Titre : Sara
Scénariste : Garth Ennis
Dessinateur : Steve Epting
Traduction : Thomas Davier
Édition : Panini Comics – Best of Fusion Comics (2020)
Résumé :
Nous sommes en Russie pendant l’interminable hiver 1942, et nous suivons le sniper soviétique Sara, tandis qu’elle résiste aux envahisseurs nazis avec ses camarades.
Les femmes du campement sont isolées dans un baraquement à part et l’unité repousse vaillamment l’ennemi, mais pour combien de temps ?
Une histoire complète inspirée d’une histoire vraie.
Critique :
Russie, 1942. Il fait un froid glacial, il y a de la neige, les Allemands on envahi le territoire russe et ces derniers se défendent avec acharnement, même les femmes. Dans ce camp, toutes les femmes sont des tireuses d’élite, des snipers.
Lorsque j’ai commencé à lire cette bédé, aux infos, on parlait toujours de covid et l’invasion de l’Ukraine par les troupes russes n’avait pas encore eu lieu.
Laissons le présent sur le côté durant un moment et partons 80 ans en arrière en URSS.
Sara est une sniper, au même titre que ses collègues Mari, Nata, Katrina, Vera, Lydi et Darya. La vie est dure, elle ne fait pas de cadeaux et elles n’en feront pas non plus.
Dans cet album, qui s’inspire de faits historiques et des faits de guerre de la sniper Lioudmila Pavlitchenko (qui compte environ 300 morts à son actif), ce sont les femmes qui sont mises à l’honneur.
Les hommes ne sont pas loin, ils les entourent, certains lancent des plaisanteries graveleuses, un chef espérera même une faveur sexuelle en échange de renseignements, mais tous finiront le bec dans l’eau, ou avec la queue en berne. Sara est plus glaciale qu’un iceberg. Vera, elle n’hésite pas à torturer les soldats allemands.
Oui, l’histoire est assez violente, les balles fusent, elles font mouche, les soldats allemands tombent, les russes aussi et malheureusement, dans la troupe d’élite des filles, ce sera pareil. La guerre n’est pas un jeu, ni un sport, ni un amusement.
Le côté historique est bien rendu, les auteurs ayant pris soin des détails sur les uniformes, sur le matériel utilisé, sur la mentalité des différents personnages, mettant l’accent sur le côté mère patrie des Russes qui obligent les soldats à se dépasser, à donner leur vie pour leur mère patrie, pendant que les gradés restent le cul à l’abri, sont incompétents et corrompus.
On s’est battus toute la nuit, on veut aller se coucher et ne jamais nous réveiller, mais il faut qu’on écoute cette petite merde ? Nous dire qu’on a fait du bon travail dans une bataille dont il ne s’est même pas approché.
— On est censées tuer un tireur d’élite. Mais tu refuses d’admettre ce qu’on affronte vraiment. Tu refuses d’admettre que nous avons des connards incompétents et corrompus derrière nous. Tu veux que je te dise comment gagner, mais tu fais toujours ta prude avec ma petite astuce des grenades ?
Ces mêmes dirigeants, cette bande de salopards, qui ne se sont pas privés de tester le patriotisme de leurs populations de la plus abjecte des manières qui soit. Et même si Sara le sait, elle doit toujours les servir, continuer à tuer, à se battre pour la mère patrie.
Les cases sont grandes, dans les premières pages, on a souvent deux cases par page, ce qui laisse la place pour les détails, les expression de visages, pour poser les décors. Le nombre de pages (152 pages) permet aussi aux auteurs de ne pas aller trop vite, de laisser leur récit aller à son rythme, sans pour autant qu’il soit trop lent.
Le dosage entre les acènes d’action et de guet est subtil, l’équilibre est parfait entre les récits de guerre et ceux des femmes, lors de leur retour au camp. Le récit fera quelques aller-retour dans le temps, nous montrant des scènes avant que l’on n’en sache plus sur l’entièreté de cette dernière.
Le final est monumental, sans pour autant être celui d’un blockbuster. Il est calme, empreint d’intelligence de la part de Sara afin de piéger le tireur d’élite allemand. Pas de folie, un plan simple, génial et machiavélique.
Un comics bourré d’émotions, sans jamais en faire trop et sans voyeurisme. Un récit de guerre glacial et glaçant où ce sont les femmes qui sont les héroïnes, laissant les hommes sur le côté, leur damant le pion.
Excellent !
Challenge Thrillers et Polars de Sharon (du 12 Juillet 2021 au 11 Juillet 2022) [Lecture N°164].