant les procédures de changement de nom… Si elles ont été simplifiées au début des années 2000 (plus besoin de saisir le Conseil d’Etat !) et si la publication de l’annonce de ce changement de nom au Journal Officiel de la République est maintenant à la charge de la personne ayant demandé ce changement (110 euros) …

Le fait est que cette publication n’est pas une nouveauté et que les changements de noms faisaient déjà l’objet d’une publication au JO avant la modification de ladite procédure (j’ai y lu des déclarations de changements de nom au JO avant les années 2000) contrairement à ce que l’auteur fait dire à ses personnages.

De toute façon, en France, pays qui adoooore la bureaucratie, tout acte administratif laisse des traces quelque part et dans le cadre d’une enquête officielle, les services de police peuvent toujours avoir accès à ces informations à condition de chercher au bon endroit.

Et puis… Sans vouloir trop en dire pour ne pas spoiler… L’usage répété sur un temps relativement long et particulier que le Prédateur fait de l’eau de javel sur ses victimes vivantes, sans qu’elles ne semblent en souffrir plus que cela, me laissera très perplexe.

Je ne suis pas médecin ou chimiste, alors je ne me montrerai pas péremptoire sur ce point, mais je ne suis pas certaine qu’on puisse aussi bien tolérer de telles pratiques sans gros dégâts immédiats et atrocement douloureux sur les tissus concernés.

L’histoire ne nous dit pas si l’eau de javel était pure ou diluée… On dira que cette ambiguïté permet d’entretenir un doute favorable à l’auteur, mais franchement… Ne faites pas ça à la maison.

Et enfin, c’est là encore un petit détail sur un petit point plus que secondaire qui surgit au détour d’une page… Mais lorsqu’un enfant devient adoptable à l’âge de six ans et présente un état psychiatrique préoccupant, il n’est JAMAIS proposé à l’adoption, même s’il a été déclaré pupille d’état.

Tout enfant pupille n’est pas nécessairement considéré comme adoptable par les services sociaux. Lorsqu’il existe un risque accru qu’une adoption soit problématique en raison de l’état psychiatrique d’un enfant, l’enfant n’est pas proposé à l’adoption…

Mais à part ces petites bourdes mineures, qui ne changeront pas grand chose à mon plaisir de lecture, je dois reconnaître que je n’aurais rien d’important à reprocher à Maxime Chattam dans la construction de cet opus efficace et sans temps morts.

Cela faisait si longtemps ! Mais je réalise que cet opus est le dernier en date du Cycle « GN » (Gendarmerie Nationale sans doute) dont je viens de découvrir l’existence. Sans doute serait-il intéressant que je lise ceux qui ont précédé.

Si j’étrille Maxime Chattam impitoyablement quand il me déçoit, c’est parce que je sais aussi ce qu’il est capable de nous donner quand il soigne son sujet, et ce n’est donc que justice que de reconnaître quand il nous a livré le meilleur de lui-même et m’a fait frissonner.

J’ai en effet eu le plaisir depuis si longtemps espéré, de retrouver cet auteur dans un genre qu’il maîtrise suffisamment pour m’embarquer là où il voulait m’amener au fil des pages.

Et j’en veux encore.