Les épées de la nuit et du jour – Drenaï 11 : David Gemmell

Titre : Les épées de la nuit et du jour – Drenaï 11

Auteur : David Gemmell
Édition : Milady (2013) / Bragelonne Fantasy (2019) – 600 pages
Édition Originale : The Swords Of Night And Day (2004)
Traduction : Rosalie Guillaume

Résumé :
Mille ans après leur mort, Druss et Skilgannon le Damné sont vénérés comme des héros par le peuple drenaï, frappé par la guerre et les maléfices de l’Éternelle.

Or, une ancienne prophétie annonçait le retour d’un héros de légende vers son peuple en son heure la plus sombre, et le sorcier Landis Khan a décidé de la réaliser. Il a trouvé la tombe de Skilgannon et l’a ressuscité.

Mais cet homme est perdu dans ce monde étrange, séparé de tout ce qu’il connaissait. Enfin, de presque tout. Car Khan avait tenté un premier rituel et ramené un grand gars taciturne qui fait office de simple bûcheron dans la forêt. Un gars qui ressemble étrangement à un certain porteur de hache que Skilgannon connut autrefois…

Critique :
Fin du cycle Drenaï, avec ce dernier roman qu’il me restait à lire. Honte à moi d’avoir mis si longtemps à terminer cette formidable saga.

Druss La Légende et Skilgannon le Damné sont morts depuis mille ans… Oui, ça fait un sacré bail !

Après le Club des Cinq, voici donc les aventures du Club des Ressuscités ! Non pas trois jours après, conformément aux écritures, non pas après trois années de Grand Hiatus, mais après un millénaire. J-C et Holmes peuvent aller se rhabiller !

Tu étais décédé et te revoilà revenu dans le monde, 1000 ans après. Heureusement, pas de nouvelles technologies, juste des peuples qui se sont éteints, le pouvoir qui a changé de main et toujours de la haine, des guerres, de la jalousie, de l’envie… ♫ Non, non, rien n’a changé ♪

Dans ce dernier tome, la science sans conscience est de sortie, certains ont joué aux apprentis sorciers, au docteur Frankenstein (non conventionné) et à l’aide des os des morts, leur ont offert une nouvelle vie. Bon, après, faut pas oublier d’aller récupérer l’âme du décédé et là, c’est un autre problème.

David Gemmel reprend sa recette qui fonctionne toujours, utilise ses ingrédients habituels et offre à ses lecteurs une fin de cycle superbe, avec des émotions, du rire, des combats, de la bravoure et du sang. Ça pourrait sembler un peu bourrin, mais ça ne l’est pas (j’vous jure !) et j’ai kiffé ma lecture.

Dans les univers de l’auteur, comme souvent, un des personnages, un petit être insignifiant, peureux et couillon (il a dû faire de nombreuses traces de freinage quand il était poursuivis par des Jiamads), a réussi à se trouver du courage. Mis au pied du mur, il a eu ce grain de folie qui a changé sa vie.

Ce sont ces personnages insignifiants qui apportent toujours un truc en plus au récit, notamment des émotions. Un couillon qui se dresse devant plus fort que lui ou devant l’injustice, c’est toujours beau à voir.

L’auteur évite le manichéisme dans la construction de ses personnages. Les Méchants sont ambivalents, L’Éternelle n’est pas devenue dictatrice du jour au lendemain et les autres ne sont pas nés méchants. Les Gentils ont leur défauts, Skilgannon a massacré une cité.

Quant aux sans grade, ils ne sont pas là pour faire mumuse et occuper de l’espace. Ils auront un rôle à jouer et pourront être des héros eux aussi. Les Bêtes, elles, seront parfois plus humaines que l’Homme (qui les a asservies), devenu une bête sanguinaire avec son épée. Une scène forte que celle-là.

Dans ce dernier roman (il vaut mieux avoir lu les précédents et dans l’ordre), pas de rythme endiablé, pas de combats toutes les dix pages. L’auteur prend le temps de mettre en place son univers, ses personnages, de leur donner de la profondeur, de nous exposer leurs motivations, tout en faisant circuler tout le monde et en donnant la parole à plusieurs d’entre eux. Et aucun ne sera ennuyeux !

Le combat final est monumental, sans l’être trop, l’équilibre étant atteint puisque cela ne devient jamais grotesque ou surjoué. Gemmell évite aussi l’écueil du final foiré parce que trop long ou trop court. Juste la bonne longueur, avec quelques surprises et une fin digne d’un long cycle peuplé de batailles et de guerres. Dans ses univers, l’Homme ne vaut pas mieux que ceux peuplant la Terre.

Un excellent tome, un dernier coup pour la route, un dernier roman pour clore cette saga monumentale qui sera intéressante de relire un jour (notamment les tomes consacrés à Druss la Légende). De la toute bonne fantasy !

Il ne me reste plus que 4 romans à lire de cet auteur que j’aimais bien et qui nous a quitté trop tôt.

#Pavés de l’été

« Les épais de l’été » 2023 (21 juin au 23 septembre) chez Dasola (par ta d loi du cine, « squatter » chez dasola) et chez La Petite Liste.

Anna Thalberg : Eduardo Sangarcia

Titre : Anna Thalberg

Auteur : Eduardo Sangarcia 🇲🇽
Édition : La Peuplade (17/01/2023)
Édition Originale : Anna Thalberg (2021)
Traduction : Marianne Millon

Résumé :
Un après-midi, alors qu’elle attise le feu dans la cheminée de sa chaumière, la jeune Anna Thalberg aux yeux de miel est enlevée par des hommes brutaux et amenée à la prison de Wurtzbourg, où on l’accuse de sorcellerie.

Isolée et torturée pendant des jours, elle tient tête au cruel examinateur Melchior Vogel tandis que Klaus, le mari d’Anna, et le père Friedrich, curé de son village, tentent tout ce qui est en leur pouvoir pour lui éviter les flammes du bûcher.

Petit à petit, le visage du Diable se révèle être celui du Dieu des hommes, et la sorcière un nouveau Christ.

Critique :
Voilà un roman pas comme les autres, déstabilisant, notamment dû au fait de l’absence de majuscules en début de phrase, de points finaux, de l’avarice de virgules et de tirets cadratins ou de guillemets pour signaler les dialogues.

Un alinéa pour signaler le début d’un nouveau paragraphe et un double alinéa pour les dialogues, c’est tout. Perturbant pour moi, mais je m’y suis vite habituée.

Comme je l’ai souvent dit, la taille d’un livre n’est pas important (pour le reste, je vous laisse seul.e juge).

La preuve une fois de plus : 159 pages d’une noirceur absolue, faite de fausses accusations de sorcellerie et de tortures, de fausse justice, de médisance, de peurs, de superstitions, de pouvoir et de religion toute puissante.

Dans l’Allemagne des XVIe  siècle, une personne comme Anna Thalberg dérangeait : elle était jolie, avait les cheveux roux, les yeux couleur de miel et pire encore, elle venait d’ailleurs ! Oh, pas du bout du monde, même pas d’un autre pays, juste d’un village plus loin… Mais je n’ai pas besoin de vous faire de dessin sur la noirceur humaine et ce que certains sont prêt à faire pour se débarrasser d’une personne qui les dérange.

L’accusation de sorcellerie est LE truc génial que l’on a inventé pour éliminer celles ou ceux qui gênent. Impossible de prouver que vous n’en êtes pas une et sous la torture, tout le monde avouerait n’importe quoi.

Kafkaïen sera son procès : elle est coupable, point à la ligne. Si elle avoue, elle renforce l’accusation et si elle n’avoue pas sous la torture, alors c’est qu’elle est aidée par le Malin, le Diable, l’antéchrist… Bref, entre la peste et le choléra, le choix est maigre.

Et puis, il ne pleut plus depuis longtemps, c’est de la faute d’Anna et sa mort servira de sacrifice et il pleuvra, sans aucun doute… Son avenir est déjà tout tracé. La justice ? « Mes couilles, ti », comme le dirait si bien Fabrizio le carolo (les belges comprendront).

La force de ce roman, c’est la confrontation entre Anna et Melchior Vogel, le grand inquisiteur, le salopard qui l’a condamnée à la torture. Jamais elle ne baissera les yeux. L’autre point fort, ce seront les longs entretiens entre Anna et Hahn, le confesseur inquisiteur. Anna est une femme forte, droite dans ses bottes et elle ne lâchera rien.

Tout les genres se mélangent, dans ce court roman, intense : la politique, la religion, l’histoire et la philosophie. Il est difficile de ne prendre ce roman qu’au sens littéral, tant il a des niveaux de lecture qui s’entremêlent, harmonieusement, puisque tout est lié.

Le côté historique est bien rendu, sans devenir indigeste et le côté politique entre en ligne de compte puisqu’avec ces procès en sorcellerie, les puissants gardent le pouvoir et tiennent tout le monde sous leur coupe. Idem pour le côté religieux, avec l’opium du peuple, on les fait marcher droit, on leur fait peur.

La philosophie intervient dans les questionnements : qu’est-ce qu’il y a après la mort ? Ainsi que dans le fait que certains croient mordicus être les détenteurs de la vérité sur Dieu, qu’il leur parle à eux, qu’ils sont élus et que c’est à eux que revient l’indicible honneur de faire marcher tout le monde droit.

Le final est superbe, prouvant que la vie ne manque jamais d’ironie, ni d’humour noir et que la roue tourne…

Un roman étrange, dérangeant, court, qui m’a sorti de ma zone de confort.

Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°16].

Terres d’Ogon – Tome 2 – Blancs visages : Nicolas Jarry et Alex Sierra

Titre : Terres d’Ogon – Tome 2 – Blancs visages

Scénariste : Nicolas Jarry
Dessinateur : Alex Sierra 🇪🇸

Édition : Soleil (22/03/2023)

Résumé :
Pour sauver son frère, Itomë pactise avec un ancien esprit malfaisant. Bannie par les siens pour avoir bravé les lois sacrées de son clan, luttant contre l’esprit du sorcier qui cherche à s’emparer de son âme, elle entreprend une quête sans retour à travers les terres d’Ogon.

Mais Itomë l’a juré : quelles que soient les épreuves qui l’attendent elle ne laissera plus la peur guider ses choix.

Critique :
Les Terres d’Ogon appartiennent au prolifique monde d’Arran. Je dis prolifique parce que la saga comporte maintenant plus de 90 titres.

Si dans les terres d’Arran, nous avons des Elfes, des Nains, des Orcs, des Gobelins, des Mages, des Humains, dans l’autre terre, plus lointaine, on trouve d’autres créatures fantastiques, mais aussi des tribus qui font penser à celles de l’Afrique.

Dans ce deuxième tome de cette nouvelle saga, nous allons faire la connaissance de Itomë, une jeune fille de la tribu des Blancs-Visages, poursuivies par la tribu des Dents-Limées, qui veulent en faire leur quatre heures…

Il est dit que l’on mange à la table du diable, il faut une longue fourchette (ou une longue table, comme celle de Poutine) et notre jeune Itomë va le comprendre, après avoir pactisé avec un sorcier. Les vœux ont une contrepartie, nous ne sommes pas dans le joli conte de Disney avec un génie bleu et amusant.

Ce deuxième tome est différent du premier, notamment parce qu’il introduit des nouveaux personnages (comme pour la saga des Terres d’Arran), mais il reste excellent en termes de dessins et de scénario.

Une fois de plus, le scénariste va mettre son personnage principal face à un autre, qui lui est opposé, totalement (Djo-Djo est un Dents-Limés), et le duo va fonctionner à merveille, à coup de chamailleries, de piques, de ronchonnements… Ce sont les duos les plus opposés qui marchent toujours le mieux.

Comme pour le premier, le personnage principal, Itomë est jeune (une jeune fille, ici) et son voyage va être initiatique, lui servant à grandir, à comprendre, à devenir une autre personne, à se sevrer de ses parents, comme pour son acolyte, Djo-Djo.

J’ai souvent souri en les écoutant parler ensemble, Djo-Djo faisant le fanfaron, puisqu’il doit devenir un guerrier, tandis que Itomë lui répond qu’elle n’a pas besoin de lui. Dans les duos, l’un à besoin de l’autre, l’un n’est rien sans l’autre et une fois de plus, l’union fera la force !

Un super album, rempli d’aventures, de combats, de parcours initiatique, d’humour et d’amitié.

Nous sommes à plus de 90 tomes dans cette immense saga qu’est celle des Terres d’Arran (parfois nommée Le monde d’Aquilon) et si quelques albums, dans la masse, étaient moins bons que les autres, l’ensemble est tout de même d’excellente facture et jusqu’à présent, il m’a donné bien souvent des coups de coeur.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°183] et Le Mois Espagnol et Sud Américain – Mai 2023 – Chez Sharon [Fiche N°01].

L’Aigle noir : Jacques Saussey

Titre : L’Aigle noir

Auteur : Jacques Saussey
Édition : Fleuve Editions (06/10/2022)

Résumé :
Un île de rêve
Un tragique accident
Le thriller de tous les dangers

Un sorcier vaudou qui décide de fonder une obscure église loin de son Togo natal. Un homme qui meurt dans une terrible attaque de requin. Une petite fille qui se replie sur sa détresse de jour en jour.

L’île de la Réunion, malgré ses paysages entre lagons turquoise et montagnes luxuriantes, n’a rien du paradis auquel Paul Kessler s’attendait. Pourtant, cet ex-commandant de police n’aspirait qu’à un peu de tranquillité jusqu’à sa rencontre, à Toulon, avec Hubert Bourdonnais.

Deux ans plus tôt, ce riche industriel a quitté son île en confiant la direction de la vanilleraie familiale à Pierre, son fils unique. Mais celui-ci est décédé dans un crash d’hélicoptère il y a peu.

Et si la gendarmerie a conclu à un accident, Hubert Bourdonnais, lui, ne croit pas à cette thèse. Face à ses doutes, Kessler a alors accepté de mener l’enquête, sans imaginer qu’il serait confronté à une réalité bien sombre…

Critique :
Mes dernières lectures m’ayant entraînées dans des contrées froides, j’avais envie de soleil…

Ce roman se déroulant sur l’île de la Réunion, c’était la bonne destination à prendre, surtout qu’il y a quelques jours, j’avais vu un reportage sur cette destination de rêve, à la télé (Échappées belles). Puisque j’avais révisé La Réunion, j’étais parée !

Les émissions de télé nous vendent du rêve, des beaux paysages, des gens que l’on a envie de rencontrer, elles ne nous montrent jamais l’envers du décor, comme le fait le roman de Saussey. Lui, il nous parle de délinquance, de drogues, de personnes au chômage, de croyances vaudous (♫ un sorcier vaudou, m’a peint le visage ♪)…

Alors oui, ses décors sont de rêve, il les décrit très bien, je m’y serais crue sans jamais y avoir mis les pieds, mais ce n’était pas un voyage merveilleux ! Dans son roman, j’ai crapahuté comme pas possible ! Moi qui voulait me la couler douce, c’est raté.

Ce thriller n’est pas bourré d’action et d’adrénaline (sauf pour le final), on ne court pas partout, le récit prend le temps de se construire et les chapitres alterneront les faits se déroulant en 2016 et ceux du présent, en février 2020. Non, pas de panique, l’auteur nous parlera très peu de la covid, ce sera quelques lignes.

Par contre, on croisera une saloperie vraiment atroce qu’on n’arrivera jamais à éradiquer : des hommes incestueux et pédophiles. Il devait y avoir un nid à La Réunion, pas possible autrement, on dépasse quasi celui de l’Église, c’est vous dire la concentration de types dérangés à enfermer.

Le titre aurait dû me mettre la puce à l’oreille… L’aigle noir ! ♫ Un beau jour, ou peut-être une nuit.. ♫ Dans ma main, il a glissé son cou ♪ Gloups, quel cou ??

Le roman, sans posséder un rythme trépidant, n’en reste pas moins addictif : Paul Kessler, flic de Lyon retraité, mène une enquête en off, sur l’accident d’hélicoptère qui a coûté la vie à Pierre Bourdonnais, fils de Hubert Bourdonnais.

C’est le père qui lui a demandé et notre flic va soulever bien des mystères, lever bien des lièvres et son enquête se mêlera avec les morts bizarres et violentes qui surviennent sur l’île. Non, pas envie d’aller en vacances à la Réunion, moi… Merci monsieur Saussey !!!

L’auteur prend donc le temps de nous présenter l’île, microcosme, sa nature, son climat, sa population, les personnages importants que nous croiserons, et, à l’aide de chapitre assez court, il arrive à donner du rythme sans pour autant que son policier coure partout comme un dingue.

On reste dans une enquête réaliste, avec du mystère et une résolution loin de ce que j’aurais pu penser. Les sujets difficiles que sont l’inceste et la pédophilie sont bien intégrés dans le récit et bien traités. Sans que l’auteur n’aille trop loin ou ne fasse que survoler ce sujet horrible. On trinque tout de même en lisant ces passages où des adultes abusent d’enfants et jouent avec leurs sentiments, leurs peurs. Ignobles ils sont (les pédophiles).

L’alternance des chapitres au passé et ceux au présent donnent à l’histoire un goût de mystère, de sang, et de questionnement, car on ne sait pas à quel moment les deux récits se télescoperont, ni comment tout cela se terminera.

Un thriller qui prend son temps, un thriller qui vous emportera à La Réunion, pour un voyage qui mêlera le rêve au cauchemar, un thriller qui a tout d’un roman noir. Un thriller que j’ai dévoré, même si pour certains passages, j’ai eu un peu de mal, tant on entrait dans ce que l’humain a de plus sombre, de plus dégoutant, de plus abject.

Un thriller réussi !

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°86].

Te tenir la main pendant que tout brûle ‭:‬ Johanna Gustawsson [LC avec Bianca]

Titre : Te tenir la main pendant que tout brûle

Auteur : Johanna Gustawsson
Édition : Calmann-Lévy Noir (06/10/2021)

Résumé :
Lac-Clarence, Québec, 2002. Maxine Grant, inspectrice et mère célibataire dépassée, est appelée sur une scène de crime affreuse. L’ancienne institutrice du village, appréciée de tous, a massacré son mari, le lardant de coups de couteau.

Paris, 1899. Lucienne Lelanger refuse d’admettre la mort de ses filles dans un incendie. Elle intègre une société secrète dans l’espoir que le spiritisme et la magie noire l’aideront à les retrouver.

Lac-Clarence, 1949. La jeune Lina vit une adolescence mouvementée. Pour la canaliser après l’école, sa mère lui impose de la rejoindre à la Mad House, la maison de repos où elle travaille. Lina y rencontre une étrange patiente, qui lui procure des conseils pour le moins dangereux…

Un thriller psychologique sombre et passionnant autour du destin de trois femmes, trois mères éprouvées ou dépassées par la maternité.

Critique :
Blanche-Neige et les 7 Nains, je connaissais, maintenant, je connaîtrai aussi « L’institutrice et les 7 mains ».

Non, ce n’est pas le titre d’un film porno, les 7 mains étant détachées de leurs propriétaires.

Non, ce n’était pas non plus des membres de la famille de La Chose (Addams Family, pour les incultes) que nous aurions retrouvé au Québec… Ma foi, on a les objets de décoration que l’on veut, chez soi, mais il vaut mieux les garder caché lorsqu’on reçoit des invités.

Notre brave institutrice retraitée vient de poignarder 31 fois son époux. Le gars avait du marcher sur le sol encore mouillé, entraînant le courroux de sa blonde. Ou bien il avait oublié une chaussette rouge dans le linge blanc de madame… Bref, sa faute devait être grave pour mériter un tel châtiment.

Ce thriller psychologique est composé de trois récits se déroulant à des époques différentes. L’enquête de police contemporaine (en 2002), un récit se déroulant à Paris en 1899 et un autre avec une jeune gamine, victime de brimades, en 1949.

Quel est le lien entre eux trois hormis qu’elles ont souffert ? Il faudra attendre les trois quarts du roman pour le savoir et comprendre ce qu’ils venaient faire au milieu d’un meurtre violent commis par une paisible retraitée (on ne s’en méfie jamais assez, des p’tites vieilles).

L’autrice a fait en sorte que vous ne compreniez pas trop vite ce qui lie ces trois femmes, les pistes sont brouillées, les cartes bien mélangées et c’est comme avancer dans la purée de pois. On ne sait pas où l’on va, mais l’on a hâte de comprendre où on nous emmène.

L’enquête va avoir des ramifications inattendues, allant au-delà de ce que j’aurais pu penser au départ. Heureusement que les policiers connaissent toujours quelqu’un dans leur entourage qui peut leur expliquer ce qui est hermétique pour eux (et pour les lecteurs aussi).

Cette lecture est addictive, profitant des températures caniculaires de la soirée, j’ai lu jusque bien tard et la chaleur me poussant à me lever tôt, j’ai continué ma lecture, dévorant totalement ce polar, même si, de prime abord, il semblait être un thriller normal, avec des mystères, du suspense et quelques ajouts inhabituels (putain, ces retraités !!).

Non, jusqu’à un certain point, je me trouvais en train de lire un thriller bien fichu, mais sans rien de transcendantal. Les personnages des policiers étaient sympas, amusants, possédaient de l’humour, sans que pour autant je me sois attachée à eux.

Et puis, tel un plat habituel que vous appréciez mais que vous connaissez par coeur, vous vous faites surprendre par la cuisinière autrice qui y a ajouté du piment, vous faisant bondir sur votre sofa, vous redressant devant le truc inattendu que votre palais vient de détecter et qui réveille vos papilles polardesques.

Oh putain de putain ! Ça a dépassé tout ce à quoi je m’étais attendue, je me suis prise un coup de pied au cul et l’autrice a remis ça ensuite, me donnant envie de hurler « Non, non, non… ». Ben si… Violent, horrible. Magnifique aussi, mais dans l’horreur. J’en suis restée muette, la bouche grande ouverte.

Si je ne me suis pas attachée aux portraits des personnages, l’autrice a su néanmoins nous mettre face à des femmes troublantes, blessées, seules, victimes du patriarcat, des préjugés, de la maternité, de la société…

J’ai été bluffée et ma copinaute Bianca aussi. Si notre précédente LC avait été un flop, celle-ci est un top et lorsque je lisais les lignes les plus violentes dans ce qu’elles impliquaient, je me disais que ma copinaute allait souffrir autant que moi en les lisant.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2022 au 11 Juillet 2023) [Lecture N°007].

Drenaï – 10 – Loup Blanc : David Gemmel

Titre : Drenaï – 10 – Loup Blanc

Auteur : David Gemmel
Édition : Milady Fantasy (21/01/2015) – 600 pages
Édition Originale : White Wolf (2004)
Traduction : Rosalie Guillaume

Résumé :
Skilgannon le Damné a disparu des pages de l’histoire. Il a quitté les terres de Naashan, emportant avec lui les légendaires Épées de la Nuit et du Jour. Les assassins envoyés à ses trousses par la Reine Sorcière furent incapables de le retrouver.

Trois ans plus tard, loin de là, une foule déchaînée se rassemble autour d’un monastère. Elle est accueillie par un prêtre désarmé. Mais en quelques terrifiantes secondes, la situation bascule, et la rumeur se répand à travers les terres de l’Est : Skilgannon est de retour.

Il doit maintenant voyager à travers un royaume hanté par les démons en direction d’un temple mystérieux et de la déesse sans âge qui y règne. Toujours poursuivi par des tueurs et une armée d’ennemis face à lui, le Damné se lance dans une quête pour ramener les morts à la vie.

Mais il ne voyage pas seul. L’homme qui marche à ses côtés est Druss la Légende.

Critique :
Dans ce roman, David Gemmel fait du Gemmel, comme d’habitude. Ce n’est pas une critique, juste une constatation.

Je veux dire par-là que la trame ressemble aux autres : un guerrier compétent, torturé par son passé, en rédemption, qui a du sang sur les mains, qui n’a peur de rien.

Olek Skilgannon, qui n’a pas hésité à massacrer tous les habitants d’une ville (femmes et enfants compris), sur les ordres de sa reine, est aussi un homme respectueux des femmes (il ne viole pas les femmes, est respectueux, pas de #metoo avec lui). Hé, il a des valeurs.

Il vivait tranquille, peinard, puis les gens du village ont commencé à accuser les prêtres de tous les maux : famine, maladies et autres trucs. L’effet de meute a commencé et on a assisté à des passages à tabac de prêtres qui avaient soignés les gens durant une épidémie. Même dans la fantasy, l’humain reste le même.

Alternant les récits au présent avec ceux du passé qui éclairent la vie de quelques protagonistes (Skilgannon en tête), on suit nos personnages, fuyant l’avancée des envahisseurs, le récit se portant sur plusieurs d’entre eux.

Outre le guerrier aux épées de légendes, on croisera aussi un vieux guerrier de 50 ans, armé d’une hache mythique, elle aussi : Druss la légende. Comme Skilgannon, il est sans pitié sur un champ de bataille, a du sang sur les mains, mais respecte les femmes. Druss, je l’adore.

Les personnages sont comme souvent dans les romans de Gemmel : des guerriers terribles avec des codes moraux. Uniquement chez les héros, bien entendu, les autres, ce sont des crapules finies.

Autre chose, dans l’univers de Gemmel, on a toujours une quête qui paraît impossible à réussir ou une citadelle à défendre… Ici, ce sera la quête impossible. Comme je vous le disais, Gemmel fait du Gemmel, il y a une marque de fabrique reconnaissable entre toutes. Bizarrement, cela ne m’a jamais dérangé.

La première moitié du récit est assez lente, l’auteur pose ses décors, installe ses héros, les figurants, déroule son récit, nous propose des combats épiques (sa marque de fabrique aussi) et raconte le passé (et le passif) des personnages principaux.

La marque reconnaissable de Gemmel, c’est qu’il est aussi capable de captiver ses lecteurs dès les premières lignes.

Son style d’écriture est sans fioritures, simple, sans être simpliste. Il sait décrire le monde qu’il a créé, les différents peuples qui l’habitent (on retrouve des inspirations du nôtre) et habiller ses personnages, faisant en sorte qu’on ait l’impression de déjà les connaître.

Mélangeant habilement l’action au présent, les escarmouches, les souvenirs du passé, les événements qui se déroulent ailleurs, mettant un brin d’humour, Gemmel nous balade dans son monde imaginaire sans que l’on souffre de l’ennui.

On marche aux côtés de grands hommes, et même si ce sont des guerriers sans pitié et que Skilgannon ait massacré, avec son armé, une ville entière, on sent la rédemption sous la cuirasse, les remords, l’envie de changer les choses.

Nos guerriers, surtout Druss, ne sont pas avares de petites pensées philosophiques. Pas de la grande philosophie, pas de celle de comptoir non plus. Juste des pensées claires, nettes, précises, véridiques, poussant même le vice à se livrer à des discussions plus poussées.

Mon bémol ira pour le Grand Méchant qui est méchant jusqu’au bout des ongles (oups, il aime couper des doigts) : il aime torturer les gens, les faire souffrir longtemps, les faire hurler, mutiler, assassiner, frapper, battre,… Bref, rien pour équilibrer le portrait, ce qui est dommage.

David Gemmel applique, une fois de plus, la recette qu’il a mis au point et qu’il reproduit dans tous ses romans. Comme d’autres… Et bizarrement, ça marche à tous les coups ! Ses univers et ses personnages sont riches, c’est ce qui fait toute la différence. Les femmes dans ses romans sont fortes, ce ne sont pas des petits choses fragiles et c’est toujours appréciable.

J’étais resté quelques années sans lire du Gemmel, je m’y étais remise dans le cadre du Mois Anglais en 2020 et à chaque mois de juin, j’ai sorti de ma biblio ses romans que je n’avais pas encore lus. Cela m’a fait un bien fou.

Ce n’est pas de la grande littérature, mais j’apprécie les héros torturés qu’il met en scène, j’aime certaines de leurs valeurs (pas les massacres), leurs pensées, leur philosophie, la psychologie de certains.

Et puis, avec Gemmel, c’est l’évasion et le souffle de la grande aventure assurées.

#MoisAnglais2022
Le Mois Anglais – Juin 2022 (Chez Titine et My Lou Book). Dernière fiche…  Et Le pavé de l’été 2022 (Sur mes Brizées).

Harry Potter ‭–‬ 06 ‭–‬ Harry Potter et le prince de sang-mêlé ‭:‬ J.K. Rowling [LC avec Bianca]

Titre : Harry Potter ‭–‬ 06 ‭–‬ Harry Potter et le prince de sang-mêlé

Auteur : J.K. Rowling
Édition : Folio Junior (2017) – 752 pages
Édition Originale : Harry Potter, book 6: Harry Potter and the Half-Blood Prince (2005)
Traduction : Jean-François Ménard

Résumé :
Dans un monde de plus en plus inquiétant, Harry se prépare à retrouver Ron et Hermione.

Bientôt, ce sera la rentrée à Poudlard, avec les autres étudiants de sixième année. Mais pourquoi Dumbledore vient-il en personne chercher Harry chez les Dursley ?

Dans quels extraordinaires voyages au cœur de la mémoire va-t-il l’entraîner ?

Critique :
Ma relecture de la saga Harry Potter se poursuit et cela m’aura appris plusieurs choses : mon tome préféré est toujours « Le Prisonnier d’Azkaban ».

Ensuite, j’ai mieux compris le comportement d’ado chiant de Harry dans « La Coupe De Feu » (nous avons tous et toutes été des ados chiants).

Quant à « L’ordre du Phoenix », que j’avais moyennement apprécié lors de sa lecture, est passé maintenant dans ceux que j’ai adorés.

Je me demandais donc ce qui allait ressortir de la relecture du tome 6, un tome important puisque l’avant-dernier…

À l’époque, je l’avais dévoré dès sa sortie, voulant tout savoir, me demandant bien qui pouvait être ce Prince de Sang-Mêlé, ce qu’était un horcruxe, pestant sur les autres qui n’écoutaient pas Harry qui leur disait que Malfoy mijotait des trucs louches et vouant aux gémonies Rogue, tout comme Harry.

Et puis, dans la bataille finale, ma gorge s’était serrée et des vilaines poussières dans mes yeux les avaient fait couler. Cet instant-là, cette scène-là, c’est comme si l’autrice avait pris une batte de base-ball et m’avait frappé en plein ventre. Rowling venait de me tuer…

J’avais hurlé de rage, fâchée contre tous ceux qui n’avaient pas écouté, une fois de plus, les mises en garde de Harry (tel Cassandre, condamné à ne jamais être cru), quant à Rogue, je l’avais traité de fils de femme de petite vertu et de tout un tas de nom d’oiseaux que je n’oserais jamais répéter ici.

Déjà que tout au long de ma découverte de la saga, j’avais souhaité à Rogue moult sorts, dont le pire étant celui du « Loréal Paskeje Levobien » afin de rendre ses cheveux brillants et non gras.

Lors de ma relecture, tout a changé, rien n’était le même : fini le mystère autour du livre des potions ayant appartenu au « Prince de Sang-Mêlé », fini les émotions de tristesse, de chagrin, lors de la perte d’un personnage, puisque « je le savais » et que j’avais connaissance aussi du « pourquoi ». Fini d’insulter la pauvre mère de Rogue de prostituée et par là même, son rejeton de : « fils de ».

Maintenant que je savais ce que je savais, j’ai relu ce tome avec un autre esprit et au lieu de me braquer sur certains personnages que je détestais (Malefoy et Rogue), je les ai vus sous un autre jour, celui de ce qu’ils étaient vraiment.

Ok, Malefoy reste un sale gamin de merde qui se la joue, qui se la pète, qui crâne et qui n’a rien dans le bide. Toujours envie de lui en foutre une sur la gueule. Pour Rogue, c’était différent (sauf pour ses cheveux gras – Beurk).

En règle générale, je ne fais jamais de relectures (sauf exceptions) : toutes les perceptions changent, comme les émotions, les ressentis, ce que l’on pensait des personnages…

Si dans ce tome, Harry semble être un emmerdeur, contestant tous les ordres ou ce que les autres lui répondent, je trouve qu’en fait, il n’en est rien (moi aussi je sais contester).

Il soupçonne certains de fomenter des trucs pas nets, il sait que Voldemort est puissant, il sait aussi surtout que personne ne l’écoutait lorsqu’il disait qu’il était de retour. Faire l’autruche est tellement plus facile pour tout le monde. Hélas, on ne croit jamais les porteurs de mauvaises nouvelles ou ceux qui voient des dangers arriver.

Moi, j’ai toujours fait confiance à Harry, mais à l’époque où j’avais lu ce nouveau roman, j’aurais dû aussi faire confiance à la sagacité de Dumbledore. Hélas, les événements auxquels j’avais assisté de visu m’avaient fait craindre qu’il n’avait pas mis sa confiance dans de bonnes mains.

Une fois à Poudlard, tout s’enchaîne, sans pour autant filer à la vitesse d’un balai « Éclair de Feu ». Rowling nous décrit la vie à Poudlard, qui à repris et si Ron était enchanté d’avoir plus de temps libre entre les cours pour se la couler douce (on dirait un peu moi), il n’en fut rien, vu la tonne de devoirs que les élèves de 6è auront à rendre.

Dans la saga HP, il y a plusieurs choses appréciables : les tomes montent en puissance, suivant l’âge des lecteurs des premiers jours.

Les personnages ne sont pas figés, ils sont ambivalents, ambigus (certains), ils peuvent, de temps en temps, nous exaspérer, mais ils restent réalistes, notamment en grandissant et en prenant de l’âge. Nous aussi nous changions très vite, à ces âges-là. Les sentiments amoureux commençaient à arriver, avec leur cortège de crétineries, de serments pour la vie et de jalousie quant l’être aimé discutait avec d’autres personnes.

Les références à notre monde sont aussi très bien faite, notamment avec ce ministère qui ne se bouge pas trop le cul, mettant sa tête dans le sable, accusant Harry d’être un fanfaron, un menteur, alors qu’il avait raison (moi, ça me met toujours en rage d’être traitée de menteuse ou accusée à tort).

Puis, comme tous les gouvernements, ensuite, ils viennent vers vous, la bouche en cul de poule, minaudant pour vous demander des services. Va à la merde ! Harry a eu raison de les envoyer chier, avec plus de formes, bien entendu.

Voldemort est un vrai tyran, un dictateur, qui, comme eux, s’entourent, en vrac, de personnes fortes, de celles qui veulent être protégées en appartenant à un groupe « fort ». N’ayant aucun ami, aucune personne de confiance, parce que le tyran est un parano, se créant bien souvent lui-même les ennemis qui le mettront au sol.

Oui, on peut dire ce que l’on veut, mais cette saga est bien faite, réfléchie, intelligente et contrairement à ce que pourraient penser des illuminés qui sont contre la magie, Harry Potter, ce n’est pas des romans où l’on se jette des sorts à la gueule durant 600 pages. Non, c’est plus profond que ça. Mais pour le savoir, il faut les lire.

Si je ne fais jamais de relecture des livres que j’ai adoré (hormis ceux d’Agatha Christie et de Conan Doyle – les exceptions), relire la saga d’Harry Potter, en sachant tout, en connaissant les véritables raisons de certains, est tout de même bénéfique, car maintenant, j’ai une autre vision de ces gens.

Les émotions ne sont plus les mêmes, elles ne sont plus « brutes de décoffrage », puisque « je sais ». Tout comme pour les mystères, qui n’existent plus maintenant.

Ces émotions importantes pour moi sont différentes ou absentes et cela m’a permis de me concentrer sur d’autres détails, sur d’autres choses, de voir le récit autrement, un peu comme quand je relis un Hercule Poirot et que je me souviens de l’identité du coupable : à ce moment-là, on voit les indices laissés pas l’autrice, on comprend où l’on s’est fait berner et la lecture est différente.

C’est la même histoire, mais ce n’est plus tout à fait la même non plus…

Une relecture que j’ai bien fait de refaire. Une LC de plus réussie avec Bianca, qui préfère le tome 6 au 5…

#MoisAnglais2022</a

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°2XX], Le Mois Anglais – Juin 2022 (Chez Titine et My Lou Book) et Le pavé de l’été 2022 (Sur mes Brizées).

Le Loup des Ardents : Noémie Adenis

Titre : Le Loup des Ardents

Auteur : Noémie Adenis
Édition : Robert Laffont La bête noire (23/09/2022)

Résumé :
1561, Sologne. L’hiver s’abat sur Ardeloup. Nuit et jour la neige tombe, transformant implacablement le village en prison.

Puis un mal mystérieux se répand parmi les habitants. Certains ont des hallucinations terrifiantes, d’autres hurlent qu’ils brûlent alors qu’ils sont glacés.

Cette maladie qui imprime sa marque noire sur le corps des mourants est-elle l’œuvre d’un démon ou celle d’un assassin ? Bientôt, la superstition embrase les esprits. Il faut un coupable avant qu’il ne reste plus personne pour enterrer les morts…

Critique :
Qu’est ce qui est blanc, froid, qui tombe en hiver et se termine par « cile » ?? Non, pas d’idée ? Ben la neige, imbécile !

C’est l’hiver, il neige à mort, il fait froid à se cailler les miches, nous sommes en 1561, à Ardeloup, petit village paumé en Sologne, entre les villes de Vierzon et de Romorantin.

Aymar de Noilat, médecin, allait vers la ville de Romorantin, la neige l’a surpris et il est resté à Ardeloup, où on a eu très vite besoin de ses connaissances et de sa science, vu l’épidémie qui a commencé à y sévir, emportant les habitants après d’atroce souffrance.

Vous vous souvenez du confinement de mars 2020 ? Il n’était rien comparé à ce que vont vivre les habitants du village : la nourriture manque, le bois pour se chauffer aussi, la neige est épaisse, monte très haut, il fait caillant et on a du mal à se déplacer. En 1561, pas Netflix, pas de livres (ils ne savent pas lire), rien ! Juste la peur…

Parlons-en, justement de la peur ! Elle dévore les cœurs, elle obscurcit les esprits et les gens ne tardent pas à chercher un bouc émissaire. En ce temps-là, le diable est Number One (avec une punition divine), mais comme il est difficile de le citer à comparaître, faut chercher plus simple : une sorcière !

Ben voilà, c’est facile, c’est rapide, pas besoin d’aller voir plus loin. La logique déserte alors les cerveaux et le médecin aura beau apporter sa science, des preuves, du bon sens, rien n’y fera !

On pourrait se dire qu’en ces temps obscurs, les gens ne sachant pas lire, étant pauvres, rustres et frustes, sans éducation, c’est malheureusement normal qu’ils se tournent vers la facilité et le bouc émissaire… Oui, mais non…

Certaines personnes, lors de la pandémie de la covid en 2020 (alors que nos populations sont éduquées, que la majorité sait lire) ne se sont pas privées de désigner des boucs émissaires. Des sales caricatures ont refait surface, comme dans les années 1930 et que des accusations, sans fondements, sans logique, ont été balancées, répétées, hurlées,… ♫ Non, non, rien n’a changé ♪

Impossible d’avoir une conversation sensée avec ces personnes, quelque soit l’époque, comme l’a constaté le médecin Aymar. Lorsque l’on veut noyer son chien, on l’accuse d’avoir la rage et dans le cas du Mal des Ardents, les gens sont capables de voir des liens où il n’y en a pas et de mentir, aussi, pour arriver à leurs fins. Glaçant, mais moins que durant notre ère (ou celle des années 30, et encore après).

Le médecin, Aymar de Noilat, sera notre narrateur, témoin impuissant de ce qui se déroule sous ses yeux, impuissant à soigner les gens, ne comprenant pas le mal dont ils souffrent. C’est le Mal des Ardents, mais ils ne savent pas encore comment il se déclenche. Nous, lecteurs, en 2022, nous connaissons les méfaits de l’ergot du seigle, mais eux sont dans le noir total.

Le coup de force de l’autrice, c’est d’être arrivée à donner une présence immense à la jeune Loïse, une petite fille taiseuse qui subit la mauvaise humeur des gens chez qui elle vit, qui se tape tous les sales boulots.

La gamine n’a pas beaucoup de dialogues, sa présence est en arrière-plan, elle ne dit rien, elle observe. Pourtant, elle m’a fait un grand effet et son personnage était lumineux, avec peu. Chapeau d’avoir réussi à lui donner pareille densité !

Ce polar historique se démarque des autres par sa conception : pas d’enquêteur pour chercher le coupable d’un crime puisqu’il n’y a pas de meurtres, juste des gens touchés par un mal violent, implacable, un tueur contre qui l’on ne sait pas lutter en 1561. Le médecin tentera de sauver les gens, avec l’aide de Loïse, qui préparera ses plantes pour soigner et de sauver la personne accusée de sorcellerie.

Un roman court, qui va à l’essentiel, qui ne fera pas l’impasse sur les décors et les ambiances, afin que les lecteurs se sentent bien dans le froid et la neige. Ce froid, je l’ai ressenti dans tous mes os, à tel point que j’ai terminé la lecture avec un plaid sur les épaules (note pour moi-même : j’aurais dû le lire un jour de canicule).

Un roman sombre, noir, qui ne s’éternise pas. Un roman court (290 pages) qui va droit au but et qui offre quelques heures de lecture remplie de mystères, notamment avec cette ombre qui rôde dans la neige froide…

Un polar historique qui a des relents nauséabonds qui n’ont rien à envier à notre époque où l’on érige des bûchers sur le Net et où les tribunaux sont les réseaux sociaux. Je me demande si nous ne sommes pas pires que ceux qui vivaient dans les siècles obscurs.

PS : Qu’est ce qui est blanc, froid, qui tombe en hiver et se termine par « ire » ?? La neige, imbécile, je viens de te le dire ! (ok, je sors).

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°193].

Trilogie d’une Nuit d’Hiver – 02 – La Fille dans la tour : Katherine Arden [LC Bianca]

Titre : Trilogie d’une Nuit d’Hiver – 02 – La Fille dans la tour

Auteur : Katherine Arden
Éditions : Denoël Lunes d’encre (2019) / Folio SF (2021)
Édition Originale : Winternight, book 2: The Girl in the Tower (2017)
Traduction : Jacques Collin

Résumé :
La cour du grand-prince, à Moscou, est gangrenée par les luttes de pouvoir. Pendant ce temps, dans les campagnes, d’invisibles bandits incendient les villages, tuent les paysans et kidnappent les fillettes.

Le prince Dimitri Ivanovitch n’a donc d’autre choix que de partir à leur recherche s’il ne veut pas que son peuple finisse par se rebeller. En chemin, sa troupe croise un mystérieux jeune homme chevauchant un cheval digne d’un noble seigneur. Le seul à reconnaître le garçon est un prêtre, Sacha.

Et il ne peut révéler ce qu’il sait : le cavalier n’est autre que sa plus jeune sœur, qu’il a quittée il y a des années alors qu’elle n’était encore qu’une fillette, Vassia.

Critique :
C’est avec délectation que j’ai de nouveau foulé les terres froides et enneigées de la Rus’, chevauchant aux côtés de la jeune Vassia, devenue le jeune Vassili parce qu’en ce temps-là, les filles (femmes) n’avaient aucun droit.

Juste l’obligation de rester à sa place dans la cuisine (ou dans une tour, pour les nobles), de se marier, de faire des gosses, d’aller au couvent (si les autres options ne plaisaient pas) : bref, interdiction de se soustraire à l’autorité des mâles.

Le premier tome nous faisait découvrir la vie dans un petit village de la Rus’ des années 1300, les folklore, les légendes, les contes, l’intrusion de plus en plus grande de la religion, reléguant aux orties les esprits des maisons, alors que celui-ci nous fera voyager jusqu’à Moscou et ses complots politiques pour devenir calife à la place du calife.

Si la première partie de ce récit est plus calme (sans jamais me sembler ennuyeuse), dans la seconde partie, l’autrice change de vitesse et appuiera sur le champignon, nous faisant  entrer dans un rythme plus trépidant, aux multiples rebondissements.

Les personnages ne sont pas figés, ils peuvent cacher leur jeu et j’ai eu quelques surprises, comme dans le premier tome. Morozko, le démon de gel évolue, c’est un personnage complexe qui ne se dévoile pas, ou peu. Je l’ai trouvé très touchant. Il sent que la religion nouvelle est en train de le faire disparaître et son déclin fait peine à voir.

Vassia, elle, sera plus téméraire, n’écoutant pas la voix de la sagesse de son grand frère, foutant le bordel monstre dans sa famille, tant elle voudrait être un garçon afin de s’affranchir des règles qui pourrissent les vies des femmes.

Elle aurait pu faire preuve d’un peu de discernement et ne pas foncer tête baissée… Ses combats sont justes, mais parfois, il faut savoir faire profil bas et laisser pisser le mérinos.

Son caractère vif lui joue souvent des tours, sa soif de liberté aussi. Bah, nous avons été jeunes aussi et nous n’avons pas écouté les voix des anciens qui nous disaient de faire attention… Cela le rend plus réaliste, plus crédible, toutes ces contradictions.

La vie sociale dans cette époque lointaine est très importante dans le récit, elle prend une place non négligeable. Heureusement, l’Histoire, la religion et la vie sociale sont toujours incorporées de manière subtile dans le récit, sans jamais le rendre lourd ou redondant.

Il en sera de même pour l’aspect politique, avec les rivalités, les tributs à payer au Khan, les jeux de trônes… Tout cela est incorporé par petites touches, sans que cela pèse sur le rythme du récit. D’ailleurs, les combats sont toujours les mêmes, que l’on soit en 1300 ou en 2022, même si nous avons plus de droits et plus l’obligation d’aller à la messe. Ouf !

Le petit bémol sera pour la perte du folklore Rus’ : les esprits des maisons (Tchiorti) et tous les autres sont moins présent dans ce deuxième tome, sans doute dû au fait que la religion catholique prend plus d’ampleur et que les gens oublient de laisser des offrandes à tous ces diables des contes et légendes qui existent bel et bien.

Le côté fantastique et la magie sont plus présents que dans le premier tome, ce qui n’est pas un soucis, que du contraire. L’univers créé par l’autrice est riche d’Histoire, de contes, légendes et cette lecture fut enjouée, ne manquant pas de rythme et de surprises.

Ce sera donc sans hésitation que j’ouvrirai le troisième et dernier tome de cette trilogie qui plaira aux plus jeunes comme aux plus anciens, qu’ils aiment ou pas la fantasy car les romans lorgnent plus du côté du fantastique.

Une LC réussie, même si Bianca a trouvé la première partie un peu trop lente.

Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°143], Le Challenge Animaux du monde 2020 chez Sharon [Lecture N°108] et Le Mois du polar chez Sharon – Février 2022 [Lecture N°25].

Sorcières – La puissance invaincue des femmes : Mona Chollet [LC avec Bianca]

Titre : Sorcières – La puissance invaincue des femmes

Auteur : Mona Chollet
Édition : Zones (2018)

Résumé :
Tremblez, les sorcières reviennent ! disait un slogan féministe des années 1970. Image repoussoir, représentation misogyne héritée des procès et des bûchers des grandes chasses de la Renaissance, la sorcière peut pourtant, affirme Mona Chollet, servir pour les femmes d’aujourd’hui de figure d’une puissance positive, affranchie de toutes les dominations.

Davantage encore que leurs aînées des années 1970, les féministes actuelles semblent hantées par cette figure de la sorcière. Elle est à la fois la victime absolue, celle pour qui on réclame justice, et la rebelle obstinée, insaisissable. Mais qui étaient au juste celles qui, dans l’Europe de la Renaissance, ont été accusées de sorcellerie ?

Ce livre explore trois archétypes de la chasse aux sorcières et examine ce qu’il en reste aujourd’hui, dans nos préjugés et nos représentations : la femme indépendante – les veuves et les célibataires furent particulièrement visées ; la femme sans enfant – l’époque des chasses a marqué la fin de la tolérance pour celles qui prétendaient contrôler leur fécondité ; et la femme âgée – devenue, et restée depuis, un objet d’horreur.

Mais il y est aussi question de la vision du monde que la traque des sorcières a servi à promouvoir, du rapport guerrier qui s’est développé alors tant à l’égard des femmes que de la nature : une double malédiction qui reste à lever.

Critique :
Non, non, ce livre ne parlera pas des filles qui ont étudié à l’école de magie de Poudlard. Parce que elles, ce sont de vraies sorcières…

Non, plus terre à terre, Mona Cholet va nous parler de ces femmes accusées d’être des sorcières et qui n’en était pas.

Une vraie sorcière, telle que Minerva McGonagall, ne se serait jamais laissée brûler sur un bûcher ! Elle aurait changé tous ces juges laïcs en lombrics rampants. Na !

Le problème, c’est que les sociétés n’ont jamais aimé que des gens vivent différemment des autres, en marge de leurs règles. Et nous ne parlons pas des sociétés du Moyen-Âge, mais de celles de la Renaissance ! Comme quoi…

Quand des femmes, veuves ou célibataires, indépendantes, avec du savoir médical, avaient décidé de vivre sans être sous la coupe d’un père, d’un mari ou d’un fils, ça faisait grincer des dents et on finissait toujours par crier haro sur le baudet et à intenter des procès à ces pauvres femmes qui avaient voulu, ô les folles, vivre de manière indépendante !

À croire que nous foutons vraiment la trouille aux mecs lorsque nous refusons d’être des petites choses fragiles, des femmes à protéger, que nous parlons d’indépendance, de vivre sans compagnon, de faire des bébés toutes seules (♫) ou pire, quand on se rebelle ou qu’on se dresse devant le mec qui voulait nous agresser, sans peur dans nos yeux, mais avec la flamme qui dit « Viens, approche mon gars et tu vas voir ce que tu vas prendre dans ta gueule »…

Cette étude ne sera pas consacrée qu’aux chasses aux sorcières, aux femmes indépendantes, veuves, impertinentes… Mais l’autrice abordera aussi une bonne partie des problèmes rencontrés par les femmes dans le Monde et au fil du Temps.

Bizarrement, nous sommes souvent réduites à notre utérus et à notre condition de femme. Trump a attaqué Hillary sur sa condition de femme, se gaussant d’elle lorsqu’elle devait aller aux toilettes (Trump ne doit jamais pisser ou chier, lui !)…

Encore de nos jours, certains hommes ont souvent tendance à nous proposer, avec cynisme, de retourner à nos casseroles et à nos gosses. Et surtout, de nous occuper de notre mari ! Oui, la femme n’est bonne qu’au ménage, à s’occuper des autres (et de son mari) et à pondre.

Parce que la femme, pour être épanouie, doit faire des gosses ! Seule la maternité en fera une vraie femme et gare à elle si un jour elle ose dire à voix haute qu’elle regrette d’avoir eu des enfants, que ça lui a gâché sa vie. Tout le monde lui tombera sur le râble.

Idem avec les femmes qui veulent vivre seules, indépendantes, sans homme, sans enfants… Nous sommes en 2021 et c’est toujours mal vu. Il faut s’en justifier sans arrêt et tout le monde vous dira qu’un jour, vous le regretterez de ne pas vous être mariée ou d’avoir refusé d’avoir des enfants.

Moi, je suis pour être une tata, pas une maman. Je suis une super tata (je me jette des fleurs) et j’en ai ma claque aussi de devoir me justifier parce que n’ai rien voulu faire grandir dans mon utérus. M’envoyer en l’air, oui, prendre du plaisir, oui. Pour les gosses, je laisse ça aux autres. Ça en défrise toujours certaines ou certains…

Pour conclure (dans le foin), cette étude qui nous parle de la place des femmes dans la société, du féminisme, de nos droits obtenus de haute lutte (une dure lutte), du fait que certains ne veulent pas partager le pouvoir avec la moitié de l’humanité, que certaines femmes, elles-mêmes, préfèrent rester dans le rang, ne se lit pas d’une seule traite.

Les sujets sont vastes, denses et il vaut mieux être au calme pour en apprécier toutes les informations données. C’est 230 pages d’un condensé qui ne se boit pas d’un coup, tant on a envie aussi de grimper au mur devant toutes les injustices dont nous furent les victimes, nous les femmes. Et dont nous sommes toujours victimes !

Le plafond de verre est toujours sur nos têtes et nos droits, chèrement acquis, peuvent disparaître du jour au lendemain, sans que nous nous en rendions compte.

Gare à nous, les sorcières des temps modernes, qui refusons le maquillage, la teinture pour nos cheveux et qui, lorsque nous vieillissons, ne bénéficions pas de la sagesse que les mecs acquièrent, eux, avec les cheveux gris !

Putain, on s’est quand même bien fait baiser durant tout ce temps ! Parce que même sans être une petite chose fragile, même sans vivre avec un homme castrateur, même en possédant une grande liberté d’action, même en ayant fait mes propres choix, on s’en prendra tout de même plein la gueule du fait de notre sexe féminin.

Une étude sociologique à lire et à faire découvrir.

Merci à Bianca pour celle LC hautement instructive ! Hormis quelques points de détail sur lesquels nous avons des avis différents, pour tout le reste, nous avons appris des choses et nous sommes au diapason.

Le Haunted reading bingo du Challenge Halloween 2021 chez Lou & Hilde (Sorcières).